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3,75

sur 2994 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Coucou les livrophages, et une fois n'est pas coutume, les cinéphiles ! c'est le premier livre (il en a écrit beaucoup) de Sylvain Tesson que je lis ! La littérature « blanche » n'est plus ce que je lis aujourd'hui, mais il arrive que l'on tombe sur une pépite, et ce livre en est une ! le récit d'un homme, sans limite, grand voyageur sillonnant les routes du monde entier, qui va être victime de ses excès ! trop d'alcool et c'est l'accident, il chute d'une terrasse !
Sur son lit d'hôpital, il se fait la promesse de parcourir la France à pied, si il réussit à remarcher un jour ! et c'est le récit de ce périple, sur les chemins noirs des cartes IGN que le lecteur ! ce n'est pas larmoyant, il ne s'appesantit pas sur son sort, il est lucide, il est philosophe, il a une volonté de fer… C'est un énorme bol d'air frais au milieu de ces endroits oubliés, de cette France loin du « numérique », de ces lieux qui se méritent, quasi inaccessibles, loin des touristes et de la vie trépidante de la ville ! un énorme coup de coeur, une bouffée d'air frais, une image de cette ruralité oubliée… Je ne conseille jamais de livre, mais celui-ci (découvert par le biais du 7eme art) mérite qu'on s'y attarde !
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Je ne suis pas très objective quand j'écris sur Sylvain Tesson, je le reconnais. Mais comment ne pas être en admiration devant une telle écriture ? Avec les chemins noirs, le très abîmé Sylvain Tesson va se guérir par la marche. Ainsi, la mise en mouvement du corps amènera la paix de l'esprit. Lui qui ne vit qu'a travers l'acharnement et la persévérance trouvera dans ce périple post accident, l'unique moyen de retrouver ses pleines capacités : « l'effort, depuis le Mercantour, faisait son office de rabot, ponçait mes échardes intérieures».
Nous est contée ici son épopée à travers la France rurale ; après avoir couru le monde durant vingt ans. Ici il prend le temps, il parcourt la France oubliée lentement, n'empruntant que les chemins de traverse. Ceux dont on ne parle pas, ceux qu'on ne regarde pas, trop occupés à « se déplacer vite et beaucoup. »
À travers sa plume unique, ingénieuse, poétique et si propre à lui, tous nos sens sont exacerbés. On prend plaisir à l'accompagner sur des terres trop belles pour être tues, et ses descriptions puissantes nous plongent dans une campagne enivrante.
Dans son récit, il n'oublie rien ni personne : ses compères, la végétation, la terre, la mer, l'eau et l'air, les bêtes. Toutes sortes de plantes et d'oiseaux. Les bois et les forêts, les pierres et les rivières. Sa famille aussi …
Les plaisantins et les reclus, les montagnes et leurs vallées qu'il personnifie tout en poésie. Il n'oublie pas non plus que que tout ça, c'est la France et qu'elle recèle de « nombreux trésors de proximité ».
On le suit dans les interstices, près du ressac qui éloigne son trac, et on assiste à la métamorphose de la France.
On se délecte une fois encore de ses connaissances, d'une érudition implacable sur ce qui nous entoure. Comment regarder ailleurs après ça ?
Le pouvoir de la marche, acte anodin mais si salvateur quand il est fait en conscience.
« Sur les chemins noirs » nous prouve que la réalité, vue et retranscrite par Tesson, vaut toutes les fictions du monde.
Il est enfin question de force et de résilience, et du pouvoir de visualisation, et qui mieux que lui pour l'incarner?

