Qui est-il donc ? Un petit officier dont le caractère oscille entre une certaine élégance de corps et d'âme qui suscite l'admiration, et une vanité certaine qui risque bien de le mener tout droit dans le mur…
Son histoire nous est contée par l'un de ses camarades, qui assiste comme nous (d'abord avec une certaine perplexité, puis avec une inquiétude croissante) à l'évolution de son amour, supposément réciproque et tenu secret, pour une femme de la plus haute aristocratie. Jusqu'où l'entraînera donc ce qui semble bien être une pure chimère ?
L'écriture de Ferdinand von Saar est un modèle, dans son genre, de finesse et de fluidité. Nul besoin pour lui d'entrer dans des analyses psychologiques pour nous faire comprendre les comportements et les situations : tout est dans les gestes, l'animation des décors, les dialogues, les attitudes. Et quoique l'on puisse qualifier de pessimiste la littérature de Saar, sa plume subtile n'est pas étrangère à quelques touches d'humour : comme certains personnages de
Dostoïevski qui allient le ridicule au tragique,
le lieutenant Burda a quelque chose d'à la fois touchant et impayable…
C'est enfin un beau tableau, sans illusions, d'une société de castes dans laquelle une aristocratie hautement convaincue de sa supériorité garde jalousement, même au milieu des guerres, les portes de son entre-soi.