J’éprouve souvent un vif plaisir à considérer la facilité avec laquelle quantité de nos artistes se sont développés, surtout dans l’architecture. Depuis maintes années déjà, cet art n’a été exercé que par des sculpteurs ou des personnes qui en ignoraient jusqu’aux termes techniques et ne possédaient pas même les éléments de la perspective. Il est vrai qu’on ne saurait exceller dans l’architecture sans un jugement solide , sans la science du dessin ou la pratique habituelle de la peinture ou de la sculpture , soit en marbre , soit en bois. Ces dernières conditions expliquent la facilité qu’ont les sculpteurs et les peintres à devenir architectes. En effet, les sculpteurs, à cause des rapports des statues et de l’ornement avec les édifices ; les peintres, à cause de la nécessité de composer dans les tableaux des fonds d’édifices , sont forcés de connaître l’architecture et d’étudier les mesures qui y sont relatives.
Le célèbre Budée proclame Fra Giocondo son maître en architecture, et remercie Dieu de lui avoir fait rencontrer un si savant interprète de Vitruve. Fra Giocondo corrigea , en effet , dans le texte de cet auteur , une foule d’erreurs dont on ne s’était point aperçu. Cela lui fut facile du reste, car il était initié à tous les secrets des langues grecque et latine. Budée nous fournit lui-même ces renseignements, et il ajoute que c’est à Fra Giocondo que l’on doit la découverte delà plus grande partie des lettres de Pline, qui étaient enfouies dans une vieille bibliothèque de Paris. Ce fait est relaté dans une lettre écrite en latin, qui a été imprimée avec celles de Pline par Alde Manuce.
Dans sa jeunesse, Fra Giocondo profita de son séjour à Rome et dans d’autres villes d’Italie pour étudier les monuments de l’antiquité, et rassembler une multitude d’inscriptions antiques, dont il composa un livre magnifique qu’il offrit à Laurent de Médicis, qui lui porta constanment une affection particulière, ainsi qu’à son compatriote Domizio Calderino. Le Poliziano cite comme une autorité, dans ses Mugellane, ce manuscrit de Fra Giocondo, auquel il décerne le titre d’habile antiquaire.
Giorgio Vasari : Vies des
peintresOlivier BARROT, depuis l'ermitage Sainte Catherine, sur le Lac Majeur en Italie, présente "Les vies des
peintres),
reportagemoderne et concret sur la vie des grands
peintres écrit par un contemporain,
Giorgio VASARI, édité pour la première fois en 1750.