AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Andrée A. Michaud (407)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Bondrée

Il est des romans étiquetés «  polars » qui dansent autour des codes habituels de ce genre en les épurant a minima pour les envelopper d'une atmosphère étrange et inquiétante qui happe le lecteur dès les premières pages.



Il faut dire que cela commence comme une légende au fin fond du Québec, à la frontière du Maine, sur les rivages du lac Boundary, la légende d'un trappeur solitaire qui y avait trouvé refuge pour fuir la conscription de la Deuxième guerre mondiale puis s'était suicidé lorsqu'une femme trop belle pour lui s'était refusée à lui. Les enfants aiment invoquer son esprit pour jouer à se faire peur comme aiment à le faire les enfants. Mais voilà que ses pièges ours semblent ressurgir de la terre noire de la forêt, une adolescente est retrouvée morte, déchirée par un de ces pièges. Puis une deuxième. Comme une malédiction posthume pour détruire la beauté de la jeunesse. Nous sommes en 1967.



C'est peut-être la première fois que je lis un polar en ne m'intéressant pas à l'intrigue de l'enquête à proprement parler : il y a bien une traque de l'assassin, des interrogatoires, une autopsie, des suspects, mais la tension n'est pas crée par une multiplication de rebondissements et de fausses pistes. L'essentiel réside ailleurs car ces crimes tendent un miroir à la population qui les subit. Et c'est cela qui est formidablement désossé, les lignes de fracture que créent les meurtres des jeunes filles lorsqu'il déchire la langueur du Summer of love, leurs répercussions sur la communauté au sein de laquelle tout le monde se connaît et qui héberge le meurtrier.



En alternant les chapitres menés par un narrateur omniscient ou par la jeune Andrée qui se souvient à la première personne, l'auteure sait puissamment dire la montée des tensions, la méfiance qui s'insinue, la colère, la tristesse, la peur qui remplacent la sidération initiale. L'acuité psychologique dont fait montre l'auteure est remarquable. Le lecteur est comme envahi par les pensées de chacun, témoins, victimes, enquêteurs, assassin. Un flot d'émotions jaillit des pages et m'a habitée durant toute la lecture.



Cette intensité naît de la force d'évocation de l'écriture, d'une richesse incroyable qui célèbre la francophonie en la mariant à des anglicismes et des québécismes qui jaillissent et régalent. Cette explosion des frontières linguistiques est une véritable performance stylistique tant la langue est virtuose, sensuelle et sensorielle. De nombreux passages m'ont éblouie et donnée des frissons, aussi bien lors des descriptions quasi impressionnistes de la nature, lacustre ou forestière, que lorsque Andrée A. Michaud se place au chevet des âmes. Comme lorsqu'elle se penche sur celle d'une voisine de l'adolescente tuée dont son mari à retrouver le corps :



« Celle-ci avait confirmé que son mari s'absentait souvent de longues heures pour revenir l'haleine chargée d'odeurs de gomme d'épinette, les yeux remplis de lueurs prises à l'eau des ruisseaux ou à l'oeil des bêtes tapies dans l'obscurité verte des sous-bois. Elle ne connaissait pas la véritable origine de ces lueurs, ne comprenait pas que l'eau froide puisse se transformer en lumière au coin d'un oeil, mais elle pouvait décrire le goût amer de la forêt, qui demeurait longtemps dans sa bouche après que son mari, à coups de langue lumineuse, avait tenté de lui inoculer cette essence contenant la beauté des arbres. Elle n'avait cependant rien pour leur apprendre sur Zaza Mulligan, sinon que son corps fantomatique marchait depuis la veille au côté de celui de son mari, qui lui avait parlé de la jambe déchirée de Zaza, mais surtout de sa chevelure, de cette trainée de lumière éteinte dans l'ombre verte. C'est ce qu'avait d'abord vu Ménard en s'écartant du sentier, une longue chevelure rousse, ne comprenant pas bien ce qu'était cet enchevêtrement soyeux. Il avait ressenti un violent coup au sternum en l'apercevant, pareil à ceux qui lui transperçaient la poitrine quand sa petite Marie lui échappait pour traverser la rue. »



J'ai été hypnotisée même si j'ai parfois décroché dans le dernier tiers à cause de quelques longueurs et d'une révélation de l'identité du coupable qui ne m'a pas convaincue.



Un polar d'atmosphère atypique et puissant par la force d'évocation qu'il distille, porté par une plume rare et superbe.
Commenter  J’apprécie          1285
Bondrée

La nuit était trop belle, les étoiles trop lumineuses en cet été flamboyant de 1967 pour que Zaza rentre chez elle aussitôt après quitté son amie de toujours, Sissy. Fredonnant, insouciante, enivrée, elle marche sans but, profitant de cet instant. Une fois engagée dans Otter Trail, non loin du chalet familial, elle entend un léger craquement derrière elle. Puis un second, un peu plus fort. Prenant soudainement peur, elle demande qui est là. Aucune réponse mais une ombre furtive. Une main qui s'empare d'elle et des cris dans la nuit.. Le corps de Zaza Mulligan est retrouvé seulement deux jours plus tard par un riverain, Gilles Ménard, très choqué par cette découverte. La jambe sectionnée par un vieux piège à ours. Le lac de Boundary Pound étant à la frontière entre le Canada et les États-Unis, l'enquête est tout de même confiée à Stan Michaud, l'inspecteur en chef de la police du Maine, et de son assistant, Jim Cusack, d'autant que la victime est de nationalité américaine. Très vite, ils concluent à un tragique accident. Dès lors, l'été, à Bondrée, perdra de ses saveurs, de ses couleurs, de son insouciance, d'autant qu'un nouveau drame ne va pas tarder à surgir...



