Puisque
Eric Vuillard vient tout juste de recevoir le Prix Goncourt pour
L'ordre du jour… il était temps d'ouvrir son roman précédent, qu'il t'avait dédicacé à Rennes en mars dernier.
Il est peu de dire que ce jour-là, lors de cette nouvelle session de Rue des livres, tu étais tombée sous le charme de cet orateur né. Finement interrogé, il avait longuement expliqué son travail sur ce livre, ses recherches, lu quelques extraits. Et au moment de la dédicace, tu étais à la fois admirative et intimidée, et pleine aussi de cet entretien. Tu n'as donc pas ouvert
14 juillet tout de suite…
Mais quand est-il donc du roman ? (Maintenant que tu l'as lu) Avec
14 juillet, nous rentrons de plein fouet dans l'histoire avec un grand H, mais à hauteur d'homme de la rue. Nous sommes à la veille de la prise de la Bastille, les esprits s'échauffent, le peuple a faim, et la France marche à deux vitesses.
Eric Vuillard se fond dans la foule, suit le mouvement, d'abord pendant l'émeute provoquée par une proposition de Jean-Baptiste Réveillon de réduire les salaires, en avril 1789. Les ouvriers se révoltent, pillent la Folie Titon, la manufacture de papiers peints tenue par Jean-Baptiste Réveillon. Les gendarmes arrivent, les pilleurs sont massacrés ou maîtrisés. On raconte que ce fut la journée la plus meurtrière de la Révolution. Quelques mois plus tard, le
14 juillet, ces mêmes ouvriers, accompagnés du tout Paris, participent à la prise de la Bastille, à la porte du bourg de Paris, du côté de ce faubourg. Les badauds s'arment comme ils peuvent. Et
Eric Vuillard les ressuscite, méthodiquement, en leur donnant à chacun leur nom, leur profession, en décrivant leurs vêtements, leurs conditions physiques. On suit leurs pas, jusqu'à l'assaut final. Et c'est sans doute cet effort (louable) de mémoire qui t'a un peu désarçonnée, car
Eric Vuillard use énormément de répétition dans son roman, afin sans doute de ne rien oublier des détails qu'il voudrait livrer à la postérité. Et toi lectrice, tu t'es sentie partagée, entre le sentiment très fort d'avoir à faire à un grand texte (certains passages sont d'une beauté époustouflante) et un certain ennui devant ces répétitions. Tu garderas donc de cette lecture le souvenir de ton enthousiasme de Rennes face à l'éloquence contagieuse d'
Eric Vuillard, et le souvenir aussi de ces très beaux passages (lyriques) que pour le coup tu as lu deux fois.
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