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Serge Fauchereau (Autre)
EAN : 9782070322749
320 pages
Gallimard (02/01/1985)
4.14/5   21 notes
Résumé :
Poésie n°193 édité par Gallimard

1ère édition en 1984
Que lire après Georgia - Épitaphes - ChansonsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La révolution surréaliste est l'oeuvre d'une poignée de poètes : Breton, Aragon, Eluard, Soupault, Reverdy… auxquels viendront s'adjoindre quantité d'autres poètes, artistes, cinéastes… Si les trois premiers ont pris très vite une place essentielle dans la littérature, les deux derniers, dont l'importance est tout à fait réelle, n'ont eu qu'une audience restreinte, réservée aux seuls amateurs de poésie. Pourtant, ils méritent l'un et l'autre d'être connus, et du plus grand nombre.
Philippe Soupault (1897-1990), comme Robert Desnos, avec qui il a beaucoup de points communs, est un poète « attachant ». Sans avoir la fluidité magique d'un Eluard ou le lyrisme d'un Aragon, il a ce qu'on pourrait appeler un charme particulier, ou un charisme populaire, tel qu'en auront également Jacques Prévert ou Raymond Queneau.
FUNEBRE

Monsieur Miroir marchand d'habits
Est mort hier soir à Paris
Il fait nuit
Il fait noir
Il fait nuit noire à Paris

(Chansons – 1949)


Il fait tout passer dans sa poésie : l'esprit d'enfance et la fantaisie, comme la profondeur, l'intensité des passions, la quête, le bonheur et le malheur de vivre… Il faut dire que sa vie aura, pendant plus de quatre-vingt dix ans, donné du grain à moudre à sa poésie : grand reporter de presse, il a voyagé autour du monde, sillonné l'Europe dans tous les sens, croisé les grands de ce monde (il a même croisé Hitler dans un ascenseur, er regretté ce jour-là, de n'être pas armé). Antifasciste notoire, il se verra pourchassé autant par la police de Vichy que par les nazis. Après la guerre, il continuera le journalisme autant à la radio que dans la presse écrite.
Sa poésie est tout à la fois intime et universelle (ce qui est le propre des grands poètes) et surtout elle a un côté populaire qui touche ce qu'on appelle aujourd'hui « les gens » et qu'on appelait jadis « le petit peuple ». Les lecteurs de Philippe Soupault se trouvent aussi bien chez les bourgeois que chez les prolétaires, chez vous comme chez moi, parce que vous et moi, nous nous retrouvons dans ses mots et dans ses phrases, avec nos qualités et nos défauts, nos désirs et nos frustrations, notre grandeur et notre petitesse
Ce recueil « Georgia-Epitaphes-Chansons » paru en 1984 dans l'excellente collection « Poésie-Gallimard (bien connue des amateurs de poésie), constitue une anthologie tout-à-fait représentative de la poésie de Philippe Soupault, depuis ses poèmes surréalistes jusqu'aux derniers textes des années 80, où la sagesse du vieil homme accompagne l'étincelle (pour ne pas dire le feu) qui a animé le poète toute sa vie. A compléter, dans la même collection avc « Les Champs magnétiques » écrit à quatre mains avec André Breton.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Marée Basse

Je songe à tous les vents
Simoun , sirocco et mousson
à vous phénomènes et typhons
tandis qu'ici tout craque
et que la chaleur épaisse comme la neige
se répand dans le silence
O Lune simplicité oracle
qu'un vent de crépuscule
réduit en lucioles
O lune tout t'abandonne
toi l'amie du silence ennemie des vents
plus est-ce toi qui mène les nuages
paitre
au-delà de la nuit
tout t'abandonne tout te fuit
obéissante moins aimée
mes yeux se ferme grâce à toi
et ta douceur se répand dans les veines de la terre
je songe à vous absents ivres ou dormeurs
vents de terre et de mer
vous qui apprenez qu'il faut vivre
avec des ailes
ou dormir sans scrupules
quand les oiseaux vos enfants
cueillent les étoiles de la vie et du sommeil
vents des continents
roses vous tremblez
vous qui préférez le supplice du crépuscule
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Je mens

Ma chambre est meublée du souvenir des îles
Et la mer est tout prêt
Ou le métro
Un livre dit un mot
Ne me demande pas d’allumer
Vos voix sont des fleurs
Là-bas ou même ici
Vous êtes morts sans doute
Je n’entends plus
Mais quoi
Quelques fois nous marchons en parlant de la pluie ou du beau temps

Nous rions
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AU CREPUSCULE

Bonsoir doux amour
Comme disait Shakespeare
Bonsoir mon petit pote
Comme disait Jules
Bonsoir mon père
Comme disait l’enfant de chœur
Bonsoir bonsoir mon fils
Comme disait le curé
Bonsoir vieille noix
Comme disait l’enfant de chœur
Bonsoir mon chou
Comme dit le jardinier
Bonsoir les enfants
Comme disent les enfants
Ariane bonsoir ma sœur
Comme aurait dit Racine
Bonsoir mon trésor
Comme disent les banquiers
Bonsoir ma cocotte
Comme dit la fermière
Bonsoir mon loup
Comme dit la bergère
Bonsoir les amoureux
Comme disent les eunuques
Bonsoir bonsoir bonsoir
Comme disent les inconnus
Mille bonsoirs de bonsoirs
Comme disent les militaires
Les nourrices et les chaisières
Bonsoir tout le monde
Comme tout le monde dit
Vos gueules là-dedans
Disent enfin les poètes
Et comme ils ont raison
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365 heures