C'est l'été, une période de certaine insouciance et légèreté. L'on fredonne "Lucy in the sky with diamonds". C'est près du lac de Poundary, près de la frontière américaine, que plusieurs familles, aussi bien canadiennes qu'américaines, viennent profiter de ces jours d'été, entre baignades, barbecues ou parties de pêche... Les adolescents, eux, jouissent de leur nouvelle liberté. Parmi eux, Zaza Mulligan et Sissy Morgan, deux amies, à la vie à la mort. La blonde et la rousse, inséparables, un brin provocantes parfois ou désinvoltes. À la mort aussi dramatique qu'incompréhensible de Zaza, toute la communauté de Bondrée s'en trouve bouleversée, vacille et doute fortement. Y aurait-il un tueur parmi tous ces vacanciers ? Aux questionnements et aux tâtonnements de l'inspecteur Stan Michaud s'intercalent les pensées d'une jeune narratrice, Andrée, adolescente admirative de Zaza et Sissy. Outre cette enquête policière finement menée, Andrée A. Michaud installe une atmosphère dense, pesante, un brin onirique et comme hors-du-temps. Aux expressions québécoises, mélangeant français et anglais, la plume acérée, descriptive, parfois poétique de l'auteur se révèle dépaysante.

Un roman d'atmosphère captivant...
Commenter  J’apprécie          8213
Rivière Tremblante

Marnie et Michael, deux amis unis et inséparables, tenus par cette promesse de ne jamais se quitter. Un après-midi d'août 1979, ils jouent ensemble dans les bois de Rivière-aux-Trembles. Un orage éclate, la pluie tombe dru soudainement. Après un comportement bizarre, effrayant la jeune fille, et des paroles insensées, Michael Saint Pierre, âgé de 12 ans, se rue dans la forêt et disparaît subitement. Malgré de longues recherches et une chaussure retrouvée un peu plus loin, près du lac aux Barbotes, le petit garçon reste introuvable. Une disparition qui hantera à jamais la jeune Marnie d'autant que, bientôt, on la tient pour responsable, on l'accuse de mentir. Il lui faudra fuir, avec son père, Rivière-aux-Trembles...

En 2006, Bill reçoit un appel inquiet de sa femme, Lucy-Ann. Leur fille, Billie, qui va bientôt fêter ses 9 ans, ne s'est pas présentée à son cours de danse. Après la sortie de l'école, personne ne semble savoir ce qu'elle a pu faire. Là encore, malgré de longues recherches, la petite fille semble s'être volatilisée. Comment survivre dans une telle situation ? Comment supporter les questions soupçonneuses de la police ? Comment affronter le regard plein de reproches de sa femme ?

C'est à Rivière-aux-Trembles que, quelques années plus tard, Bill et Marnie vont se croiser...



Deux enfants qui disparaissent soudainement à des années d'intervalle. Deux adultes aujourd'hui cabossés. L'une inconsolable depuis la disparition de son meilleur ami. L'autre meurtri après celle de sa fille tant aimée. Comment surmonter une situation si tragique ? Comment expliquer l'inconcevable, à savoir que les enfants se seraient comme volatilisés ? Comment vivre avec une telle douleur, avec tant de questions restées sans réponses ? C'est ce que Andrée A. Michaud dépeint, avec force, dans ce roman. Alternant son récit entre Marnie et Bill, elle donne voix et corps à ces deux âmes blessées, au bord de l'abîme, esseulées, à jamais meurtries dans leur chair et dans leur cœur. Elle s'attarde sur chacun d'eux et sur la manière dont ils surmontent cette terrible épreuve. Une terrible épreuve qui se rappellera à eux lorsqu'une autre disparition mystérieuse secouera Rivière-aux-Trembles. Au cœur de paysages fascinants, ce roman, à l'atmosphère particulièrement envoûtante, énigmatique et inquiétante, brille par la plume exigeante, puissante et étoffée d'Andrée A. Michaud.

Profondément noir et troublant...
Commenter  J’apprécie          772
Tempêtes

Marie Saintonge vient d’hériter de son oncle suicidé une maison isolée sur les pentes du Massif Bleu, au Québec. Sa première nuit sur place, alors qu’une terrible tempête de neige se déchaîne, tourne au cauchemar : entre une nature hostile et démontée, d’étranges visiteurs et d’inquiétants phénomènes, Marie finira-t-elle par perdre la tête comme son oncle ? Quelques mois plus tard, quand sévissent cette fois de violents orages d’été, Ric Dubois est à son tour confronté à la peur sur l’autre versant de cette montagne décidément bien peu hospitalière. Les disparitions et les morts inexpliquées se multipliant au camping de la Red River où il séjourne, il va devoir rassembler tout son courage pour tenter de comprendre ce qui se passe dans ce coin de forêt, et pour sauver sa peau.





Jouant avec nos nerfs et nos doutes, l’auteur s’emploie à créer l’épouvante et l’incertitude dans cette histoire où l’on ne sait plus si les événements ont une cause rationnelle ou surnaturelle, ou encore s’ils ne se produisent que dans l’imagination des personnages, en proie à une terreur collective à l’origine de comportements délirants. La nature, écrasante et dangereuse, fait peser une menace permanente sur le récit, contribuant à son climat délétère et effrayant.





Portée par une belle écriture aux accents lyriques dans ses descriptions de la montagne et de ses tempêtes, l’histoire m’a d’abord happée, avant de laisser retomber mon enthousiasme au niveau de la simple curiosité. Malgré un début prometteur, je suis restée au final assez extérieure à l’intrigue, déçue de ne pas être davantage prise aux tripes par l’angoisse et le suspense.





