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Teddy Kristiansen (Illustrateur)Michael Zulli (Illustrateur)Peter Snejbjerg (Illustrateur)Steve Yeowell (Illustrateur)
EAN : 9781563892745
133 pages
Vertigo (01/10/1996)
5/5   1 notes
Résumé :
The three fates, dark witch-goddesses of ancient Greece, seek revenge after their followers are savagely raped and slaughtered by barbarians. Across the generations, the witches' priestess is reborn with one purpose--to slay the reincarnation of the barbarian's chief, with subtle aide from the witches themselves. Ranging from ancient times to modern London, this haunting tale weaves a dark spell in the tradition of Vertigo's Sandman.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome contient une histoire complète et indépendante de toute autre, de 125 pages de bandes dessinées. Il comprend les 3 épisodes de la minisérie, initialement parus en 1994, écrits par James Robinson. Teddy Christiansen a dessiné et encré les séquences consacrées aux 3 sorcières, soit 16 pages au total. Peter Snejbjerg a dessiné et encré les 35 pages se déroulant en 1342. Michael Zulli a dessiné et encré la séquence se déroulant en 1842, soit 37 pages. Enfin, Steve Yeowell a dessiné et encré les 38 pages se déroulant en 1994. La mise en couleurs a été réalisé par Daniel Vozzo. Les superbes couvertures sont l'oeuvre de Michael WM. Kaluta. Ce recueil commence par une introduction de Penelope Spheeris.

En 133 après Jésus-Christ, des romaines installées à Londres profitent de l'absence de leurs maris pour célébrer le culte d'Hécate. Elles sont victimes d'une bande de barbares menés par Rafe Ban Cooth. La bande viole et massacre ces femmes, en particulier Cooth viole Ursula Venicculus, la romaine qui célébrait la cérémonie. Cinthia, Mildred et Mordred, les 3 aspects de la déesse, ont observé ce drame et se promettent de donner la possibilité à Ursula de se venger au cours de ses prochaines réincarnations. En 1342, la jeune Faith Armatage (17 ans) s'apprête à épouser Jack Caulder, un homme important dans la communauté, qui utilise de temps à autre des méthodes criminelles. Faith Armatage a grandi dans un couvent, rendant un culte à Hécate, derrière une façade très chrétienne. La vengeance est en marche.

En 1842, Richard Francis Burton (grand voyageur, écrivain et poète, 1821-1890) surprend sa mère Martha au lit avec un gitan Loveridge. Cette fois-ci, le roue de la réincarnation a quelque peu brouillé les cartes. En 1994, Irène Cobbs surveille sa petite fille Fiona Vaughn. Alors que la grand-mère prend quelques minutes pour s'occuper de son thé, Fiona est enlevée par un individu non identifié et retrouvée morte quelques heures plus tard. Irène Cobbs se mure dans un mutisme et est placée en maison de repos par sa fille Gaynor. Cette dernière préfère se consacrer à son couple avec Martyn Vaughn plutôt que de se morfondre. Cette fois-ci, c'est Mordred la vieille bique qui apporte son aide pour mettre en oeuvre la vengeance.

En 1978, l'éditeur DC Comics lance une anthologie horrifique appelée The Witching Hour, dans laquelle les histoires sont présentées par 3 sorcières à tour de rôle : Cynthia, Mildred et Mordred, librement adaptées des sorcières apparaissant dans Macbeth de William Shakespeare. Ces personnages avaient connu un regain d'intérêt grâce à Neil Gaiman qui les avaient faites apparaître dans sa série Sandman. C'est à cette occasion que l'éditeur DC Comics (dans le cadre de sa branche Vertigo) propose à James Robinson de leur écrire une histoire complète dans un format de 3 épisodes de 48 pages chacun. La scène d'introduction fournit le fil conducteur des 3 principaux récits : l'extermination d'une cabale de sorcière (coven) partageant un savoir ésotérique sous la forme d'une religion rendue à Hécate, par un groupe de barbares qui les violent et les exterminent. le scénariste place donc son récit sous le signe d'une forme de féminisme, et de la violence faite aux femmes. Les sorcières disposent d'un savoir et d'une culture qui leur est propre, d'une certaine manière des femmes conscientes de leur condition et capables d'en tirer avantage grâce au recul acquis.