Jours blancs jours de peine
jours de laine moutons
que l'on pousse et que l'on tond
troupeaux de jours sans haleine

Jours longs comme les cheveux
blancs comme la neige et le feu
cendres et fumées et cendres
escalier qu'il faut descendre

Petits vieux en robe de peine
jours creux comme des assiettes vides
quand la faim mord et morfond
vieilles journées et feuilles mortes

La vie passe comme un véhicule
devant les fenêtres fermées
et nous serons bien ridicules
devant nos miroirs brisés

Rions puisque vous demandez
que les jours soient des souvenirs
quand on a perdu la mémoire
et qu'il faut rire et qu'il faut vivre
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EPITAPHES (1919)

Dans ces « Epitaphes » seul le premier (Arthur Cravan – 1887-1918) est mort. Au moment de la publication (juin 1920), Georges Ribemont-Dessaignes (1884-1974), Francis Picabia (1879-1953), Théodore Fraenkel (1896-1964), Marie Laurencin (1883-1956), Louis Aragon (1897-1982), Paul Éluard (1895-1952), Tristan Tzara (1896-1963) et André Breton (1896-1966), sont toujours vivants. Philippe Soupault (1897-1990) leur a tous survécu, et de beaucoup. (note de Lamifranz)


ARTHUR CRAVAN

Les marchands des quatre-saisons ont émigré au Mexique
Vieux boxeur tu es mort là-bas
Tu ne sais même pas pourquoi
Tu criais plus fort que nous dans les palaces d’Amérique
Et dans tous les cafés de Paris
Tu ne t’es jamais regardé dans une glace
Tu as villégiaturé à l’hôpital

Qu’est-ce que tu vas faire au ciel mon vieux
Je n’ai plus rien à te cacher
La Seine coule encore devant ma fenêtre
Tes amis sont très riches

J’ai une envie folle de fumer

*

GEORGES RIBEMONT-DESSAIGNES

Autour de ta tombe
On creuse des trous un peu partout
Pour y planter des géraniums et des concombres
Ils fleuriront un jour ou l’autre
mais personne ne le saura
et tu seras là bien tranquille

*

FRANCIS PICABIA

Pourquoi
As-tu voulu qu’on t’enterre avec tes quatre chiens
Un journal
Et ton chapeau
Tu as demandé qu’on écrive sur ta tombe
Bon voyage
On va encore te prendre pour un fou là-haut

*

THEODORE FRANKEL

Il faisait un temps magnifique quand tu es mort
Le cimetière était si joli
Que personne ne pouvait être triste
On s’aperçoit depuis quelque temps que tu n’es plus là
Je n’entends pas tes ricanements
Tu te tais
Ou tu hausses les épaules
Tu ne voudras jamais connaître le paradis
Tu ne sais plus où aller
Mais tu t’en moques

*

MARIE LAURENCIN

Ce bel oiseau dans sa cage
C’est ton sourire dans la tombe
Les feuilles dansent
Il va pleuvoir très longtemps
Ce soir avant de m’en aller
Je vais voir fleurir les arbres
Une biche s’approchera doucement
Les nuages tu sais sont roses et bleus

*

LOUIS ARAGON

Tes petites amies font une ronde
Elles t’ont tressé des couronnes
Avec tes petits mensonges
Je t’ai apporté du papier
Et une très bonne plume
Tu feras des poèmes pendant l’Eternité
Ton ange gardien te console
Il noue ta cravate lavallière
Et t’apprend à sourire
Tu m’as déjà oublié
Dieu est beaucoup plus beau que moi

*

PAUL ELUARD

Emporte là-haut ta canne et tes gants
Tiens-toi droit
Les yeux fermés
Les nuages de coton sont loin
Et tu es parti sans me dire adieu
Il pleut
Il pleut
Il pleut

*

TRISTAN TZARA

Qui est là
Tu ne l’as pas serré la main
On a beaucoup ri quand on a appris ta mort
On avait tellement peur que tu sois éternel

Ton dernier soupir
Ton dernier sourire

Ni fleurs ni couronnes
Simplement les petites automobiles
Et les papillons de cinq mètres de longueur

*

ANDRE BRETON

J’ai bien aperçu ton regard
Quand je t’ai fermé les yeux
Tu m’avais défendu d’être triste
Et j’ai quand même beaucoup pleuré

Tu ne me diras plus
tout de même tout de même

Les anges sont venus près de ton lit
Mais ils n’ont rien dit

C’est beau la mort

Comme tu dois rire tout seul
Maintenant qu’on ne te voit plus
Ta canne est dans un coin

Il y a beaucoup de gens qui ont apporté des fleurs
On a même prononcé des discours
Je n’ai rien dit
J’ai pensé à toi

*
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Videos de Philippe Soupault (31) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Philippe Soupault
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, un groupe de jeunes poètes, traumatisé par le conflit et animé par un fort désir de révolte, se lance dans l'exploration de nouveaux territoires de création. Parmi eux, André Breton et Philippe Soupault vont écrire, au début de l'année 1919, Les Champs magnétiques. Rédigé dans des conditions inédites et radicales, ce texte va bouleverser les conventions littéraires de l'époque et constituer un jalon important de l'histoire du surréalisme. Découvrez pourquoi avec Olivier Wagner, conservateur à la BnF et commissaire de l'exposition « L'Invention du surréalisme », présentée à la BnF du 19 mai au 14 août 2021.
Du 19 mai au 14 août 2021 | François-Mitterrand
En savoir plus sur l'exposition « L'Invention du surréalisme : des Champs magnétiques à Nadja » : https://c.bnf.fr/L7t
+ Lire la suite
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