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Citations de Dourvac`h (93)


« Heiraten »...
Tu t'es blottie contre moi : tout ton petit corps frémissait.
N'as-tu pas soupiré ?
Il faisait gris : une clarté vague venait de la cour intérieure.
Petite pièce exiguë, pleine de ta chaleur ; l'eau à pomper sur le palier...
Du vasistas est tombée cette belle lumière orangée.
Tu l'as remarquée la première quand elle t'a caressé l'épaule.
Un signe ?
Comme tes grands yeux riaient...

[Chapitre XVI : "FUIR... ", page 90 — éd. Stellamaris (Brest), 2015, pages 90]
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Il y eut cette blonde chute d'Anna...
Anna la fragile, jouant à l'écureuil sur la branche basse de notre hêtre... Anna trop petite à la poursuite de notre trio de sauvages...

Il y eut la fillette inconsciente au pied de l'arbre, ses yeux révulsés ; son visage de poupée morte.

Sentiment de faute partagée de nous trois... Pourtant, n'étais-je pas seul responsable ? Ne l'avais-je pas laissée dès le premier jour se joindre à notre troupe de grands chimpanzés ?

Il y eut l'arrivée du petit docteur chauve au pied de l'arbre ; celui qui criait au téléphone : ''Ne la bougez pas ! ''.
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Les grands peupliers bruissent à nouveau au-dessus de nous. Dans l'un de ces coins égarés du grand Parc de Prague, une couverture de laine dépliée sous elle, Julie est étendue en robe claire dans l'ombre bleue-verte des arbres.

Ces grands peupliers dans le vent qui vient ; leur long murmure de rivière.

Je dépose un baiser sur le front de l'infante endormie.

(Chapitre XIII : Chevaux de Zϋrau)
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N'ai plus qu'à l'écouter chanter...
—... et la vie continue !
Une brèche pour moi ?
— Bien sûr, tu es la vie.
— Chuuut, enfin !
—... la vie qui continue... absolument imperturbable.
— N'est-ce pas trop te demander...
— Eh bien ?
— ... d'étoffer un peu le livret avec moi ?
— Me laisserais-tu parler ?
— Méchant !
— Chère Julie... je n'ai pas ton talent.
— Hypocrite ou menteur ?
— Pas tant... Si je te dis : ton inventivité est réelle... et j'espère bien que tes patrons l'apprécient...
— Tu es sincère ?
— Cela m'arrive souvent... Sinon je me force à me taire.
— Je ne te crois pas...
— Un exemple : on pourrait étoffer ce joli propos tenu par notre dramaturge, en sortie de scène... et la belle vie continue... Le spectateur n'en aurait-t-il pas davantage pour son argent ?
— Tu vois ? Tu es méchant !
— Sincère. Ne m'as-tu pas demandé de l'être ?

Elle me pinça la joue. Elle était heureuse. Je remarquais combien le long trait de ses lèvres révélait pour nous l'infini du ciel.

(Chapitre IV : OPÉRETTE ET VOILETTES) page 19.
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Ma sœur se plaint des lapins qui ravagent le potager.
De plus en plus nombreux — et tous nos pièges restent vides.
En parler au voisin qui tient caché son fusil de chasse...
Son coup de feu tiré à l'aurore fera trembler nos maisons endormies.

["Heiraten (Noces)", éditions Stellamaris, 2015 — Chap. XIII : "CHEVAUX DE ZÜRAU", page 72]
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« A mentsch tracht, un Got lacht. » (*)
[...]
Tu as ri des aventures de ce Samsa (Gregor) qui a tant peur de rater son tram, de la réprimande de ses chefs, tout par la faute d'une Métamorphose qui lui complique encore sa triste vie...
[...]
Tu aimes le burlesque.
Au point que la mort prévisible de mon Gregor ne te fait pas peur...
Tu trouves cette mort logique et miséricordieuse.
Belle, presque...
Il y a un apaisement, les sensations s'amoindrissent, puis...
« Venez donc voir, il est crevé ; il est là, il est couché par terre ; il est crevé comme un rat. »
______________________________________________
(*) Proverbe yiddish : « Un humain s'efforce, et Dieu rit. »

[Chapitre X : "ECRIRE ? VIVRE ? AIMER ?", page 52, 53 et 55 — éd. Stellamaris, 2015]
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Danse et violon sont affaire de mains comme d'oreilles charmées.
D'yeux s'abandonnant au regard de l'autre.
Eternellement, pensions-nous...
Alors que là-haut se pourchassent et crient encore les oiseaux du soir.

*

Tout en bas, la ruelle s'effaçait sous nos gestes et nos arcs de cercle.
Sous ma main, la taille de Julie s'amollissait.
Notre chaleur. Ce rouge aux joues.
Et Julie souriait, souriait...

