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sur 1564 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2022 # 35 °°°

Le titre ne laisse place à aucune ambiguïté. Lisa a menti lorsqu'elle a affirmé qu'elle avait été violée à quinze ans par Marco Lange, un ouvrier du bâtiment, lourdement condamné. le procès en appel doit avoir lieu, Lisa avoue tout à sa nouvelle avocate. Pascale Robert-Diard déplace donc les enjeux du suspense sur un autre terrain que celui de la culpabilité ou pas de Marco Lange qui a écopé d'une peine de prison de dix ans en première instance et croupit en prison  : pourquoi Lisa a-t-elle menti quatre ans auparavant ? Pourquoi a-t-elle accusé de viol un homme innocent ?

D'une plume alerte, fluide et concise, sans effet de manche ni fioriture stylistique, l'auteure, chroniqueuse judiciaire au Monde, ausculte brillamment les tréfonds de la nature humaine à travers les différents personnages : Lisa, les témoins ( amis et professeurs ), les parents, les jurés. le roman se lit comme un thriller psychologique qui tient en haleine. Même si on est effaré par le mensonge de Lisa et ses terribles conséquences, on veut comprendre. Progressivement apparaissent les faits qui ont conduit à ce fiasco judiciaire ou comment une jeune fille s'est retrouvé piégée dans un engrenage qui la dépasse.

Le récit avance sur les pas de l'avocate Alice Kéridieux, consciente que vérité et morale ne font pas toujours bon ménage. le lecteur partage son trouble et son malaise face à l'affaire. Ses interrogations, ses tâtonnements, ses vacillements sont les nôtres, ses contradictions aussi : la sourde crainte de l'épreuve qui attend Lisa qui a le courage de s'arracher à son rôle de victime ; le désir de la protéger de la tempête qui va s'abattre sur elle ; l'exaltation de réparer une erreur judiciaire qui a brisé un innocent. Mais aussi l'envie de la faire taire car Lisa dérange à l'ère post MeToo, alors que les femmes prennent de plus en plus la parole pour dénoncer les agressions sexuelles subies. Certains auraient préféré qu'elle se taise car son mensonge porte atteinte à la parole sacrée de la victime de crimes sexuels.

Au-delà de ces aspects très actuels, j'ai particulièrement apprécié l'acuité avec laquelle Pascale Robert-Diard radioscopie l'adolescence, sa laideur et sa violence telle qu'elle est vécue par certains. La déroutante Lisa a menti et avant elle a beaucoup souffert, elle la fille qui a eu des seins plus tôt que les autres, plus gros que les autres. le regard perfide des autres collégiens qui jugent et assènent, lui collant l'étiquette de la « petite salope du collège ».

Surtout, le roman initie une véritable réflexion sur la parole de la victime et son écoute. La vérité n'est jamais celle que l'on imagine et il est parfois bénéfique de remettre en question notre intime conviction.  Pascale Robert-Diard a le courage de sortir des sentiers battus en ne choisissant pas de présenter une victime « classique » qui aurait dit toute la vérité d'emblée sur l'identité de son agresseur, qui aurait été bien entendue et comprise par l'entourage familial, scolaire, policier et judiciaire. J'ai aimé cette prise de risque politiquement incorrecte qui ne plaira sans doute pas à tous les lecteurs mais permet d'apporter de la densité et de la complexité au récit, loin de tout manichéisme moralisateur. Forcément, c'est déstabilisant de voir nos certitudes et réflexes remis interrogés et c'est tant mieux.

Un roman passionnant et intelligent qui force à réfléchir, creusant avec finesse les ambivalences humaines, plongeant dans la psyché des personnages autant que dans une époque donnée. Peut-être aurais-je préféré que le personnage de Lisa conserve son opacité, comme celui de Lise dans La Jeune fille au bracelet ( excellent film de Stéphane Demoustier ) auquel j'ai pensé tout au long de ma lecture.