Ce thriller fantastique reste un bon moment où l’étrangeté le dispute au dépaysement des conditions climatiques et des expressions québécoises. Malgré l’originalité de ses deux principaux ingrédients : la malveillance de cette montagne bleue et la dérive de ses personnages jusqu’aux rivages de la folie, il lui manque cependant ce je ne sais quoi qui rend une lecture véritablement addictive et qui réussit à vous faire frémir d’angoisse.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
Commenter  J’apprécie          743
Proies

À Rivière-Brûlée, petit village perdu parmi les collines, Judith, Abigail et Alexandre, surnommés respectivement Jude, Abe et Alex, se réjouissent plus que tout d'aller camper quatre nuits en forêt, près de la rivière, La Brûlée. En ce mardi resplendissant, c'est tout sourire, insouciants et heureux, que les trois amis saluent Gilbert, le père de Jude, venu les déposer en voiture près du chemin raboteux. Après avoir marché quelque temps, ils déposent enfin leurs sacs à dos en plein milieu d'une clairière, un endroit idéal pour y planter leurs tentes. Il ne leur reste alors plus qu'à profiter du lieu, du calme environnant, de la rivière pas loin et du soleil qui promet une belle journée. Alors qu'ils s'amusent dans la rivière, un sentiment étrange s'empare d'eux. Comme une impression d'être observés. S'ils se confortent dans l'idée que nombre de personnes empruntent le sentier des Ravages pour se rendre à la Brûlée, ils ne sont pourtant pas rassurés lorsque, de retour à leur campement, tous ont l'impression que quelqu'un est passé par là, sans pour autant avoir déplacé quoi que ce soit. Ils font fi de cette impression, se rassurant les uns les autres que rien ne pourra gâcher leur séjour...



Loin des leurs, en pleine forêt, et alors que les festivités pour la foire annuelle de Rivière-Brûlée se préparent, ces trois amis se sont promis de passer un séjour inoubliable. Inoubliable, il le sera. Mais, hélas, pas dans le sens où ils l'envisageaient. Car, l'on sait, dès les premières pages, qu'un terrible drame va se passer, un drame tel que chaque habitant se souviendra, à tout jamais, de ces jours du mois d'août. Ce n'est pas la forêt, personnage à part entière, sombre et majestueuse dont les trois adolescents auraient dû se méfier mais de ce qui rôde parfois et qui fera d'eux des véritables proies. Si Andrée A. Michaud nous plonge en plein huis clos, nous faisant vivre avec une incroyable intensité, les événements se déroulant en pleine forêt, faisant monter, au fil des pages, une angoisse sourde, presque terrifiante, elle observe, avec la même puissance, ce qui se passe au village, aussi bien sur les parents, terriblement inquiets, pétris de remords, que sur les habitants. Elle dépeint, avec force, les sentiments, les émotions à fleur de peau, les appréhensions de ces proies, de leur entourage mais aussi des différents protagonistes concernés, alors dans l'incompréhension totale de cette violence. Toute une galerie de personnages qu'elle décrit avec profondeur. Tout en finesse, avec des mots toujours justes, percutants, virevoltants, parfois plus poétiques, elle fait monter la tension, installant une ambiance anxiogène, inquiétante voire malsaine. Un roman puissant, haletant et d'une extrême noirceur...
Commenter  J’apprécie          700
Bondrée

Eté 1967. Boundary Pound fait le bonheur des vacanciers. du soleil, un lac entouré d'une forêt profonde. Nature et farniente, chasse et pêche, confitures et barbecues. Ils s'appellent Duchamp ou McBain, Larue ou Latimer, viennent du Maine ou du Québec et partagent tous la douceur de vivre de ce lieu paradisiaque. Les femmes préparent des tartes, les enfants barbotent et les maris arrivent pour le week-end pour un repos bien mérité. Andrée est encore une enfant même si elle se donne des airs de grande et rêve de s'immiscer dans le duo formé par Zaza Mulligan et Sissi Morgan. Une blonde, l'autre rousse, deux gamines tout juste sorties de l'adolescence qui exhibent leurs longues jambes, chantent les Beatles à tue-tête, cigarettes fines au bec. Andrée les admire, les femmes leur jettent des regards réprobateurs et les hommes tentent de cacher la convoitise honteuse qu'elles allument dans leurs yeux. Rien de grave, rien de bien méchant. Mais tout bascule le jour où Zaza disparaît jusqu'à ce qu'un promeneur la retrouve dans les bois. Morte, la jambe coincée dans un piège à ours, elle s'est vidée de son sang. L'enquête menée par Stan Muchaud et son adjoint Jim Cusack conclut à un accident. Mais la quiétude de l'été a disparu avec Zaza. On s'inquiète, on organise des battues pour déloger les pièges, on déterre les histoires du passé. Celle de Pierre Landry, un déserteur qui voulait échapper à la seconde guerre mondiale et s'est réfugié dans les bois de Boundary. Un trappeur, un ermite, un sauvage, mort d'amour pour les beaux yeux d'une estivante qui ne l'aimait pas en retour. Son fantôme a-t-il tendu un piège à Zaza ? Quand une deuxième jeune fille disparaît, le doute n'est plus permis. Ce n'est pas un fantôme qui lui a rasé la tête et coupé la jambe...Michaud revient et cherche un meurtrier.



Quel magnifique roman ! Grâce à sa plume alerte et sensuelle, sa langue colorée mixant anglais et français, Andrée Michaud nous emmène avec elle au bord de ce lac qui marque la frontière entre Canada et Maine, dans les petits chalets habités par les familles d'estivants, au coeur de la forêt profonde qui l'entoure et contribue au mystère des lieux. C'est dans ce décor bucolique qui invite au farniente ou à l'exploration de la nature qu'elle instille discrètement un parfum de drame. Malgré les enfants qui s'ébattent dans les eaux du lac, les femmes qui confectionnent à tour de bras tartes et confitures, les hommes bienheureux qui viennent goûter ici au repos du guerrier, il y a quelque chose de pourri à Boundary, une odeur de mort qui vient peut-être de la triste histoire de Peter Landry...A la suite de ses personnages si attachants, du flic surmené, hanté par une affaire non résolue et profondément humain, à la petite Andrée qui fait une entrée fracassante dans l'âge adulte, jusqu'à ces mères autoritaires et protectrices dignes représentantes de la bonne ménagère des années 60, on parcourt les sentiers de Boundary, on profite de la chaleur estivale et puis on craint le pire, on cherche un coupable, on voit voler en éclat la douce langueur d'un dernier été au bord du lac.

