Bien sûr, le livre de Jonathan Phillips n'est pas la somme sur les Croisades : il y eut Grousset, et il y en eut d'autres, Paul Rousset, Joshua Prawer, Steven Runciman et Jean Richard. Bien sûr, il ne nous apprend rien que l'on ne sache déjà sur le plan factuel, même l'inattendu sur lequel parfois ce livre met intelligemment l'accent : guerres à fronts renversés de Chrétiens contre d'autres Chrétiens, ou de Musulmans, ponctuellement alliés ou pas, avec des Chrétiens, contre d'autres Musulmans. Tout nous est connu.
Mais l'intéressant est de vouloir tirer l'essentiel de tout cela, de nous le mettre sous les yeux, sans complaisance pour les protagonistes de l'époque, ni pour nous-mêmes qui pourrions être tentés de jouer les censeurs des actes de nos ancêtres - ce dont il faut nous défier, en partie, puisque notre époque n'est guère meilleure ; nous en avons actuellement, et presque quotidiennement la preuve dans nos relations actuelles avec les pays du Moyen-Orient et avec ceux du Maghreb.
Il ne faut tomber ni dans l'angélisme ni dans l'excès de vertu, comme si l'on avait toujours raison et jamais l'autre, et inversement, bien entendu.
L'important est que l'on sache ce qui s'est passé entre 1095 et 1291, ce qui s'est passé ensuite aux XIXème et XXème siècles, et ce qui se passe dans le XXIème. Trop d'intérêts - encore en jeu - et trop de passions nous aveuglent. Il faut savoir prendre du recul.
La lecture du Livre de Jonathan Phillips, même si elle est loin de satisfaire un historien - et pour cause puisque rien de nouveau n'en ressort - a le mérite d'y contribuer un peu, parce qu'elle est sans parti pris et sans concession pour l'un ou pour l'autre des deux camps lorsque ceux-ci ont erré et ont manqué de noblesse et de grandeur. C'est dans le coup d'oeil général et l'interprétation des faits, tels qu'ils sont présentés par lui, que ce livre présente un réel intérêt, même si l'on n'est pas forcé de toujours souscrire à toutes les thèses de l'auteur.
François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)
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Une approche anglo-saxonne qui contribue à chasser les idées reçues.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Une fois de plus, au cœur de l'hiver, le ravitaillement s'avéra difficile, et Foucher de Chartres note : " Nos hommes eurent à supporter tous les maux de la faim. Je ne puis redire sans horreur comment plusieurs des nôtres, transportés de rage par l'excès du besoin, coupèrent un ou eux morceaux de fesses d'un Sarrasin déjà mort, et, se donnant à peine le temps de les rôtir, les déchirèrent de leurs dents cruelles."
L'abbé fut inébranlable : il fallait un exemple pour impressionner tous les ennemis de l'Eglise. Il prononça calmement l'une des phrases les plus glaçantes de l'histoire de l'Occident médiéval, ces mots qui devaient sceller le sort de milliers d'innocents : "Tuez-les tous. Dieu reconnaîtra les siens."
Après ce décret impitoyable, le massacre démarra.
Alors que la bataille faisait rage, l'antipathie entre chrétiens et musulmans s'intensifiait. Un espion égyptien fut capturé puis renvoyé (par une catapulte) vers ses coreligionnaires ; les défenseurs ripostèrent en crachant et en urinant sur des croix.