Citations de Alexandre Thabor (45)
Vois-tu , j'aime les femmes . Je sais que tu les aimes également . Elles seules peuvent sauver l'humanité du désastre masculin . Je la vois encore pousser un cri horrifié quand devant nous , cinq déserteurs français désignés au hasard ont été exécutés . Ils étaient tous communistes . Tous volontaires . Je n'ai jamais entendu un cri pareil . C'était à la fois le cri d'une mère , d'une soeur , d'une femme , d'une adolescente . Un cri d'amour au milieu de cette guerre . P.181
" Sans l'espérance, vous ne trouverez pas l'inespéré. "
Héraclite
(page 81)
Elle m'a dit en riant que les mots l'accompagnaient partout où elle allait pour les assumer , les propager , les semer aux couleurs de la vie pour qu'ils survivent , des mots qui comme des oiseaux aux ailes repliées attendent le souffle de ses lecteurs pour s'envoler et propager l'insoumission .
Elle m'a appris le secret des mots . " Qu'est-ce qu'un mot , m'avait-elle demandé , si ce n'est une histoire d'amour ? " .P.179
Pourtant , Odessa était sans pareille avec ses soirées printanières douces et languissantes , les parfums épicés des acacias , et ses clairs de lune inimitables au-dessus de la mer obscure ; une vie pleine de surprises, de plaisirs, de curiosités avec son grand port accueillant ....P. 44
Jusqu'à ce jour atroce où nous avons libéré Berezivka de l'occupation des Cent-Noirs de Kourov le sanguinaire . Nous avons trouvé la vieille communauté anéantie . Plus de tanneurs , d'artisans , de petits commerçants , de colporteurs , de tailleurs . Tous sauvagement massacrés . Quand nous avons traversé la ville , ses rues étaient jonchées de cadavres de dizaines d'hommes juifs , tous massacrés . C'était intolérable . Je n'ai jamais oublié les vieillards et les enfants découpés en morceaux , empilés sur les trottoirs ou accrochés aux maisons calcinées , les femmes et les jeunes filles violées ; même des petites filles et des femmes âgées , hagardes , perdues , terrifiées , au point d'en perdre la tête .
A ces atrocités s'étaient ajoutées les tortures morales ...
Ils avaient forcé les habitants à chanter et à danser en présence de leurs tortionnaires . On les avait obligés à s'insulter entre eux , à louer leurs bourreaux , à creuser leur propre tombe et à commettre des actes indignes pour amuser leurs assassins . L'état mental des Juifs que nous trouvâmes était proche de la démence . Notre histoire n'avait jamais rien connu de pareil .
L'enfer de Dante pâlit à côté de ce que vécurent les Juifs en Ukraine dans ces années - là / P.58_59
Il y a tant de choses dans la vie d’un homme qui ne dépendent que de son choix, ... : le bon choix, le mauvais choix. Et même s’il fait un mauvais choix, un homme peut encore le rectifier par ses réflexions, par son action même.
je me suis dit en moi-même que sans s'en douter, Gricha venait de me faire découvrir une grand loi sociale : à savoir que pour amener un homme ou un enfant à désirer une chose, il n'y a qu'à lui rendre cette chose difficile à atteindre.
Notre vie est si pleine de contradictions . Je ne pourrai les expliquer que si j'en parle à haute voix , et qui mieux que toi peut m'entendre ?
(... )
Je sais que nous ne pourrons rien changer du passé , mais notre histoire , en la racontant , fera peut-être revivre la mélodie de notre vie , au-delà de la mort . P.19
Notre présent est indissociablement plongé dans notre passé. Le remonter, c'est le comprendre pour mieux affronter le futur.
Odessa était sans pareil avec ses soirées printanières douces et languissantes, les parfums épicés des acacias, et ses clairs de lune inimitables au-dessus de la mer obscure ; une vie pleine de surprises, de plaisirs de curiosités avec son grand port accueillant des cargos venus de Newcastle, Cardiff, Marseille, Port-Saïd […].
Mon adolescence se passa ainsi dans un état de guerre permanente, dans une ville sous pression policière, mais où l’on pouvait entrer dans les magasins, acheter des journaux, aller au cinéma, se rendre dans des boîtes où l’on ne dort jamais. Un peu comme à Paris sous l’occupation.
