Citations de Amara Lakhous (77)
Notre voisin, au Caire, oncle Attia, disait : "Avoir des filles, c'est comme tenir une grenade dans la main : il vaut mieux s'en débarrasser le plus vite possible." Quand on lui demandait combien il avait d'enfants. Il répondait toujours : "Trois fils et quatre grenades (à placer quelque part, inch Allah) et deux bombes atomiques (une célibataire et une divorcée). Est-ce un hasard que le mot bombe, en italien comme en arabe, soit féminin ?
En bref, la situation était très grave. Le nom de famille risquait de disparaître, telle une espèce en voie d'extinction. Et moi, j'en étais en partie responsable, ou pas ? Le malaise se lisait sur leurs visages.
Nous, les Arabes, nous ne sommes bons qu'à pleurer sur notre sort et à accuser l'Occident de tous nos maux. Si nous sommes opprimés, pauvres, malheureux, analphabètes, impuissants, et cetera, ce n'est jamais de notre faute, mais celle des colons occidentaux.
Chez nous, la virginité est une obsession, une chose sacrée. On ne plaisante pas avec le trophée du marié!
A propos du voile: certaines femmes le choisissent librement et elles peuvent avoir différentes raisons: par conviction (elles pensent que le voile est le sixième pilier de l'Islam); pour des raisons économiques (elles économisent beaucoup d'argent sur les vêtements)
On voit des physionomies en tout genre: de jeunes Noirs et Asiatiques qui vendent des marchandises de contrefaçon sur les trottoirs, des enfants arabes qui se promènent avec leur père et leur mère voilée, des filles roms avec de longues jupes qui font la manche. Bref, je suis dans l'Italie du futur, comme disent les sociologues.
l'amour a besoin de temps pour s'épanouir.
Parler de viol en présence d’une femme est encore plus compliqué. Il faut être délicat.
“Un jour ou l’autre, il faut savoir se ranger”, “La vie de célibataire est une vie de merde”, “Il est temps de grandir”. Je déteste tout particulièrement cette dernière connerie. Qu’est-ce que ça veut dire, “Il est temps de grandir” ? Je ne crois pas qu’il soit possible de programmer de grandir. On grandit, un point c’est tout. En vieillissant, on accumule de l’expérience, c’est-à-dire qu’on fait des erreurs. Si on est doué, on arrêtera de faire les mêmes conneries, si on est un idiot, on répétera le même scénario, et on l’aura toujours là où je pense.
Ce n’est pas donné à tout le monde de s’éclater à enfiler un tablier et passer des heures à préparer un plat. La patience est une vertu rare que peu de gens possèdent.
"... le couscous est comme le lait maternel, il a une odeur très particulière que l'on ne peut sentir qu'accompagnée de baisers et de tendresse." p.130 Ed. Barzakh
"Il n’avait pas tort, ce sympathique génie d’Albert Einstein : il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé."
Pour simplifier les choses, on peut dire que les fiançailles à l'égyptienne, à l'arabe, à la musulmane sont une forme de réservation qui suppose bien sûr d'avoir versé quelques arrhes pour la chebka de la fiancée. Ce mot fait référence aux bijoux que l'on donne à la fiancée, mais il ressemble à shabaka, un autre mot qui signifie filet, comme celui du pêcheur. Qui pêche et qui est pêché ? En échange, que gagne le fiancé ? Eh bien il gagne qu'il aura le droit de revendiquer publiquement sa future propriété privée. Mes compliments à la belle, la bienheureuse, elle peut enfin quitter la vitrine après des années d'exposition. ! Et comme disent les Italiens : "Félicitations et de nombreux garçons !"
Il y a des règles du jeu à respecter, ou je me trompe ? Le vrai problème, c'est que nous vivons dans une société où l'homme est à la fois adversaire et arbitre. Nous, les femmes, que devons-nous faire ? Pouvons-nous jamais l'emporter dans ces conditions ?
Personne n'échappe au maktoub, au destin. Quand quelqu'un naît, Dieu écrit sur son front tout ce qu'il vivra jusqu'à sa mort. On rétorquera que c'est du fatalisme, que la partie est déjà jouée, qu'il n'y a pas de libre arbitre, toujours les mêmes ces Musjlmans qui obéissent à tout, bla bla bla.
Mais les choses sont autrement. Le maktoub nous aide à accepter le fait accompli, comme la mort d'une personne chère, pour ne pas devenir fou ou sombrer dans le plus sombre désespoir. Il existe une volonté supérieure qui domine la nôtre. La question est assez compliquée. C'est normal, nous sommes en train de parler de métaphysique, pas de physique.
Première règle pour survivre : éviter à tout prix la compétition avec les garçons. En échange de l'obéissance, la femme peut jouer de la protection masculine toute sa vie : du père au frère, du mari au fils, du fils au petit-fils. Une femme arabe doit se mettre en tête une chose importante : pour éviter les complications, elle doit vivre comme une brebis. Quoi ? Oui, exactement, comme une brebis, et de préférence blanche, pas noire. Mieux vaut une brebis normale, conformiste. Si elle abandonne le troupeau, elle le fait à ses risques et périls. Elle ne survivra pas aux meutes de loups ! C'est clair ?
La vérité, c'est que j'ai compris très tôt, avant même d'avoir lu un livre de Nawal Saadawi sur le féminisme que notre société n'aime pas les femmes et surtout ne tolère pas leur ambition. Ma grand-mère nous recommandait toujours, à nous ses petits filles chéries : "Ne vous montez pas la tête, volez toujours au ras du sol." Et si l'une d'entre nous se hasardait à voler plus haut ? La famille se chargeait de lui couper les ailes. Sans pitié.
Pauvre Marilyn, tout le monde l'a utilisée et jetée, y compris les frères Kennedy. Je ne l'aurais jamais imaginé de la part de JFK. Quelle déception ! A propos, je me suis toujours demandé : mais Jacqueline était-elle au courant des trahisons fréquentes de son mari, ou faisait-elle semblant de rien ? J'ai lu dans un journal que John disait souvent : "Si je ne couche pas avec une femme tous les jours, j'ai la migraine !"
Marilyn était belle parce qu'elle avait les cheveux blonds. C'est ainsi que j'ai commencé à considérer sérieusement le dicton arabe : "Les cheveux sont la moitié de la beauté." En Italie, en revanche, on dit : "La taille est la moitié de la beauté." Franchement, je n'en suis pas si convaincue.
Quel sens aurait une vie sans rêves ? Aucun. Avoir un rêve à réaliser est la meilleure raison de vivre. Certains considèrent la vie comme une véritable peine, et non un don de Dieu. Quel dommage ! Malgré tout, la vie est belle !