La montre de l'amiral

Pagnier Dominique (1951-) – "La montre de l'amiral" – Alma éditeur, 2013 (ISBN 978-2-36-279057-7) – format 19x14cm, 221p.

Un joli récit, bien écrit : l'auteur imagine les derniers jours du compositeur Joseph Haydn (1732-1809), au moment où l'Empire d'Autriche-Hongrie est de nouveau envahi par les troupes impériales de Napoléon, pour dresser un portrait de l'Autriche, de la vie musicale à Vienne (Wien), tout en insérant des réminiscences de ce que fut sa vie personnelle, ses rencontres, ses créations musicales principalement dans le cadre de son service auprès du prince Niklaus 1er Esterházy (1714-1790) puis de son petit-fils Nicolas II (1765-1833).

Sans y insister, ni forcer le trait, l'auteur montre l'extraordinaire influence qu'eut Haydn dès ses jeunes années, tant auprès de Mozart que – plus tard – de Beethoven, car c'est lui qui fut le véritable "fondateur" de ce qu'il est convenu de nommer le "classicisme" dans l'histoire de musique occidentale, inaugurant un nouveau style mettant fin à la grande épopée que fut le baroque.

La relation entre Bonaparte et Haydn est évoquée dans toute sa complexité, sous l'angle de vue de Haydn. Il se trouve en effet que sa première grande oeuvre à connaître un succès européen – "La Création – Die Schöpfung" (composé vers 1796-1798) fut donnée à Paris le 24 décembre 1800, et que Bonaparte – alors Premier Consul – fut victime de la tentative d'attentat dans la rue Nicaise en se rendant à la représentation : l'une des victimes fut une pauvre gamine de 14 ans, Marianne Peusol, à laquelle Haydn repense en ses vieux jours. Par la suite, l'empereur Napoléon honorera à plusieurs reprises Haydn, et enverra un détachement militaire lui rendre les honneurs lors de son enterrement. Et pourtant, Haydn était déjà et reste le compositeur (en 1797) de ce qui devint l'hymne national allemand "Deutschland über alles", qui était pour lui la prière "Gott erhalte Franz der Kaiser", hymne de l'Empire d'Autriche-Hongrie.

Tous ces thèmes, et bien d'autres plus ou moins romancés sur la vie privée du compositeur, sont élégamment tissés par l'auteur, dans un style raffiné digne de ce si joli dix-huitième siècle.

Je ne saurais terminé sans évoquer le "Requiem" de Mozart – joué aux obsèques de Haydn – dans la version inoubliable dirigée par Pieter Jan Leusink au Concertgebouw en 2015 (avec Olga Zinovieva, Sytse Buwalda, Martinus Leusink et Thilo Dahlmann) – ainsi que – pour l'esprit aussi galant que féministe de ce dix-huitième siècle – la récente publication de l'étude monumentale de Guillaume Faroult intitulée "L'Amour peintre : l'imagerie érotique en France au XVIIIème siècle" (Cohen&Cohen, 2020 – ISBN 978-2367490731).

Dernière remarque : un roman que l'on peut sans hésiter recommander pour les adolescentes et adolescents concernés par le lecture, l'histoire et la musique – si, si, il en reste, j'en connais...

Et bien évidemment, il faut ab-so-lu-ment lire "le cénotaphe de Newton"...