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sur 709 notes
On m'avait vendu un Sade dont les écrits sont si subversifs qu'ils ont bousculé les tyrannies et les tabous, notamment religieux. On m'avait vendu un Sade comme champion de la liberté. Ce "on", ce sont d'abord les surréalistes qui l'avaient remis au gout du jour, mais depuis une multitude de productions, littéraires, théâtrales ou médiatiques qui ont chanté ses louanges.

Bon. Je suis bien déçu. Je n'ai trouvé dans ce bouquin que l'histoire d'une pauvre jeune fille, très pieuse et droite dans ses actions, qui subit horreurs sur horreurs. Et plus elle s'accroche à sa rectitude morale (qui est d'abord une morale chrétienne chez ce personnage), plus on lui inflige souffrances, viols, tortures...

Il parait que le "message" du roman serait de dire que la morale vertueuse et la foi ne peuvent amener qu'à des problèmes (d'où le sous titre Justine ou les malheurs de la vertu). L'autre personnage fille du roman, Juliette, la soeur de Justine, est elle immorale et libertine et ça lui réussit plutôt bien dans la vie.

L'autre "message", en témoigne les nombreuses digressions philosophiques qui suivent chaque description de viol/torture, est que la nature n'a que faire d'une idée de justice. Et qu'en conséquence, être naturel, être libre, c'est de ne se priver de rien. Tout est permis. Surtout le pire, visiblement.

Je ne comprends pas bien après cette lecture pourquoi les surréalistes ont chanté que Sade faisait l'apologie de la liberté ou de la subversion. L'énorme majorité des scènes de ce roman montrent des personnages en position de pouvoir, qui usent et abusent de leur pouvoir sur une personne socialement dominée (fille, jeune, pauvre, vagabonde). Pour ma part, Sade serait plutot un apologiste de la domination. Ultra-violente, de préférence.
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Je ne connaissais pas l'oeuvre de Sade. Après "Justine ou Les Malheurs de la vertu", j'ai donc une petite idée de ses écrits.
Le bilan est relativement mitigé:
Certes, la plume est superbe, les thèmes philosophiques abordés sont intéressants (même si Sade présente, tout de même, une certaine étroitesse d'esprit dans ses argumentations) et il y règne une certaine poésie et un humour, à la fois noir et grinçant.
Conforme à sa réputation, Sade a truffé ce roman de nombreuses scènes violentes, tant de sexe et de luxure que de torture pure et simple. La répétition de ces scènes, j'avoue, devient au fil des 361 pages, difficile à supporter.
D'autre part, le récit est relativement lourd: à savoir que Sade utilise "l'histoire dans l'histoire" pour relater le destin tragique de Justine et sa vertu; cette pauvre femme répétant donc les sévices, dont elle a été victime, à divers interlocuteurs.
Enfin, l'enchaînement des événements ne jouit d'aucune crédibilité: Sade utilise, à chaque fois, des tours de passe-passe, pour sortir son héroïne des griffes d'un libertin pour la jeter dans les griffes du suivant.
En résumé, c'est donc une lecture intéressante mais qui ne m'a pas, pour autant, donné l'envie de découvrir le reste de l'oeuvre du Marquis.
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Je n'avais encore jamais lu Sade. J'ai souhaité (enfin) découvrir cet auteur « classique déluré » du XVIIIème siècle.

J'ai donc pioché au hasard, c'est tombé sur Justine ou Les Malheurs de la vertu. Il faut savoir que Donatien-Alphonse-François de Sade, né en 1740 et mort en 1814, a écrit plusieurs versions de ce récit malheureux dans lequel le vice triomphe constamment sur la vertu. La première, intitulée Les Infortunes de la vertu, a été écrite en 1787 alors qu'il était emprisonné à la Bastille (pour empoisonnement et sodomie). Ce manuscrit fut exhumé par Apollinaire au début du XXème siècle et publié par Maurice Heine en 1930. La seconde version est celle de cette chronique et a été publiée en 1791. Enfin, la dernière s'intitule La nouvelle Justine, ou les Malheurs de la vertu (Suivie de l'Histoire de Juliette, sa soeur) et se présente comme publiée en Hollande en 1797, mais fabriquée et diffusée à Paris en 1799.

