Qui se souvient encore des révolutionnaires péruviens au nom exotique de "Túpac Amaru" du début des années 1980 ?
Le "Movimiento Revolucionario Túpac Amaru" MRTA, créé en 1983, fût ainsi nommé pour honorer José Gabriel Túpac Amaru II (1738-1781), un chef métis qui s'était rebellé contre les colons espagnols en Amérique latine.
Comme en Uruguay, les Tupamaros voulaient renverser le pouvoir et instaurer un régime de type marxiste, inspiré par et analogue au Cuba de
Fidel Castro.
Parmi les fondateurs, il y a eu Néstor Cerpa Cartolini, Miguel Rincón et Victor Polay Campos. C'est surtout ce dernier qui en a été considéré comme le chef. Un des grands-pères de ce Victor, né en avril 1951, était un pauvre paysan exilé chinois. Après des études à l'université de Paris et de Madrid, il rentra au Pérou et commença sa lutte contre la corruption du gouvernement en place.
Coïncidence remarquable : lors de ses études à Paris, il a partagé sa chambre d'étudiant avec l'homme qui sera pendant 10 ans président du Pérou, Alan García Pérez, entre autres au moment de la grande aventure du tunnel.
Arrêté début 1989, il fût condamné à perpétuité et transfere à la lugubre prison de Canto Grande à Lima. C'est l'évasion spectaculaire de toute une équipe de Tupamaros de cette forteresse, en juillet 1990, qui forme la trame du présent ouvrage.
Depuis juin 1992, Victor Polay Campos se retrouve de nouveau en taule, dans une prison de "sécurité maximale" et a subi une intervention chirurgicale d'urgence à cause d'un caillot ďe sang dans le cerveau tout récemment (le 4 mars dernier) dans l'hôpital de la base navale militaire du Pérou.
L'auteur,
Guillermo Thorndike (1940-2009), passe avec
Mario Vargas Llosa comme un des écrivains les plus réputés de son pays. Comme journaliste, Il a lancé plusieurs journaux et le tout premier dans l'histoire péruvienne en langue quechua, un idiome qui remonte à l'empire inca et qui est depuis 1975 une langue officielle au Pérou.
C'est grâce à sa bonne réputation que les Tupamaros lui ont filé une pile de cassettes avec les témoignages de celles et ceux qui avaient réussi à s'évader de la citadelle de Canto Grande et aussi des participants à la construction de ce colossal tunnel de 300 mètres.
Le récit de cette évasion sensationnelle du 9 juillet 1990, que je ne vais pas résumer ici, est donc basé sur des sources tout à fait authentiques. Sachez cependant que 48 guérilleros et guérilleras, parmi lesquels leur "líder" Victor Polay, sont arrivés à prendre le large.
Guillermo Thorndike, en humaniste affecté par les malheurs de sa patrie, nous fait aussi part de l'extrême pauvreté d'une large part de la population. le sort exacerbé de nombreux de ses compatriotes infortunés par la corruption et la violence des forces spéciales à l'appui du gouvernement en place à Lima.
Outre les Tupamaros, ce gouvernement était confronté au Sentier lumineux ("Sendero Luminoso") d'obédience communiste, fondé par le professeur de philosophie Abimael Guzmán en 1970. Guzmán est actuellement toujours emprisonné à la base navale de Callao, malgré ses 86 ans.
Le tunnel de l'auteur péruvien est donc fort différent de l'oeuvre du résistant français,
André Lacaze (1918-1986), qui porte le même titre "
Le tunnel", sauf en ce qui concerne la qualité littéraire.
Guillermo Thorndike s'exprime dans une langue qui quoique extrêmement précise ne manque pas de poésie.