La première femme noire africaine à devenir proviseure dans un lycée parisien raconte le racisme au quotidien.
«Je suis suédoise. »
Tout sourire, je laisse fuser cette réponse ironique chaque fois que l'on me questionne sur mes origines.
C'est-à-dire constamment !
Aujourd'hui proviseure d'un lycée parisien, première femme noire africaine à un tel poste dans la capitale, j'échappe rarement à cet interrogatoire absurde. D'où viens-je ? Suis-je française, et si oui depuis quand ? Comme des millions de mes concitoyens « issus de la diversité », je continue à affronter le regard porté sur nous par la société française. Et tout se passe comme si j'étais condamnée à faire mes preuves encore et encore. Autant dire à montrer éternellement patte blanche…
Pourtant, hors de question de me poser en victime face aux doutes et aux situations humiliantes. Si je témoigne aujourd'hui, c'est notamment – mais pas seulement – pour les jeunes Noirs de France, en pensant particulièrement aux filles, pour qui le boulet du patriarcat s'ajoute à celui du racisme insidieux. Dans l'espoir qu'ils opposent, comme je l'ai toujours fait, l'humour et l'ambition à toutes les tentatives d'assignation. Pour que la France accepte enfin la diversité des origines, des genres et des orientations sexuelles comme une somme de talents dont l'épanouissement bénéficie à tous.
Commenter  J’apprécie         10
Brillante démonstration du regard souvent porté sur les gens de couleur par le reste du monde depuis l'Antiquité et qui leur laisse à penser qu'ils seraient inférieurs. Ces personnes sont parfois obligées de se justifier ou d'expliquer qu'elles ont pu faire des études et réussir dans leur métier, de plus en Afrique le poids de la société patriarcale perdure et complique pour les femmes l'accès à l'éducation et le choix du métier.
Commenter  J’apprécie         40
27 La « taxe à la frontière » quotidienne
Depuis le début de ce récit, je livre mes expériences et mes sentiments d'ordre personnel, en tentant de les enrichir d'observations nées de trente années passées dans l'enseignement secondaire.
Et j'en arrive ici à une triple conclusion : les discriminations et vexations quotidiennes sont une réalité ; les femmnes noires en souffrent davantage que d'autres catégories de la population française ; et cela commence malheureusement dès leur scolarité.
Mais, pensera-t-on, que valent mon analyse et mon témoignage ? Reflètent-ils des phénomènes établis par des données scientifiques ou des investigations méthodiques ? Qu'en disent les sociologues et autres observateurs de notre société ?
Aujourd'hui Mahi Traoré, proviseure au lycée polyvalent Lucas-de-Nehou à Paris, est notre invitée pour nous parler de son livre "Je suis noire mais je ne me plains pas, j'aurais pu être une femme" (Robert Laffont, août 2021).