La plume de
Sade est légère, sournoise et répétitive, mais assez agréable à lire, il va s'attaquer tout au long du roman à la religion, à la morale et à l'ensemble de la société en plaçant sa
candide héroïne dans des situations qui s'avèrent « sadiques » mais le ton employé pour les conter les rend subtilement loufoques et parfois à la limite de la dérision. Tout au long de son périple Justine va devoir affronter ce qu'il y a de plus vicieux, de plus cruel et de plus hypocrite dans ce 18 ème siècle.
Sade n'épargne aucune classe sociale, tout le monde y passe du petit commerçant véreux aux hauts dignitaires ecclésiastiques.
Il n'épargne pas non plus son héroïne, Justine un modèle de vertu, elle a en elle un besoin presque insensé à ne céder à aucune tentation due t elle en mourir.
Une héroïne
candide à qui l'expérience n'apporte rien, bien au contraire, à l'image d'une pieuse martyre elle continue à croire que seule la vertu peut triompher du mal et lui apporter le bonheur. Cette jeune fille n'est pas sans rappeler le
Candide de
Voltaire, la même innocence et une résistance presque surhumaine à surmonter toutes les catastrophes.
L'aventure de Justine est bien curieuse, elle aspire à une vie pure et pieuse et elle se retrouve sans cesse à fuir, dans des paysages et des lieux de contes de fées elle parcourt des chemins qui traversent des bois qui recèlent de vils personnages, d'autres fois elle se retrouve emprisonnée dans de sombres châteaux, donjons. Mais hélas pour notre Justine le conte de fée s'arrête là, aucun Prince à l'horizon pour la sauver.
Les infortunes de la vertu est un véritable conte philosophique à priori il pourrait sembler léger, mais au final
Sade avec beaucoup de « miel » et de style mène le lecteur là où il voulait le mener.
En effet quoi de plus subtil que d'utiliser sa Justine pour nous conter toutes ces horreurs. Justine, une ingénue qui n'utilisera jamais de vocabulaire vulgaire, bien au contraire, son discours est empli de pudeur, de non-dits, elle suggère plus qu'elle ne dit. Elle nous expose pourtant des scènes de viols, de séquestrations, de sadisme, de mutilation mais sans jamais utiliser des mots explicites qui pourraient heurter le lecteur. du coup la lecture est rendue facile, on s'apitoie sur cette pauvre fille, mais elle nous exaspère aussi à toujours se retrouver dans des situations sordides. Et pourtant elle ne baisse jamais les bras, ne renie jamais cette vertu qui pourtant ne lui apporte jamais le moindre bénéfice.
Sade a réécrit ce texte deux fois, en le développant en lui donnant plus de noirceur. Une seconde version a été écrite en 1791 intitulée
Justine ou les Malheurs de la vertu puis une troisième « La nouvelle
Justine ou les malheurs de la vertu » un texte encore interdit à la vente au moment de la publication de la présente édition.
Dans la version que je viens de lire,
Sade n'épargne personne, sauf peut-être le lecteur , en effet sa prose dans la voix de son héroïne donne une légèreté étrange à ce conte où l'auteur s'exerce à prouver que les plus vertueux ne sont pas récompensés sur terre et qu'au contraire les plus cruels et immoraux triomphent grâce à leur force, leur habileté et leur intelligence.
J'ai beaucoup aimé cette lecture, la structure m'a énormément fait penser à «
Candide » de
Voltaire, j'ai été agréablement surprise et par le ton de l'auteur et son style très subtil.