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EAN : 9782847208375
224 pages
Gaïa (10/01/2018)
3.86/5   18 notes
Résumé :
Dans les premiers jours de la vie de Bo, il y a des bombes, une cigarette qui part en fumée, une société totalitaire qui s'installe. Bo grandit, aime la musique, les mathématiques, ses amis, une femme, une autre. Il bricole les ondes et les transistors, invente une télécommande et un réveil-cafetière-tourne-disque. Pour sauver son fils, Bo doit quitter le pays. Alors les autorités proposent un marché : devenir leur agent pour partir. Comment assumer son choix, quel ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Cela faisait longtemps que je voulais faire connaissance avec l'univers d'Irina Teodorescu, alors merci à Babelio et Masse critique d'avoir exaucé mon souhait .
D'abord parce que j'en avais beaucoup entendu parler, ensuite parce que nos origines partagées ont forcément amplifié mon intérêt. La différence est que moi je suis née en France, je ne connais de la Roumanie que ce que les membres de ma famille qui y ont vécu m'ont raconté ou ce que j'en ai lu, notamment à travers la presse relatant l'actualité mais également à travers des romans. Pourtant, il y a quelque chose de subtil, une atmosphère, un ton, quelque chose de pas très facile à définir, une sensation d'appartenance qui crée un lien spécial, une appréhension immédiate du sujet. Disons une affinité particulière.

Dans ce roman, le pays n'est jamais nommé, les noms et prénoms faits d'une ou deux syllabes ne renvoient volontairement à aucune nationalité. La dictature est malheureusement universelle, elle a déjà été éprouvée à l'Est comme à l'Ouest, elle peut tomber sur n'importe qui. Tout juste est-il indiqué qu'après une guerre meurtrière, la Nouvelle Société a commencé à être instaurée sous la houlette d'un Haut Commanditaire dont on sent peu à peu le poids étouffer les libertés individuelles derrière des images hypocrites envoyées à destination de l'International. C'est ici que grandit Bo, né à la fin de la guerre, devenu ingénieur et inventeur de génie sous la surveillance de l'Etat qui se fait fort de gérer la matière grise de ses ressortissants. Et qui, devenu père se verra proposer un horrible marché pour avoir le droit de faire soigner son fils malade. Comment vit-on dans un environnement où tout est rationné, surveillé voire interdit ? Comment garde-t-on une certaine joie de vivre, une confiance en l'avenir, en l'autre ? Dans un pays où "la chose est très simple, soit tu hais la milice, soit tu es la milice".

L'univers d'Irina Teodorescu est d'une force rare, servi par une plume qui s'autorise la fantaisie et la poésie pour mieux souligner son propos. C'est agréable de s'y laisser couler surtout après des dizaines de lectures très ancrées dans le réel et le premier degré. Ici, le léger décalage, l'effet d'intemporalité permettent de créer le twist qui déplace le point de vue tout en le rattachant bien à une réalité. Ce qu'elle souligne ce sont ces minces espaces de liberté qui persistent quand tout est sous contrainte ; le pouvoir de l'imaginaire, l'écriture, la transgression, le rêve... qui permettent d'alléger la pression. A moins que le couvercle de la cocotte-minute ne soit soudain définitivement scellé et que tout espoir disparaisse.

C'est un conte à la fois lumineux et désespéré. Une histoire d'hommes, d'entraves et d'espoirs vacillants. Qui pose la question du choix lorsqu'on ne l'a pas et du sens que l'on peut donner à une vie qui n'offre que peu d'options. Tout ceci réalisé avec beaucoup de subtilité et surtout une singularité qui marque durablement les esprits. Une découverte bien intéressante, qui a trouvé en moi un écho assez particulier.

