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EAN : 9791031805160
292 pages
Le Cavalier Bleu (26/05/2022)
4.43/5   7 notes
Résumé :
Après des siècles d’un silence quasi-entier, plusieurs œuvres ouvertement lesbiennes sont publiées au tout début du XXe siècle. Depuis lors, des années folles à l’après-guerre, de l’histoire militante des années 1970 à la naissance de l’édition spécialisée, jusqu’à l’effervescence du début du XXIe siècle, ce sont des centaines de textes qui disent et théorisent leur existence. Parcourant tous les genres, ils mettent en scène le lesbianisme, nomment et nourrissent un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Écrire à l'encre violette, sous-titré « Littératures lesbiennes en France de 1900 à nos jours », une appellation qui annonce la couleur (ah, ah) mais laisse pour le moins dubitative.
L'impossibilité évidente de couvrir plus d'un siècle de littérature, tout genre confondu, en moins de 300 pages (250 même si on retranche l'abondante – ô joie – bibliographie) et surtout la question qui se pose inévitablement : la littérature lesbienne, c'est quoi ? Dès l'introduction on est prévenu : à cette interrogation, tout le monde a une réponse, jamais la même. La littérature lesbienne serait écrite uniquement par des femmes homosexuelles ? Non, des grands noms comme – exemple – Marguerite Yourcenar contredisent le propos. Il faudrait alors que le sujet de l'oeuvre soit lesbien ? Encore raté puisque dans cette catégorie on trouve Balzac, Baudelaire, Louÿs, Gautier etc., sans compter les romans de gare mettant en scène des amours saphiques écrits par des hommes à destination, le plus souvent, de leurs pairs.
Pas de réponse précise et c'est tant mieux car comme énoncé dans la conclusion : « Il serait impossible, et surtout dangereux, d'enfermer la littérature lesbienne dans une définition figée. Poser des critères stables, pour la circonscrire avec rigueur et sans faille, reviendrait à en détruire toutes les richesses avant même de les avoir valorisées. La production littéraire lesbienne compte autant de facettes que d'oeuvres : autant d'auteurices, autant de littératures lesbiennes. »

Une littérature riche et plurielle donc mais encore trop souvent invisibilisée, même si entre Renée Vivien et Wendy Delorme, des avancées notables ont évidemment été faites. Mais que de temps il a fallu et que de chemin encore à parcourir. Sans parler des conditions des précurseuses dont souvent seules la blanchité et l'appartenance à une certaine bourgeoisie autorisait la notoriété (Natalie Clifford Barney) quand aujourd'hui, même si leurs voix sont encore trop souvent étouffées, les intersectionnelles défoncent les plafonds de verre (Nina Bouraoui), bien aidées en cela par leurs soeurs aînées dont les combats n'ont eu de cesse de défier l'hétérosexualité, non comme orientation amoureuse mais comme oppressif système patriarcal, la société dans son ensemble reposant sur la disparité des sexes – les hétéroflics pour paraphraser Anne-Marie Grélois lors de la création du FHAR en 71. Parmi ces guérillères, que des pointures : Monique Wittig (ah, Monique !) Christine Delphy, Geneviève Pastre, Michèle Causse, Jocelyne François... Il en manque mais chacune sans le moindre doute a levé un poing rageur, bougé les lignes et refusé ce bas-bleuisme dans lequel on tentait de l'enfermer.

Qu'on soit familière ou non du sujet, Écrire à l'encre violette c'est la promesse d'aborder une littérature aussi diversifiée que passionnante, fourmillant de références (ma pal ne devrait plus tarder à s'effondrer) et qui nous rappelle, si besoin en était, que militance et culture avancent souvent main dans la main, l'une se nourrissant de l'autre car comme l'a si bien déclaré Nicole Brossard : « Une lesbienne qui ne réinvente pas le monde est une lesbienne en voie de disparition. »

Écrire à l'encre violette, un documentaire historique, une étude éminemment politique, un essai en forme de lavender menace !
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Voilà un essai bien singulier dans notre production littéraire actuelle : le premier en France à synthétiser et à rendre accessible à tous l'Histoire de plus d'un siècle de littérature(s) lesbienne(s)... et il était temps !

En effet, malgré une publication foisonnante au fil des ans, la Littérature Lesbienne a toujours été marginalisée, exclue des institutions littéraires. D'abord réservée (lue et écrite) à l'élite, cette littérature s'est démocratisée et a commencé à se diffuser, se partager plus librement et plus facilement à partir des années 90.

Construit en 7 chapitres (de 1900 à nos jours) "Écrire à l'encre violette" propose un état des lieux de la littérature lesbienne en prenant en compte le contexte historique et social de l'époque concernée.
Cette littérature est diffusée dans tous les genres existants (poesie,littérature blanche, policiers, littérature de l'imaginaire,...) et aborde, entre autres, des thématiques telles que le statut de la femme, le patriarcat et l'hétérosexualité, des réflexions autour de la maternité et du mariage, le besoin de témoigner sur la vie lesbienne (enfance, découverte de la sexualité, pacs, homoparentalité, lesbophonie ordinaire,..).

Je ne vous cache pas que la lecture a parfois été difficile (à destination d'un public motivé), mais cela vaut vraiment le coup de s'accrocher, de faire des pauses pour digérer l'information, de s'en empreigner, puis de continuer la lecture. C'est un travail d'une grande richesse et d'une grande rigueur proposé par des militant.es et des chercheur.euses.