Bref, plus qu'un polar c'est un roman d'atmosphère, extrêmement bien écrit, aux personnages marquants, dans un décor dépaysant. Un coup de coeur.
Commenter  J’apprécie          689
Bondrée

Eté 1967, Summer of love, au bord du lac de Boundary Pound, cerné de forêts profondes, à la frontière entre le Canada et les Etats-Unis.

Bondrée, pour les intimes.

Endroit propice aux légendes tressées autour du personnage d'un trappeur dont certains se souviennent et qui flanque le frisson à tout le monde...

Le lieu de villégiature fait le plein de vacanciers canadiens et américains, qui reviennent année après année. Ils ne se fréquentent pas forcément, mais ils se connaissent tous.



Parmi eux, les Mulligan et les Morgan, dont les filles, Zaza et Sissy, deux amies fusionnelles, laissent derrière elles un sillage d'attirance sexuelle chez bien des hommes et de jalousie chez bien des femmes.



Et les Duchamp, qui viennent aussi chaque année avec leurs trois enfants, Bob, Andrée et Millie.



Une nuit, Zaza disparaît. Elle est retrouvée morte, dans une clairière, la jambe prise dans un vieux piège à ours.

L'inspecteur Michaud conclut à un accident.

Mais trois semaines après, une autre jeune fille est engloutie à son tour dans le crépuscule...



Que l'on accompagne Andrée Duchamp dans ses vacances adolescentes bouleversées par la disparition de Zaza puis par l'angoisse grandissante parmi les vacanciers, ou bien l'inspecteur Michaud venu du Maine enquêter sur cet "accident", les personnages sont bien campés, les caractères finement évoqués.



Zaza et Sissy font écho aux Zaza-et-Sissy que nous avons tous pu croiser.

Les vedettes de la villégiature.

Tout le monde les connaît. Tout le monde a un avis sur elles. Tout le monde les regarde.

Elles fascinent Andrée, litteldole so cut, Sissy, à qui elles donnent des gommes ballounes.

Deux jeunes filles qui se jouent du désir qu'elles éveillent chez les hommes, qui se fichent que les femmes en prennent ombrage, riant au nez de tous ces bien-pensants qui les toisent de haut.

Deux jeunes filles insouciantes et libres.

Pas si chanceuses qu'on veut le croire, ni si bien-aimées non plus.

Plutôt délaissées par leurs parents, gâtées à hauteur de leur désintérêt pour elles et qui ne comptent que l'une sur l'autre.

Dont le souvenir égratignera la mauvaise conscience de tous ceux qui en pensent tant de mal... révélant malgré elles le meilleur et le pire en chacun.



La plume d'Andrée A. Michaud a une force d'évocation remarquable. Elle enveloppe la narration de bribes de conversation en anglais, tics de langage, expressions québecoises, jurons, passant d'une langue à l'autre dans la même phrase si naturellement qu'on croit l'entendre.

Tous ces voisins prennent vie, les anglophones, les francophones. La lumière scintille en poudre d'or sur le lac. La forêt se pare du chatoiement de toutes ses nuances d'émeraude. Les journées vibrent dans une chaleur harassante avant la déferlante d'orage. Mais une inquiétude pesante rampe autour de Bondrée... Elle monte avec le crépuscule, soir après soir, semaine après semaine, retombe un peu, un court répit, pour assurer ensuite davantage son emprise sur la communauté...



A l'aise dans la peau d'une adolescente comme dans celle d'un inspecteur au bord de rendre son insigne, hanté par les fantômes d'affaires abominables, l'auteur tisse subtilement la toile de cet été 67, où viennent se prendre jeunes filles, illusions, enfance, tranquillité et innocence...

Tout y est juste, le ton, les préoccupations, les descriptions, les relations familiales, amicales, de voisinage.

Tout peut réveiller un souvenir enfoui en soi, qui dit les incertitudes de l'adolescence, les odeurs de barbecue, les voix appelant les enfants dans le soir d'été, la ligne rose vif au-dessus des cîmes suivant l'engloutissement du soleil, les mères, les pères, leur regard sur leurs enfants, leur absence aussi...

Au fil des pages, l'ambiance se tend, une sourde anxiété fait place à l'angoisse, l'air devient irrespirable.



J'ai été très impressionnée par la maîtrise, la profondeur, la finesse d'observation d'Andrée A. Michaud, sa délicatesse et sa poésie.

Bondrée est pour moi un grand roman, j'en ai suivi chaque méandre avec délectation.



Encore une découverte que je dois à la lecture commune polar,

merci !
Commenter  J’apprécie          667
Bondrée

Au fin fond du Canada, dans une région qui s’appelle « Bondrée », quelques familles se sont regroupées comme chaque année pour passer l’été au bord d’un lac. Trois adolescentes profitent de leurs vacances, insouciantes, Zaza et Sissy, que l’on pourrait prendre pour des jumelles car elles sont inséparables et Frenchie, dernière arrivée qui s’est liée au duo de délurées. Elles ne se doutent pas que dans la forêt environnante, un être sanguinaire et malfaisant rode…

Tout l’intérêt du roman d’Andrée Michaud réside dans l’atmosphère pesante qu’elle a parfaitement su recréer autour des meurtres perpétrés par un psychopathe. Même la nature participe à cette tragédie, une forêt primaire, des montagnes et un lac.

