Star : Birth Of A Dragon

Ce tome ne nécessite pas de connaissance préalable du personnage principal. Il regroupe les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2020, écrits par Kelly Thompson, dessinés par Javier Pina, avec l'aide de Filipe Andrade pour les 5 épisodes, et Jay Leisten pour l'épisode 4. La mise ne couleurs a été réalisée par Jesus Aburtov, avec l'aide de Chris O'Halloran pour l'épisode 4. Les couvertures ont été réalisées par Carmen Carnero, avec une mise en couleurs d'Alburtov. Il contient également les couvertures alternatives réalisées par Jeehyung Lee, J. Scott Campbell, Pepe Larraz, Kirbi Fagan, Rahzzah, Jen Bartel, Phil Noto, Kris Anka.

Il y a quelques temps de cela, Captain Marvel (Carol Danvers) se précipite sur Star (Ripley Ryan), en lui passant le bras au travers de sa poitrine. Elle y laisse un trou béant. Ryan se réveille de ce cauchemar, avec la main entre les deux seins, à l'endroit où la superhéroïne a passé son bras. Elle comprend que ce traumatisme ne risque pas de s'effacer rapidement de sa mémoire, et elle décide d'aller boire un verre au bar sans nom, qui accueille principalement les supercriminels. Accoudée au comptoir, elle se rend compte que sa vie n'est pas terrible : recherchée par la police pour s'être évadée de la prison The Raft, terrorisée à l'idée de se retrouver face à Captain Marvel, sans emploi, bien à court de liquidités, avec la Pierre de Réalité implantée dans son corps, mais elle ne sait pas s'en servir. Elle en est là de ses ruminations quand Titania (Mary MacPherran) se plante devant elle en lui reprochant d'occuper son tabouret. Elle refuse de se laisser intimider et Titania lui décoche un coup de poing en pleine ventre. Ryan fait l'effort conscient de faire appel au pouvoir de la Pierre de Réalité et provoque son opposante pour qu'elle la frappe à nouveau. La force du coup l'envoie valdinguer à travers le mur, et elle se retrouve dans la rue, avec son costume de Star. Alors qu'elle s'apprête à riposter, elle se fait assommer par derrière.

Star reprend connaissance attachée à un bloc de béton dans un entrepôt désaffecté. En face d'elle se trouve Loki, le roi des Géants du Gel, qui est en train de réaliser une opération d'ablation sur elle : peine perdue, il ne parvient pas à séparer la Pierre de Réalité du corps de Ripley Ryan. Il commence à lui expliquer la nature de ladite pierre, le fait qu'elle ne sait pas s'en servir, et que chaque fois qu'elle l'utilise, elle crée une petite déchirure dans le continuum espace-temps, ce qui la rend repérable par des individus animés de mauvaises intentions, en particulier ceux qui veulent s'approprier la Pierre de Réalité pour leur intérêt personnel. Elle le remercie pour ces précieuses informations dont elle avait bien besoin, et elle utilise la pierre pour incinérer Loki. Elle part sans se retourner, sans voir Loki se reformer indemne dans un autre coin de l'entrepôt. À leur insu, ils avaient été observés par une jeune femme avec sa capuche sur la tête. Elle rentre dans l'appartement qu'elle partage avec trois autres individus, et les informe qu'ils ont un problème : elle a localisé une pierre de l'Infini. Ripley Ryan a décidé de recourir à l'aide d'une professionnelle : elle se rend dans les bureaux d'Alias Investigations, et elle expose son problème à Jessica Jones. Cette dernière a vite fait de la situer et elle commence à lui envoyer son poing dans la figure. Ryan fait appel au pouvoir de la pierre de l'Infini et lui ordonne de l'aider. Jessica n'a d'autre choix que d'obtempérer.

C'est un dilemme récurrent pour les éditeurs DC Comics et Marvel Comics : ils ont besoin de sang frais, de personnages neufs. Mais ils sont pris dans un cercle vicieux : les lecteurs n'ont pas d'appétence pour les personnages qu'ils ne connaissent pas, donc ils ne vont pas acheter une minisérie (encore moins une série) consacrée à un personnage pour lequel ils n'ont aucun attachement. le lecteur est donc fort surpris de voir paraître la présente minisérie, consacrée à un supercriminelle apparue pour la première fois dans le numéro 1 de la série Captain Marvel (Vol. 10) en 2019, créée par Kelly Thompson et Carmen Carnero. En 1 an elle est apparue uniquement dans 9 épisodes de la série Captain Marvel, et nulle part ailleurs. C'est donc une décision très singulière d'attribuer une minisérie à un personnage aussi inconnu. D'un autre côté, la présente histoire est écrite par la scénariste qui l'a cocréée. En outre, la couverture annonce une superhéroïne bon teint, presque virginale dans ce costume blanc, s'élançant fièrement en avant pour lutter contre le mal. En fait, il s'agit d'une supercriminelle, échappée de prison, luttant surtout pour sauver sa peau, sans beaucoup d'altruisme, voire aucun. Dans ces conditions, le lecteur trouve vite que le costume de la dame est trop décalé et la dessert car elle n'a rien d'impressionnant dans ces hautes cuissardes rouges, sa petite cape, et son costume vierge. S'il ne connaît pas du tout le personnage, ce n'est pas trop grave car en introduction il y a 3 petits paragraphes qui résument son histoire, avec la liste des pierres d'Infini juste en dessous. En outre, la scénariste fait en sorte de rappeler les principaux faits au cours de la minisérie.