Le film sort mercredi prochain !
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J'ai découvert ce livre à l'occasion du film à venir, et quelle bonne surprise, quel bonheur de découvrir ce côté-ci de Sylvain Tesson. Comme à son habitude, il construit un récit passionnant qu'il ponctue de réflexions éclairantes sur le monde dans lequel on vit, ou peut-être est-ce Tesson qui fait écho au nôtre... À lire pour se dépayser et réfléchir en même temps.
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La carte et le territoire.... (comme un clin d'oeil)

La ligne noire de la carte IGN symbole du chemin et du sentier ;
La ligne noire faite d'oscillations comme celle d'un électrocardiogramme synonyme de murs en pierre sèche ou en ruine, de soutènement ou en maçonnerie ;
Une référence au titre du roman de René Frégni ;
Les chemins parcourus par l'auteur avec ces crises, ou ses crises, surnommées "mon mal noir"...

Dès l'exergue, le ton est donné :
« Je vais sortir. Il faut oublier aujourd'hui les vieux chagrins, car l'air est frais et les montagnes sont élevées. Les forêts sont tranquilles comme le cimetière. Cela va m'ôter la fièvre et je ne serai plus malheureux dorénavant ». Thomas de Quincey 

Avec la lucidité qui est sienne, Sylvain Tesson nous emmène sur ces chemins noirs à moins que ça ne soit sur ses chemins noirs.
Une lettre qui fait toute la différence ou toute la convergence.
Un accident qui le transformera, mais sur lequel sa vision est, comme à son habitude, d'une terrible réalité : "J'étais tombé du rebord de la nuit, m'étais écrasé sur la Terre. Il avait suffi de huit mètres pour me briser les côtes, les vertèbres, le crâne. J'étais tombé sur un tas d'os."
Une rémission comme un défi : « Si je m'en sors, je traverse la France à pied. »

Et nous voilà partis avec lui, à traverser la France à pieds de Tende, dans les Alpes-Maritimes au point le plus septentrional du Cotentin : le sémaphore de la Hague..
Un peu à l'instar de ce qu'il fera dans ce livre plus récent intitulé sobrement Blanc.

En parallèle de ces chemins noirs les voies ferrées et leurs TGV, les voies routières et leurs autoroutes, les voies câblées et leur haut-débit, les voies des ondes et leurs fréquences 4G ou 5G. Là où tout va vite, trop vite...

Sur ces chemins noirs, nous voilà au coeur du pays perdu, dans les zones grises de « l'hyper-ruralité », dans les zones blanches de « l'hyper-connectivite », à moins que... Car ceux que l'on appelle ces néo ruraux qui cherchent le déconnexion et pour qui la première question avant de savoir si il y a une école est de savoir si il y a du haut débit.

Cet itinéraire est aussi pour lui source de reconstruction, de réflexion comme dans cette maison d'hôtes d'Azay-sur-Indre, où l'auteur tombe "sur une histoire du bagne de Cayenne. J'y découvris l'antienne des condamnés : « Le passé m'a trahi, le présent me tourmente, l'avenir m'épouvante. » La marche dans les bois balayait ces effrois. J'aurais pu recomposer la ritournelle : « Le passé m'oblige, le présent me guérit, je me fous de l'avenir. »".

Et pour nous lecteurs, c'est un bien plus qu'un simple voyage, c'est partager bien plus qu'un chemin, c'est se glisser dans ce que Tesson appelle ces interstices, c'est partager un rêve :
" Un rêve m'obsédait. J'imaginais la naissance d'un mouvement baptisé confrérie des chemins noirs. Non contents de tracer un réseau de traverse, les chemins noirs pouvaient aussi définir les cheminements mentaux que nous emprunterions pour nous soustraire à l'époque. Dessinés sur la carte et serpentant au sol ils se prolongeraient ainsi en nous-mêmes, composeraient une cartographie mentale de l'esquive. Il ne s'agirait pas de mépriser le monde, ni de manifester l'outrecuidance de le changer. Non ! Il suffirait de ne rien avoir de commun avec lui. L'évitement me paraissait le mariage de la force avec l'élégance. Orchestrer le repli me semblait une urgence. Les règles de cette dissimulation existentielle se réduisaient à de menus impératifs : ne pas tressaillir aux soubresauts de l'actualité, réserver ses colères, choisir ses levées d'armes, ses goûts, ses écoeurements, demeurer entre les murs de livres, les haies forestières, les tables d'amis, se souvenir des morts chéris, s'entourer des siens, prêter secours aux êtres dont on avait connu le visage et pas uniquement étudié l'existence statistique. En somme, se détourner. Mieux encore ! disparaître. « Dissimule ta vie », disait Épicure dans l'une de ses maximes (en l'occurrence c'était peu réussi car on se souvenait de lui deux millénaires après sa mort). Il avait donné là une devise pour les chemins noirs."

