Cléopâtre est davantage un personnage appartenant à la légende qu’un personnage appartenant à l’Histoire. Et malgré le rouleau compresseur de la propagande écrite par les vainqueurs repris par un millénaire d’histoire nationale officielle, la Légende Noire n’a jamais su effacer la Légende Dorée : dans la mémoire des siècles et l’imaginaire collectif, la dernière reine d’Égypte reste non seulement une femme forte dans un monde d’hommes machistes et sexistes, mais aussi une héroïne tragique et non une « vilaine sorcière orientale » voulant la perte du « peuple élu pour diriger le monde occidental ».
Avec le récit de la vie de Cléopâtre se télescopent le game of thrones égyptien avec Ptolémée XIII, Théodote, Pothin, Achillas, Arsinoé et Ptolémée XIV, et le games of thrones romain avec César Pompée, Cassius et Brutus, Marc-Antoine, Lépide et Octave. Cela fait beaucoup de monde, et pour tout caser en 48 pages le récit progresse par ellipse et fait apparaître et disparaître la plupart d’entre eux assez rapidement… Donc on suit :
- la rencontre de la divine Cléopâtre et du divin Jules
- la Bataille d’Alexandrie
- les Ides de Mars
- le rencontre à Tarse d’Isis-Aphrodite et de Marc-Antoine Dionysos
- la campagne contre les Parthes et la réorganisation de l’Orient
- la Bataille d’Actium, qui initie la chute des amants maudits
Les graphismes d’Andrea Meloni sont agréables, comme sont agréables sont ses réflexions et ses commentaires sur la difficultés de dessiner l’Alexandrie antique que finalement on connaît fort peu. Par contre sinon scénario c’est un peu la guerre de tranchée entre l’historienne Aude Gros de Beler qui se vautre peu ou prou dans tous les clichés de la propagande augustéenne et le journaliste Victor Battaggion qui essaye d’apporter un peu de neutralité et d’impartialité à l’ensemble. La comparaison est rude en appendices entre le travail de la première qui se résume à une redite d’une rare platitude digne d’un manager paraphrasant son propre powerpoint, et le travail du deuxième qui s’interroge sur la réalité et la vérité quand les sources historiques ont toutes été écrits par employés du pouvoir romain. Les sources ne sont pas d’accord sur sa naissance, les sources ne sont pas d’accord sur sa mort, et les récits de la Bataille d’Actium sont imprécis, contradictoires et tous écrits par des sicaires littéraires du vainqueur (comment prendre pour argent comptant des documents qui avancent des pertes supérieures aux effectifs engagés ?). La retraite stratégique du camp oriental pour cause de mauvaises conditions et d’incertitudes quant au résultat final est présentée comme une victoire écrasante du camp occidental alors que les combats semblaient en fait très serrés (genre la grande victoire française de Valmy, qui était en faite une retraite stratégique de l’armée autrichienne qui en avait marre de tirer au hasard dans le brouillard). Docteur Octave a toujours été meilleur commandant de légions de langues de putes que commandant de légions de soldats, donc c’est sur le terrain politique qu’il emporte sa victoire en obtenant une impressionnante série de trahisons éhontées présentée comme le ralliement naturel des vrais patriotes. Comment croire à tout le reste, à commencer par les piques sur l’ivrognerie et l’incompétence de Marc- Antoine et par les piques sur les débauches et les maléfices de Cléopâtre qui aurait voulu à tout prix la perte du peuple romain et de sa destinée manifeste : Mister Auguste en révèle plus ses perversions à lui que sur celles de ces ennemis en prenant son cas personnel pour une généralité universelle...
Le portrait que dresse Plutarque de Cléopâtre, qui était certes moraliste et non historien mais qui écrivait pour lui et non pour flatter tel ou tel souverain romain en place se réclamant du petit père des peuples Auguste, est bien loin de celui de la « vilaine sorcière orientale » dressé par Dion Cassius, Flavius Josèphe, Suétone, Appien, Lucain et autres lécheurs de culs romains… Il décrit une souveraine moderne, intelligente et efficace, bien meilleure dirigeante que ses aînés, et une mère soucieuse de l’éducation de l’avenir de ses enfants, autrement plus aimante que les parents démissionnaires des classes dirigeantes qui confiaient leur progéniture à leurs esclaves.
