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EAN : 9782818004913
208 pages
P.O.L. (03/06/2010)
3.56/5   17 notes
Résumé :
Issu d’un « Carnet de travail » tenu quotidiennement en écrivant, en peignant, en faisant répéter les acteurs, ce livre - conçu comme une suite aux six cent seize notes de Pendant la matière ( P.O.L, 1991 ) - tient sur quatre pieds comme un table ou un animal. Il se compose de quatre textes égaux : Demeure fragile, Le Débat avec l’espace, Devant la parole, Opérette réversible où s’affirme - à partir de la description d’une représentation de nô, d’une peinture de Pie... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le livre que j'aurai le plus emprunté, rendu, re-réemprunté à la bibli : il est touffu et il nous emmène loin.


L'auteur est un glouton des mots, il les bichonne, il les guilise pour leur faire rendre leurs derniers petits rires et soupirs ; il est, plus largement, fasciné par le langage, ce que le langage fait à l'homme et comment celui-ci s'en sert pour faire apparaître le monde.


Sans préambule, l'auteur nous pousse dans le grand bain pour une plongée dans les abysses du langage. Il ne lésine pas sur les moyens : foisonnement de jeux de langue, ribambelle de mots-hameçons, distorsions, néologismes inventés sur le feu.

Pour lui, la fibre du langage, c'est le verbe. Les substantifs n'en sont que les socles refroidis, des moules qui nous tiennent à l'étroit. La substance même du langage c'est son mouvement, celui du verbe. L'homme est un verbe, à sa propre recherche.

Le langage n'est pas la description de la matière mais son révélateur ; pas un catalogue d'articles référencés, des couples signifiant-signifié, mais déploiement de l'espace.
La vue nous vient des mots. « C'est un autre monde que nous verrions de nos yeux avec d'autres mots. Notre vue est parlée. »

Si l'esprit de l'homme se résumait en un point, ce serait celui du point de perspective, celui qui étire l'espace à l'infini et lui donne son sens.
Image du kaléidoscope : l'embrouillamini des choses s'éclaire dans la mise à distance ; Les relations de l'univers prennent leur sens sous l'effet de perspective.


Avouons que par moments l'auteur paraît se chauffer quand même un peu, on a l'impression qu'il se fait un poil mousser le cerveau, emporté par son propre élan dans les rapides du grand fleuve des mots qu'il a auparavant mis sur puissance 10.

Non, parce que quand je demande à ma voisine par-dessus la haie c'est quand déjà le jour des poubelles de verre, je peine à y retrouver la magnificence exubérante et itérative que nous décrit abondamment notre tourbillonnant auteur. Mon prosaïsme désespérant renvoie peut-être au fait que nous devrions plus souvent reprendre violemment conscience de cette valeur magique du langage.


Des réflexions sur l'acteur de théâtre aussi : un véritable acteur , c'est tout sauf un égo obèse, c'est celui qui parvient à dégager le plancher et à laisser la place à l'Homme universel en lui.

J'ai aussi été sciée par ses références incessantes à Louis de Funès ; çui-ci nous a bien roulés dans la farine, dis donc ! je ne connaissais que le personnage grotesque de ses films familiaux : aucun rapport avec le niveau de haut vol de ses réflexions métaphysiques. Ca en bouche un sacré coin ma foi.

En parlant de foi, j'ai un peu faussé compagnie à Novarina et de Funès sur ce sujet, qui sert manifestement d'arrière-plan à leurs diverses réflexions. Mais sacré et métaphysique ne sont pas incompatibles avec l'être humain dans son tête -à-tête avec un univers tout nu (oui moi c'est comme ça que je le préfère l'univers, tout nu).


Ce livre contient en tout cas de magnifiques départs de lièvres qui font courir la pensée. On le referme en se disant que l'être humain, c'est quand même un sacré ptit gars, qui en a là-dedans. Si seulement il ne s'acharnait pas à tomber à pieds joints dans tous les pièges avec cette constance remarquable.

Merci Monsieur Novarina pour cette plongée décoiffante dans le grand bain des mots!



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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
À l’image mécanique et instrumentale du langage que nous propose le grand système marchand qui vient étendre son filet sur notre Occident désorienté, à la religion des choses, à l’hypnose de l’objet, à l’idolâtrie, à ce temps qui semble s’être condamné lui-même à n’être plus que le temps circulaire d’une vente à perpétuité, à ce temps où le «matérialisme dialectique» effondré, livre passage au «matérialisme absolu» – j’oppose notre descente en langage muet dans la nuit de la matière de notre corps par les mots et l’expérience singulière que fait chaque parlant, chaque parleur d’ici, d’un voyage dans la parole ; j’oppose le savoir que nous avons, qu’il y a, tout au fond de nous, non quelque chose dont nous serions propriétaires (notre «parcelle individuelle», notre «identité», la «prison du moi»), mais une ouverture intérieure, un passage parlé.
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Voici que les hommes s'échangent maintenant les mots comme des idoles invisibles, ne s'en forgeant plus qu'une monnaie : nous finirons un jour muets à force de communiquer; nous deviendrons enfin égaux aux animaux (...) dressés par les images, hébétés par l'échange de tout, redevenus des mangeurs du monde et une matière pour la mort
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Très précisément, chaque mot désigne l'inconnu. Ce que tu ne sais pas, dis-le. Ce que tu ne possède pas, donne-le. Ce dont on ne peut parler, c'est cela qu'il faut dire.
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Ce que je recherche depuis toujours, c'est un état surgissant de la langue. Printemps se dit ici en patois « saillifeu » : ça saille, saute, sors dehors : « feu » vient de foris... Le printemps dans les Alpes n'est pas un temps de renouveau aimable, de fraîcheur, c'est un temps de violence, pulsif ; il sort de la neige comme le printemps russe : c'est une percée, un débordement soudain, une invasion... Je cherche la force germinative de la langue, son pouvoir de passer la mort.
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Je n'utilise pas les mots; je n'en ai jamais cherché aucun. Ce ne sont pas des outils. Devant le langage, les sensations sont de l'ordre du toucher:quelque chose parle, là, derrière l'oreille. On ressent la matérialité de tout. Les mots sont comme des cailloux, les fragments d'un minerai qu'il faut casser pour libérer leur respiration. Tout un livre peut provenir d'un seul mot brisé. Le mot est fermé, enveloppé, secret, enfoui: quelque chose doit appraître de dedans — de l'intérieur du mot et pas du tout de l'intérieur de l'écrivain.
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Videos de Valère Novarina (33) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Valère Novarina
Lecture par André Marcon, Dominique Reymond & l'auteur Musique : Anssi Karttunen (violoncelle)
Pour cette carte blanche, Valère Novarina a choisi de faire entendre des extraits de trois textes. La clef des langues paru cette année aux éditions POL : « roman nominaire » et large estuaire où se croisent les quatre fleuves de noms, de verbes, d'actions et de dessins. Dominique Reymond puisera dedans pour faire entendre la liste des définitions de Dieu.
Valère Novarina lira lui-même des extraits de Pour Louis de Funès, essai sur l'acteur qui pourrait être aussi un « Pour André Marcon » puisqu'il est né de l'observation quotidienne et presque chirurgicale du travail d'André Marcon dans le passage impensable du plateau à la salle lors de la création du Monologue d'Adramélech au théâtre de la Bastille en 1984.
Monologue d'Adramélech qui aura été préalablement lu ce soir par André Marcon accompagné de Anssi Karttunen au violoncelle.
À lire – L'oeuvre de Valère Novarina est éditée chez P.O.L.
Son : Lenny Szpira Lumière : Patrick Clitus Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
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