Le lecteur peut donc garder à l'esprit cette dimension féministe pour apprécier l'intrigue, mais James Robinson préfère raconter plutôt que prêcher, ce qui conserve intacte la qualité de divertissement de l'histoire. Dans la mesure où la structure du récit est connue par le lecteur avant d'en commencer la lecture, le scénariste doit lutter contre sa propre structure et maintenir un suspense, sur une autre base que celle de la vengeance (en effet le lecteur a compris qu'elle ne s'accomplira au mieux qu'à la fin du troisième récit, à la période contemporaine). le récit réalise une reconstitution historique convaincante, avec un couvent un peu particulier non loin de Londres, des connaissances ésotériques et un plan pour se venger original qui repose sur des pratiques magiques. Pour cette première partie, James Robinson tient toutes ses promesses : vengeance de la réincarnation d'Ursula contre Cootth, avec les personnages présentés dès le départ, pratiques magiques, intervention ponctuelle de Cynthia, la plus des 3 sorcières.

Cette partie est mise en images par Peter Snejbjerg qui a succédé à Tony Harris sur une autre série de James Robinson : Starman. Cet artiste utilise un trait un peu gras pour délimiter les concours, avec une accentuation discrète des courbes pour rendre les formes plus fluides. Il utilise des aplats de noir copieux, mangeant une partie des dessins, avec un effet expressionniste dans lequel cette noirceur s'apparente également à celle des personnages. L'apparence des dessins est donc très agréable, ce qui ne diminue en rien la cruauté de ce qui est représenté. Il intègre un niveau de détails important dans ses cases, ce qui participe à la consistance de la reconstitution historique. Il exagère un peu les traits des visages pour mieux transcrire les émotions et l'état d'esprit des personnages. Lorsque la séquence s'y prête, il abandonne la composition en cases rectangulaires juxtaposées, pour des images entremêlées à l'échelle de 2 pages en vis-à-vis. Peter Snejbjerg apporte une dimension visuelle qui ajoute de l'intensité au récit, tout en transcrivant fidèlement la dimension historique.

Après cette première partie intense, le lecteur retrouve l'intermède introductif où apparaissent les 3 sorcières, et c'est au tour de Mildred de décider d'intervenir. Les traits de contours de Teddy Christiansen sont plus déchiquetés, les compositions de cases sont plus brutes et primaires. Les images peuvent revêtir un aspect métaphorique plus prononcé, correspondant plus à l'idée d'une force spirituelle primale.

Pour la deuxième partie, James Robinson brouille le schéma bien établi en introduisant une variation sur les identités sexuelles. Il utilise un personnage historique en en respectant ce qui est connu de sa vie. Il écrit un drame bourgeois, mêlé à un récit de maturation d'un individu, sans oublier une ou deux interventions magiques. le contraste est très fort avec la première partie, justifiant ainsi la forme en 3 parties distinctes avec des dessinateurs différents. Il remet en cause la notion même de vengeance en lui opposant un autre objectif plus constructif. le scénariste ne se contente pas de reproduire le même schéma ; il développe des variations formelles, mais aussi narratives. Il est toujours question de la condition féminine, mais sous un angle déformant, avec un viol réalisé sur un homme, plaçant ainsi le lecteur masculin dans la position de victime, une manière habile de l'impliquer et de le projeter dans cette situation.