Après l’assassinat de la démocratie par la ploutocratie, la confédération de despotes éclairés dirigée par Cléopâtre et les enfants de César et de Marc-Antoine aurait-elle été moins bonne pour les peuples du bassin méditerranéen que l’Empire d’Auguste avec son « retour à l’ordre », « ses valeurs morales », « sa régénération nationale » et autres conneries suprématistes ? Parce qu’on ne va pas se mentir Auguste comme tous les vainqueurs a réécrit l’Histoire en son honneur, mais comme Staline ou Steve Jobs c’était juste un tyran tellement paranoïaque qu’il était du genre à faire exécuter celui qui avait eu l’audace de mettre en œuvre une bonne idée qu’il n’avait pas eu lui-même (je pense à ce philanthrope assassiné par le pouvoir en place juste parce qu’il avait mis en place sur ses propres deniers un service de pompiers).
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Vaste sujet...S'attaquer à un mythe tel que Cléopâtre n'est pas une sinécure, d'une part par «les références historiques» sont nombreuses mais pas toujours précises, par exemple sa date de naissance, d'autre part l'histoire de Cléopâtre a été écrite par les Romains «les vainqueurs» (l'histoire est toujours écrite par les vainqueurs) donc partiale.
Toujours est-il que cet album est admirablement dessiné. Le scénario quant à lui est quelque peu confus car trop dense pour un seul album, on peut s'y noyer. Au final un album inégal, avec ce petit cahier en fin d'album qui permet tout de même de s'y retrouver.
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Cette BD historique présente une version romancée de l'histoire de Clovis. Mais cette biographie (qui démarre par l'enterrement du roi franc à Paris) est réussie : les dessins sont prenants (mention spéciale aux scènes de batailles et aux représentations de chevaux) et l'essentiel de ce qui peut être historiquement exact est présent.
Le règne de Clovis ne nous est parvenu que par des commentaires ultérieurs, visant à magnifier les liens entre le roi franc et le développement du catholicisme. Même les dates de naissance (465 ?) et de mort (511?) sont sujettes à caution. Le dossier final de Bruno Dumézil complète très bien les apports de la BD.
Une BD vivante allant à l'essentiel.
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Après César, c’est à une autre figure historique contemporaine que s’intéresse la collection Ils ont fait l’histoire : Cléopâtre.
L’album est riche, dynamique et ne s’embarrasse pas de temps mort, nous approchons ici en peu la psychologie du sujet principal, mais surtout nous allons suivre trois chapitres principaux : ses aventures (historiques et personnelle) avec César, puis avec Marc-Antoine et enfin le dénouement… Chaque planche est ici bien choisie et suit un fil rouge qui ne nous laisse pas le temps de souffler !
Le propos, malgré sa densité, est aisé à suivre et personne ne sera vraiment déboussolé. La qualité et la précision sont également au rendez-vous pour ce qui concerne les dessins. Il a bien entendu quelques séquences de batailles, qui sont réussies, mais ici se sont surtout les scènes d’intérieur et les visages qui retiennent tout l’attention. Tout cela est, en un mot, beau !
Le cahier scientifique ne fait que prolonger et paraphraser le texte principal en justifiant tel ou tel point précis. Son objectif est ailleurs : préciser les sources qui ont été suivies et ce qu’elles impliquent en terme de choix. C’est ainsi que le lecteur apprendra qu’initialement les auteurs avaient d’autres idées qu’ils n’ont pu mettre en œuvre sans prendre de risques. Cette sincérité est rare et bienvenue, mais si elle tout aussi frustrante pour les auteurs que pour les lecteurs.
Cléopâtre est donc une réussite, un très bon album. Loin des superproductions cinématographiques (ou plus récemment sous forme de série), voici à moindre coût, un très bon outil de vulgarisation, désormais accessible à toutes et à tous.
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Clovis est une grande figure de l'histoire de France, notamment de par l'exploitation faite de sa légende ou des ses actions supposées dans le cadre de ce qui sera le pouvoir royal, d'abord féodal, puis d'ancien régime. Tenter un album de vulgarisation n'est pas un choix aisé car il laisse la place à beaucoup d'interprétation.
Le pari est tenu !
L'album reviendra sur les principaux événements connus : le vase de Soissons, le baptême, les guerres. Ces événements seront largement commentés dans les annexes. Il est à noter que la mise en page est dynamique, jouant avec les planches pour apporter un dynamisme bienvenu. De même, les scènes de bataille sont nombreuses, la violence bien présente, ce qui apporte un forme de dynamisme à une série qui est clairement en manque d'action.
