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sur 1531 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Karoo, Karoo, Karooo … Sauuul Karoo !
Tout un personnage ce Saul Karoo. La première partie du roman est à mourir de rire, surtout la soirée où Karoo tente, en vain, de se saouler. Il n'y parvient plus. Ce n'est pas facile de «subir» ces soirées, maintenant qu'il est condamné à être sobre. Son grand mérite reste néanmoins de tenter coûte que coûte de faire comme si. Karoo s'aperçoit alors qu'il était le boute-en-train de service, que l'on se moquait de lui, à ses dépends : qu'il servait de caution pour les bonnes consciences. Il représentait l'excès que l'on ne doit pas franchir. Lors d'une soirée, ça amuse, ça donne un sujet de discussion, ça rassure ; pendant ce temps, on évite nos problèmes à soi. Ceux-ci sont tellement dérisoires par rapport à ceux que l'on prête, que l'on donne, que dis-je, que l'on attribue de force à Karoo.

C'est drôle parce que Karoo s'en moque et s'assoupit dans le mensonge qui se construit autour de sa personne. Il est malmené, mais en même temps il prend plaisir à assurer la marchandise. Il surjoue son personnage, il en fait des tonnes quitte à exagérer un peu, il n'a pas de demi-mesure possible pour répondre aux exigences du public qui en redemande encore et encore.