D'un conte philosophique à son origine, il devient davantage un roman au souffle romanesque noir dans cette deuxième version. Justine, que la Vertu ne peut quitter, enchaîne les déboires pervers et tombe dans tous les panneaux. Chacune de ses rencontres, lors de chacun de ses périples malheureux, la fait se confronter à des libertins qui incarnent véritablement le Mal. La première moitié de cette deuxième version de Justine serait assez similaire à celle de la première version, donc davantage dans l'esprit du conte. Et effectivement j'ai pu constater une montée en puissance de la violence sexuelle et de la perversité en deuxième partie. L'ange Justine est alors la victime de multiples bourreaux sodomites et cruels. Les actes incestueux, sanglants, déchirants s'enchaînent au rythme de l'imagination de plus en plus folle et débridée de l'auteur.

Par ailleurs, le « Divin Marquis » transpose son enfermement dans son récit. Ainsi l'héroïne va-t-elle de prison en prison même si elle est représentée tantôt par un château tantôt par un couvent. le récit est noir, tant par les lieux sombres des débauches que par les agissements des personnages. Justine, qui se renomme rapidement en Thérèse pour cacher sa réelle identité, paraît alors bien naïve et très malchanceuse. La vertu est alors présentée comme une souffrance face au vice des libertins qui s'en sortent toujours haut la main. Cet apologie répétitive du Mal est parfois bien ennuyeuse à lire. On aimerait « secouer » l'héroïne et crier à l'auteur qu'il peut cesser ses redites puisque nous avons compris son message.

Mais comme l'explique très bien Béatrice Didier, qui préface et commente cette édition : « L'univers sadien est un monde de la réitération sans fin, certes. Mais cette inlassable redite se situe à des niveaux différents et multiples. le personnage libertin cherche désespérément, par la répétition de ses actes, à atteindre un absolu qui toujours lui échappe. le romancier ramène son personnage dans des situations identiques, symétriques, par une technique propre au roman baroque, mais que Sade semble avoir poussée à ses conséquences extrêmes. »

À travers Justine / Thérèse, Sade dénonce également toute forme de religion et ses institutions. L'épisode de l'héroïne pieuse enfermée, violée et violentée dans un couvent parmi bon nombre de compagnes d'infortune en témoigne.

Il est aussi beaucoup question d'argent. Quant les personnages issus de la noblesse ne sont qu'âmes perverties et réchappent de tout, l'héroïne tombée dans la pauvreté ne fait que vivre dans le malheur malgré une grande vertu. Il élève alors la haute sphère dans ce qu'elle a de plus vicieux tout en exprimant l'opinion de celles et ceux qui la composent à coup d'aplats philosophiques de ses personnages libertins. Ainsi apprenons-nous la maigre considération de ces hommes à propos des femmes. Poils dressés assurés !

On pourrait encore analyser ce roman de Sade et c'est ce qui le rend intéressant. Mais sans nul doute, il n'est pas à remettre entre toutes les mains. On comprend aisément que le Marquis fut l'objet de controverse et que ses écrits furent longtemps censurés. le néologisme « sadisme » prend alors tout son sens.
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Les scènes violentes ou sexuelles sont parfois difficiles, âmes sensibles s'abstenir. Mais la langue est formidable, et la philosophie est très intéressante.
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Justine est une jeune fille de bonne famille qui, du jour au lendemain, devient orpheline et sans le sou. Elle devra se débrouiller toute seule, livrée à elle-même. Tandis que sa soeur se créée une situation par le vice en profitant de riches amants. Justine, croit avec une certitude absolue, que la vertu a de l'avenir en ce monde. Elle déchantera très vite mais gardera la foi jusqu'au bout. Elle demandera de l'aide à diverses personne qu'elle croisera sur son chemin, mais en chacun un libertin se découvrira sous les traits d'honnête citoyen avec un plaisir bien défini.



Ce livre me fait penser à une sorte de Candide en plus sombre. Malgré tout, il contient deux défauts :

-- Il s'agit avant tout d'un roman à thèse, l'auteur veut nous faire parvenir un message. L'ennui c'est qu'en plus des péripéties et événements qui auraient largement suffit à la compréhension de celui-ci, il en rajoute en faisant disserter longuement certains protagonistes. C'est comme si il ajoutait du sous-texte à une image déjà lisible et déchiffrable. Il se montre beaucoup trop démonstratif en fait.