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Pascale Robert-Diard, chroniqueuse judiciaire au Monde depuis vingt ans, a eu le courage d'écrire un livre qui va à contre-courant de tout ce qui enflamme l'actualité depuis longtemps : La petite menteuse.
Avec une écriture simple et efficace, Pascale Robert-Diard m'emmène sur les pas d'Alice Keridreux, avocate déjà expérimentée. Elle a dû se faire une place dans un métier où les hommes avaient la part belle depuis toujours.
Dans ce livre, je vais suivre cette avocate, découvrir ses sentiments, partager ses réflexions, approuver ses observations sur un monde judiciaire qui doit statuer entre deux mots terribles : victime ou coupable et, éventuellement… innocent (voir le fiasco judiciaire d'Outreau).
C'est quand elle reçoit Lisa Charvet, jeune femme de vingt ans, que s'enclenche ce roman. Cette Lisa a accusé un homme de viol et elle lui demande d'emblée de la défendre pour le procès en appel qui approche : « Je veux être défendue par une femme. »
Au début, Alice n'est pas décidée à s'impliquer car elle n'est pas spécialiste des victimes. En effet, Lisa a fait condamner Marco Lange, un plâtrier, qu'elle accuse de viol alors qu'elle avait quinze ans. Cet homme a toujours tout nié, a toujours clamé son innocence mais sans jamais être entendu.
L'histoire des deux protagonistes se déroule alors avec, pour chacun, problème familiaux, détails de personnalité et peu ou pas d'éléments positifs. Après quarante-huit heures de garde à vue, Marco Lange a été mis en détention car des témoignages orientés, un procès-verbal de gendarmerie, sans autre option que la culpabilité, ont vite réglé son sort.
On oublie vite cet homme qui tente de survivre derrière les barreaux malgré son statut terrible de « pointeur » qui met sa sécurité en jeu à chaque instant vis-à-vis des autres personnes détenues, pour détailler l'adolescence de Lisa et ses rapports avec ses parents.
À quinze ans, Lisa attire les regards des garçons et certains n'hésitent pas à aller plus loin, à profiter de son mal-être, de son désir de reconnaissance pour abuser d'elle. D'ailleurs, c'est elle qui devient « la salope du collège ». C'est là que deux jeunes professeurs l'ayant prise en pitié n'ont pas hésité à la convoquer en salle des profs pour, dépassant leur rôle, jouer aux enquêteurs. Marion, une amie de Lisa, les avait alertés car, celle-ci, pour resserrer un peu plus leurs liens, lui avait raconté son histoire de viol.
Tout bascule donc lorsque Lisa avoue son mensonge à Alice. L'avocate est profondément choquée car, si Lisa dit vrai maintenant, un homme, innocent, est en prison depuis plus de trois ans !
Alors, Pascale Robert-Diard me conduit doucement jusqu'à la plaidoirie de l'avocate. C'est un chemin difficile, avec de nombreux obstacles dus particulièrement à la complexité du parcours judiciaire. Ces femmes et ces hommes censés juger leurs semblables ont une vie, des soucis, des ennuis, un vécu et il ne faudrait jamais faire abstraction de cela. D'ailleurs, l'autrice consacre quelques pages fort instructives à propos des jurés tirés au sort et sur l'attitude de la présidente de la cour d'assises.
La conduite de chaque protagoniste du procès joue un rôle très important et Pascale Robert-Diard note avec beaucoup d'à-propos les réactions, les comportements, s'attachant surtout aux témoins qui viennent et dont certains reviennent après le coup de théâtre que le titre du roman laisse présager.
Enfin, je ne dois pas oublier le rôle important de la presse, des médias qui ont vite réglé le sort d'une personne mise en cause, que cela lui soit favorable ou non. Seul l'avocat général est un peu délaissé vu la configuration des événements mais sa volonté d'accabler un ou une accusé(e), innocent(e) ou non, est souvent révoltante.
Pour équilibrer une tendance constatée depuis une trentaine d'années, il faut lire La petite menteuse. Ce n'est pas parce qu'un nombre incalculable d'agresseurs est resté impuni depuis que l'espèce humaine existe, qu'il faut faire payer la note aujourd'hui aux innocents injustement accusés et condamnés sans la moindre preuve. Pascale Robert-Diard, courageusement, le démontre admirablement dans La petite menteuse.

