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EAN : 9782915978568
96 pages
Editions Argol (30/10/2009)
3.9/5   10 notes
Résumé :
Ciel et terre et ciel et terre, et ciel, est un récit « autobiographique » dans la grande tradition des livres de prose de Jacques Roubaud. Le seul où apparaît la vie entière de Mr. Goodman, sorte d’alter ego romanesque de l’auteur. Du vécu-rêvé autour de tableaux de Constable. En cela, Ciel et terre et ciel et terre, et ciel, ce court texte unique, est tenu par les lecteurs et les universitaires comme la pièce centrale d’un dispositif où l’on retrouve de nombreux... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Récit rétrospectif "autobiographique" hautement poétique. le personnage principal Mr Goodman, est une sorte d'alter ego romanesque de l'auteur.


Présentation:

Pendant la seconde guerre mondiale, un enfant vit caché avec sa mère, une "tante" et des "cousins", dans un petit village du sud de la France non loin de la frontière espagnole avec la peur au ventre qui les tenaille sans cesse : peur de l'inconnu, peur de la dénonciation par quelque âme de corbeau vichyste, ou cupide , ou les deux. le père de Goodman a été fait prisonnier par les "ennemis". Sa mère lui parle de l'Angleterre comme d'un futur idéalisé, l'île de liberté, une promesse _ pays qu'il découvre et imagine à partir de quatre tableaux _ reproductions d'oeuvres de Constable qu'il ne connaissait pas et auxquelles il avait attribué des noms_ tableaux qu'elle a disposés aux murs de la chambre. Dans la tête de l'enfant il s'agit bien de quatre lieux provenant du même endroit qu'il voit vivre, tout est réel, c'est là qu'ils iraient vivre et il donne un titre à chaque tableau. Il n'y avait qu'un seul ciel, qu'une seule rivière, le ciel d'Angleterre, les nuages anglais.
Une quarantaine d'années plus tard, Goodman qui vit au Royaume-Uni, perd sa femme et c'est seulement à ce moment, allongé sur son lit qu'il aperçoit des nuages comme sortis du silence. Ce jour-là il les voyait comme si c'était la première fois.
Son enfance s'était brutalement arrêtée en 1944, sa mère avait été arrêtée par la Gestapo et déportée dans un camp. Goodman n'avait jamais repensé à ses premières années, il avait pris l'habitude de ne plus jamais en parler.
En plein deuil, lui qui est professeur de mathématiques, prend congé de son université et se consacre à la recherche sur les cristaux. Il tombe par hasard sur un ouvrage français dont le titre "Du nuage" le fascine et l'émeut de suite. Il s'agit en fait d'une invention, d'une définition et classification des grandes familles de nuages faite par le pharmacien quaker anglais Howard. On supposait qu'un des maîtres incontestés de la peinture de paysage, l'anglais Constable, avait eu connaissance de cette classification et en avait tenu compte dans ses tableaux. Goodman se rend alors à Londres afin d'acquérir les meilleures reproductions possibles de ces tableaux et se plonge dans une véritable contemplation du ciel et des nuages. Les souvenirs d'enfance vont revenir par vagues successives imaginaires. Ce qui importe le plus n'est pas tant la réalité que l'invention du peintre, sa préférence pour les formes arrondies et cotonneuses qui trouve un véritable écho inattendu et profond en Goodman.
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Une prose du maître du sonnet. Souvenirs hypnotiques, obsessionnels d'eau et de ciel, d'un enfant caché, bientôt privé de sa mère. Son double adulte, Mr. Goodman, retrouve dans les tableaux de Constable les nuages qui le fascinaient : « Il aurait voulu les retenir, les immobiliser, les coller à jamais dans le ciel, les accrocher à quelque point fixe de l'éther bleu » (p 21). « le ciel était de nouveau pur, profond, d'un bleu d'abord pâle puis sombrissant peu à peu. La montagne noircissait, se préparait à s'approcher jusqu'à toucher presque les yeux, comme tous les soirs. Il fallait s'arracher à la contemplation » (p 22). « Grâce à l'art de Constable, lui, Goodman, avait retrouvé, non pas le passé, ni le temps, qu'on ne perd jamais parce qu'il n'a jamais été en notre possession, mais, ne serait-ce que pour des moments précaires, et sans cesse effacés, quelque chose sur son enfance, que la fracture de la guerre, que l'absence de sa mère, la séparation d'avec sa mère, le meurtre de sa mère, lui avait fait perdre pendant toutes ces années. Il ne s'agissait pas d'une restitution impossible. Seulement l'offre d'une possibilité : un regard réconcilié avec le passé, avec l'oubli. »