-- À partir de la seconde partie, l'histoire devient redondante : un libertin succède à un autre libertin, etc. de plus, Sade aurait pu éviter que la plupart d'entre eux aient le même opinion sur tout (comme sur la religion par exemple, véritable obsession). Il y a une certaine forme d'homogénéité qui n'a pas lieu d'être car un bandit de grand chemin ne peut pas avoir exactement le même avis sur le christianisme qu'un noble puisqu'ils n'ont pas eu la même éducation.


Lorsqu'on retire toute son exagération au roman, toutes ses scènes crues, il apparaît alors quelque chose qui parle de la situation de la femme dans une société patriarcale où l'existence de l'homme lui est supérieure.
Ce livre ne parle que de ça : d'une femme cherchant une main secourable ou à aider une personne en difficulté, se retrouvant à chaque fois face à des hommes qui ne cherchent seulement à profiter d'elle.

Que cela soit volontaire ou non, cet angle choisi fait de ce livre, un roman féministe même si, en réalité, son but n'était pas de défendre une noble cause mais plutôt soit de se frotter à certains philosophes de son temps qui imaginaient l'être humain comme vertueux par nature ou soit assouvir, via la plume, son obsession pathologique pour la torture à caractère sexuel.

Néanmoins, le marquis de Sade garde après tout ce temps tout son mystère et son souffle sulfureux.
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J'apprécie beaucoup Le Marquis de Sade par son originalité, sa manière de penser et son audace. Il incarne bien le 18e siècle.
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Il est encore sujet à controverses. Mais Sade est un génie
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« Martine chez les curés » ou  « Sade est-il encore scandaleux aujourd'hui ? »

La vertu n'est que comédie.
D'abord le roman  « Les infortunes de la vertu » : ne vous attendez pas à une suite de scènes immorales (vous seriez déçus) c'est avant tout un roman tout ce qu'il y a de plus classique, avec une histoire qui suit son fil, une héroïne certes exagérément naïve (Sade s'amuse à surcharger le trait d'une fille qui ne se raccroche qu'à sa vertu, sous le double regard de la société et surtout d'une « justice céleste « ) jusqu'à un dénouement oh combien ! Théâtral ; Sade ne va rien lui épargner : après être passée entre les mains de sadiques en tous genres, mais toujours vierge d'un point de vue animal, elle débarque au milieu du roman dans un couvent dissimulé derrière d'immenses murailles. Fatalement, comme un enfant qui entre en orphelinat, un prisonnier en prison, un vieux ou un fou dans un asile (bref tout huis clos qui permet la mise en oeuvre des fantasmes les plus inavouables) elle y devient le jouet de la perversion d'hommes omnipuissants.

A propos de cette « vertu » si mal définie
C'est sans doute ce qu'il y a de plus vieilli dans ce roman, cette chimérique vertu défendue bec et ongle, à cette époque encore imprégnée (badigeonnée) de religion (aujourd'hui on parlerait « d'orgueil »)
Ce n'est pas juste le mot « vertu » qui a perdu sa vitalité, sa  contemporanéité , c'est le sens même de cette vertu qui a disparu. Il en reste tout au plus une image ridicule dans les vieux romans ou peintures, façon Virginie (Paul et Virginie) qui refuse d'enlever sa robe dans la tempête, ce qui lui aurait permis de sauter à la mer et rejoindre à la nage la côte toute proche… La vertu est un mot disparu, ou plutôt le monde où la vertu avait un sens a disparu.
Et il faut l'avouer (le confesser) cette oie blanche exagérément naïve, qui en prend plein la tête, ça a quelque chose de drôle, comme toute exagération ; on en vient secrètement à espérer que la misérable « apprenne la vie »...
C'est drôle aussi par ce que les mots se parent de la même pudibonderie que la malheureuse quand il s'agit d'être précis dans les pratiques sexuelles. Par exemple, « Raphaël (…) se satisfait outrageusement, sans me faire cesser d'être vierge », tout ça pour dire qu'elle se fait enculer. Et tout de suite après pour un deuxième assaillant « (…) l'endroit où son hommage va s'offrir laissera de même ma vertu sans péril. Il me fait mettre à genoux, et se collant à moi dans cette posture, ses perfides passions s'exercent dans un lieu qui m'interdit pendant le sacrifice le pouvoir de me plaindre (…)» Personne ne me fera croire que Sade ne s'amuse pas ici à dire cette femme qui ne peut plus parler parce que la bouche pleine…
(A noter que pour « l'héroïne », sa vertu se limite ici à la fine membrane dans son vagin)