La dynamique de la série est vite installée : visiblement ses actions de criminelle ont laissé des traces, et Star ne sait pas utiliser la pierre enchâssée dans son corps. Cette pierre au pouvoir incommensurable attire de nombreuses convoitises dont celle du Black Order. Ripley Ryan doit donc essayer de sauver sa peau contre ses ennemis, tout en essayant de se positionner vis-à-vis de Captain Marvel et Scarlet Witch qui sont prêtes à l'aider. La question est de savoir si elle va virer sa cuti ou non. Au vu des conditions de production des comics, le lecteur apprécie que le responsable éditorial ait réussi à accaparer un dessinateur présent tout du long des 5 épisodes, même s'il bénéficie de l'aide d'un second artiste. Il apprécie également qu'il en aille de même pour le coloriste. Jesus Aburtov est un metteur en couleurs avec une solide expérience professionnelle et le lecteur peut le voir à chaque page. La mise en couleurs n'écrase pas les traits encrés, les laissant clairement apparaître, sans les noyer dans des effets spéciaux. Ces derniers sont utilisés avec pertinence lors des affrontements physiques pour maximiser le spectacle des superpouvoirs : la silhouette scintillante de Ryan quand elle fait apparaître son costume de Star, le rayonnement émanant de la pierre quand Loki essaye de l'extirper de Ryan, l'incandescence du corps de Loki quand elle l'incinère, l'aura rose-rouge quand Scarlet Witch apparaît, la brillance des armes magiques, etc. La mise en couleurs se met un peu en retrait lors des scènes civiles ou celles de dialogues entre personnages costumés. Pour autant, le lecteur voit bien comment le coloriste ajoute de petites touches d'une nuance différente pour apporter du relief, de la texture, des sources lumineuses, et des ombres. le lecteur se rend vite compte que le dessinateur n'est pas très intéressé par la représentation des décors dans les arrière-plans et que Aburtov les nourrit avec des camaïeux bien étudiés pour évoquer la couleur des éléments représentés en ouverture de scène, pour donner la sensation de poussière, pour réussir à ajouter une profondeur de champ même quand rien n'est représenté en fond de case.

En entamant cette minisérie inattendue, le lecteur espère trouver une narration visuelle de type superhéros. Il constate vite que le dessinateur préfère représenter les personnages plutôt que les décors, et qu'il connaît déjà bien les trucs et astuces pour s'économiser en la matière. D'une manière tout à fait naturelle, sans donner l'impression de se forcer, il ne met pas en avant les rondeurs des différents personnages féminins, les mettant en scène sans les sexualiser à outrance, comme il aurait fait pour des personnages masculins. Cela donne plus de crédibilité au récit qui essaye donc d'installer un nouveau personnage. Les prises de vue ne sont pas très originales et le découpage des pages est très basique, mais la narration reste fluide. le jeu des acteurs manque régulièrement de naturel, avec des postures assez empruntées, en particulier lors des combats. En revanche, les visages bénéficient d'une gamme d'expressions assez étendue, et souvent très parlantes. Malheureusement, ce n'est pas suffisant pour compenser le langage corporel assez raide.

Venu pour ça, le lecteur ne demande qu'à éprouver de l'empathie pour Ripley Ryan. La scénariste montre bien comment le personnage oscille entre la tentation de se ranger d'une vie en marge de la loi, et ce n'est pas facile, et la tentation de continuer à refuser de suivre la voie toute tracée proposée par Carol Danvers et Wanda Maximoff. Il y a là une volonté d'indépendance crédible, rendu encore plus touchante par le fait que Captain Marvel a passé son poing au travers du corps de Ripley. Mais bien vite, l'intrigue prend le dessus, reléguant les hésitations de Star à de simples atermoiements mécaniques superficiels, dans lesquels le lecteur ne parvient plus à s'impliquer. Il finit par comprendre que Ripley Ryan va saisir progressivement comment puiser dans l'énergie de la pierre de l'Infini, et que de ce fait il n'y a pas grand enjeu. Il remarque d'ailleurs qu'elle n'a aucune vie personnelle ou civile, aucun proche ou amie pour interagir et gagner en épaisseur. Il finit par s'en désintéresser, et les ennemis sont tout aussi superficiels qu'elle.

Après avoir découvert Star dans la série Captain Marvel, on la suit désormais, liée à l'Infinity Stone de la réalité.
Star est à la base une civile qui sort traumatisée de divers évènements liés aux super-héros et vilains. L'histoire montre donc comment elle digère ces traumas et comment elle tente de s'en sortir alors que tout foire dans sa vie. La qualité d'écriture de l'autrice permet de bien s'attacher au personnage qui essaye tant bien que mal, qui gère ses problèmes comme elle le peut. Mais ici ce n'est pas l'histoire d'une super-héroïne mais d'une personne lambda qui se débat avec tout ça et combien cela peut-être difficile.

L'histoire est de son point de vue, ce qui explique l'écriture des autres personnages, qui peuvent sembler pour certains plus froids qu'à l'accoutumée.

Kelly Thompson aime utiliser plusieurs personnages dont en majorité ceux qu'elle a déjà écrit et c'est encore le cas ici. on retrouve donc des têtes connues de l'autrice mais pas que.

Au dessin je trouve que les artistes s'en sortent particulièrement bien. C'est un style assez classe, la colorisation aidant. Et puis le style des séquences de flash-back tranche, montrant un côté plus brut des souvenirs et de leur impact.

Bref c'est une bonne voire très bonne histoire de Kelly Thompson, sur un personnage qui en a malheureusement beaucoup à dire encore.
Oui suivre les pérégrinations d'une personne perdue et liée à une pierre de l'infini, devant gérer tout le bazar que ça peut créer, ça m'intéresse.