En voilà une idée merveilleuse, cette idée de confrérie.... Tel le Petit Poucet il dépose des cailloux au fil de ses livres que chacun est libre ou non de suivre, ou de ramasser tels des souvenirs de promenades littéraires.

Pour conclure cette critique de ce livre qui a tout de l'ADN de Tesson, le mieux est de lui laisser la parole, la page ou l'écran :
" J'avais rêvé cette balade de France dans un lit, je m'étais levé pour l'accomplir, elle s'achevait. C'était un voyage né d'une chute. Certains chemins avaient été suffisamment labyrinthiques et solitaires pour mon goût. Y flottait encore l'odeur des aubépines et des écorces fraîches. J'avais assorti ma balade de quelques trébuchements. Mon arrivée consistait à m'approcher des parapets pour y solder mes comptes et oublier les infortunes. Désormais, s'ouvraient de nouveaux chemins noirs : ceux que je devais inventer, hors du 25 000e. Des fuites, des replis, des pas de côté, de longues absences lardées de silence et nourries de visions. Une stratégie de la rétractation."
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Toujours aussi pertinent, drôle, réparateur, courageux et que j aime cette franchise des mots sans concession ! Je ne me lasse pas de cette plume et de ce regard juste, asceré et assumé ! Je suis fan inconditionnel ! S'il fallait donner une caractéristique à cette belle plume je la qualifierai d'écriture qui vient des tripes et des tréfonds de l'âme !
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Ses lecteurs savent que Tesson est tombé d'un toit, alors qu'il était totalement saoul, et qu'il aurait pu y rester.
Comment envisager sa longue rééducation quand on est accro aux grands espaces et à l'aventure ?
Tesson imagine une traversée de la France à pieds, du sud-est au nord-ouest, via les chemins noirs. Soit les quelques parcelles épargnées par l'urbanisation dévorante.

Attention, la lecture de ce récit donne envie de tout plaquer pour partir avec un sac et un bâton de marche !
Tesson raconte sa reconstruction et sa victoire sur les défaillances de son corps. Il livre aussi, évidemment, les pensées qui lui viennent sur la société, la nature, ce qu'il reste du monde paysan ou la mort, parsemées de références littéraires.
Comme toujours c'est brillant, plein d'ironie (y compris envers lui-même) et tellement bien écrit ! Jusqu'à présent, mon livre préféré de cet auteur.
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Je remarque que l'on voit de plus en plus souvent Sylvain Tesson à la télévision. Je me suis dit qu'il serait peut-être temps que je m'intéresse à cet auteur qui me paraissait bien sympathique mais également mystérieux avec son visage en biais. En lisant ce livre, j'ai appris que cette « gueule cassée » était due à une chute de dix mètres d'un toit, chute certainement provoquée par l'alcool. Ce livre est le résultat d'une promesse : dans son lit d'hôpital, l'écrivain s'est juré d'aller parcourir les chemins de France dès qu'il le pourrait. Et c'est donc avec la colonne vertébrale cloutée, comme il le dit lui-même, qu'il va se lancer dans cette aventure, un peu comme Stevenson avec sa mule. Quel plaisir de lire ce récit, de vivre ces pérégrinations ! On voyage dans son canapé.

Nul doute que je lirai Dans les forêts de Sibérie et Blanc. Mais vous me connaissez, ne faisant jamais rien comme tout le monde, j'ai préféré commencer par celui-ci.
Lien : https://promenadesculturelle..
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Comment peut-on imaginer vivre une telle aventure sur ces chemins noirs, qui sont pourtant si proches de chez nous ?