Mais même à l'époque de ces écrits, est-ce ces quelques scènes de torture et de sexe qui ont choqué ? A une époque proche où, en guise de cinéma, on allait sur la place publique voir un écartèlement ? Ou quand il s'en prend à cette obscénité parmi les obscénités qu'est la religion (même si son final voudrait dire toute la dévotion d' un livre bon chrétien, très certainement que Sade pensait ainsi s'éviter quelques foudres non divines, mais sans se rallier une seconde à cette fin couillonne) Cette époque n'était-elle pas déjà en partie nettoyée de cette crasse religieuse ?
Ou encore quand il choisit finalement des « hommes de dieu » pour prendre à son héroïne cette vertu jusqu'alors si difficilement défendue, dont l'un d'eux est parent du pape ! Aujourd'hui pour chercher pareils provoc', il faudrait se rendre au Kremlin pour traiter Poutine de couille molle.

Alors, est-ce plutôt les discours politique que l'on trouve dans le roman, comme celui par exemple de la Dubois à la jeune naïve « Sophie » qui ont suscité tant de réactions hostiles ? Dire par exemple qu'il ne peut y avoir de sens à la vertu sans justice (sociale), quel scandale ! Que dans une société inégalitaire, le vol, le meurtre, rien n'est immorale, quelle provocation !
« Cette classe qui nous méprise à pour elle toutes les faveurs de la fortune ».
Mais personne en vérité, pas plus hier qu'aujourd'hui, ne découvre ici que toute société humaine est basée sur l'inégalité, que sans inégalité il ne peut y avoir société. L'auteur fait dire à un de ses personnages à qui il donne un caractère exagéré dans le cynisme, que le riche a droit de tuer le faible, le pauvre, c'est une loi de la nature. Est-ce les délires d'un seul « hors norme » ou la réalité observée de la civilisation ?
L'obscénité, c'est la société humaine (les hommes de pouvoirs, de religion, tout un chacun)
Tu m'étonne que Sade ait passé la moitié de sa vie en prison avec pareil discours socialiste avant l'heure !
Ou alors, autre discours difficile à entendre certainement, montrer qu'en ces époques où le jeune homme de bonne famille n'avait pour choix que le Rouge ou le Noir, le choix de la femme non marié lui était encore plus circonscrit  (autour de sa culotte)
En fait, ce n'est rien de tout ce que je viens d'énumérer qui fait scandale, mais le fait qu'il le dise : des humains éprouvent du plaisir à en torturer d'autres : la belle affaire ! Personne ne découvre rien, mais cela ne se dit pas, cela ne peut se dire.
A la lecture de nos jours, on se dit juste que Sade est un habile observateur. C'est parce qu'il tend un miroir à l'humanité qu'il paraît scandaleux, profanateur à son époque. C'est ce miroir qui a pu rendre insupportable ses écrits. Il n'y a rien d'immorale chez Sade, pas plus que chez un journaliste à notre époque qui filme la guerre.

Mais resterait-il ici alors quelque chose de scandaleux pour notre époque ? quelques rares scènes de sexe ? L'immoralité de certains (un fils veut tuer sa mère ?) ? le goût pour la torture  (des religieux séquestrent et supplicient un groupe de femmes ?) ? le pouvoir qui permet tout…
Bon, premièrement pour ce qui est du sexe, on trouve à présent bien pire dans tout bon roman pour mémère.
Pour ce qui est de l'immoralité, la torture… La belle affaire ! Il n'y a qu'à allumer la télé pour trouver plus pervers : une assistante pas très maternelle fait boire du Destop à un bébé qui a eu le malheur de pleurer, une maman jette sa fillette nue dans une baignoire bouillante, un papa éventre et tue sa petite fille de un an en la pénétrant, un homme séquestre dans sa cave une enfant durant des années… Notre époque n'a rien à envier au XVIIIe siècle ni même au Moyen-Age. C'est juste que le spectacle qui jadis se regardait avec gourmandise sur la place publique à présent se déroule en premier lieu au sein plus pudique de la famille. La torture est devenue avant tout une histoire de famille, et plus accessoirement tout autre huis-clos institutionnel (à la seule différence là, c'est que c'est l'État qui régale, qui offre les proies) Sade n'est qu'un petit joueur face à la constance de la réalité de l'humanité, des papas qui chaque soirs font preuve de bien plus de créativité que dans les pires passages de ce roman. Depuis ses écrits, bien du sang a coulé sous les ponts et dans la culture sous toutes ses formes.
Par exemple, pour ce qui est du côté perversité, le règlement sadique basé sur la dénonciation dans le monastère ressemble furieusement au règlement dans « l'école en bateau », célèbre cas ou des enfants durant un an étaient livrés corps et âmes, sur un bateau qui parcourait le monde, à une équipe de pédophiles expérimentés (« emprise psychologique pour assouvir des pulsions sexuelles » selon la cour lors du rendu du procès)
Quand aux idées politiques du roman sur la réalité de nos sociétés plus que malades, qui à part un petit enfant croit encore en des « égalité », « fraternité » et autres contes de fées pour attardés ?