"Tous ces pourquoi resteront à jamais inexpliqués, car dans cette vie, il n'y a pas de sens. Dans cette vie, on dirait qu'il n'y a que des objets qu'on garde et des objets qu'on jette, puisqu'il y a la fin et qu'à la fin plus rien n'a d'importance".
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Bon sang que j'ai aimé ce livre ! Je l'ai trouvé d'une beauté profonde. D'une beauté de fleuve que l'on a l'illusion d'apprivoiser mais qui continue de "passer sans passer".
Né sous les bombes, Bo est prédestiné par sa mère à être et à rester un "petit traitre". Dans la "Nouvelle Société" dictatoriale issue de la guerre, Bo grandit et montre vite sa passion des mathématiques appliquées aux transmissions. Devenu chercheur à l'Institut de Recherches Scientifiques, persuadé de l'importance de ses travaux, il résiste avec insolence aux ordres "d'en haut". Mais pour que son fils reçoive les soins nécessaires à sa survie, Bo doit négocier un voyage à l'étranger. Un marché lui est alors proposé par les autorités. Une alternative qui ne lui laisse que le choix entre le pire et le pire...
Tout est beau, tout est signifiant, tout est créatif dans ce roman ! du titre qui joue sur la polysémie et l'homophonie du mot "compter" aux personnages qui parviennent à trouver des éclats de lumière sous l'étouffoir de la dictature en passant par l'écriture fluide, mouvante, pleine de fantaisies et de chagrins bâillonnés. Irina Teodorescu bouscule les codes romanesques dans un jeu perpétuel avec les temporalités, les voix, les points de vue et dessine ainsi un univers qu'elle met à notre portée jusqu'à nous en faire ressentir les moindres palpitations, les plus fines émotions. La poésie épouse le réalisme, l'humour embrasse le drame et du plus intime jaillit l'universel. Et tout cela en gommant toute apparence d'effort, tout procédé ostensible ! La lecture devient lumineuse, évidente, même dans ses anfractuosités les plus furtives.
L'on devine, l'on ressent profondément dans les fibres du récit, une douleur latente, un questionnement qui brûle encore et qui devient nôtre par la magie de cette écriture et de ces choix narratifs. Il est tout proche de nous, celui qui comptait être heureux longtemps, il nous est familier, il nous est parent, il nous est semblable. Son histoire pose une question de conscience, de négociation insoluble entre des devoirs irréconciliables, entre sentiments et intégrité. Mais c'est au lecteur de discerner ces strates interprétatives car rien n'est explicitement asséné. Et c'est là aussi que réside la force du roman d'Irina Teodorescu : dans tout ce qu'il dit bien au-delà des mots.
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Masse Critique est un truc génial, sans Babelio, il aurait fallu l'inventer. Merci donc à Babelio et tous les éditeurs participant, ici plus particulièrement à Gaïa!

Bo est né sous les bombes, les derniers jours de la guerre. il a grandi avec la dictature, bien décidé à être heureux malgré tout, et cela en prend le chemin, il organise des fêtes, il a un bon boulot, un ami sincère, une femme étrange puis une femme fidèle, et enfin un fils. Tout au fil des années plane la menace de la haine et de la délation, mais ma foi, on peut bien faire avec. Et qu'importent les petits inconforts matériels?

Seulement voilà, l'enfant est malade, il faudrait le soigner à l'étranger et dans un cruel choix de Sophie, le pouvoir maléfique lui échange les autorisations contre le fait de devenir espion.
Le drame intime ne suffit pas : dans un tel pays, l'intime n'existe pas, le drame collectif achève la dévastation.

Irina Teodorescu garde son style pointilliste et malicieux, facétieux au début puis peu à peu frappé au coin du malheur, ses phrases rapides, ses accélérations.

Comme dans La malédiction du bandit moustachu, la bonne humeur et la détermination sont impitoyablement mis à mal par la fatalité.

Bonne lecture à proposer à ceux qui répondent à la surveillance généralisé qu'ils s'en fichent, qu'ils n'ont rien à cacher...
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Ce livre m'a été offert dans le cadre de la masse critique de janvier. Je remercie donc Babélio et les éditions Gaïa. C'est un immense plaisir de se voir offrir un livre.
Tout d'abord, ce fut une découverte pour moi, je ne connaissais pas du tout cet auteur roumaine. Et une mention spéciale pour la couverture du livre que je trouve vraiment jolie.
L'histoire débute avec la naissance de Bo au moment de la creation de la Nouvelle Société. Il y avait avant la guerre, maintenant la Nouvelle Société dont on comprend très vite qu'il s'agit d'un régime totalitaire où l'individu en tant que tel n'existe pas. La collectivité, le travail en équipe, sont superieurs à tout individualisme. Nous allons donc suivre Bo qui deviendra un ingénieur en physique spécialisé dans la télétransmission, compétence très utile pour la Nouvelle Société. Après plusieurs histoires, Bo aura un enfant avec Di. Un enfant malade... pour le sauver, il faut aller à l'étranger. Mais pas si simple de partir du pays. Les hautes autorités lui proposent un deal : partir mais devenir espion pour la Nouvelle Société. Voici L'histoire de ce livre.
J'ai bien aimé l'histoire de fond. le style d'écriture m'a un peu dérangé (l'auteur n'utilise pas toujours la ponctuation dans les dialogues). L'histoire évolue rapidement, les événements importants ne sont pas décrits longuement. A contrario, l'auteur s'attarde sur les sentiments ressentis par les personnages. Cette Nouvelle Société fait peur, elle dirige entièrement la vie des personnes, chacun ayant une mission bien déterminée afin d'être utile pour le régime. Avant, c'était la guerre et les morts par terre, maintenant c'est l'incessant contrôle du régime sur la vie quotidienne des personnes, enfermées dans ce pays. Sensation étrange ... Je ne regrette pas d'avoir lu ce livre, même s'il n'aura pas été un coup de coeur, une belle découverte tout de même.
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« Celui qui comptait être heureux longtemps » d'Irina Teodorescu chez Gaïa est un texte émouvant et poétique, porté par une langue singulière, et qui aborde un thème universel : comment grandir et survivre sous un régime autoritaire, et jusqu'à quel point accepte-t-on de coopérer, pour arriver à ses fins ?

