En passant devant la guillotine, j'aperçus sur la plateforme le bourreau, entouré de quelques curieux; il faisait la "répétition" pour ces messieurs. Il touchait au ressort de la planche à laquelle on attache le supplicié, cette planche aboutissait au trou en forme de croissant placé sous le couperet. En l'ébranlant, on faisait du même coup descendre la lame, qui retombait lourdement, sans arrêt, avec un grondement sourd et rapide.
Je ne pus pas assister à cette répétition. Je ne voulais pas monter sur l'échafaud. Un sentiment de crime, de honte secrète, m'envahissait de plus en plus...
C'est peut-être pourquoi les chevaux de la guillotine, qui mangeaient en paix leur picotin d'avoine devant la porte de la prison, m'ont paru les seuls êtres innocents parmi nous tous.
Je me souviens d'un instant merveilleux... - Alexandre PPOUCHKINE