LES PRÉCIEUSES RIDICULES,
Comédie en un acte et en prose, jouée d’abord en province, et représentée pour la première fois à Paris, sur le théâtre du Petit-Bourbon, au mois de novembre 1659.
Lorsque Molière donna cette comédie, la fureur du bel esprit était plus que jamais à la mode. Voiture avait été le premier en France qui avait écrit avec cette galanterie ingénieuse dans laquelle il est si difficile d’éviter la fadeur et l’affectation. Ses ouvrages, où il se trouve quelques vraies beautés avec trop de faux brillants, étaient les seuls modèles ; et presque tous ceux qui se piquaient d’esprit n’imitaient que ses défauts. Les romans de Mlle Scudéri avaient achevé de gâter le goût : il régnait dans la plupart des conversations un mélange de galanterie guindée, de sentiments romanesques et d’expressions bizarres, qui composaient un jargon nouveau, inintelligible, et admiré. Les provinces, qui outrent toutes les modes, avaient encore renchéri sur ce ridicule : les femmes qui se piquaient de cette espèce de bel esprit s’appelaient précieuses. Ce nom, si décrié depuis par la pièce de Molière, était alors honorable ; et Molière même dit dans sa préface qu’il a beaucoup de respect pour les véritables précieuses, et qu’il n’a voulu jouer que les fausses.
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