Les quatre vies du saule

Roman en quatre parties.
1430. Chong Yang naît dans une famille riche. Près de sa fenêtre, il a planté deux branches de saule. A 18 ans, ses parents meurent, il se retrouve pauvre et seul dans la montagne. Il aura la visite d'un jeune cavalier qui deviendra son ami et lui présentera sa soeur. D'où viennent-ils?

XIV ème siècle. Chunning et Chunyi sont les jumeaux du descendant du seul rescapé d'une grande famille de Pékin exterminée lors de l'arrivée des mandchous. Ils vivent sur un haut plateau du sud-ouest.
Elevés séparément, Chunning méprise sa soeur. Mais ce garçon ne fera pas la fierté de son père...

1966: Révolution culturelle. Wenn manifeste dans la rue avec les étudiants. Tout le monde jure obéissance à Mao. Il sera envoyé à la campagne avec ses camarades et son amie Saule, pour transformer une forêt en rizière...

Ajing prépare sa valise pour aller à Hong Kong.

Et , le saule est présent à travers ces quatre récits.

C'est le troisième livre de Shan Sa que je découvre, je le préfère à "La Porte de la Paix Céleste", mais c'est "La Joueuse de Go" mon préféré!

Quatre nouvelles pour quatre vies, toutes situées dans la Chine depuis la dynastie Ming (1368-1644) jusqu'à la Révolution culturelle et l'ère du Grand Timonier.

Le point commun entre ces nouvelles : l'amour, amour contrarié pour plusieurs raisons et aussi la place de la femme de la femme dans la société chinoise. Auto-promue Impératrice quand son époux Ying Zong est capturé par les Mongols ; mutilée, les os des pieds cassés et contraints par un bandage sévère jusqu'aux débuts du XXème siècle, jouant le rôle de la délicieuse épouse ou concubine répondant aux canons de la beauté chinois (teint pâle, bouche petite, mains et pieds mignons) ; révolutionnaire ardente et passionnée.

Le lien entre ces histoires, deux branches de saule qui, plantées le même jour, vont s'enraciner, croître, de rencontrer, dégénérer. Comme des amants passionnés et épuisés. Comme les jumeaux, frère et soeur, imaginés par le jeune Chong Yang avant de partir pour Pékin, et sa douce Lü Yi à qui il fera jurer qu'ils se retrouveront dans une vie future.

L'auteure (déjà très appréciée pour sa Joueuse de Go) met en scène les personnages, leur donne chair et vie en les situant de façon très pittoresque dans l'Histoire de leur époque. Nous visitons la Cité interdite, la Porte de la Paix céleste (Tian 'anmen), vivons avec l'adolescent amoureux, la rude préparation des concours impériaux et l'irrésistible emprise de l'ambition. Nous constatons l'influence de la pensée confucéenne et son poids sur les familles, le tourbillon révolutionnaire avec ses courants et contre-courants, ses délateurs et ses camps de rééducation (les « écoles du 7 mai ») ainsi que les discours fleuves enflammés du Président Mao.

C'est un passage rapide à travers des centaines d'années de culture chinoise, empreint de poésie mélancolique et douce où la part est faite belle à la nature et aux sentiments romantiques. Un bémol tout de même : le style, à mon avis assez peu travaillé.

Quatre époques de l'histoire chinoise (l'Empereur dans la cité interdite, l'isolement des campagnes en un temps qui se modernise, Mao et la Révolution culturelle, la working girl contemporaine) comme quatre peintures distinctes qui, reliées entre elles par deux branches de saule, forment une sorte de conte sur l'amour, l'ambition, les choix que nous faisons (ou pas), le destin.
Un livre court et poétique qui évoque beaucoup : les traditions, les croyances, la condition féminine, la codification des places et rôles de chacun et chacune.

Quatre jolies histoires que nous donne Shan Sa. C'est toujours plein de poésie et de grace je trouve, on est tout de suite catapulté en Chine avec cette écrivaine. J'ai une une petite préférence pour la seconde histoire, mais j'ai trouvé dommage qu'elle ne parle pas plus des moments où la jeune fille a ses pieds bandés, c'est les moments les plus intéressants.

Ces nouvelles se lisent comme un conte et nous transportent à travers la Chine, de ses palais  du 15e aux rizières du siècle dernier, jusqu'à aujourd'hui et nous enveloppent du mystère des légendes et de l'exotisme des tenues de soie, des fumeuries d'opium, au son des cithares, sous des saules pleureurs. L'amour est le point commun aux récits des différents protagonistes, mais un amour bien souvent amer. Comme toute fable, il est possible d'en tirer une morale.

Un roman très calme et poétique, ça change des lectures de thrillers ou de fantastiques.
Les 2 premières histoires sont très bien, originales comme je l'ai aime. La troisième, j'ai été moins fan dû à l'histoire qui ne m'a pas touché.
Et la dernière très courte, mais digne d'un conte que l'on donne à un enfant avant de dormir.

Un vrai voyage au pays du soleil levant. Portée par une écriture fluide et délicate, plus poétique qu'habituellement dans nos romans occidentaux, j'ai suivi avec intérêt les sensibles histoires d'amour et d'amitié dont l'auteur a fait son sujet.

J'ai également découvert les conditions de vies de gens du peuple en Chine, à différentes époques.

Un roman que je recommande pour le courant d'air différent qu'il réussit à souffler sur nos habitudes et notre confort de lecture.