La mise en images de cette deuxième partie est confiée à Michael Zulli qui a également illustré quelques épisodes de la série Sandman et d'autres projets de Neil Gaiman, et qui est le cocréateur de Puma Blues avec Stephen Murphy. de manière tout aussi saisissante, les dessins de cet artiste emmènent le lecteur dans l'époque, dans une reconstitution historique bien alimentée par les détails des costumes, de l'équipement d'une cuisine, des étoffes des gitans, des moulures d'un manteau de cheminée. Zulli montre un environnement d'une grande cohérence graphique entre les personnages et leurs coiffures, leurs tenues vestimentaires, les aménagements des lieux où ils évoluent. Il réussit à accomplir cette recréation d'un monde révolu, sans tomber dans une sorte de photoréalisme. Il utilise des petits traits secs pour texturer les surfaces, pour faire apparaître des ombres portées aux contours irréguliers, comme si l'oeil ne pouvait percevoir la réalité avec précision. Ce mode de représentation induit le fait que la réalité est soumise à un mouvement de flux constatable par le lecteur, sans qu'il ne sache trop quelles forces le meuvent. Michael Zulli allie une approche teintée de romantisme, faisant ressentir l'importance de la sensibilité de chacun, l'importance de son individualité, tout en sous-entendant la manière dont ces individualités interagissent, grâce à un langage corporel mesuré, une direction d'acteurs en nuance (pas de grandes gesticulations), et des prises de vue aussi factuelles que transcrivant un mouvement sophistiqué. du grand art ! La partie visuelle apporte une dimension supplémentaire et complémentaire à un scénario linéaire l'enrichissant pour donner la vie aux personnages.

La troisième partie entraîne le lecteur à une nouvelle époque, aux mains d'un autre dessinateur, Steve Yeowell qui a, entre autres, collaboré avec Grant Morrison sur Zenith. Il s'agit d'un artiste moins minutieux que Michael Zulli, et beaucoup plus pragmatique que Peter Snejbjerg (= il n'y a pas trace d'expressionisme). Pour autant, le lecteur ne ressent pas de déception graphique, parce que les dessins de l'artiste conservent une bonne densité d'information visuelle, et qu'il décrit une banlieue londonienne très ordinaire avec une grande conviction. Il n'y a pas d'exagération romantique, il n'y a pas d'ombres mystérieuses et impénétrables, il y a juste le quotidien banal d'une femme âgée qui s'est réfugiée dans le mutisme après un traumatisme culpabilisant. Les dessins sont clairs, la narration est concrète rendant l'horreur de la situation palpable, et évitant aux les éléments plus fantastiques de sombrer dans le ridicule. Les dessins de Yeowell sont moins remarquables que ceux de ses confrères, mais ils sont tout aussi compétents dans leur registre.

Dans cette troisième partie, le lecteur apprécie que James Robinson tienne ses promesses concernant la vengeance, grâce à un coupable qui ne mérite pas autre chose. Il revient à la question de la place de la femme dans société sous un angle plus classique que dans la partie précédente, et très efficace. En effet, le criminel ne souhaite rien moins que de revenir à des temps plus simples où la place de l'homme et celle de la femme étaient clairement définies. L'auteur montre en quoi cette conception rétrograde relève d'une forme d'esclavagisme pour les femmes, mais aussi pour les hommes ce dont Martyn Vaughn n'a même pas conscience.

Le principe de série dérivée (prendre des personnages secondaires d'une série à succès pour développer une série sur la base de leur renommée) fait généralement craindre le pire au lecteur, ou un produit de qualité inférieure à l'original dans le meilleur des cas. Ici, James Robinson construit un récit sous forme d'anthologie (un clin d'oeil à The Witchnig Hour), sur la base d'un thème fort (la condition féminine), avec une maîtrise de la forme, la capacité de développer des personnages attachants, des intrigues bien troussées, et un point de vue adulte. Il bénéficie de la collaboration de 4 artistes différents, tous amenant leur sensibilité pour magnifier la séquence qu'ils illustrent.
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