« Bondrée » est un polar à la Hitchcock où le lecteur est gardé à distance de l’intrigue et l’auteur lui lâche les éléments au compte-goutte derrière un voile opaque, un peu comme dans un cauchemar. Rien n’est dit ouvertement, tout est centré sur l’ambiance de cette région qui va s’avérer hostile, et sur les caractères des personnages, des gens simples, des ermites, des gueules cassées de la vie.

Il manque mal grès tout la pression crescendo d’une enquête qui livre ses éléments, des pistes élaborées pour accompagner ou perdre le lecteur. L’auteur a trop axé son récit sur la psychologie de ses personnages ce qui affaiblit la tension narrative. Il y a tous les éléments d’un très bon polar mais trop dilués dans un flot de détails sur le caractère des protagonistes.

« Bondrée » est une enquête hors des sentiers battus de ce type de littérature où le venin envahit lentement le corps de cette histoire.

Editions Rivages / noir, 380 pages.

Commenter  J’apprécie          650
Rivière Tremblante

C'est le genre de roman qui me laisse perplexe , une fois refermée la dernière page: ai-je aimé ? Couci - couça… Pourrai- je le conseiller ? Ça dépend à qui ...



La première chose qui frappe , c'est la qualité d'écriture.

L'auteur a un style très personnel, et vous entrainera dans son monde , un monde plein de poésie, de nature, mais aussi de chagrins , de deuils impossible à surmonter .

Une rivière, une forêt , la neige, ponctuées d'expressions canadiennes, comme autant de pierres semées par un Petit Poucet nommé Andrée A. Michaud, comme autant de couleurs exotiques , qui ont amusé la lectrice française que je suis et qui permettent de reprendre son souffle après des passages poignants



Parce que l'histoire " vendue" comme un thriller n'en est pas vraiment un. Et c'est surement pourquoi, j'ai été très déçue.

En Août 1979, le petit Mickael disparaitra dans la forêt , seule son amie Marnie est présente, mais elle ne saura pas ( malgré les interrogatoires de la police) , expliquer cette disparition et se verra clouée au pilori par les habitants de RIvière - aux Trembles. Trente ans après , elle revient dans sa ville.

Et , dans une autre ville, la petite Billie, 8 ans, disparait entre son cours de danse et son domicile. Sa disparition demeurera sans réponse. Son père, ivre de chagrin viendra habiter Rivière - aux Trembles, sans se douter qu'un autre enfant va y disparaitre .

Et pendant 261 pages , on suivra ces deux personnages ballotés par la vie, le malheur, l'incompréhension et une douleur infinie.

Souvenirs , chagrin, errance…

Et c'est long (261 pages sur 363 !). C'est éprouvant…

Ah oui, mais les chants tristes sont souvent les plus beaux , oui, mais c'est long...

Et c'est donc à la page 261, que s'ouvre enfin "L'enquête" avec des flics complétement obtus, qui n'ont pas d'autres suspects à se mettre sous la dent que des personnages que nous ne pouvons imaginer coupables.

Ne comptez pas sur Andrée A. Michaud pour vous proposer une fin claire, nette et précise, elle sera à la mesure de cette forêt, opaque et de cette rivière : trouble, tremblante et floue.

Je me suis sentie un peu flouée, un peu sur ma faim.

D'autres lecteurs apprécieront cette ambiance oppressante , plombante servie par une écriture puissante et poétique.





Challenge Mauvais Genres 2018/19.
Commenter  J’apprécie          616
Bondrée

Superbe...

Il y a les romans policiers , et puis les romans policiers excellemment écrits..

Andrée A Michaud réussit à raconter une très bonne histoire, avec un climat particulier et un vocabulaire très riche et ciselé.

Dans la forêt de Boundary Pond , il y a un lac ; on surnomme cet endroit : Bondrée .

C'est un endroit qui sent bon les vacances, la nature et la paix...

Des chalets disséminés, suffisamment éloignés pour que chacun se sente indépendant. Des enfants qui se baladent en totale sécurité et des parents qui peuvent souffler...

Mais l' été 1967, deux adolescentes se sentent un peu trop " en liberté", maquillées, n'ayant peur de rien, effrontées et bruyantes, elles font parler d'elles et pas en bien. Andrée, une gamine, les admire et aimerait intégrer le duo, mais elle est trop jeune et naïve. alors, elle se contente d'observer...

Et ce qu'elle verra cette année là, sonnera le glas de son insouciance et son enfance.

L'une des adolescentes, disparaît..

Et l'enquête peut commencer , menée par la police du Maine, on est à cheval entre les USA et le Canada. Et tout au long du roman, on percevra cette double culture. Parfois l'auteur, sans crier gare, passera du français- canadien à l'anglais, ce qui donne une couleur singulière au roman, un charme fou. ( Les expressions Québécoises sont savoureuses ).

Trois cultures, trois personnages phares : celui du traducteur qui fait partie des résidents et qui se retrouve dans l'enquête , sans le vouloir, témoin tenu au secret.

Puis le chef de la police habité par des "cas boomerangs" , des enquêtes qui se rappellent à vous , à n'importe quel moment. Un flic hanté qui porte le même nom de famille que l'auteure, et un personnage de gamine qui porte son prénom...

Trois personnes qui pourraient être l'auteur , laquelle se souviendrait d'un fait divers qui aurait percuté son enfance...

Parce qu'il y a de ça dans ce roman, une ambiance particulière, lancinante, qui rappelle des souvenirs, des mauvais rêves...

Comme un caillou qu'on jetterait dans l'eau trouble de Bondrée et qui ferait des ronds de plus en plus grands. Car la fin de l'été 1967 ne ressemblera pas au début...

Cela fait une semaine que j'ai fini ce roman, et les ronds dans l'eau continuent dans ma tête...j'y pense encore . Je l'ai prêté, histoire qu'il fasse encore des petits ronds ailleurs...



Un suspens poétique et raffiné : un coup de coeur...