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Une chose qui ne m'arrive pas souvent, quand tu finis un livre, en ne sachant pas si tu l'aimes ou pas. Un livre qui me laisse dans le questionnement , est ce le but de l'auteure. Ce roman est hors norme, inclassable pour moi. La couverture est magnifique, ces yeux tristes, ces yeux de repentis. Pourquoi ce mensonge, le titre est vraiment le reflet de l'histoire. L'auteure se lance dans un sujet difficile, celui du viol. Une jeune fille témoigne, et son violeur est de suite incarcéré, condamné à une peine de 10ans,il a toujours revendiquer son innocence. le dossier est réouvert, nouvelle audience, la peur de Lisa de se retrouver face à lui. Elle décide de changer d'avocat et choisit Alice pour la défendre. Cette dernière veut comprendre, connaitre l'histoire de la jeune fille. Les masques tombent, et la réalité est dévoilée, et nous laisse, totalement béa. A partir de ce moment , j'ai ressenti de la haine de la colère, et de la pitié pour Lisa.

Une jeune fille qui n'a pas eu une enfance facile, le divorce de ses parents, la fille facile du collège, des formes physiques développées, une vidéo est diffusée,et tout part en vrille.

Jusqu'où est elle capable d'agir pour se décréditer, pour assouvir sa soif de vengeance? Une jeune fille qui se remet en question, elle a besoin d'évacuer tout ce qu'elle a coeur?

Nous ressentons que l'auteure use d'un langage puissant , une maitrise du sujet, nous sommes plus dans une réalité que dans une fiction. L'auteure met le côté lugubre et malsain de l'histoire.

La psychologie des personnages est travaillée en profondeur, nous permettant de mieux cerner les personnages, principalement celui de Lisa. le rythme va crescendo au fur et à mesure de la lecture.

L'auteure tient en haleine ses lecteurs, le final me laisse perplexe. L'écriture est fluide, et envoutante. la lecture est percutante ,addictive. Un livre court dévoilant une intrigue surprenante et un suspens haletant.

A vous de découvrir la vie de Lisa, entre mensonge, manipulation, regret, thèmes qui reflètent le contenu du livre.

"La petite menteuse". Un roman que je recommande
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Quand l'avocate Alice Keridreux, la cinquantaine, reçoit à son cabinet Lisa Charvet et lui demande « Dites-moi ce qui vous amène », Lisa répond « je voudrais être défendue par une femme ».
La jeune femme âgée d'à peine 20 ans a été victime d'un viol cinq ans plus tôt. Au procès, l'accusé avait pris dix ans et avait fait appel. le nouveau procès doit se tenir dans quatre mois.
Devenue étudiante en horticulture, Lisa souhaite donc que ce soit Alice qui la représente cette fois.
L'avocate va alors récupérer et prendre connaissance du dossier.
Un face-à-face commence et Lisa va finir par avouer à Alice qu'elle a menti « pour se sortir de toute la merde dans laquelle elle était », piégée un peu aussi par les adultes. Si elle est venue voir l'avocate, c'est pour être entendue et aidée, aidée à déposer cet immense fardeau qu'elle a endossé en mentant.
L'avocate va au fil des entrevues avec Lisa comprendre les raisons qui ont été à l'origine de ce mensonge qui a conduit un innocent en prison et comment prise dans un engrenage, Lisa, cette enfant de quinze ans au moment des faits s'est enlisée dans ses déclarations, et n'a pas su s'en dégager.
Avec ce roman La petite menteuse, Pascale Robert-Diard, romancière et chroniqueuse judiciaire au Monde depuis vingt ans, touche à un problème quasiment tabou à l'ère de MeToo, celui du doute de la parole féminine en posant cette question : Doit-on croire sur parole une femme plaignante sans faire un véritable travail d'enquête ?
Elle évoque également la difficulté à défendre une personne qui a menti, tout en mettant en exergue ce que peut être la fragilité de l'adolescence.
L'auteure nous offre des portraits psychologiques absolument saisissants : en tout premier lieu celui de cette avocate dont on suit pas à pas les atermoiements, mais aussi celui de Lisa, cette adolescente de 15 ans dépassée par ce qui lui arrive, puis porteuse d'un secret jusqu'à ce procès en appel. Les personnages secondaires sont brossés avec tout autant de talent, que ce soient les garçons du collège, les professeurs, le principal ou encore celui qui, malgré toutes ses dénégations a été jugé coupable, sans preuves, sur de seules affirmations.
Pascale Robert-Diard mentionne d'ailleurs les erreurs judiciaires qui ont déjà eu lieu, comme celle d'Outreau, sans cependant la nommer, faisant dire à l'un des accusés l'impuissance à prouver son innocence quand on est accusé de viol par un mineur. Elle montre combien il est important de ne pas se fier seulement à ses convictions et à ses certitudes et qu'il faut avant tout écouter, vérifier, ne pas se fier qu'aux apparences, qu'un travail d'enquête sérieusement mené et non basé sur une intime conviction est une absolue nécessité.
À lire ce roman basé sur la grande expérience de cette chroniqueuse judiciaire qu'est Pascale Robert-Diard, on peut aisément en déduire que certains n'ont pas eu la chance de Marco et ont pu faire les frais de décisions hâtives, incapables de faire admettre leur innocence. Il faut reconnaître également dans cette fiction le courage étonnant et la grande force dont a dû faire preuve Lisa pour revenir sur ses affirmations, s'exposant à être attaquée, jugée et condamnée et bien entendu la grande valeur de cette avocate qui a osé mettre en péril sa carrière en défendant une victime qui a menti.
Tenue en haleine du début à la fin, j'ai lu La petite menteuse quasiment en apnée tant ce roman est poignant et captivant par toutes les questions qu'il soulève. La sobriété, la justesse de ton, la sensibilité et l'humanité restent les points forts de ce livre qui est pour moi un vrai coup de coeur.