Comme fil rouge, l'album retient l'idée que trois personnages évoquent les faits d'armes du roi défunt. Cette mise en abîme est classique, mais plutôt bien vue, permettant de faire commenter tel ou tel point selon des points de vue différents. Cela permet également d'avoir une approche de la société, des pensées, des conflits entre cultures avec tout ce que cela suppose de parti pris.
Quelques déceptions peuvent être notées ici ou là. Ainsi l'approche active pourra faire penser à un bon péplum, avec pour personnages principal une belle figure hollywoodienne. La violence pourra ne pas plaire, tout comme le manque d'unité du récit. L'absence de carte adaptée et d'outil de compréhension intégrés au récit est également préjudiciable.
Sans être le meilleur album de la série, Clovis reste un bon cru !
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Pour la première fois, la série Ils ont fait l’histoire va tenter une incursion dans l’histoire pharaonique de l’Egypte classique. L’exercice est ici différent de l’album consacré à Cléopâtre (moins de sources, période plus éloignée du temps de l’Egypte fastueuse).
Le choix de ce souverain, ne doit sans doute rien au hasard, sachant qu’il a suscité l’intérêt du grand public français après la réussite d’une exposition. Le pari n’en demeure pas moins risqué car le personnage laisse de nombreuses zones d’ombre derrière lui.
Soucieux de respecter les faits historiquement connus et reconnus, les auteurs vont composer un scénario qui va reposer sur trois piliers : la personnalité du monarque, ses choix guerriers et les constructions qu’il a ordonné.
L’approche est ici dynamique car elle permet de laisser s’exprimer le monarque dans ses relations avec deux proches, lui permettant d’évoluer et de paraître sympathique au lecteur. Hélas, son évolution sera incomplète et s’achèvera de manière brutale. La fin est réussie mais elle va être douloureuse pour le lecteur.
Le dynamisme va également se retrouver dans les dessins. Le texte est important mais la mise en page permettra de mettre en évidence des scènes de combats ainsi que les monuments construits à l’époque. Tout cela est beau et donnera envie de les découvrir sur place.
Quelques défauts pourront être notés ici et là, notamment une forme d’imprécision dans les traits des personnages, davantage reconnaissables par leurs attributs que par leur physique. Mais cela ne gêne pas vraiment la lecture.
Les esprits plus critiques pourront peut-être s’étonner d’un recours trop fréquent aux planches à dessin unique. Mais les choix peuvent également trouver une justification.
Bien que l’album demandera du temps pour être apprécié à sa juste valeur, il se lira facilement et c’est avec surprise que l’on pourra constater que le temps aura passé si vite. L’on aurait aussi pu en attendre davantage du cahier historique, mais il s’agit là d’une remarque qui démontre que le pari a été réussi et que nous voulons en savoir davantage…
Ramsès II est une réussite… peut-être annonciatrice d’une nouvelle incursion en Egypte ?
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Un bel album graphique aux images réjouissantes, colorées, précises, qui nous plongent facilement dans l’époque égyptienne de Ramsès II. Il y a moults détails dans les dessins, qui nous les font regarder attentivement et déguster cette bande dessinée lorsqu’on est égyptophile comme moi.
Cette BD a été acheté en complément de la fabuleuse exposition vue il y a quelques mois à Paris. C’est un bonheur de se replonger dans l’histoire de Ramsès en BD.
Malheureusement, après 46 pages, l’histoire s’arrête nette, après la mort de son épouse principale Néfertari, laissant les 10 dernières pages explicatives.
J’aurai aimé que cette BD couvre une plus grande période, quitte à faire plusieurs albums, car ce troncage m’a laissé sur ma faim.
Dommage, tout partait si bien.
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Cette BD est l’un des titres de la collection Ils ont fait l’histoire.
Elle donne quelques renseignements sur ce passage du 5è au 6è et sur ce roi des Francs saliens, puis de tous les Francs appartenant à la dynastie des Mérovingiens et fils de Chilpéric.
Malheureusement la connaissance des débuts du Moyen ge est très partielle, elle ne repose pas sur des documents d’époque mais sur le récit qu’en ont fait des chroniqueurs.
Mais un petit cahier de l’historien Bruno Dumézil permet d’expliquer ce qu’il n’était pas possible de faire passer par le dessin.
Cette BD est distrayante tout en donnant quelques connaissances.