Challenge Mauvais Genres

Commenter  J’apprécie          580
Bondrée

Chaque livre a son atmosphère, dans Bondrée, elle est envoûtante, voire hypnotique. Le type d'atmosphère qui vous colle à la peau et ne vous lâche pas avant longtemps.

Un lac entouré de grandes forêts entre le Québec et le Maine, des estivants , deux jeunes filles, Zaza et Sissy qui découvrent le pouvoir de leur jeunesse, de leur corps, le plaisir de la première cigarette ...

Après la mort de Zaza qui bouleverse tout ce petit monde, la thèse de l'accident va être mise à mal avec une deuxième mort qui va plonger alors les habitants et estivants dans une peur, une angoisse, une colère.

En tant que lecteur, nous vivons à travers les personnages ces différents sentiments. Andrée A. Michaud nous décrit avec soin la psychologie des personnages à tel point que leurs réflexions deviennent nôtres et leurs émotions presque palpables.

Le choix de mélanger le français avec quelques phrases en anglais m'a un peu déstabilisée au début mais très vite, je me suis habituée à ce style et même apprécié.

C'est un livre qui m'a été conseillé par ma libraire et je suis ravie de l'avoir écoutée !

Commenter  J’apprécie          580
Proies

Après Bondrée , me revoilà en "amour" de la plume de cette grande écrivaine qu'est Andrée A.Michaud ...

A partir d'une histoire "banale "( dans le sens où plein de romans ou de films mélant suspens, et horreur) commencent comme cela, cette auteure arrive à en faire quelque chose de très personnel, collant parfaitement à L ADN canadien...



Tout d'abord , il y a le début : trois adolescents, (deux filles, un garçon) , amis d'enfance, partent camper quelques jours dans la fôrét, au bord d'une rivière. Et l'on sait que c'est courant au Canada, de faire de grandes provisions de grand air avant l'hiver, de liberté, de nature, de débrouillardise, de souvenirs, et de moustiques... Mais ils ne seront pas tous seuls dans cette espace, le danger rôde, embusqué, et plus rien ne sera comme avant.



Andrée A. Michaud ne nous propose pas seulement l'avant et le pendant du drame, mais aussi l'après, le grand après... Toutes les répercussions sur les gens de cette petite communauté, sur les victimes et leurs proches , mais aussi sur celles du "mal"....

Alors au delà de cette hymne à la nature (un peu gâché par ce qui s'y passe) , on a la façon de raconter. Et c'est là que Andrée A . Michaud est unique, car elle mêle pêle melle, la poésie, la précision dans le choix des mots qui désigne un oiseau ou une plante, et les expressions canadiennes que le lecteur ne comprend pas , mais dont il devine le sens dans le contexte. Et c'est savoureux ! Et cela casse un peu ce suspens de dingue et nous permet de reprendre notre soufle. Elégance rime avec cocasserie. A l'universel de la nature, du sentiment de peur, à l'universalité des liens parents-enfants, elle oppose le régionalisme, le "dialecte", les mots de cet endroit du monde. Et c'est beau...

Si beau qu'on en oublierait presque qu'à la page 60 environ, j'ai peur... Tout avait si gentiment commencé, que j'en avais oublié le titre " Proies", sans article pour l'introduire. " Proies" qui claque comme une promesse de trouillomètre qui s'affole chez le lecteur. Un suspens magistral écrit magistralement bien.

Suspens garanti : on est pas là pour "niaiser", "crisse d'andouille" !
Commenter  J’apprécie          574
Rivière Tremblante

Nous sommes dans le village de Rivière-aux-Trembles avec deux amis d'enfance, Marnie et Mike, et à l'été 1979 , un jour d'orage, le garçon de ce binôme inséparable disparait dans la forêt lors d'une escapade à leur cabane.

Nous sommes dans une grande ville des années plus tard, et Billie la petite fille de Bill ne se présente pas à son cours de danse après l'école et ne revient jamais à la maison.

Ni le corps de Mike, ni celui de Billie ne seront jamais retrouvés.

Pour Marnie, après la disparition de son Mike, ce sera une fuite vers Montréal avec son père, puis vers New York où elle tentera de se construire une vie. New York et les tentatives d'oubli jusqu'à ce que la mort de son père la ramène à Rivière-aux-Trembles.

Pour Bill, le papa de la petite Billie, ce sera la fuite de la ville, puisqu'il ne peut plus y vivre sans sa petite fille, vers Rivière-aux-Trembles.

Rivière Tremblante me parle d'âmes en peine, celles qui ont perdu un être cher, celles pour qui la détresse s'est transformée en tristesse continuelle, ce genre de tristesse qui nous habite le corps et le coeur. Des âmes cassées, avec des bleus au coeur, des contusions permanentes, un deuil ...

Une écriture poétique, riche, sensible, élégante dans la souffrance qui me touche profondément.

Un récit d'atmosphère sombre, angoissant, sans exhibitions inutiles qui m'a poignée .

Andrée A. Michaud, une écriture d grand talent.
Commenter  J’apprécie          563
Tempêtes

Depuis Bondrée, je suis une fidèle de Andrée A Michaud, et si j'ai beaucoup aimé Bondrée, je la suis moins sur ses deux autres romans, mais ça reste des lectures agréables, parce que la dame écrit divinement bien. Romans noirs très littéraires, empreints de poésie, de mots Québecois, et américains, qui viennent se glisser entre des mots plus "sérieux" pour nous faire sourire, faire redescendre la pression... Car vous allez monter en pression avec Tempêtes, ses personnages aussi, la montagne peut rendre fou, lorsque s'abat tempêtes et orages sur des pauvres personnages...

Un roman , deux histoires, deux faces de cette montagne bleue, deux saisons, et tout cela se rejoint (un peu) à la fin, mais si peu...