Il devient donc possible, les lecteurs de Tesich en conviendront, de chercher à assurer le rôle de Karoo lors d'une soirée un peu crispée. Ce n'est pas toujours facile, mais parfois ça coule de soi. Il suffit, après avoir enfilé quelques verres rapides, de lancer quelques blagues mal convenues, de parler un peu fort, de manger de la main gauche, et vlà, le reste se fait tout seul. En fait, ce sont les invités eux-mêmes qui prennent la relève. Ils vous appellent monsieur, disent «vous», même si vous êtes plus jeune qu'eux. Ils prennent soin de ce personnage apparu de nulle part et qui leur font dire que «eux» sont normaux, au moins.
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Un drôle de personnage que Saul Karoo (un peu flippant pour être honnête). le genre d'homme à double-tranchant : séparé de sa femme mais pas divorcé (ils se font d'ailleurs régulièrement des dîners de presque-divorcés), « réécrivain » de films (qu'il s'occupe de décortiquer pour remonter afin de correspondre aux standards attendus), père d'un fils adoptif, Billy.
Lors de l'un de ses visionnages, Karoo tombe sous le charme d'une jeune actrice au second rôle, Leila Millar (qui n'est pas franchement la prochaine Grace Kelly). Et à partir de là, tout dérape…
Malgré ses presque 600 pages, on ne sent pas le temps passer avec Steve Tesich. Une belle écriture, une histoire complètement tiré par les cheveux avec un anti-héros névrosé, menteur invétéré, mais attachant. On sent qu'on va droit à la catastrophe, que Karoo va se prendre les pieds dans le tapis, ce qui rend cet homme plus humain et moins détestable. Un joli exercice de style à découvrir !
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Au début, j'ai été très agacée par ce personnage égoïste, pour tout dire absolument odieux, lâche, absurde. C'était le cynisme vanté par les critiques qui m'avait incitée à lire ce livre, mais le cynisme du narrateur personnage était vain, facile, un cynisme de riche new-yorkais baignant dans le milieu du show-biz, un peu répugnant, or j'ai pour ma part la ferme conviction que cynisme et misanthropie ne valent que lorsqu'ils sont au fond motivés par un profond humanisme et une véritable exigence envers l'humanité et ses capacités.
Et pourtant, malgré mes réticences, je dévorais le roman, chapitre après chapitre. Quelque chose dans le style peut-être? La satire et l'autodérision? Pas seulement. J'aimais aussi l'idée d'un personnage scénariste qui ne cesse de brouiller les frontières entre réalité et fiction, qui considère la vie comme une comédie où nous jouons un rôle imaginé pour satisfaire l'idée que les autres se font de nous, comme s'il n'y avait pas de personnes, mais seulement des personnages et comme s'il était décidément impossible de connaître les autres et de se connaître soi-même. le "héros" scénarise sa propre vie et celle de ses proches, mais il perd le contrôle de ses personnages. Son histoire lui échappe et sa chute vertigineuse prend par moments des accents pascaliens sur la vanité moderne: la vie échappe non seulement à tout contrôle mais aussi à toute certitude, à toute compréhension, puisque tout est fiction et que la fiction dévore la vie.
Pour conclure, pendant que je lisais le roman, je n'étais pas convaincue, mais après coup, en y réfléchissant, en écrivant ma petite critique personnelle avant d'en publier une sur Babelio, j'ai pris conscience que ce livre est bien plus profond qu'on pourrait le croire au premier abord. D'ailleurs, ce n'est sans doute pas un hasard si une histoire décrivant un monde apparemment aussi superficiel regorge de références littéraires de haut vol: Homère, Flaubert, la tragédie grecque et l'hubris,...
J'ai particulièrement aimé le passage (p. 477) où le narrateur reconstitue le schéma de toute vie, qui commence comme une épopée dont on est le héros et qui inexorablement, de déceptions en désillusions, sombre dans la banalité, l'échec, la vanité. C'est déprimant et existentiel, mais tellement juste et raconté avec une certaine distance ironique qui atténue la violence du propos. Et puis, si comme disait Kafka, "on ne devrait lire que des livres qui vous mordent et qui vous piquent. Un livre doit être la hache qui brise en nous la mer gelée", alors, il faut lire Karoo.
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Excellente première partie pleine d'humour mais aussi de désespoir ... à lire
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Avec sa belle couverture dorée et son titre aux sonorités étranges, on peut dire que Karoo m'a d'emblée attirée comme un énorme oeuf de Pâques Kinder après trois semaines de diète. Ce roman posthume (l'auteur est mort avant d'avoir apprécié le succès de son livre), avait tout pour me séduire : les élucubrations tragico-comiques d'un vieux looser aux prises avec la diabolique et sans pitié industrie du cinéma hollywoodien. Saul Karoo est un ghost writer, un homme de l'ombre dont le métier consiste à réécrire des scénarios pour les rendre bankable, en épurant au maximum l'intrigue, parsemant le texte des grosses ficelles qui assureront le succès immédiat du film, quitte à corrompre et dénaturer le propos de départ. Quinquagénaire ventripotent, alcoolique - son drame est de ne plus jamais être ivre -, fumeur impénitent, ours mal léché à la libido débridée, incapable d'affection pour son fils adopté, entretenant une relation plus qu'ambiguë avec son ex-femme (entre haine et mépris mais pourtant incapable de prononcer leur divorce), c'est l'incarnation du looser pathétique, conscient de la vacuité de sa vie, de son milieu social qu'il dénigre et de son absence de talent, sa cachant derrière celui des autres. En constante représentation, c'est aussi un homme touchant bien qu'antipathique, un harpagon attachant. Sorte de compagnons de route, nous suivons la repentance de notre antihéros qui tombe amoureux d'une jeune actrice sans talent, accessoirement la mère biologique de son fils adoptif. Comme illuminé par l'idée de se repentir et de "renaître", Saul Karoo va tenter de rattraper des années de mauvaise conduite avec son fils en ressoudant leur lien tout en réunissant le fils et la mère séparés à la naissance.
Drôle, sarcastique, satirique, décortiquant avec dérision la société américaine, le milieu requin du cinéma, vilipendant sans vergogne les pseudos intellectuels new yorkais, Steve Tesich - lui-même scénariste pour Hollywood - nous livre un roman acerbe, qui après avoir démarré sur les chapeaux de roue, continue son rythme de croisière, n'épargnant personne sans jamais tomber dans le règlement de compte de mauvais goût. Son écriture est sèche, sans équivoque, elle épingle là où il faut avec humour et finesse, ce qui m'a fait passer un agréable moment de lecture sans langue de bois.
Petit bémol cependant pour le dernier tiers du roman qui selon moi s'essouffle un peu, le personnage de Saul Karoo devenant un brin bavard ce qui m'a légèrement lassée et perdue quant au propos du livre et de sa conclusion. Mais rassurez-vous, cela n'enlève rien au talent de Steve Tesich et mon impression générale reste bien plus que positive, le premier tiers du livre valant à lui seul le détour.
Lien : http://livreetcompagnie.over..
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Saul Karoo , fume trop, boit trop, souffre de nombreux maux. C'est un égoïste, un décalé de la réalité, Attendrissant, et incapable d'avoir des sentiments. Il boit pour essayer de s'enivrer, un verre ne suffit plus, il lui en faut plusieurs, car l'alcool ne lui fait plus d'effet. Je ne suis pas saoul, je bois un peu trop, mais rien de grave. Corrigeur de script pour film pour grand écran c'est un as en la matière. Un jour en visionnant un film qu'il doit corriger, une révélation va lui faire prendre conscience de sa défaite vis-à-vis de tous ses démons. Dès lors, il mettra tout en oeuvre pour se racheter .C'est à la fois la descente aux enfers avec humour ,tristesse , et en même temps beaucoup de pitié.
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Brillant. Carrément brillant.
Et je ne parle pas que de la couverture de l'édition de poche.
Je parle du roman, et de son auteur Steve Tesich, paix à son âme pour notre plus grand malheur à nous, pauvres lecteurs désormais privés de son talent.
Mais en aucun cas je ne parle du personnage principal, Saul Karoo, quinquagénaire plutôt peu reluisant. Ou alors il faudrait dire de lui qu'il brille par son cynisme, sa lâcheté et son égoïsme. Un type pathétique et détestable. Ce qui n'empêche pas la « profession » de lui reconnaître depuis longtemps un talent certain : Karoo est doué pour réécrire des scenarii de films de façon à les calibrer « purs produits hollywoodiens grand public », quitte à massacrer des chefs-d'oeuvre en puissance.
Ce stéréotype de l'antihéros, qui se rêve en Ulysse au coeur d'une odyssée futuriste, est un raté. Son mariage, son fils adoptif, son assurance-maladie, sa santé, tout lui échappe. Même l'ivresse se refuse à lui, malgré les litres d'alcool qu'il ingurgite à la moindre occasion. Limite cinglé mais terriblement lucide sur lui-même, Karoo est incapable de sincérité. Menteur patenté, à force de manipulations et d'hypocrisie, il perd de vue la réalité, aveuglé par son déni. Jusqu'au jour où un éclat de rire sur une cassette-vidéo le bouleverse et laisse espérer que sa carapace de superficialité va bientôt exploser.
Et là, de détestable, Karoo en devient presque touchant. En tout cas pour le lecteur. Parce que sa future ex-femme continue à le trouver ridicule et méprisable.
Sur la voie de la rédemption (croit-il), Karoo tente alors de sauver les meubles de sa vie, de recoller quelques morceaux, de remplir le vide intersidéral de son existence. Il se voit en artisan d'un happy end en guimauve technicolor, grâce auquel le vrai Saul Karoo serait enfin révélé au monde.
Critique féroce d'une certaine industrie cinématographique cheap et sentimentale made in US, mais aussi d'une société superficielle, égoïste et décadente, ce roman pourrait être désespérant. Mais l'humour – noir, cynique – est présent à toutes les pages. Entre Ulysse et Oedipe, le roman de Karoo est une tragédie moderne dramatiquement drôle, avec des moments de réelle tension, voire d'émotion.
Un grand roman américain, magistralement écrit et traduit.
Virtuose.
Saisissant.
Brillant.

