Ce livre porte un regard nouveau sur le handicap et la majorité, deux mots qui peuvent apparaître en totale opposition. Quel regard portons nous sur ces personnes en situation de handicap qui deviennent majeur. C'est quoi la majorité, comment devient-on majeur ? Autant de questions posées dans cet ouvrage très accessible.
Commenter  J’apprécie         40
Le concept d'adulte accolé au qualificatif de personne en situation de handicap mental relève du paradoxe. La confrontation de ces deux termes place les travailleurs sociaux face à une contradiction fondamentale. D'un côté, le terme adulte renvoie à la responsabilité de l'individu, de l'autre, handicap mental replace la personne dans les stigmates de l'éternelle enfance et de l'irresponsabilité.
La volonté de tout être humain est de participer à ce processus "d'inachèvement". Le concept élaboré par G.Lapassade trouve tout son sens dans le monde du handicap mental. Il rappelle que l'homme se construit dans le temps, lentement. Tout statut, toute identité sont un apprentissage sans fin. Il brise les tentations de certitude et nous rappelle la précarité de toute situation, la complexité de la vie humaine. Tout être humain parcourt ce chemin. Les personnes déficientes mentales le font au même titre que les autres. Mais elles réclament que celui-ci soit plus structuré, jalonné d'aides pour participer malgré les vulnérabilités.
Une intégration construite à partir de la dissolution de la différence dans la norme sociale porte le risque du gommage et de l'oubli. Une chose est de donner des droits à une personne, une autre est de s'assurer que celle-ci peut en jouir pleinement.
L'étude du terme handicap, sa genèse et sa généralisation, nous renseigne sur la transformation idéologique qui marque le début du XX ème siècle. Le regard porté sur la personne en situation de handicap mental évolue, la société souhaite combler le manque, intégrer. Pour autant, parvient-elle à reconnaître la différence, à l'intégrer dans la société quotidienne ? Sommes-nous à l'heure de la rencontre ou toujours dans la controverse de la différence ?
Le handicap fait peur. il représente les limites de l'humanité et brise l'image idéale d'une filiation réussie. Mais ce n'est pas que cet autre qui est dérangeant. Personne ne peut faire l'impasse sur les sentiments que lui procure la rencontre avec la différence. Ils peuvent être violents et difficiles à accepter. Cet inconnu nous renvoie à notre propre étrangeté, nous place face à ce miroir brisé.