Où l'on retrouve avec un plaisir grandissant Klemet et Nina, qui oeuvrent dans la police des rennes, confrontés à la mort d'un éleveur durant la transhumance. Comme dans le premier opus, l'intrigue s'appuie sur le conflit opposant le peuple nomade sami, qui vit de l'élevage, et les habitants d'une petit bourgade pour qui cette activité constitue un obstacle au développement économique – ici, la prospection pétrolière. Passé et présent s'entrecroisent pour nous offrir une histoire complexe, qui tire ses racines plusieurs décennies plus tôt, dans différents milieux tels que ceux de l'élevage et de la plongée ntamment. C'est là le talent de l'auteur qui parvient toujours à tisser plusieurs « fils » entre eux qui créent une trame à plusieurs entrées.
On fait davantage connaissance avec Klemet et Nina, chacun hanté par un passé lourd à porter. La difficulté du premier à assumer l'histoire familiale, à concilier ses origines et son travail de policier génère de l'empathie chez le lecteur. Plus tout à fait sami, pas complètement inscrit dans le XXIème siècle non plus, sa double appartenance le met à mal et ne contribue pas à pacifier ses relations avec le reste du monde. Quant à Nina, le meurtre d'Erik va lui permettre de mettre à jour un secret de famille bien gardé par sa mère, une laestadienne pratiquante (pas très sympathique au demeurant !). le personnage de l'oncle, Nils-ante, accompagné de Melle Chang, est particulièrement truculent – c'est vers lui que se tourne Nango quand il doit mobiliser souvenirs et traditions. Enfin, il y a toujours la présence d'un personnage un peu solaire qui incarne l'âme lapone (dans le premier tome, il y avait Aslak) – la jeune veuve Anneli tient ce rôle, pleine de douceur, de poésie et de magie, elle représente le coeur de la vidda.
On apprend beaucoup dans les romans d'
Olivier Truc, je l'ai déjà dit dans une précédente critique, sur la culture lapone et sa difficulté à perpétuer les traditions et un mode vie non-sédentaire. Comme dans d'autres coins du monde, ce qu'on nomme le progrès, l'évolution, la modernité balaient tout surtout quand les territoires recèlent des richesses. L'auteur ne présente pas pour autant un quotidien idyllique ou une vision romanesque de ce mode vie mais fait plutôt la description d'une activité exigeante, dont le rythme est basé sur celui des saisons et des rennes eux-mêmes. Pas de confort, pas de profit, juste la volonté de vivre comme ont vécu les générations précédentes.
J'ai un peu perdu le fil vers le milieu du roman mais j'ai néanmoins passé un excellent moment et recommande cette lecture aux amoureux des contrées sauvages, à ceux qui ont besoin de dépaysement et à tous les amateurs de polars.