De la littérature, quoi.
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Karoo est un sacré pavé. On sourit (jaune souvent), on grince des dents, on savoure l'écriture de Steve Tesich, qui est précise et assez addictive, mais je vous avoue aussi que l'on avance très doucement. C'est parfois un peu mou, et l'envie de sauter quelques pages se présente de temps en temps, tellement le récit est foisonné et semble s'éterniser. Mais à part ça, j'ai beaucoup de difficulté à en dire du mal car je trouve que l'auteur a beaucoup de talent. Il arrive à faire réfléchir (sur la société américaine, les rapports humains et le monde du cinéma) autant que sourire. Certains me dirons que beaucoup d'auteurs y arrivent aussi très bien sans pour autant y mettre des longueurs, oui mais bon j'ai aimé l'univers du désenchantement et du désastre proposé par Karoo. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il s'approche de la perfection (comme j'ai pu le lire dans certains articles) mais je reconnais qu'il m'a déroutée, tantôt fantaisiste, tantôt critique, tantôt absurde, tantôt tragique (tragi-comique !)................................;
Lien : http://stephanieplaisirdelir..
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Le personnage principal du roman Karoo a beau être égoïste, cynique, antipathique, je ne suis pas arrivée à le détester. Ai-je cru à la rédemption de ce scénariste sans morale, qui tente de noyer ses échecs personnels et professionnels dans l'alcool mais qui n'arrive même plus à être ivre ? Saul Karoo décide en effet, à la suite de la projection d'un chef d'oeuvre, de partir à la recherche d'une jeune actrice qu'il reconnait et qui a des liens avec son histoire personnelle et va, pour la première fois de sa vie, prendre soin d ‘elle. Sauf qu'on n'est pas dans un film hollywoodien avec les gentils qui triomphent et les méchants qui sont punis. Karoo est même aux antipodes : une critique féroce de la société du spectacle. J'ai ri jaune devant la lâcheté de cet homme pathétique mais j'ai ri. Je me suis un peu perdue dans ma lecture dans certains passages que j'ai jugés plus ardus, j'ai été prise au jeu des scénarios de l'auteur. Jusqu'à la dernière page, j'ai ressenti ce mélange d'agacement, de perplexité et d'attachement pour Saul Karoo.
Lien : http://www.chocoladdict.fr/2..
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Est-ce l'histoire d'un homme ou est-ce l'histoire d'un monde ? En tant qu'homme, Karoo s'est toujours senti isolé. Il tire son sentiment d'existence de cette solitude monadique qui l'empêche de communiquer avec les autres. Voilà sa force, mais voilà aussi son désespoir, voilà pourquoi Karoo oscille sans cesse entre badinerie et ironie.


