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sur 2650 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Étonnant cet Alfred de Musset ! Étonnant, vraiment, car on croirait dur comme fer que sa pièce a été écrite au XVIIème siècle par un dramaturge espagnol à la Lope de Vega.

Il a l'art de remettre au goût du jour (au goût de SON jour, s'entend, c'est-à-dire la première moitié du XIXième siècle) des styles et des formes désuètes comme le genre théâtral du proverbe, dont il signe ici l'un des plus grands opus.

(Pour ceux que cela intéresse, le proverbe, au théâtre, est une sorte de comédie, le plus souvent en un acte, à l'origine destiné à être représenté dans les salons mondains et dont le public — un cercle d'invités — devait retrouver à quel adage, dicton ou maxime cette petite farce faisait référence. Alfred de Musset a su donner quelque relief au genre qui, bien qu'assez populaire à une époque — XVIIè puis XVIIIè s. —, n'a jamais vraiment livré à la postérité une bien longue descendance.)

Il faudra attendre la fin du siècle pour que quelqu'un sache faire encore mieux que Musset dans le maniement d'un style suranné tombé en totale désuétude, (mais c'est tellement exceptionnel que c'est du registre de " l'exception qui confirme la règle "), je pense évidemment à l'immense Cyrano d'Edmond Rostand.

Ce que réussit Musset avec On Ne Badine Pas Avec L'Amour (ou Rostand avec Cyrano de Bergerac) est tout à fait comparable au récent succès du film muet The Artist de Michel Hazanavicius avec Jean Dujardin et Bérénice Bejo dans les rôles titres, en allant tout à fait à contre-courant du style du moment.

C'est osé, donc, quant à la forme. le fond est forcément largement contraint par l'intitulé même du proverbe « on ne badine pas avec l'amour ». Mais pour donner du relief et de l'épaisseur à la chute forcément connue, l'auteur s'ingénie premièrement à greffer une assez longue introduction, deuxièmement à créer des personnages secondaires qui portent le comique, et troisièmement à tendre les ressorts tragiques au maximum, si bien que de la modeste forme du proverbe, on arrive à une pièce en trois actes qui fait très fortement penser aux tragi-comédies espagnoles du siècle d'or et qui s'inscrit pleinement dans la mouvance romantique du moment, sans être caricaturale à l'excès. Chapeau bas, Monsieur de Musset, car c'était une vrai gageure.

Je crois qu'il est grand temps que je vous parle un brin du synopsis car je m'enfonce par trop dans des considérations personnelles. Nous voici donc avec un baron, homme d'importance, probablement dans la capitale, mais aussi détenteur d'un domaine en province où se déroule l'action.

Il est aux anges notre brave baron car c'est aujourd'hui que son fils Perdican, fraîchement promu docteur en droit, littérature, botanique et je-ne-sais-plus-quoi encore, vient d'accéder à la majorité (21 ans à l'époque et ce jusqu'à Giscard d'Estaing) et semble donc bon à marier.

La fiancée toute désignée est sa cousine Camille, qui elle aussi précisément sort du couvent où elle a reçu une éducation sérieuse et stricte, notamment sur la morale. tout doit aller pour le mieux, ils s'adoraient enfants, il est beau comme l'air, elle est belle comme l'aube, comment pourrait-il en être autrement ?

Mais voilà, ce vilain couvent avec ses pièces froides et austères, n'abritant que des nones ou des femmes déçues du monde, ce vilain couvent, dis-je, a injecté dans le cerveau de Camille des préceptes incompatibles avec un mariage terrestre. Et donc, la damoiselle, s'attendant fatalement à souffrir des amours humaines, en vient à exposer à Perdican qu'elle envisage de prendre le voile, et par la même, de mettre les voiles et de s'échapper dès le lendemain, direction couvent, destination paradis.

Perdican, forcément est un peu piqué par la chose, car il sent bien qu'il l'aime, et mieux encore, il sent bien qu'elle l'aime un peu aussi, elle, et que ce sont ces vieilles punaises de sacristies qui lui ont bourré le crâne avec cette mauvaise farce.

Celui-ci décide donc de titiller la fibre de la jalousie de sa dévote cousine en prétendant s'en fiche comme de l'an quarante et d'être tout disposé à épouser sa soeur de lait, paysanne certes, mais elle aussi belle à croquer et probablement bien plus facile à vivre et à satisfaire…

Vous en savez déjà bien assez. Il me reste à vous avouer que cette lecture m'a paru très plaisante mais qu'elle ne m'a tout de même pas emmenée dans les confins stellaires telles que d'autres lectures ont eu le pouvoir de le faire, d'où mes quatre étoiles et non cinq, mais sachez qu'on ne badine pas avec les étoiles et que ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Étrange pièce qui oscille entre la comédie et la tragédie. J'ai eu l'impression de perdre sans arrêt l'équilibre.

