Après lecture, je vous offre dans la foulée quelques pistes de réflexion que ce livre a suscité chez moi :
1)
Gilles Rapaport est au auteur français blanc, humoriste et dessinateur de presse. Après une rapide recherche il n'a, me semble-t-il, aucun bagage historique sur la période qu'il décrit dans ce livre : il n'est pas historien spécialisé dans la période coloniale. Or, c'est un détail capital à soulever car son personnage principal est
un homme noir esclave qui parle à la première personne.
2) Ce livre a été édité en avril 2007, soit avant la vague de féminisme qui aujourd'hui nourrit une réflexion profonde de la culture populaire qui nous est transmise. Qui sont les personnes qui écrivent nos livres, tournent nos films, mettent en scène nos spectacles, d'où celles-ci parlent, avec quelles connaissances du sujet traité ?
Je vous invite à lire la BD «
WAKE » de
Rebecca Hall et Hugo Martinez. Malgré que cet ouvrage soit destiné à un public plus âgé, la différence de traiter un même propos est flagrant. On y apprend notamment que c'est une légende que les personnes noires auraient vendus leurs propres « frères et soeurs » à des colons, comme le suggère «
un homme » de
Gilles Rapaport.
A mon sens ce livre regorge, sans le vouloir, de la vision que les personnes blanches se font de la période coloniale et le texte sonne creux, malgré la dureté du ton et des images.
Je ne le trouve personnellement pas très intéressant à faire lire à des enfants, sauf s'il est mis en perspective avec d'autres livres sur le même sujet, traité par des auteurs et autrices noires.
Je suggère vivement de le faire relire par des associations antiracistes et/ou des auteurs et autrices afro-féministes, leur avis serait d'ailleurs plus intéressant que le mien. Personnellement je ne trouve pas qu'on ressent l'horreur de la condition d'esclave, j'ai eu d'avantage le sentiment que l'auteur essaye de choquer au lieu de raconter.
Je pense qu'il est fondamental de remettre en question la légitimité des auteurs et autrices d'écrire sur certains sujets lorsque ces derniers sont très largement méconnus. Nous avons en Belgique une réelle carence de réflexion sur la colonisation, grand absent des cours d'histoire à l'école et de l'opinion publique, à la différence de la Shoah par exemple. On le voit très clairement quand les belges se prononcent sur les personnages de leur folklore, lorsque ceux-ci sont reconnus racistes et humiliants par des associations concernés (« le Père Fouettard », «
Le Sauvage » de la ducasse d'Ath, etc…).
J'invite donc à la prudence mais surtout à l'exploration d'auteurs et autrices noires qui se sont emparés de ce sujet, pour trouver un meilleur livre à proposer que celui-ci.