C'est enfin une mine de références. Votre PAL risque d'en prendre un sacré coup, croyez-moi ! Vous trouverez une bibliographie en fin d'ouvrage avec l'ensemble des livres cités... et il y en a beaucoup !
Parfois, ce sont des autrices injustement méconnues ou oubliées. Nous espérons que cette nouvelle mise en lumière de la Littérature Lesbienne donnera envie à des éditeurs de se pencher sur ces textes malheureusement plus édités pour réparer cette injustice.
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Ouvrage reçu dans le cadre de Masse Critique

Je remercie tout d'abord Babelio et les éditions le cavalier bleu, qui m'ont permis de lire cet essai repéré il y a longtemps - bien qu'un peu effrayant. de par sa taille, d'abord, mais aussi parce qu'il est écrit par des chercheuses (et un chercheur), ce qui lui donne un ton bien universitaire qui peut sembler peu accessible de prime abord.

Si certains passages ont été ardus, cela ne m'a pas découragée et j'ai continué patiemment ma lecture, car même dans ces moments-là j'arrivais toujours à en retirer quelque chose.

Découpé en chapitres qui forment une chronologie (des années 1900 à aujourd'hui), cet ouvrage fourmille de références et il y en a pour tous les goûts : roman policier, fiction, poésie, SF, fantasy... J'ai beaucoup appris sur certaines périodes, car il est vrai que je lis plutôt des livres LGBTQIA+ récents. le travail de mémoire mené est très important et celui-ci doit continuer.

On peut cependant regretter un biais qui paraît ici inévitable : les auteurices, précisant dès le départ qu'iels ne pouvaient pas être exhaustifs.ves, ont fait des choix éditoriaux qui se sentent. Iels sont toustes blanc(he)s et CSP+ de par leur statut universitaire. La parole racisée manque cruellement, et je vous laisse lire l'avis de Sarah Ghelam : https://genreed.hypotheses.org/2793, d'autant plus qu'elle a été sollicitée dans le cadre de cet essai sans être nommée par la suite... le mot intersectionnalité a un sens réel, ici souvent dévoyé comme pour se justifier.

Si je salue ce travail d'importance, car il manque de grands pans de notre histoire collective, il ne faut pas oublier que beaucoup de personnes "non universitaires" sont également spécialistes dans ce domaine et s'y connaissent énormément. On gagnerait à 1) leur donner la parole dans ce type d'ouvrages 2) les citer lorsque leur travail est repris.
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critiques presse (1)
LeMonde
27 juin 2022
L'ouvrage collectif « Ecrire à l'encre violette » valorise la diversité des littératures lesbiennes.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Dois-je préciser qu'il m'est difficile, voire impossible, de prêter un seul de ces ouvrages, qu'il soit bon ou mauvais, que j'ai ou pas l'intention de le relire un jour ? J'ai trop peur de ne pas les voir revenir près de moi, et de perdre un morceau de la colonne vertébrale qui me fait tenir debout.

– Suzette Robichon –
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Le motif pictural des "deux amies", déjà présent dans un tableau de Courbet en 1866, continue après 1900 de fasciner Louis Anquetin, Constantin Guys, Toulouse-Lautrec, Félix Vallottion, Gauguin, Manuel Robbe, le jeune Picasso, Egon Schiele, parmi de nombreux autres artistes.
Pourquoi cette fascination soudaine ? Elle va de pair avec l'obsession de la deuxième moitié du siècle pour les femmes - obsession emprunte de misogynie - pour l'érotisme, mais aussi pour tout ce qui est considéré comme antinaturel. Chez Baudelaire déjà, c'est la stérilité des amours lesbiennes, par opposition à la maternité, qui forme l'un des creusets de leur nature poétique. Cet intérêt croissant vient aussi du fait que la sexualité lesbienne est par définition interdite à la présence masculine, et que l'idée de la représenter quand même participe pleinement de l'"esthétique voyeuriste" de l'époque (Albert, 2005). Les lesbiennes sont, par ailleurs, étroitement liées pour les artistes masculins de la fin du siècle au motif du dédoublement et du miroir, lui-même au cœur des obsessions encouragées par le développement des théories sur l'inconscient. On en fait une "femme doublement femme", et sa représentation se rapporte à l'intérêt de l'époque pour le narcissisme.
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Globalement, elles sont avant tout des figures sexuelles, dont l'érotisme est volontiers calqué sur les couples hétérosexuels. Caractérisées par le manque de la présence masculine, leurs ébats imitent, soit de manière innocente et ingénue, soit sous une forme coupable, lorsque l'une d'elle recourt à un procédé de travestissement pour activement "singe[r] le viril" (Albert, 2005). Elles finissent enfin, la plupart du temps, soit par revenir vers les hommes, de manière volontaire ou forcée, soit par disparaître de la fiction par l'exil ou la mort afin de permettre, on l'a déjà souligné, un retour à la norme.
[1900-1915, émergence d'une littérature lesbienne]
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"Ainsi, si les romanciers tuent les lesbiennes pour les punir de leur dépravation, ou pour leur signifier leur "impossibilité", les romancières, elles, suicident leurs personnages, finalement tout aussi impossibles, tant et si bien que "la seule bonne lesbienne est une lesbienne morte", au moins jusqu'aux Guérrillères.
[NQF - Christine Delphy]
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"L'existence lesbienne y est présente de façon diffuse, comme une réalité parfaitement ordinaire, pas du tout étonnante, voire comme une chose que toute femme rationnelle, à la condition qu'elle ne soit pas déformée par sa culture, peut très bien préférer."
[Meryl Altman à propos du Deuxième Sexe de S. de Beauvoir]
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