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Lisa Charvet, jeune fille de vingt ans, contacte l'avocate Alice Keridreux pour le procès en appel dans lequel l'ouvrier plâtrier Marco Lange va être rejugé pour son viol alors qu'elle avait quinze ans. En première instance, il a été condamné à dix ans de prison. Lisa souhaite en effet changer d'avocat et quitter Laurentin, qui avait été choisi par ses parents, pour être défendue par une femme. Alice accepte, Lisa lui communique son dossier et lui raconte son histoire, ses années collège, ses rapports avec les garçons à l'époque… ● L'efficacité narrative de ce roman est remarquable. Il tient le lecteur en haleine, sans aucun temps mort. ● Chroniqueuse judiciaire au Monde depuis vingt ans, Pascale Robert-Diart connaît le fonctionnement de la justice sur le bout des doigts et en fait profiter ses lecteurs dans ce récit passionnant, sans que le rythme du récit ne soit en rien affecté par ce qu'elle nous expose du système judiciaire. ● J'ai juste un petit regret sur le titre de l'oeuvre qui déflore maladroitement l'intrigue. ● Certaines critiques babeliotes semblent avoir peur que ce roman remette en cause la dynamique du mouvement « #metoo ». Je trouve cela ridicule. D'une part, ce n'est pas un roman qui peut arrêter une telle lame de fond ; d'autre part #metoo ne signifie pas que les paroles des femmes soient toujours sincères. Elles aussi peuvent mentir : le découvre-t-on ?
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Enfin ! Enfin une quatrième de couverture qui , si elle fait feu de tout bois pour présenter favorablement cet ouvrage , n'en délivre pas une miette .Je ne connais pas l'impact de ce procédé sur le lecteur mais , personnellement , loin de me rebuter , cela a plutôt eu le don d'exciter ma curiosité et , au final , de me laisser littéralement dévorer ce petit roman efficace et bien écrit .
Bon , aprés avoir dit cela , me voici bien ennuyé pour vous en parler ....Alors , quelques pistes : on y plonge dans le domaine de la justice , du procés , de la valeur des témoignages , du travail des avocats , des jurés .Vous l'avez compris , on est au tribunal où l'on assiste à un procés aprés appel .Mais pas que...
Dans le même temps , on va pénétrer dans le monde des ados, dans leur collège, dans leurs découvertes du monde , des mondes . .Les ados , on en a eu , on en a , on en aura et c'est pas " de la tarte " . Finalement , seules et seuls qui n'en ont plus en sont heureux ( oui , y'aura les petits enfants , mais là , rien à voir !!! ) .Pour les autres , pas de bol si vous les avez , encore moins de bol si vous les aurez , si ,pour l'instant , ils sont encore tout mignons ( cqfd) , dans quelques temps . Allez , courage , profitez .
Et bien dans ce livre , y'a des ados , y'a des juges , des avocats , des parents , des profs bref , pas mal de monde , un univers trés bien analysé ,à mon avis .
J'ai bien aimé les profs , tiens , ceux qui disent tout savoir et ceux dont on dit que ,peinards , ils n'attendent plus que la retraite et ne veulent plus s'investir , pas d'emmerdes , quoi . Avant de me tirer dessus , consultez ma " fiche " vous comprendrez mieux ...
Et oui , y'a tout ça dans ce petit bouquin , un beau voyage chez les ados avec cette " petite menteuse " que certains se sont même permis de traiter de " petite salope ".Tout un programme , tout un aspect de notre société .J'avais , il y a longtemps lu un livre qui s'intitulait " un crime de notre temps ". On n'est pas loin .
En attendant , je me permets de vous recommander cette lecture qui pourrait sans doute nous amener , en certaines circonstances , à plus de discernement et d'humilité .
Bonne soirée , les amis et amies , et à trés bientôt .