Face A : Marie Saintonge hérite d'un chalet situé au coeur du massif bleu, car son oncle s'est suicidé. L'auteur ne prenant pas soin de nous présenter ce personnage, on ne saura que ça ... Quel âge a-t-elle ? Quel est son travail , pour venir au pied levé passer un hiver dans un endroit aussi hostile ? Visiblement, elle est seule dans la vie, et très vite, (visiblement !) , on la sent un peu dérangée..;

Visions, hallucinations, mauvaises décisions, folie ? Tempêtes , et tombe la neige ... Bof, bof...

Puis, page 121, on passe sur l'autre versant du Massif à "Orage" ! ( Mais pas désespoir...). L'histoire m'accroche davantage, le décor ressemble à Bondrée : petits logements de vacances autour d'un lac, et au milieu des familles, Ric Dubois , 43 ans, pas en grande forme... prête-plume d'un écrivain qui lui aussi s'est suicidé : point commun... Morts étranges, soupçons de la police, hallucinations, folie qui guette le personnage; et à un moment, les deux histoires se rejoignent, mais si peu...

Ai-je tout compris ? Je pense que oui, ça tourne sévère dans ma caboche pour remettre tout ça en perspective ... Y-a-t-il seulement quelque chose à comprendre ? J'ai l'impression que sur ce coup, l'auteure s'est fait plaisir, un petit trip à la Shining , en moins effrayant.

Je ne suis pas sûre d'aimer, les romans policiers ou thrillers qui laissent le lecteur face à un "vide explicatif", j'aime bien me coucher en paix, (déjeuner en paix aussi, of course ..)

Je ne conseillerais pas Tempêtes à tout le monde, l'adhésion ne sera pas automatique. Mais pour ceux qui aime le style , la forme avant l'histoire, Andrée A Michaud, a une patte unique...



Commenter  J’apprécie          558
Bondrée

Bondrée c’est un roman policier qui parle aux gens, qui parle à l’enfance, qui vous emmène dans les recoins enfouis de votre tête avec une touche énorme de poésie. Vous cherchez un tueur, vous y trouverez l’âme pleine de boomerangs d’un policier, les senteurs des confitures, l’amour d’une fratrie, les réflexes protecteurs des mères et même un peu plus. J’ai beaucoup aimé ce roman parce qu’Andrée A. Michaud sait autant faire parler les adultes que les enfants. Sous ce dernier aspect, j’ai eu l’impression de retrouver une part de l’esprit de Scout chez la Punaise. Et puis ce livre c’est aussi un parler qui mêle anglais et français, « une langue métissée, une langue bâtarde incapable de trouver sa juste place » avec des expressions qui sentent bon le lointain, le tout accentué par le lieu où se déroule l’histoire. Bondrée, Boundary, cette terre, qui relie les Etats-Unis au Canada, « apatride, un no man’s land englobant un lac, Boundary Pond, et une montagne que les chasseurs ont rebaptisée Moose Trap, le Piège de l’orignal ». Un no man’s land où se promène des girls qui partagent une amitié indéfectible, du genre de celle qui lie Anna et Francesca D’acier, des beautés devenues proies des fantasmes. L’écriture est charnelle, profonde, intelligente et je ne peux que conseiller fortement ce roman.
Commenter  J’apprécie          480
Bondrée

1967.

C’est l’été, les vacances. Et dans la forêt de Bondrée, vaste région boisée située dans le Maine près de la frontière canadienne, résonnent les voix de Zaza Mulligan et de Sissy Morvan. Elles sont jeunes, belles, ont les jambes démesurément longues et bronzées. Elles chantent « Lucy in the sky with diamonds », rient. Elles ont la vie devant elles...



La forêt de Bondrée est un endroit magique, loin des villes et de la fureur de vivre. Tout y est simple et naturel. On se promène. On se baigne. On observe la faune et la flore. On y côtoie Canadiens et Américains. On y parle français et anglais. Tous les estivants se connaissent plus ou moins. C’est un petit coin de paradis pour chacun où voisins, parents, amis aiment à se ressourcer.

Mais lorsque Zaza Mulligan est retrouvée déchiquetée par un piège à ours, il y plane un sentiment de mal-être qui trouble profondément chaque vacancier. Comment un lieu si charmant peut-il encore receler de pareils pièges ? Quel accident absurde !

Et lorsque son inséparable amie, Sissy Morvan, est à son tour retrouvée morte dans les mêmes conditions, tout le monde comprend qu’un tueur fou règne au sein de cette forêt...



« Mais il était trop tard et personne ne saurait jamais si Zaza et Sissy étaient pourries à l’os, destinées à devenir ce qu’on appelait des bitches et des vieilles bitches. Alors on leur en voulait presque d’être mortes et de provoquer ces examens de conscience où on prenait la mesure de sa banalité et de sa mesquinerie, de l’aisance avec laquelle on parvenait à juger et à condamner sans d’abord se regarder bien en face dans le miroir. »





Voici un roman noir très marquant. Très marquant d’abord par son écriture très littéraire, au vocabulaire riche et soutenu, où les descriptions sont de véritables tableaux, où les sentiments et émotions sont minutieusement rapportés et traduits, où la langue même est un délicieux mélange de français et d’anglais.



Très marquant aussi par sa construction qui ne comporte aucun dialogue, mais dont la narration est celle de deux personnes. Celle de la romancière d’abord qui cerne admirablement la communauté et les policiers responsables de l’enquête en leur apportant crédibilité et précision. Celle ensuite d’une fillette de douze ans, grande admiratrice des deux jeunes filles, qui par son regard enfantin et joueur apporte de la fraîcheur, mais qui peu à peu va perdre sa spontanéité et être propulsée dans le monde des adultes face aux évènements tragiques qui se déroulent sous ses yeux.