Sylvain Tesson nous démontre par son voyage que la France regorge de remèdes : un voyage sur les chemins noirs est une véritable thérapie pour quiconque est en overdose d'ultra-urbanisme.


Il s'agit de ma première lecture de l'auteur, et même si les autres me feront peut-être davantage voyager, "Sur les chemins noirs" sera sans doute le seul qui aura impacté à ce point mon regard sur les contrées françaises.
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Sur les chemins noirs nous emmène en voyage à travers la France. Non pas celles que nous connaissons bien, non pas celles qui pourrait être le lieu d'aventures habituelles chez Sylvain Tesson comme certains territoires d'outre-mer pourraient l'être, mais la France qui ne parle pas, la France qu'on ne voit pas à la TV, la France qui ne brûle pas de voiture, la France qui ne se plaint pas, la France de l'hyper-ruralité, comme la nomme un rapport commandé par Manuel Valls, sur lequel Sylvain Tesson est tombé...
Il tombe sur cette étude pendant qu'il est cloué sur un lit d'hopital après une chute qui aurait pu lui causer la mort et qui lui a causé une paralysie partielle, une vingtaine de fractures, et dont les médecins pensaient qu'elle allait empêcher Tesson de remarcher, ou bien pas normalement. C'est à ce moment qu'il se promet que lorsqu'il sortira de cette chambre d'hôpital, il traversera la France, du Mercantour au Cotentin, sur ces chemins noirs qui n'apparaissent pas sur les cartes.
S'ensuit donc le récit de cette traversée en marchant, avec les rencontres qu'il fait, ses amis qui l'accompagnent sur une portion du trajet (Goisque, Gras, sa soeur) et aussi son rétablissement, soignant le feu par le feu.
Bien évidemment, le récit est accompagné de réflexions sur la France, son état, sa société, sa ruralité, sa campagne, l'avenir, et de quelques tacles à la classe dirigeante (ou plutôt impuissante) qui rendent l'écriture de Sylvain Tesson si singulière et si appréciable, qui va au-delà du simple fait de nous faire voyager par ses récits d'aventures.
C'était donc ma première lecture d'un livre de cet auteur, et ça restera celle qui m'a convaincu qu'il allait devenir un de mes auteurs fétiche...
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(novembre 2016)

Le livre commence par "L'année avait été rude. Longtemps, les dieux avaient favorisé la famille, nous avaient baigné de leur douceur. Peut-être se penchent-ils sur certains d'entre nous, comme les fées des contes ? Puis leur sourire se crispe en grimace."

Je surnomme ce jeune et brillant écrivain "le souffleur de verre", tant ses mots s'entrechoquent, risquant à chaque instant de rompre par l'effet d'une telle densité. Mais c'est l'acrobate qui est tombé de haut le 20 août 2014. La Vie et la Camarde ont tenu conseil, et le tir de semonces l'a emporté sur le coup de grâce. Sylvain Tesson, le corps abîmé et la plume intacte, a alors entrepris sa marche "sur les chemins noirs".

Si le pas est moins vif comme l'esprit est moins léger, la gravité fait son office : les pieds du voyageur foulent la Terre-mère dans ses tréfonds ruraux jusqu'aux confins d'un monde ancien. Des bizarreries du changement à la nostalgie d'un monde fantasmé, il n'y a qu'un pas que Sylvain Tesson franchit, tel un Sisyphe de l'absurdité du monde actuel. le rejet est poli. L'homme est bien élevé. Et la géographie devient la Muse de celui qui se fait poète de l'éternité.

Je remercie la chute d'avoir déstabilisé un temps la pudeur. Cette fenêtre qui s'entre-ouvre sur quelques chemins intérieurs est bouleversante.
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Sur les chemins noirs (Sylvain Tesson)

Dans quelles circonstances Sylvain Tesson est-il tombé du toit ?

Il y était monté pour faire des réparations.
Il y était monté pour se rendre intéressant.

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