La première fois que j'avais vu la couverture de l'album, j'étais tombée des nues.
Quoi ?
Francis Blake en train de boire un verre avec Olrik, le Grand Méchant qui revient toujours ?
Olrik, ce Joe Dalton (en version sérieuse) qui rate toujours son coup, lui qui aimerait devenir Calife à la place du Calife et qui pourrait clore chacune de ses aventures par un "Caramba, encore raté !"… Et Blake qui boit avec…
Edgard P. Jacobs n'était déjà plus, mais d'autres ont pu reprendre sa série mythique et que l'on aime ou pas, certains albums de l'après ne sont pas si mal que ça, en voici la preuve.
Je marmonnais dans ma barbe que "La Marque Jaune" était truffée de lourdeur, de dialogues énormes et de Méchant qui explique tout, nous tartinant sa vie sur des phylactères et des phylactères ? Ici, ce n'est pas le cas.
Jean van Hamme n'est pas un scénariste à la petite semaine, il est le père de Largo Winch, de XIII, de Lady S, de Thorgal, pour ne citer que les plus connus et son fils, Thomas, est plaisant à regarder (il présente des émissions sur la chaîne Belge de RTL).
Donc, mon cher compatriote, au lieu de s'enliser dans des parlotes inutiles, il fait avancer son récit à un bon rythme et évite le côté fantastique ou science-fiction pour nous offrir un mélange entre de l'espionnage et une enquête qui nous fera voyager dans l'Angleterre pour finir par sauter par-dessus le mur d'Adrien, avant de plonger d'une falaise.
Pourquoi toutes ces péripéties ? Mais enfin, vous ne le saviez pas ? On accuse le capitaine
Francis Blake d'être un agent double ! Et il avoue sa forfaiture en s'enfuyant avec l'espion que le MI5 venait d'arrêter.
Cet Anglais, vraiment, oser tromper sa patrie, son pays, sa reine ! Un étranger, les Anglais auraient compris, mais pas un des leurs. Tout fou le camp, ma bonne dame.
Les personnages sont conformes aux originaux, même si je n'ai pas pris la peine de relire tous les véritables albums pour corroborer les faits…
La preuve en est que lorsqu'on annonce à Blake que son copain Mortimer est mort, noyé, après avoir sauté dans la mer, à plus de 60 mètres de hauteur, notre Blake insulte Olrik d'un "Misérable", montrant par là tout son flegme et son éducation anglaise, là où un autre aurait utilisé des "S'pèce de sale enculé de ta mère de fils de pute de ta race que je vais te niquer".
Blake et Mortimer sont un peu coincés sur les bords, ce sont des gentlemans et même lorsqu'on tire vers des bandits qui veulent notre peau, on vise à côté pour ne pas les tuer… Dans les éditions anciennes, j'aurais compris, la censure était là, mais dans les années 90, elle sévissait toujours et ailleurs que chez Dupuis ?
Oui, j'aurais aimé un
Francis Blake éructant des insultes aussi colorées que celles du capitaine Haddock, mais un bon anglais ne s'abaisse pas à si bas. Dommage, ça donnerait un peu plus de réalisme et d'épaisseur à nos deux hommes.
Une enquête qui ne manque pas de rythme, où l'on voyage beaucoup en Angleterre, Mortimer donnera même des coups de pédale, la présence d'une "cousine" de Blake qui n'a pas froid aux miches (pour une fois qu'on a un personnage féminin qui n'est pas une bonniche), des agents doubles, des traîtres, du suspense et un scénariste qui a joué aussi avec ses lecteurs, ajoutant du peps dans certaines scènes.
Pour se coucher moins bête au soir : Sur le dos de la première édition figurait le nom d'Edgard P. Jacob sans l'ajout "d'après" qui a été rajouté par la suite à la demande des héritiers qui craignaient une confusion des lecteurs qui auraient pu penser que c'était un inédit d'E.P. Jacobs.
Lien :
https://thecanniballecteur.w..