[Chapitre XV : "KLEZMER ET SHNORRER", page 84 - éd. Stellamaris, 2015]
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Je vois aussi très bien à travers elle. Fermant les yeux et retrouvant dans l'obscurité ses yeux noisette et ses fossettes... [...]

– Cholemshe maidel ! (*)
– Midelshe neshomeh iz a cholem... (**)
_______________________
(*) [yiddish] – Fille de rêve !
(**) [yidd.] – L'âme d'une fille est un rêve...

[Chapitre VII : "LES DIABLES DE LEVY", pages 30-31 - éd. Stellamaris, 2015]
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Relevant les yeux, soudain :
— Franz ?
— Oui.
— M'aimes-tu ? M'aimeras-tu toujours ?

Je suis là, silencieux, immobile : avec mon air digne. Mon chapeau, ma cravate, mon costume clair de ce jour-là. Silhouette inaccessible au cœur chantant de Julie. Elle me touche la main :

— Franz, il y a quelque chose...

Comme un chant de violon dans l'air.

[Chapitre XV : "KLEZMER ET SHNORRER", page 82 — éd. Stellamaris, 2015]
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L'oratoire est glacial ; un auvent et trois murets qui protègent de la bise (on l'entend qui fait chanter les rameaux, là-haut). Il y a un banc minuscule dans le renfoncement : le curé doit s'y reposer de temps en temps — reprendre sa respiration et soulager ses lourdes jambes.

— Assieds-toi, Franz, et laisse-moi m'asseoir ensuite...
— Le banc est minuscule !
— Qu'est-ce que ça fait ? Je serai bien sur tes genoux.
— La nuit t'encourage, Julie...

Quelque chose s’est rompu en moi : Prague s’éloigne. Les collines sous la nuit d’ici ont soudain cette présence que je ne leur ai jamais vue. Et toi, notre petite mère aux griffes, enfin tu t’effaces, avec tes brouillards, ton fleuve malade, ton grouillement écœurant de métropole…

Par un mouvement naturel, Julie vient de s’asseoir en travers de mes cuisses, si légère malgré son poids de vêtements humides. Elle me fait face et me regarde de haut. Son front luit. Ses yeux sont embués. Intimidé, j’éclaircis ma voix :

— Ne regrettes-tu pas Prague en ce moment ? Nous pourrions nous réfugier dans un café de nuit… Nous ne grelotterions pas ainsi…
— Je n’ai plus froid… et tu es là, ça me suffit ! Berce-moi…
— Te bercer ? Tu n’es plus une enfant…

Pourtant, je fais aller son joli corps qui prend appui contre le mien : d’un balancement régulier comme si j’étais l’océan.

["Heiraten" (Noces), Chapitre VI : « JULIE SE LIVRE », éditions Stellamaris (Brest), 2015 — pages 26-27]
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Je reste étendu : tel un gisant, emmitouflé sur le fauteuil de rotin... Le soleil vient sur ma joue. Elle s'assied près de moi. Elle a posé son manteau à peine fermé par-dessus une robe sombre que je ne lui connais pas. Je pense : une robe des départs...
— ... ça n'est pas prudent, Franz !
— Qu'est-ce qui n'est pas prudent, Julie ?
— Et bien, d'être ici... Olga m'a dit qu'elle t'a surpris plusieurs fois à laisser ta fenêtre ouverte alors qu'il gèle toutes les nuits...
— Cela me guérit...
— ... te guérit ?
— De mes peurs. D'être enfermé... Je sais que la Nature nous guérit !

Elle me touche la main. La prend tendrement. Longuement. La porte à sa joue. Comme un talisman — objet sacré et toujours bienveillant. Un simple objet de chair.

— J'aime tes mains.

Tes joues rougissent. Tes yeux brillent. Le froid vif. Noires balustrades de bois du grand balcon qui nous retient. Petit théâtre grand ouvert sur l'hiver : si tu pouvais nous retenir ! Nous figer ici, tels des statues de gemme... Moi allongé, toi à mon chevet... Nos mains réunies. Ta tresse à moitié dénouée oscille sous le vent des collines sombres d'en face. La lumière en devient espiègle.

Je voudrais, je voudrais...
— Voudrais-tu connaître mon rêve ?
— Pourquoi pas ?
— Nous étions là-haut, à nouveau...
— Là-haut ?

Son front se tourne vers les Diables invisibles...

— Tu sais bien...

(Chapitre IX : RÊVES AU BALCON, page 48)
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(...) cette saison, qui a une fin mais pas de début, nous met dans un état qui nous est à la fois si étranger et si naturel qu'il pourrait nous assassiner. (...)