Bo est né le même jour que la Nouvelle Société. Il grandit dans un pays totalitaire, mais ses dons pour les maths et la recherche lui valent un statut privilégié, à tel point qu'il pense pouvoir imposer ses vues au pouvoir en place. Après une ‘aventure' avec la troublante Irenn, il finit par se marier à Di. Ensemble ils ont un fils qu'il adore. Lorsque celui-ci tombe gravement malade, ils se battent pour le sauver, avec l'énergie du désespoir.
Il s'avère souvent intéressant de découvrir le style d'auteurs qui écrivent en français, mais dont le français n'est pas la langue maternelle. C'est le cas d'Irina Teodorescu, qui est née à Bucarest, et vit à Paris. L'histoire de ‘Celui qui comptait être heureux longtemps' est poignante, et le style très particulier de l'auteur amplifie l'émotion. Si certains passages sont à mon avis trop simplistes (phrases courtes, à la manière d'un conte pour enfants), l'alternance entre les dialogues un peu loufoques du ‘Quidam Bo' avec les ‘généraux' et le récit intime, plein de sensibilité, est bien menée. Pour la suite, cliquez sur le lien
Lien : https://bit.ly/2qoVCOp
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critiques presse (2)
Actualitte
07 mars 2018
Que le lecteur soit informé ou non de la résonance autobiographique de cette histoire compte finalement assez peu ; sa force émotionnelle est ailleurs, notamment dans l’écriture si singulière de l’auteure, dans sa manière délicate de raconter les épreuves de la vie.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Actualitte
24 janvier 2018
Une écriture fraîche, imagée pour une histoire qui déchire le cœur.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Bien entendu, tout ceci se fera en finesse, le fils doit comprendre la vie sans que le père la lui explique, le père doit discrètement lui montrer les manettes à actionner, les boutons sur lesquels appuyer, les règles de base et les lois en vigueur, mais il ne doit jamais apparaître en donneur de leçons, ainsi le fils peut penser qu’il avance seul sur un chemin jusqu’ici inexploré, jamais parcouru par quiconque avant lui, et il faut à tout prix lui laisser ce rêve-ci. C’est uniquement comme ça que ça marche quand c’est de père en fils. Le fils ne doit pas savoir grand-cho se sur le père et, tant qu’il le peut, le père laisse planer le mystère, il ne doit pas dévoiler sa sensibilité ou ses faiblesses. Puis un jour le fils découvre que le père est un homme comme tous les autres, un incurable coureur de jupons, et là ce n’est pas grave car le fils est déjà trop grand pour reculer, il est déjà mordu par le virus de la passion, l’envie d’être un homme plus fort que celui d’avant lui. C’est comme ça de père en fils et pas autrement. Et le fils est très bon, meilleur ingénieur, meilleur chercheur, meilleur inventeur, meilleur que son père ; il est excellent dans le domaine, il est un prodige.
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Il savait, l’homme aux lunettes sombres, il savait que dans le monde dans lequel ils vivaient, son fils aurait le temps de faire des compromis ; il ne se doutait pas, l’homme au regard empoisonné, que son fils ne saurait et ne pourrait pas faire l’ultime concession, celle absolument indispensable ; l’idée qu’il aurait mieux fait de lui apprendre à transiger parfois, cette idée ne l’avait jamais effleuré et il était fier, Pol, de son fils qui s’éloignait avec l’argent dans la poche, il était fier car en plus, avait-il pensé, il est bon, le jeune, avec les appareils, il est très très bon, en quelques mois il sera le meilleur de l’atelier, meilleur que son propre père, et Pol avait eu une telle bouffée d’orgueil qu’il avait fini par se féliciter d’avoir trompé sa femme sous le nez de son fils.
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Tous ces pourquoi resteront à jamais inexpliqués, car dans cette vie, il n'y a pas de sens. Dans cette vie, on dirait qu'il n'y a que des objets qu'on garde et des objets qu'on jette, puisqu'il y a la fin et qu'à la fin plus rien n'a d'importance.
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C’était bien, papa ? Et toi, en tant que père tu réponds que oui, c’était génial, ça y est, tu sais faire du vélo, et tu es fier, très fier, comme si ton fils avait posé un premier pied sur Mars, ou un truc comme ça, et tu as envie de le soulever dans tes bras et de l’embrasser et de crier regardez tous, regardez donc mon fils, tu as envie de le remercier d’exister, mais tu ne sais pas qu’il ne deviendra pas ce que tu espérais, il ne deviendra rien, rien du tout, le genre d’enfant qui ferme les yeux et avance en souriant, confiant sur son bout de chemin qui ne mère nulle part.
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Lorsque le chirurgien a du whisky ou du cognac de la meilleure qualité, et il en a souvent, ses patients lui en offrent, Bo et lui s’assoient à la grande table du salon du docteur, face à face pour boire et ils ne se disent rien, comme si chacun d’entre eux était occupé à manier, là, autour de la table, des instruments extrêmement précis avec lesquels ils tireraient des fils, l’un des fils vivants, des nerfs, des veines, des artères, des intestins et l’autre des fils conducteurs de courants invisibles.
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