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Un jour que j'étais dans ma cuisine (à faire ce que l'on fait dans une cuisine...), j'ai entendu à la radio, une histoire de justice injuste ... Un homme allait bientôt être libéré, car la personne qui l'avait accusé de viol, mineure à l'époque des faits, s'était rétractée, il était innocent... Elle l'avait désigné lui, pour ne pas désigner le vrai coupable, son frère... et ainsi pulvériser sa famille. Ce roman étant sorti, sensiblement en même temps , et présentant des similitudes étonnantes, avec cette vraie affaire, j'ai laissé passer du temps, pour oublier la vraie histoire. Mais les raisons du roman n'ont rien à voir ... Pascale Robert-Diard, chroniqueuse judiciaire au Monde, a créé SON histoire, certainement avec des bouts de celles entendues dans les prétoires, les salles d'audience ; en effet, c'est tellement bien fait, tellement réaliste...

Dés le début , on apprend que la fille a menti, que l'homme est innocent. Et c'est toute l'histoire de ce mensonge, que va nous raconter l'autrice. Comment il naît d'un malaise, d'un mal-être, comment "il passe crème", comment la justice croit d'abord les enfants, avant les adultes. Comment la machine s'emballe, d'une petite confession au gros cirque d'un procés et d'une condamnation et d'un procés en appel.

C'est fascinant à lire.
Cela pourrait être vrai.
Cela s'est déjà produit... (On l'a vu avec l'affaire dont je vous parle plus haut, et aussi avec l'affaire d'Outreau...)
Les enfants peuvent mentir. Les filles aussi.
Et cela pose des tas de questions, retourne complétement notre cerveau. Si l'on ne peut plus croire les faibles, d'abord, avant les adultes, les jeunes filles avant les hommes si fort physiquement, qui croirons-nous ? Et cela fait du tort à un mouvement comme MeToo, si nécessaire, et qui a eu tant de mal , qui a mis si longtemps avant d'éclore...
Cela questionne sur la cellule familiale, sur les parents qui à force de vouloir être heureux, ( "parce qu'on a qu'une vie, hein."..), foutent en l'air celle de leur enfant lorsque tout explose, s'ils ne font pas gaffe ...
Et cela interroge sur le féminisme, sur ce que nos mères nous ont légué, sur ce qu'on en a fait, sur ce que nos filles pensent maintenant de cet héritage, ce qu'elles gardent, ce qu'elles jettent...
Cela questionne sur le métier d' enseignant, à qui on demande parfois de jouer les alerteurs, les confesseurs, les assistantes sociales, les psychologues... Sauf qu'ils n'ont pas LA formation. Sauf qu'ils sont si jeunes quand ils débutent (21/22ans ,si leur cursus étudiant se passe "normalemement")...
Que dire du réquisitoire de l'avocate ? : génial , implacable, magistral . Une pure démonstration de ce que l'on fait dire aux mots, du sens que l'on leur donne, de leur puissance. C'est un livre pour les littéraires.
C'est un roman qui montre et démontre que la justice ne passe pas de la même façon sur les puissants ou sur les misérables. Comme dans le cas évoqué plus haut, le coupable-innocent était pauvre, sans relation, seul... Un coupable idéal, donc...