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Cette BD est une reconstitution plutôt fidèle de la vie politique et personnelle de notre chère Cleopatre. Certes elle n'était pas d'une grande beauté mais son intelligence et son ingéniosité lui ont plus d'une fois rendu service. Les planches dévoilent de belles illustrations !
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Ramsès II (2023) est une bande dessinée de Wyctor (scénario) et Michael Malatini (dessin), 40e tome de la série Ils ont fait l’histoire. Biographie dessinée et romancée du célèbre pharaon de la XIXe dynastie égyptienne, qui a régné de 1279 à 1213 avant JC. L'intrigue se concentre sur le guerrier et le bâtisseur avide de reconnaissance. Une lecture intéressante. L'édition est complétée par un dossier historique de Juan-Carlos Moreno Garcia.
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J'ai trouvé cet album un peu brouillon et le récit bien terne. Il n'y a tout simplement aucune émotion qui transparaît dans les personnages et les événements se succèdent trop rapidement.
Effectivement il n'y a que 48 pages pour compter la vie d'une personnalité aussi emblématique de l'antiquité mais que ce soit la rencontre avec César, la bataille d'Actium ou même le suicide de Cléopâtre, tout cela est trop rapidement raconté et il manque cruellement d'émotion, de passion et d'énergie dans le récit.
L'auteur a tenu à en faire une bande dessinée historique, en oubliant le style romancé, alors que le dossier en conclusion est fait pour ça - et il le fait encore une fois très bien. J'aurai aimé un peu d'intrigue, un peu plus d'action et un peu plus de passion dans la narration. Une narration bien trop linéaire où on l’impression d’un coupé/collé des textes du dossier final.
Bref, le récit est fade et est mal construit pour bien comprendre l'enchaînement des événements et leurs conséquences sur le monde égyptien et romain.
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Cleopatre est le second tome que je lis dans la série "ils ont fait l'histoire" Après Elizabeth Iere.
Comme pour Elizabeth, vous ne serez pas incollable sur la vie et le règne de Cleopatre en lisant cette BD, mais vous aurez une bonne idée générale.
Bien sur, il est difficile d'avoir un récit objectif puisque tout ce que l'on sait de la reine et de ses illustres compagnons à été rapporté par les romains... qui eut même n'étaient pas étouffés par l'impartialité.
Comme pour Elizabeth, on survole l'histoire pour ne s'attarder que sur des périodes clefs, le tout pouvant facilement donner envie de s'intéresser de plus près à cette période de l'histoire.
Comme pour Elizabeth, un cahier pédagogique vient, à la fin, apporter quelques précisions historiques, donner les sources utilisées et expliquer certains choix scénaristiques.
Je ne sait pas encore quelle figure historique sera la prochaine à rejoindre ma collection, mais, avec plus de 30 titres, je n'ai que l'embarras du choix.
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Cléopâtre, une reine iconique et mal connue, à travers cette BD on comprend différents moments de sa vie et son but : restituer la gloire passée de l’empire égyptien. Le dessin est superbe et le dossier final est passionnant !!
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🔆 ILS ONT FAIT L'HISTOIRE : CLÉOPÂTRE de Victor Battaggion, Andrea Meloni & Aude Gros de Bêler 🔆
J'ai lu ce one-shot qui rappelle la vie de Cléopatre, la reine d'Égypte qui a vécu entre 69 av. J-C et 30 av. J-C.
On y retrouve les épisodes fameux de son histoire : sa rencontre avec Jules César (cachée dans un tapis), son voyage à Rome, la naissance de son fils Césarion, sa rencontre avec Marc-Antoine avec qui elle a eu trois enfants puis son suicide afin d'échapper à la disgrâce d'Octave.
J'ai apprécié cette lecture d'autant plus qu'une historienne a participé à sa conception. A la fin de l'histoire, on peut y lire un dossier qui retrace historiquement sa vie et explique les choix historiques qui ont été faits dans le scénario.
Je pense lire les bd consacrées à Jeanne d'Arc, Catherine de Médicis et à Elizabeth Ier. Malheureusement, parmi les 28 tomes, seuls quatre sont dédiés à des femmes. Quel dommage qu'elles ne soient pas plus présentes car, oui, elles aussi ont fait l'Histoire 💪
Et toi, quelle vie de femme remarquable souhaiterais-tu apparaitre dans l'une de tes prochaines lectures ?
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