Alors qu'il aimait se payer des cuites régulières, Karoo réalise un jour que plus aucune substance ne parvient à le tirer hors de lui-même. Les verres de whisky peuvent bien s'aligner, sa lucidité reste d'une précision alarmante. Toutefois, Karoo continue à simuler l'ivresse pour satisfaire les attentes de ses congénères. Alcoolique il fut, alcoolique il restera, tel est le blason qu'il doit continuer à porter car le monde est un grand plateau de cinéma sur lequel chacun doit jouer son rôle du début jusqu'à la fin de son entrée sur scène. La métaphore est bien connue mais Steve Tesich la décline sur des modes variés qui offrent une souplesse de visualisation rare. Trois niveaux s'imbriquent : sur la scène de la vie, Karoo retape des scénarios de cinéma pour produire des soupes commerciales, jusqu'au jour où il tombe sur une vidéo dans laquelle il reconnaît Leila, la mère de son fils adoptif Billy. Non seulement Karoo décide de rechercher cette actrice pour l'inclure dans sa vie au premier niveau, mais aussi afin de transformer cette mauvaise scène du père fuyant qui renie son fils en scène du père aimant. Karoo concrétise ses ambitions mais avance toujours avec hésitation, conscient de la précarité de ses réalisations. Il suffirait d'une grimace pour que l'ensemble du jeu s'effondre. Concentré sur le rôle qu'il doit jouer, il se ferme sur la plupart des informations qui proviennent de l'extérieur. Karoo ne parvient jamais à sortir de lui-même et plus il voudrait aimer, moins il y parvient, parce que les objets de son élection sont trop inconsistants et s'évanouissent plus vite qu'une figure de cinéma.


Karoo est à la fois médiocre et brillant. Brillant, parce que l'évidence eschatologique lui brûle les yeux, l'infinie complexité de l'univers recréant le chaos cosmique dans sa façon d'appréhender les événements anodins d'une existence. Rongé par cette affirmation que « la vie […] n'est pas dépourvue de sens » mais qu' « elle est au contraire tellement pleine de sens que ce sens doit constamment être annihilé au nom de la cohésion et de la compréhension », Karoo essaie d'épurer le flux d'informations qui lui parvient, et c'est à cet endroit qu'il se montre médiocre. Pourquoi s'évertue-t-il à épurer en ne gardant que les aspects négatifs qui lui parviennent ? Pourquoi ne parvient-il pas à se transcender d'une manière qui soit satisfaisante pour lui, et donc pour les autres ? Karoo est peut-être un homme imbu de lui-même, à moins que ses congénères ne soient véritablement pas à la hauteur de ses conceptions. Son histoire se hissera bientôt jusqu'à la conversion religieuse, non pas tant que Karoo se sente soudainement proche de certains dogmes établis précis, mais parce qu'il rejoint l'illumination archétypique des prophètes, en tant que celle-ci exprime, dans son sens profond, la vie secrète et inconsciente de chacun, mais dont seuls quelques élus peuvent être conscients.


Karoo ne pouvait pas aimer seulement une femme, ou un fils, ou un ami ni même une profession ou un idéal de vie. Karoo trop médiocre pour le monde, ou le monde trop médiocre pour Karoo ? L'itinéraire reproduit les frasques d'un Zarathoustra nietzschéen : il faut aller très loin pour revenir apaisé. C'est peut-être, aussi, le sens primordial du message christique.

Lien : http://colimasson.over-blog...
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