Dès le début je me suis pris le chou avec les personnages de maître Blazius, maître Bridaine et dame Pluche. Ils ne sont pas mal définis, au contraire, ils sont simplement infects. Puant la tradition conservatrice imperméable, ils ne pouvaient que détraquer l'éducation des jeunes Perdican et Camille. Je me suis dit que passer cinq actes avec des gus pareils, ça allait faire long.
Puis Musset fait prendre un virage comique à ces vieux je-sais-tout décrépis, dévoilant leur goût immodéré pour la vinasse et la bonne bouffe ou les mettant dans des situations casse-gueule d'intermédiaire dans la romance. Et ils en deviennent dès lors sympathiques car on voit bien que l'auteur veut se foutre de leur gueule.

Comme en miroir, les deux jeunes Perdican et Camille qui s'annonçaient comme d'innocents oisillons se révèlent tacticiens hors pair dans leur grand combat d'amour. le baron, père de Perdican et oncle de Camille, veut les marier pour apporter un lustre clinquant à son blason (oui, marier deux cousins germains, bah, l'église apportera une dérogation, pas de soucis). Perdican n'a rien contre, Camille refuse. Perdican est un coureur, l'amour pour lui est équivalent au tourisme. Camille, qui a vécu dans un couvent, est dans le fond absolument effrayée par l'idée d'un amour qui ne serait pas synonyme d'éternité. Ils sont pourtant, et de plus en plus, attirés l'un par l'autre.

Leur partie d'échec amoureuse aurait pu rester badine s'ils ne décidaient pas d'utiliser un pion sacrifiable : la pauvre Rosette, paysanne au coeur pur qui n'a rien demandé à personne, soeur de lait de Camille. Au moment où l'on est prêt à placarder les mots « tout est bien qui finit bien » on tombe finalement dans la tragédie pure comme dans un profond ravin. Alors que quelques scènes plus tôt on s'amusait encore des réparties pathétiques de Blazius et Bridaine.

Bref on ne sait jamais sur quel pied danser et c'est plutôt agréable d'être mené par le bout du nez comme ça. Lorsqu'il écrit cela, Alfred de Musset est sur le coup d'une grosse déception amoureuse avec George Sand qui a elle aussi joué les « touristes » ailleurs. Il irrigue carrément sa pièce de son affliction. Il en profite pour égratigner l'Église qui maintient encore la femme dans un carcan de « règles civilisées » restrictives et pour démontrer que cinquante ans plus tôt la Révolution a échoué à détruire la dominance de la noblesse et du clergé sur la paysannerie.

Je retournerai certainement visiter cet auteur.

Challenge XIXème siècle 2017
Challenge Théâtre 2017-2018
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C'est une pièce que j'affectionne.Elle est certes cruelle, mais tellement pleine de passion, de complexité !

Elle est aussi particulière car elle mélange les styles: le tragique, avec ce choeur annonciateur de événements, le comique et le grotesque incarnés par certains personnages, Blazius, le gouverneur pédant de Perdican, et Bridaine, le curé ivrogne à l 'éloquence ridicule. Enfin et surtout le psychologique et le dramatique autour des deux personnages principaux, jeunes héros romantiques et exaltés : Camille et son cousin Perdican.

Ils s'aiment depuis longtemps mais sont à un âge où ils se cherchent .Ce qui complique leurs retrouvailles, c'est aussi le fait que Camille sorte du couvent, la tête emplie d'idées fausses sur le monde, et que Perdican ait encore des incertitudes et un idéal un peu présomptueux d'adolescent.Orgueil et préjugés ...

Alors, on joue, on expérimente, on ment aux autres, à soi-même...Et surtout on utilise une jeune fille innocente, Rosette.

Mais le jeu se transformera en tragédie.

La fin, les élèves ne la comprennent pas. C'est vrai qu'elle peut paraitre excessive dans son romantisme exacerbé . Ils me disent, très pragmatiques: " Mais Madame, elle peut en trouver un autre!"

Elle est surtout le symbole de ce que peut entraîner le travestissement de la vérité, surtout celle des sentiments. Car , non, on ne badine pas avec l'amour...
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Cette pièce est la deuxième d'Alfred de Musset que je dévore. La faute à ces histoires passionnantes mais surtout je crois à la plume si raffinée De Musset, le poète déçu en amour, tout comme les deux personnages principaux de cette pièce en trois actes : Camille et Perdican. La première est une jeune fille de dix-huit ans, la nièce du Baron, qui vient de sortir du couvent où elle a entendu bon nombre d'histoires de coeurs brisés et de désespoir qu'elle ne souhaite jamais vivre ; le second, Perdican, est le fils du Baron -et donc cousin de Camille- et vient de recevoir un doctorat. Ces deux héros sont amoureux l'un de l'autre depuis leur plus tendre enfance mais Camille ne fait plus confiance aux hommes, et par conséquent préfère éviter Perdican. Ainsi, en jouant de leurs sentiments, Camille et Perdican finiront par provoquer la plus terrible des erreurs.D'ailleurs, la réplique finale : "Adieu Perdican" nous révèle la gravité de la situation causée par ces êtres si innocents mais finalement coupables...

