Les Hommes de bonne volonté - Intégrale, tome 2 : Les Amours enfantines - Eros de Paris

Ce troisième livre des Hommes de Bonne Volonté débute sur un thème qui m'a un peu moins intéressé que dans les volumes précédants, à savoir, les conversations de deux normaliens, Jerphanion, jeune auvergnat fraîchement débarqué à Paris et Jallez, lui de pur jus parisien.

Leurs préoccupations de jeunes adultes étudiants intellos, un peu coincés, et leurs évocations de l'Amour avec un grand A (et non un grand tas !), n'est pas spécialement captivante à mon goût.

Par contre, vers le milieu du roman, la description des familles aristocratiques sur le déclin (de Saint-Papoul) ou richissime (de Champcenais) m'a paru beaucoup plus savoureuse.

Jules Romains y dépeint une vieille famille aristocratique qui peine à maintenir son rang, faute de rentrées d'argent suffisantes (le revenu des terres agricoles n'étant plus un gage de fortune au début du XXè siècle) et qui donc tâche à de brefs instants d'éblouir son cercle d'amis par de brillantes réceptions.

De l'autre côté, une famille effectivement riche que son cercle envie et qu'on n'hésite pas à qualifier de pingre, en regard des millions supposés glisser entre leurs doigts, tels l'eau d'une fontaine jamais tarie.

La fortune des de Champcenais issue du pétrole est menacée par le rapport du député de gauche Gureau, lequel est contacté par un proche de de Champcenais, Sammécaud, probablement, le personnage le plus ambigu et attachant jusqu'à ce point.

Les rapports entre Gureau et Sammécaud, étonnamment pacifiques et complices rendent ce passage délicieux. Romains dessine bien toute l'ambiguïté qu'il peut y avoir chez un député qui rencontre un gros capitaliste, mais aussi, ce qui est moins évident, tout ce que peut avoir de compromettant pour le capitaliste cette relation.

Lequel Sammécaud cultive une certaine duplicité dans tous les domaines en essayant de nouer une liaison avec la femme de son collaborateur, de Champcenais. de son côté, Quinette, semble se fourrer de plus en plus dans un guêpier...

En somme, un opus moyen, avec quelques chapitres très intéressants et d'autres qui m'ont un peu ennuyée. Mais le mieux sera toujours que vous vous fassiez votre opinion vous-même car ce n'est que mon avis, c'est-à-dire, très peu de chose. À suivre...

Connaissez-vous Louis Farigoule agrégé de philosophie né en 1885 ? Ce nom évoque le sud de la France, les cigales, un héros de Marcel Pagnol ou de Giono. En fait Louis Farigoule est le vrai nom de l'écrivain Jules Romains (1885 - 1972) connu notamment pour son célèbre docteur Knock. Il est aussi l'auteur d'une fresque romanesque unique en son genre dont le titre général est "Les hommes de bonne volonté". Cette oeuvre comprend 27 volumes rédigés entre 1931 et 1946 et raconte les destins croisés d'environ 2000 personnages qui évoluent dans un espace temps situé entre le 6 octobre 1908 et le 7 octobre 1933. Ce doit être à fois exaltant et très lourd de porter en soi tout un monde en gestation et qui exige de prendre vie au travers de récits. Pour l'instant je n'ai lu que les trois premiers volumes et je ne suis pas certain d'aller au bout mais j'ai grand plaisir à retrouver chaque fois le style de cet auteur qui s'est fait une place à part dans le monde de la littérature. Il est le promoteur du concept littéraire appelé l'unanimisme. Il s'agit d'une doctrine selon laquelle l'écrivain doit exprimer la vie collective des groupes humains plutôt que les destins particuliers de tel ou tel personnage. Georges Duhamel que j'apprécie également comme auteur et comme homme est l'un des représentants de ce mouvement. Jules Romain a notamment été influencé par « la psychologie des foules » de Gustave le Bon ou la sociologie de Durkheim ainsi que par l'oeuvre de Zola. Dans ce volume « Les amours enfantines », chaque chapitre raconte les relations sociales, amicales, familiales à l'intérieur d'un groupe de personnages. Il y a un fil conducteur entre les chapitres et certains personnages sont récurrents, d'un chapitre à l'autre et d'un livre à l'autre, mais l'auteur ne raconte pas une histoire conventionnelle avec un début une fin une intrigue et des personnages dont on suit les péripéties. L'ambiance ainsi créée est difficile à décrire, mais l'écriture est impeccable et empreinte de poésie. À travers le destin de quelques individus et de nombreux personnages secondaires, on sent la présence et la pression de la société tout entière. L'auteur dépeint avec talent et sensibilité toute une époque, il possède à la fois la précision d'un sociologue et l'imagination d'un poète.

- « Les Hommes de bonne volonté, volume 1, tome 3 Les amours enfantines », Jules Romains (flammarion 1954).

Jerphanion et Jallez nouent une amitié à l'Ecole Normale et dégoisent sur Paris et leurs grandes idées. Pendant ce temps, Gurau manoeuvre pour imposer les pétroliers qui de leur côté proposent au député une place de directeur de journal pour le faire renoncer à son projet. Gurau prend conseil auprès de Jaurès.