Suite à la lecture de « Comment tout peut s'effondrer : Petit manuel de collapsologie à l'usage des générations présentes » j'ai enfin fait le deuil de l'avenir que j'avais imaginé depuis bien longtemps pour moi-même et mes proches (cf. ma critique). Il me fallait donc un sacré remontant…
Deux options : la cuite ou le culte. Etant plus proche actuellement de la modération que de la consommation d'expédients en tout genre, je m'oriente vers quelques recommandations Babéliennes pour trouver la perle rare qui allait me donner un coup de fouet… au sens figuré !
Clac et déclic ! Un livre avec ses critiques clivantes, attire mon attention, et miracle, il m'attend dans ma PAL. J'ai choisi mon flacon d'ivresse. Ca sera «
La conjuration des imbéciles » de
John Kennedy Toole avec un personnage hors-norme, rabelaisien et ubuesque comme je les adore.
Ignatius Reilly, personnage égocentrique et hypocondriaque obsédé par son pylore, est une sorte de Diogène reclus chez sa mère. Avec sa grande culture médiévale il réinvente un monde, en réaction à celui dans lequel il vit et qu'il déteste par-dessus tout en dénonçant la « décadence » des moeurs américaines. Ses interactions saugrenues ou maladroites avec ses congénères quand il daigne aller travailler ou sortir de la maison de sa mère se concluent à chaque fois par des catastrophes et des réactions en chaîne.
Est-ce que ça en fait un roman plein d'humour irrésistible comme annoncé ? Eh bien non ! Je n'ai pas ri de tous ces imbroglios en cascade. Mes zygomatiques sont restés bien sages et ont clairement fait place à une irritation de plus en plus présente face au comportement d'Ignatius. Ce n'est pas un personnage naïf qui prête à sourire mais bien un personnage réactionnaire, égocentrique qui n'agit que pour son propre intérêt.
Est-ce que cela en fait une satire sociale et politique de l'Amérique des années 60 ? Eh bien non ! Ignatius n'est pas ce Don Quichotte américain annoncé, naïf et drôle qui critique et analyse la société dans laquelle il vit. Ignatius reste pour moi un réactionnaire, misogyne, raciste, homophobe dont la lâcheté devant les conséquences de ses actes est son seul moteur de survie jusqu'à la toute dernière page.
Je suis un lecteur obstiné et malgré tout j'ai failli abandonner au bout de 150 pages. La découverte du personnage, le style particulier de l'écriture, le cadre narratif ont laissé place à de l'agacement contre le personnage et finalement contre l'auteur.
John Kennedy Toole ne m'a jamais convaincu dans ce qu'il voulait raconter ou dénoncer si ce n'est sa propre aigreur ou amertume de ne pouvoir s'inscrire dans ce monde en pleine mutation et aux libertés nouvelles des années 60. Ignatius (auteur ?) est un inadapté de son époque.
Je suis peut-être passé au travers de ce roman mais je me joins à
la conjuration des imbéciles, Ignatius est loin d'être un génie visionnaire.
Je tiens toutefois à souligner le travail du traducteur qui n'a pas du être chose simple.
En conclusion, je n'ai pas eu ma cuite, mais j'ai bien eu la gueule de bois en fermant ce livre.