Loué soit celui par qui le monde est né
Quelle magnificence de tous côtés
Il fit la mer , infinie et profonde .
Il fit les bateaux qui glissent sur l'onde .
Il fit le paradis .
Il fit la terre - et il fit ton visage
Que j'aime
Mon amour . P. 289
J'ai appris dans les camps de Djelfa et du Vernet la trame de ce qui constitue les hommes , non seulement leur origine, leur langue , leur âge , leur intelligence , mais leur histoire ,je les classais en trois catégories : ceux qui se penchent sans cesse sur leur passé , ceux qui s'accrochent à leur présent et ceux qui ouvrent les yeux sur le futur et agissent pour renverser l'intolérable présent en s'appuyant sur leur passé et leur présent . P. 232
- Tu vois petit, Dieu est malade.
- Depuis quand ?, lui ai-je demandé.
- Depuis qu'il a été contaminé par l'Homme.
- Penses-tu qu'il puisse guérir ?
- Il en a le pouvoir.
- Alors pourquoi reste-t-il malade ?
- Pour nous angoisser.
- Jusqu'à quand ?
- Les restant de notre vie.
Tsipora rêvait de cette terre retrouvée au-delà des mers, où les juifs venus de toute la Russie, d’Allemagne et d’ailleurs avaient repris goût à la vie, où les verts pâturages remplaçaient le désert, où toute souffrance trouvait son remède, un pays où des femmes et des hommes ajoutaient de nouveaux beaux chapitres au grand livre de leur Histoire, un pays où il nous serait possible d’aimer avec passion. Nous discutions de toutes les possibilités ….
J'ai découvert au cours de ce dîner que Rabbi Ben Yakov , mon père et ma mère parlaient librement de l'amour , du plaisir , et considéraient que la sexualité était au centre de la vie . P 91
On parlait beaucoup, mais les juifs n'avaient pas encore la culture de la révolte, ils n'avaient que celle de la transhumance. Des milliers d'entre eux se sont réfugiés à New-York où ils ont fondé la petite Odessa. Une minorité est partie pour la Palestine-Eretz Israël.
Mais Roussakov était avant tout un policier exceptionnel , unique dans son genre . Il avait des dossiers sur tous ceux , y compris les chefs des clans , qui pourraient contrarier ses idées de justice et de liberté . Ses dossiers étaient son arme favorite . En les envoyant à la bonne adresse au moment opportun , il savait que justice serait faite . P. 241
Tsipora aimait lire et écrire depuis la maternelle. Elle appréciait par-dessus tout les auteurs romantiques du siècle précédent. Avec eux, elle apprenait à voir, à attendre, à penser. Elle s’était mise à chercher le pourquoi et le comment des choses. Lire, écrire, c’était la liberté, et la liberté, c’était la raison d’être de la vie, écrivait-elle dans son journal. Elle aimait autant la biographie des écrivains que leurs œuvres, les traces de leurs passions et de leurs aventures. Balzac, Dostoîevski, Pouchkine, quels romans fabuleux étaient leurs vie, pleine d’héroïsme, de vitalité, de violences magnifiques, d’audaces téméraires. Ils lui enseignaient que l’important, c’est ce que l’on fait. Mais elle avait aussi compris qu’on ne peut rien faire si on ne se connait pas soi-même.
Ma dernière rencontre avec mon père s’est terminée la nuit assez tard. I avait les yeux en larmes. Les miennes perlaient sur mes joues. Après s’être arrêté, il n’a pas bougé. Il était là, face à moi, tout proche. Je le regardais. Tsipora… Auschwitz… rien n’a jamais été aussi profondément douloureux que cette blessure. Rien ne pourra l’effacer de notre vie, de notre histoire à tous deux, de notre amour, de notre douleur. Je ne lui voyais aucune responsabilité. Ils étaient unis et ensemble ils avaient soumis leur pensée, leur travail, leur amour, leur vie, à la seule gloire de servir et de se battre contre l’insoutenable, là où ils se trouvaient : à Odessa, à Haïfa, à Madrid, à Paris… Elle est morte fière d’être juive.
Un état qui assurerait la plus complète égalité sociale et politique à tous ses habitants, sans distinction de religion, de race ou de sexe, garantirait la liberté de culte, de conscience, de langue, d'éducation et de culture et assurerait la protection des Lieux saints de toute les religions.