Lettre de Franz K. à Max Brod, Prague, 29 août 1904

Après huit jours heureux passés dans la forêt de Bohème - là-bas les papillons volent aussi haut que les hirondelles chez nous - je suis maintenant à Prague depuis quatre jours et totalement désemparé. (...)

Lettre de Franz K. à Max Brod, Prague, septembre 1908

Pourquoi le mot final reste-t-il toujours : je pourrais vivre et je ne vis pas ?

Lettre de Franz K. à Max Brod, 1922


Écrire : drôle d'échappatoire.

Cette réclusion volontaire.

Je m'y adonne. Je m'y plie. Je m'y noie avec délice.


(Chapitre X : ÉCRIRE ? VIVRE ? AIMER ?, page 51)
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Un jour, il y eut une mélancolie incroyable dans ses yeux.

J'ai oublié de vous parler de ses yeux : des pupilles bizarres, cernées de pierreries minuscules... ou ai-je trop d'imagination ?

Exactement comme si - d'une barque amarrée - elle rapprochait son visage de la surface de la rivière, tendant sa main pour saisir une de ces herbes étranges qui poussent à fleur d'eau : son visage dans le miroir aux scintillements, où se croisent sans cesse ces libellules aux fuselages bleus, émeraude...

Dois-je vous parler un jour de ses ailes de libellule ?
Pour l'instant, parlons des yeux de Chris...
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Finalement, les morts sont ceux qui perdent la partie.
Condamnés à se taire.
Obligés de quitter la scène à tout jamais.

Mais qui veillera désormais à leurs intérêts ? Qui s'occupera de leurs besoins du moment ? N'en ont-ils pas tout autant, comme avant ?

[Chapitre XVII : "TRAHIR", page 87 - éd. Stellamaris, 2015]
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T'écouter c'est entendre la plainte de chacun des arbres;
endurer leurs plus humbles tracas.
p13
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Tu étais là, le soir dit : ombres de nous deux devant la mer endormie.
Tes yeux brillaient ; tes lèvres et tes joues inaccessibles.

Tu me cachais ta peine à me voir ainsi : déchu... Pourtant m'étant un peu apprêté. La racine de mes poils même devait offrir ces relents de vin aigre et de bière mal éteinte.

Tu m'as dit juste : " Fais-le ! "
Tu ne m'as pas dit : " Fais-le, je t'en supplie... "
Tu n'as pas eu à me supplier.

Me soigner, oui... puisque c'est toi qui le dis...

Tes paroles comme tes yeux dans l'ombre : chacun de tes mots me sont des roses.

[DOURVAC'H, "Grand Large", chap. XIV, Mon Petit Editeur, 2013 - page 69]
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« Un lamentable échec... »

Comme c'est curieux ! Parlant de ma vie, jusque dans la sonorité des mots, je vois se dessiner une fleur.

[Chapitre X : "ECRIRE ? VIVRE ? AIMER ?", page 23 - éd. Stellamaris, 2015]

« A dismal failure... »

How strange it is ! Talking about my life, down to the sounds of words, I can see the drawing of a flower.

[Chapter X : "TO LIVE ? TO WRITE ? TO LOVE ?"/ Dourvac'h : "A Wedding Announcement", a tale translated from the french by Bénédicte Leconte & Marcia Vannithone, 2020]
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— Mais toi, ton rêve ?
— Tu sais bien : je n'ai pas de rêves... Sans doute ma maladie...
— Menteur !
— Non, pas de rêves ici... ou plutôt : Veux-tu bien devenir mon rêve, Julie ?
— Je veux bien...

[Chapitre IX : "RÊVES AU BALCON", page 49 — éd. Stellamaris, 2015]
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Un rêve est un terrier aux multiples entrées. Tiens, comme cette maison ! Notre pension... Les appartements de Fräulein Olga, ses photos en chapeau fleuri des fleurs de montagne... D'elle alors toute jeune fille – ne les as-tu pas regardées sur sa cheminée ? Toutes ces histoires à nous raconter... Mes feuilles que tu m'as demandé de lire, le soir à notre table de salle à manger... Sans parler de nos rêves : les miens que je veux écrire en gardant la chambre – quand tu me surprends, que je me fatigue des leçons d'hébreu. Et nous voici maintenant au balcon, à parler de nos rêves...

[Chapitre IX : "RÊVES AU BALCON", page 47 — éd. Stellamaris, 2015]
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Regarder la mer empêche de mourir.

Je l'ai ressenti la première fois ce printemps dernier.J'ai regardé l'heure à ma montre: des puits de lumière dansaient à la crête des vagues.J'ai dû fermer les yeux un moment....
À qui confier pareils secrets?
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