Un roman très contemporain, très intelligent, très facile d'accés qui interroge sur le monde dans lequel nous vivons.
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Un roman court, dense, concis, qui interpelle. D'autant plus que son propos est décalé, à contrario de l'air du temps, tout comme les révélations de la petite menteuse qui dérangent tout le monde sauf l'accusé. Beaucoup pensent tout bas qu'elle aurait mieux fait de se taire, et, ce n'est pas dit de façon directe dans le roman, il est quasi certain que si elle avait parlé avant sa majorité on l'aurait obligée à se taire. C'est juste un peu dommage que le titre annonce à ce point la couleur alors que Lisa ne dévoile son mensonge que relativement tard dans le livre. le roman pose beaucoup de questions : sur la justice, sur la façon dont arrive une erreur judiciaire, sur le féminisme, sur le poids des apparences, sur ce qu'est un mensonge, sur la parole des enfants, … Car au départ elle ne ment qu'à sa meilleure amie et les adultes n'entendent que ce qu'ils imaginent, oubliant tous, y compris les experts, qu'il n'y a pas mensonge plus crédible qu'un mensonge partiel. L'engrenage est alors lancé, plus Lisa ment, plus elle va mal, et plus elle va mal, plus on la croit, au point d'aller au procès sans jamais avoir organisé de confrontation entre Lisa et Marco, au prétexte qu'elle va trop mal pour le supporter. L'auteur a choisi un ton assez neutre, souvent très proche d'une chronique judiciaire assez sèche, mais tempérée juste ce qu'il faut par le personnage de l'avocate de Lisa, Alice, dont nous suivons la vie professionnelle, la famille, et un peu les loisirs. Tout ce que lecteur sait des autres protagonnistes, y compris Lisa, c'est ce que perçoit l'avocate, tant à travers le dossier judiciaire, que dans sa relation à sa cliente et dans le procès. Excellent moyen de ne pas tomber dans un récit trop dans l'émotionnel. du coup, difficile d'éprouver de l'empathie pour Lisa, mais ce n'est pas le propos non plus, l'essentiel est de comprendre ce qui s'est passé, comment ça s'est passé, et ne pas retomber dans les travers du premier procès où, parole contre parole, c'est celui qui attire le plus la sympathie que l'on croit. Un roman très efficace qui pousse à se poser bien des questions.
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Lisa a été victime à 15 ans de viol et son agresseur est en prison. Cinq ans plus tard , il y a réouverture du procès. Lisa décide d'être défendue par une femme , contrairement au premier procès. Très vite, les certitudes volent en éclat.

Écrit par une spécialiste des chroniques judiciaires, ce livre est extrêmement précis sur les rouages de la justice et lui donne d'emblée une certaine crédibilité. C'est un roman nerveux, concis , qui ne laisse aucun répit au lecteur et évite toute tergiversation. Il aurait pu être plus long et fouiller un peu plus les personnages .

C'est un roman autour de la parole d'une adolescente dont les propos ne peuvent pas être remis en question autour des années 2020 dans le monde du #Metoo. En face , un pauvre type , alcoolique , à la vie sexuelle trouble et au regard vicieux. Devinez qui les jurés vont croire !
Au delà du volet juridique , il y a une pertinente réflexion autour de l'adolescence , et particulièrement de ces années collège , qualifiées à juste titre par l'auteur de gare de triage.
Oui, à la fin du collège , on sait , sauf quelques parents obstinés, si l'on est fait pour les études ou pas , on sait si l'on va plaire ou pas , même si cela peut s'arranger. On souffre au collège, ou l'on fait souffrir.Mais on n'est rarement neutre.
C'est un livre qui prend un peu le rebours de la tendance actuelle , celle de la parole sacrée des femmes dans les affaires de viol mais bien plus que ça.
En quelques pages , l'auteure a sans doute ramené chacun d'entre nous à ses années collège .On a tous connu une Lisa , ou tout au moins , on l'a tous imaginé dans les traits d'une camarade. Ce qui est d'une violence absolue.Ce livre nous le rappelle.

Une très belle lecture.
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L'avocate Alice Keridreux sort de la salle du Tribunal de la Cour d'Assise ; elle est fatiguée, et elle n'a pas réussi à empêcher la condamnation de son client, un meurtrier. Elle rejoint son cabinet, où son assistante lui indique qu'elle a un rendez-vous de dernière minute. Une jeune fille qui veut la voir, maintenant.

Cette jeune fille, Lisa Charvet, explique qu'il y a sept mois, elle a fait condamner un homme à dix ans de prison, Marco Lange, un plâtrier, pour l'avoir violée. Cet homme a fait appel se disant innocent, le procès en appel se tiendra dans quatre mois. Lisa dit à cette avocate qu'elle veut changer d'avocat, que ce soit une femme qui soit son avocate, et elle veut que ce soit elle, Maître Keridreux, qui devienne son avocate. Elle lui apporte son dossier en entier, le pose sur le bureau, et dit : Marco Lange est innocent, il ne m'a pas violée. Alice Keridreux est secouée, elle se souvient de ce procès. Elle donne un rendez-vous à Lisa Charvet dans quelques jours, pour qu'elle même aie le temps d'étudier le dossier.

