Les aventures de Tom Sawyer

Il en est ainsi souvent des coutumes traditionnelles. Moins elles se justifient , plus il est difficile de s'en débarrasser.

Tom se dit qu’après tout l’existence n’était pas si mauvaise. Il avait découvert à son insu l’une des grandes lois qui font agir les hommes, à savoir qu’il suffit de leur faire croire qu’une chose est difficile à obtenir pour allumer leur convoitise. Si Tom avait été un philosophe aussi grand et aussi profond que l’auteur de ce livre, il aurait compris une fois pour toutes que travailler c’est faire tout ce qui nous est imposé, et s’amuser exactement l’inverse.

« Je te tiens ! J’aurais bien dû penser à ce placard. Que faisais-tu là-dedans ?
– Rien.
– Rien ? Regarde-moi tes mains, regarde-moi ta bouche. Que signifie tout ce barbouillage ?
– Je ne sais pas, ma tante.
– Eh bien, moi je sais. C’est de la confiture. Je t’ai répété sur tous les tons que si tu ne laissais pas ces confitures tranquilles, tu recevrais une belle correction. Donne-moi cette badine. »
La badine tournoya dans l’air. L’instant était critique.
« Oh ! mon Dieu ! Attention derrière toi, ma tante ! »
La vieille dame fit brusquement demi-tour en serrant ses jupes contre elle pour parer à tout danger. Le gaillard, en profitant, décampa, escalada la clôture en planches du jardin et disparut par le chemin. Dès qu’elle fut revenue de sa surprise, tante Polly éclata de rire.

Le travail consiste en une tâche que l'on est obligé d'accomplir, alors que le plaisir consiste en une occupation à laquelle on n'est pas obligé de se livrer.

Quand on a le ventre creux, on fait quelquefois ce qu'on ne ferait pas si l'on avait mangé à sa faim.

Il y a dans la vie de tout gamin normalement constitué un moment où il éprouve le désir irrésistible de partir à la recherche d’un trésor caché. Tom ne fit pas exception à la règle.

Il en est souvent ainsi des coutumes traditionnelles. Moins elles se justifient, plus ils est difficile de s’en débarrasser.

-Quand est-ce que ça commence, la bande? Quand est-ce qu'on devient bandit?
-Eh bien tout de suite; je vais convoquer les copains: l'initiation pourra peut-être avoir lieu cette nuit.
-L'ini...la quoi?
-L'initiation.
-Qu'est-ce que c'est que ça?
-Eh bien, on jure de se soutenir les uns les autres, de ne jamais révéler les secrets de la bande même au risque d'être coupé en petits morceaux, de tuer tous ceux qui touche à quelqu'un de la bande et leur famille avec.
-Épatant, mon vieux!
-Je comprends. Et tout ça doit se faire à minuit, dans l'endroit le plus retiré, le plus solitaire qu'on puisse trouver; genre maison hantée, quoi!

Il avait découvert à son insu l’une des grandes lois qui font agir les hommes, à savoir qu’il suffit de leur faire croire qu’une chose est difficile à obtenir pour allumer leur convoitise. Si Tom avait été un philosophe aussi grand et aussi profond que l’auteur de ce livre, il aurait compris une fois pour toutes que travailler c’est faire tout ce qui nous est imposé, et s’amuser exactement l’inverse.

«  ... J’ai enlevé des milliers de verrues de mes mains comme ça, Huck. Je joue tout le temps avec des grenouilles, alors j’ai toujours une sacrée quantité de verrues. Quelquefois, je les enlève avec un haricot. »
« Ouais, le haricot, c’est bien. J’ai essayé. »
« C’est vrai ? Et tu fais comment ? »
« Le haricot, tu le divises en deux, et tu coupes la verrue pour que ça saigne un peu, et alors tu mets du sang sur une moitié du haricot et puis tu creuses un trou pour l’enterrer vers minuit à une croisée de chemins quand il y a pas de lune, et ensuite tu brûles le reste du haricot. Tu comprends, la moitié qui a du sang dessus, elle va tirer et tirer, parce qu’elle veut faire venir l’autre moitié, et comme ça, le sang il se met à tirer la verrue, et la verrue elle est bientôt partie. »
« Oui, c’est bien ça, Huck - c’est ça; mais, quand tu l’enterres, si tu dis «  Descends, haricot; va-t’en verrue; viens plus m’enquiquiner ! », c’est encore mieux. » (p. 65, Éditions Tristram, 2008)