J'aime beaucoup les drames romantiques comme celui-ci où les personnages se tournent autour avant de s'avouer leurs sentiments, où le décor et les autres acteurs renforcent le caractère tragique de la scène et où l'on découvre avec stupeur la fin de la pièce si chargée en émotions ! Bien évidemment, toutes les pièces de théâtre sont différentes mais celles d'Alfred de Musset sont un peu comme des petits diamants que l'on ne se lasse jamais d'admirer.

A lire !!
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Cette pièce de théâtre démarre sur un ton léger (badin ?). Les deux curés sont là pour la touche comique. Les deux héros se frôlent, se heurtent sans comprendre/admettre qu'ils sont faits l'un pour l'autre. Tout cela pourrait rester très léger. Mais non.
Musset multiplie les phrases magnifiques sur l'amour. Je pourrais multiplier les citations tant ce court texte est empli des phrases les connues (cf voir ci-dessous), les plus belles sur ce sujet !

Mais Musset est-il au fond pessimiste ? D'une comédie légère, il fait évoluer sa pièce en un mode plus dramatique. Fermant d'un coup tout espoir de bonheur à cet amour naissant. A tout amour ?
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Perdican et Camille sont amis d'enfance. Ils se retrouvent, dans les lieux qu'ils ont connu enfants, avec leurs précepteurs respectifs et parent éloigné, elle sortie du couvent, lui des bras d'une impressionnante série de maîtresses.

Il est dégoûté de faire la vie, elle a peur de vivre la sienne .Il a accumulé les expériences, elle s'est fait instiller le venin des confidences féminines confiées au couvent: femmes trompées, déçues, malheureuses. qui lui ont empoisonné l'âme.. Lui est un cynique au coeur tendre, un corrompu épris de rédemption. Elle a la dureté des prosélytes fraîchement convertis, elle croit tout savoir, alors qu' elle n'a rien vécu.

La force inventive et le sens théâtral très abouti De Musset donne à ce tragique tête-à-tête un arrière-plan burlesque: la duègne guindée et racornie, le curé ivrogne, le précepteur sans préceptes, le baron...perché, tout ce peuple de fantoches papillonne autour des jeunes gens, et parasite leur dialogue de son agitation vaine et creuse, souvent très drôle.

Ils n'en sont que plus seuls..alors leur dialogue tourne à la guerre et à la prise d'otage: la petite Rosette en sera la première victime. D'autres victimes suivront, car "on ne badine pas avec l'amour"...

Une comédie-proverbe, un "spectacle dans un fauteuil" : après plusieurs bides, Musset n'espérait plus que son théâtre fût un jour joué, il le destinait amèrement à la seule lecture "dans un fauteuil"..

Il était né trop tôt dans un siècle trop vieux: les drames romantiques, si ennuyeux dans leurs excès, faisaient alors le buzz,alors que son théâtre élégant, léger, amer, entre tragique et burlesque ne plaisait pas...

On peut se réconforter en se disant que maintenant on joue Musset presque aussi souvent que Marivaux: ses comédies et proverbes n'ont pas fini de nous interroger avec leur finesse douce-amère, leur joyeuse cruauté.

"On ne badine pas..." est la plus connue de ces comédies -proverbes, la plus aboutie aussi. Elle met aux prises deux êtres faits pour s'aimer dans un monde artificiel et creux, qui renverra en écho leurs appels au secours sans leur répondre.

Un monde d'absence et d'insignifiance, une ultra-moderne solitude..
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Bon classique de la littérature française que l'on étudie le plus souvent à l'école, tout le moins à mon époque; , cette pièce satyrique est courte et enlevée, les dialogues peuvent paraitre désuets mais les sentiments décrits sont toujours d'actualité.
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On ne badine pas avec l'amour est incontestablement une pièce intemporelle. En classique du romantisme, il s'attaque à des thèmes majeurs tels que les sentiments, l'amour, la raison.
Telle une prophétie, Alfred de Musset, nous prouve qu'en jouant avec des sujets aussi importants, on finit par perdre. Et quelle perte !
Qui fait le malin, tombe dans le ravin !
En dénonçant de tels travers (ainsi que d'autres, je pense notamment à l'alcoolisme des Maîtres Balzius et Bridaine), On ne badine pas avec l'amour se transforme en véritable éloge à la bienséance et à la vertu. le ridicule des personnages semble nous prévenir : voyez ! ne soyez pas comme eux !
De l'humour donc, apporté à la pièce, qui détend l'atmosphère ! Et Dieu sait que ça fait du bien !
(Seigneur Jésus ! Eve a juré)

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Promis Alfred

On ne badine pas...
On s'esclaffe,
on tremble,
on frémit,
on frissonne,

on virevolte,
on tremble...on ne badine pas
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Une pièce de théâtre des plus tordantes, soutenue par des dialogues fins déclamés par des personnages non moins amusants, cette courte pièce propose de montrer les déboires que fait subir l'amour à ses victimes, et que celui-ci est incontrôlable, et que le manipuler n'est pas sans danger.

On pénètre instantanément l'atmosphère légère de la pièce, on s'amuse aux réparties des différents personnages tout en savourant la langue utilisée : une divertissement des plus appréciables !
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