La maîtrise de quelque chose sombre, pour paraphraser l'un des meilleurs recueils de Roubaud.
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C'est un enfant qui court dans la garrigue, « son territoire personnel, la tranquillité sans menaces, la solitude, son bien.»
Un enfant rêveur qui se cache parce qu'on est en 1943 et qu'on devine que l'enfant n'est pas d'ici. Il aime regarder le ciel, les nuages qui le font voyager « Il pouvait reconnaître en eux à volonté, des navires, des barques, des goélettes, des steamers, des yachts, des pirogues, des radeaux, des îles. » il voudrait les conserver intacts dans sa mémoire.
Dans la chambre où il est réfugié avec sa mère, il y a au mur quatre tableaux qui lui permettent de quitter la chambre par l'imagination, de faire accélérer le temps, il leur donne des noms à lui et quand il ferme les yeux il peut les reconstituer « la rivière, la prairie, le moulin, la barque ». C'étaient des images d'Angleterre, un pays qui rimait avec liberté si sa mère et lui y parvenaient.

Quarante ans ont passé et M Goodman regarde un ciel d'Ecosse, il étudie le ciel, c'est un scientifique, il veut comprendre les nuages et un jour il voit un tableau « Clouds study with birds » un tableau de John Constable mais les tableaux du peintre n'évoque rien pour lui, ne lui rappellent rien, jusqu'au jour où « un coin de voile d'oubli opaque qui plus de quarante ans auparavant était tombé devant ses yeux se leva. Il se souvint. »
Lors d'un voyage sur les traces de Constable « Peu à peu, par pans entiers, les images de son passé qui s'étaient refusées à lui obstinément, par vagues successives l'envahirent. Il revit la garrigue et ses nuages, il revit l'écluse du canal, il revit la maison où il était resté des semaines attendant le départ pour l'Espagne »

Une réconciliation avec le passé par le filtre de la peinture, la force de l'oubli des événements tragiques, c'est ce qu'offre Jacques Roubaud dans un magnifique récit construit comme une énigme.
Il évoque comment les images de l'enfance sont transformées, recomposées par la mémoire, la fascination qu'exercent les nuages, il nous permet de cerner le génie de Constable qui « avait fait d'une quête du temps la forme centrale de sa peinture, et découvert, là était son génie, une solution picturale à son mystère dans le contraste entre ciel et terre, entre une terre peuplée des images fixes du passé, des lieux de l'enfance, et un ciel peuplé des images mobiles du présent perpétué en futur, les nuages »

Ce livre avait déjà été publié aux éditions Flohic en 1997.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Une alliance entre un sujet sérieux (la déportation, les juifs cachés) et l'art, la peinture d'un artiste qui a existé, où on nous présente certaines de ses oeuvres. Comment retrouver des souvenirs oubliés grâce à une toile ? Une bonne idée.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Peu à peu, par pans entiers, les images de son passé qui s’étaient refusées à lui obstinément, par vagues successives l’envahirent. Il revit la garrigue et ses nuages, il revit l’écluse du canal, il revit la maison où il était resté des semaines attendant le départ pour l’Espagne
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Grâce à l’art de Constable, lui, Goodman, avait retrouvé, non pas le passé, ni le temps, qu’on ne perd jamais parce qu’il n’a jamais été en notre possession, mais, ne serait-ce que pour des moments précaires, et sans cesse effacés, quelque chose sur son enfance, que la fracture de la guerre, que l’absence de sa mère, la séparation d’avec sa mère, le meurtre de sa mère, lui avait fait perdre pendant toutes ces années. Il ne s’agissait pas d’une restitution impossible. Seulement l’offre d’une possibilité : un regard réconcilié avec le passé, avec l’oubli
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Les nuages
Il pouvait reconnaître en eux à volonté, des navires, des barques, des goélettes, des steamers, des yachts, des pirogues, des radeaux, des îles.
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Le ciel éternellement changeant a, lui aussi, une sorte de permanence, puisque les "châteaux de nuages" sans cesse sont défaits puis rebâtis par le vent. Mais cette permanence-là est infiniment plus durable que celle des objets terrestres. Le pourrissement végétal, les ruines des habitations, la mort des êtres, désignent sur terre le passé irrémédiable. Le plus fugitif, le plus changeant, le formel sans forme de la vapeur aérienne dans le ciel se révèle être plus durable que les moulins, que les herbes, que le cottage de Willy Lot, que la Stour River.
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[...] toutes ces familles anglaises, tous ces touristes de partout, parmi lesquels il se trouvait ce jour-là, étaient venus vérifier le paysage, s’assurer, non pas que les peintures lui ressemblent mais bien que, par endroits, c’est lui qui réussit, avec plus ou moins de bonheur, avec une obstination touchante, à ressembler aux tableaux.
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