Au premier rendez-vous, Alice demande à la jeune Lisa, maintenant vingt ans, de raconter depuis le début son histoire, lorsqu'elle avait quinze ans. Alors Lisa raconte la famille, le divorce des parents, la sensation de ne rien valoir à côté de sa soeur Solène qui réussit tout, elle se sent mal dans sa peau, mais d'un coup, à treize ans, elle remarque que sa poitrine se développe, mais vraiment. Elle est mal à l'aise mais voit bien que d'un coup toute la gente masculine la regarde quand elle passe, au Lycée, celle qui se trouvait inintéressante est abordée par tous les garçons, et surtout un pour lequel elle « craquait », en secret. Les baisers, les attouchements, deux autres garçons, et elle se rend compte qu'ils l'ont filmée. La vidéo est partagée, c'est le « revenge porn« .

Lisa, au fur et à mesure des entretiens avec son avocate, raconte comment ce choc la plonge dans une spirale : elle ne mange plus, s'habille de façon informe, se cache, évite les autres qui l'appellent « La Salope du Lycée ». Bientôt des professeurs s'inquiètent, sa meilleure amie aussi, ses parents sont convoqués : il semble que quelque chose de grave s'est passé, qu'il n'ont rien vu. Et c'est ainsi que les paroles des uns et des autres, voulant aider Lisa qui ne parle pas, qui ne dit rien, qui baisse la tête, vont désigner, au bout du compte, Marco Lange, pour son attitude suspecte et son alcoolisme lorsqu'il a fait des réparations chez les Charvet. D'un coup Lisa se sent enfin protégée, câlinée, aimée par sa famille et ses amis, de nouveau.…….

Excellent roman sur le fonctionnement de la justice, sur les dérives du harcèlement, sur la parole des enfants et des autres victimes, là où enfin une jeune fille finit par avoir le grand courage de dire « il est innocent, il ne m'a pas violée. »

C'est un casse- tête, un défi pour cette avocate qui réfléchit longuement à ce procès qui arrive, et qui décide d'épauler et de défendre celle qu'on appellera forcément « La petite menteuse ».

L'auteure, journaliste et chroniqueuse judiciaire, signe ici un roman d'une grande intensité, et prouve que tout peut arriver, même une erreur judiciaire, lorsque les victimes ne sont pas entendues correctement et avec des intervenants qui peuvent les aider.

J'ai eu une surprise qui m'a mise hors de moi hier lorsque je suis allée sur Babelio, à la page de ce livre, j'ai vu des « critiques » de gens qui avaient visiblement eu le livre en service presse (vu les dates des critiques, juillet, août etc alors que le livre est sorti le 18 août). Il y a visiblement au moins trois personnes qui n'ont pas lu le livre, et d'autres qui ont dû lire trois pages. Cela a donné des petits articles disant « J'ai ressenti de la gêne à cause de #metoo et ça risque d'empêcher des victimes de parler » voilà la teneur de leurs avis. Je me suis mise en colère et commenté en disant : connaissez vous au moins l'affaire Loïc Sécher (voir ici)? Que les erreurs judiciaires arrivent car si des personnes en détresse laissent accuser quelqu'un quasiment au hasard, il en faut, du courage pour réparer ça ! Et pour les avocats, se retrouver dans la situation de défendre quelqu'un qui vient dire « J'ai accusé un innocent », ce n'est pas très facile, de se battre pour libérer un accusé à tort, déjà en prison depuis des années.

Un beau travail de psychologie de l'auteure pour ces deux personnages, et bravo. Superbe roman, très prenant.

Maintenant pour les critiques des SP sur Babelio, pousser des cris d'orfraie en hurlant au scandale, à l'anti #metoo, à la Parole des Victimes, un conseil : lisez ce livre, Jusqu'au bout. Vous l'avez eu gratos, moi j'ai payé 20 euros comme le lecteur lambda et c'est bien comme ça. Et prenez un peu de recul. Réfléchissez.
Lien : https://melieetleslivres.fr/..
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