La dernière vidéo et pas la moindre de notre serie estivale - Les livres par leurs traducteurs - nous plonge dans " le pays du commandeur" du romancier & journaliste yémenite Ali Al-Muqri. L'histoire d'un écrivain invité par le dictateur d'un pays imaginaire, l'Irassybie, pour écrire sa biographie. Paru début mars, et traduit de l'arabe (du Yémen) par Khaled Osman et Ola Mehanna pour les Éditions Liana Levi, c'est une fable sur le pouvoir, la liberté et la vie après la chute du tyran.
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....la lecture, je ne savais même pas ce que c’était, pas plus que l’écriture. À la maison, quand j’ai interrogé mon père à ce sujet, il m’a expliqué que les paroles et les invocations qu’il récitait lors de ses prières étaient inscrites dans des recueils anciens, les savants les avaient transcrites sur des planches, des supports de cuir ou de papier afin que les lettrés y aient accès. Il m’a avoué que lui-même ne savait ni lire ni écrire, simplement, il avait mémorisé ces chants et ces incantations en assistant à la prière, psalmodiés par des récitants qui ne faisaient que les répéter après les avoir eux-mêmes entendus d’autres bouches.
« Écoute-moi bien, il n’y a pas d’un côté l’art juif, de l’autre l’art arabe, il n’y a que l’art tout court. Ce qui est de l’art et ce qui n’en est pas. »
"Ce sujet fait l’objet de controverse parmi les savants de la religion et les jurisconsultes de la charia. Cependant ils sont nombreux à avoir estimé qu’éduquer une fille après l’âge de neuf ans n’est pas souhaitable, car elle devient à partir de ce moment une femme-défendue. Sa place naturelle est alors dans sa maison, qu’elle ne doit plus quitter jusqu’au tombeau. »
La vie elle -même est un rêve ,qui nous est donné ; les rêveurs ne font ensuite qu'entretenir cette illusion pour qu'elle ne dépérisse pas .
Nous avons choisi un café Internet et je me suis installée à ses côtés face à l'un des ordinateurs, tentant d'assimiler les explications qu'elle me donnait (une camarade de classe) ' je n'ai pas perdu de temps : le même jour, j'ai fait installer une ligne Internet à la maison et je suis allée acheter ce qu'on appelait un "ordinateur islamique". Lorsque le systéme s'ouvrait, on n'entendais pas le jingle habituel, mais la formule "au nom de DIeu, le Clément, le Misécordieux", ainsi qu'un verset issu du Saint Coran : " louanges à celui qui nous a consacré ce bienfait." (p170)
Durant notre séjour au Soudan, il n'a ouvert les valises qu'une seule fois, pour en retirer un coffret de maquillage et deux flacons de parfum.
"Aurais-tu par hasard une troisiéme femme que tu aurais épousée en secret ? Une femme que tu aimes et à qui tu offres maquillage et parfum ? Ai-je plaisanté.
-oui, j'ai une troisiéme bien-aimée, d'ailleurs elle passe et passera toujours avant toutes les autres, car je l'aime de passion : c'est la mort en martyr pour la gloire de Dieu.
- magnifique ! Lui ai-je répondu.
C'est parole ont accentué encore mon envie de djihâd. (P 140)
Ses parents me sont apparus comme deux branches distantes sur un arbre vieilli, seule la brise insufflée par la présence de leur fille les rapprochait.
Nous avons laissé les hommes à leurs destins, cette bataille derrière laquelle pointait la défaite, ou du moins ce que certains estimaient être une défaite, alors que pour les moudjahidine, ce n’en était pas une. Plus que cela : compte tenu de tous les morts qu’elle entraînait, cette défaite était pour eux une véritable victoire, car elle signifiait le martyre – la mort en sacrifice à la gloire de Dieu.
Ce livre et les autres que j'avais lus auparavant m'avaient transformé en un être différent ou , plus exactement , en un être doué de sensibilité .
Dans son esprit, elle ne fuyait pas: elle avançait avec détermination sur la route qu'elle s'était tracée.