Alors ? Qu'est-ce qui pourrait choquer un public aujourd'hui  chez Sade ? Bin, rien...
En nous affligeant de cette fin d'une morale obligée affligeante (la malheureuse, enfin débarrassée de son infortune, se lamente et meurt tué par Vous Savez Qui (l'un des deux dont on ne peut prononcer le nom, et, petit indice, ce n'est pas l'adversaire de Harry Potter) d'un coup d'éclair dans le coeur ! ) Sade condamne son roman à la désuétude.
L'immoralité qui gagne à la fin (on y a presque eu droit, après tout c'est le discours tout au long du roman), des méchants non puni, le cynisme qui triomphe ... voilà qui aurait donné ici une oeuvre entière, intemporelle, à minima au dessus de la quasi totalité de la production actuelle. Mais déjà à l'époque les écrivains n'étaient pas foutus d'aller au bout de leurs idées…
A moins de voir ici un point de vue caché, conspirateur (chez l'auteur ou le lecteur fêlé?) L'immoralité est sauve, puisque finalement, celui qui gagne à la fin, c'est dieu (oops ; j'ai dit son nom!) exemple divin d'injustice, de narcissisme et de haine. L'immoralité est alors sauve.
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Il s'agit d'une femme candide et de bonne naissance, appelée Justine, qui raconte les déboires que sa naïveté (qu'elle appelle vertu) lui ont valu, souvent des sévices sexuels de la part de personnes infâmes. Ce personnage étant candide, il décrit toutes les pratiques les plus affreuses avec des périphrases très compliquées, comme par exemple : "l'infâme (...) essaie de se satisfaire avec moi de cette façon criminelle et perverse qui ne nous fait ressembler au sexe que nous n'avons pas qu'en dégradant celui que nous avons"; "Ensuite il me plaça sur le bord du canapé, frotta d'esprit-de-vin cette mousse dont la nature orna l'autel où notre espèce se régénère" ; "Quoique le vrai temple de l'amour soit à sa portée, Rodin, fidèle à son culte, n'y jette pas même de regards". A chaque nouvelle horreur, l'auteur des sévices donne une longue explication pour convaincre la pauvrette que le vice est bien plus avantageux que la vertu. Celle-ci reste pure et candide jusqu'au bout, mais n'est récompensée que par des tourments qui vont s'aggravant. L'ouvrage est présenté comme une dénonciation des vices, mais l'on comprend bien que l'auteur est trop bien informé pour n'être pas lui-même un débauché.
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Au-delà de la torture et de la pornographie c'est une oeuvre qui a du sens philosophique car elle pousse le questionnement - elle questionne plus qu'elle ne répond, c'est une oeuvre littéraire qui n'est pas un essai classique quoiqu'on y trouve des dissertations - à un niveau qu'aucun philosophe n'eut atteint à l'époque. Alors, on peut évidemment éviter de prendre le récit comme une sorte de modèle comportemental. Mais c'est tout de même beaucoup plus subtil que de la simple torture ou de la simple pornographie. Pour Sade, la nature est mauvaise, et s'y affranchir, c'est l'imiter : elle est finie et doit, pour renouveler ses productions, user de la destruction. Sade pousse les hypothèses philosophiques à leur maximum, et c'est tout l'intérêt. Par là, Sade donne de l'enjeu à l'existence même de la morale.
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