« Ce n’est qu’au cours de cet été, quand les événements se sont précipités et que mes repères ont commencé à vaciller que j’ai compris que ces peurs enfouies au coeur de toute enfance refont instantanément surface lorsque vous constatez que la stabilité du monde repose sur des assises qu’un simple coup de vent mauvais peut emporter. »



Marquant enfin par les légendes qui continuent de courir sur Bondrée et laissent planer le doute jusqu’à la fin du roman.



Un roman que j’ai adoré par son atmosphère envoûtante, sa description d’une nature foisonnante, ses personnages richement observés et en particulier celui de l’inspecteur Michaud, policier bourru au professionnalisme à l’ancienne, attaché à des valeurs humaines profondes et entouré de ses fantômes.

Une auteure canadienne à découvrir, un roman à lire !

Commenter  J’apprécie          474
Bondrée

C’était un été, celui ou Lucy se promenait dans le ciel avec des diamants en guise d’étoiles. C’était à Boundary, un no man’s land perdu entre la frontière du Maine et celle du Québec. Un lac, des cabanes en bois, une chaleur moite, et l’insouciance de l’époque. Tout le monde se connait, vient ici pour quelques semaines de vacances, ou trapper le castor. Des provisions de sirop d’érable, de bières et de whisky pour tenir le choc, celui d’un retour à la nature, celui qu’on ne souhaite jamais vivre. C’était l’été 67 et je sifflote un air de Procol Harum en descendant vers le lac de Bondrée.



Avec des senteurs de pin et d’érables, j’écoute le chant des grenouilles qui croassent aux abords d’un lac. Croa-Croa me susurrent-elles, rien d’érotique dans leurs mots, plutôt genre fais gaffe toé avec tes gros sabots poussiéreux à ne pas m’écraser les cuisses. Alors je pourrais me croire dans un petit coin de paradis, quelques crisses par ci, quelques câlisses par là, histoire de me rappeler que je suis du bon côté de la frontière, et pourtant… oui parce qu’il y a un pourtant à tout image d’Épinal même collée au sirop d’érable, une petite fille vient d’être retrouvée, aux abords d’une clairière, morte, sauvagement mutilée. Une bête sauvage ? ou un monstre humain. Un piège à ours rouillé à ses pieds - ou du moins dans sa jambe déchiquetée. Faut-il poser des pièges à bête humaine pour survivre dans cette contrée ?



Un flic lessivé par la vie, par la poussière et par les horreurs de son taf… Faut-il le rappeler… Lorsqu’on voit le corps d’une gamine… Puis une seconde, aux abords d’un même coin. Là, on ne parle plus accident d’un vieux piège laissé à l’abandon, mais bien d’un second meurtre. Toujours aussi sauvages, les hommes perdus dans cette luxuriante forêt aux odeurs de pins et de champignons. C’est là que j’entre en scène, dans un polar nature-writing, car tout aussi prenant soit l’histoire, celle-ci, sombre et sans guère d’espoir, est servie par une magnifique plume, aussi belle que celle d’un lagopède à queue blanche, aussi envoûtante qu’un slow de Procol Harum, qu’une mélodie inspirée par J.S. Bach. Je tourne les pages, pour l’ambiance sublimante de ces mots aux détours d’un coin de forêt perdue dans un no man’s land, aux abords d’un lac, à Bondrée, un été 1967, l’été où de jeunes filles insouciantes sifflotent A Whiter Shade of Pale en faisant voler leur mini-mini jupes en poil de castor.



C’est quand que la neige viendra lessiver tous les mauvais esprits de cette contrée et que les aurores boréales illumineront les âmes perdues dans le ciel ?
Commenter  J’apprécie          462
Bondrée

En ce début d'été 1967, l'ambiance est aux vacances au bord du lac de Boundary Pound, lieu de villégiature idyllique entouré de profondes forêts aux confins du Québec et des USA.

Zaza et Sissi, deux ados meilleures amies du monde, et leurs familles sont au nombre des estivants. Barbecues, bronzage, papotage, canotage et barbotage sont au programme.

Et puis le paradis devient enfer quand Zaza disparaît. On la retrouve morte, vidée de son sang, la jambe coincée dans un vieux piège à ours rouillé. Malheureux accident ?

Le doute s'efface quand Sissi disparaît à son tour, et est retrouvée dans les mêmes circonstances : un tueur de jeunes filles sévit à Boundary/Bondrée.

J'ai acheté ce roman sur la foi de nombreuses critiques positives et de la 4ème de couverture (grande naïve que je suis), qui promettait « Une écriture raffinée au service d'atmosphères angoissantes et de subtiles explorations psychologiques ».

Et cela avait pourtant bien commencé : mise en place lentement mais sûrement, ample description du décor et des réflexions des personnages, rupture de temporalité avec l'histoire tragique d'un trappeur réfugié dans les bois environnants après avoir déserté pendant la 2ème Guerre mondiale, multiplicité des points de vue, ambiance de plus en plus oppressante.

Mais les qualités des premiers chapitres sont très vite devenus les défauts du reste du bouquin : l'intrigue est trop mince et le dénouement presque bâclé, les descriptions du paysage et de l'ambiance deviennent d'une lourdeur accablante et sans intérêt, les pensées des personnages se transforment en ruminations larmoyantes d'autant plus pénibles qu'elles sont répétitives et interchangeables, et l'insertion à tout bout de champ de phrases en anglais est carrément horripilante. Beaucoup trop de lyrisme et de pathos pour moi.

Je reste sur une impression de remplissage et de bavardage.

Un livre qui m'a ennuyée et que j'ai lu jusqu'au bout mais en diagonale.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          452
Bondrée

Il est courant d'hésiter entre polar et thriller lorsqu'on a entre les mains un roman noir immersif où il y a crime et tension à la fois. Dans "Bondrée", il y a les deux mais c'est un troisième élément qui m'a séduite, davantage encore que les premiers : l'atmosphère.



"Bondrée" est une plongée dans un environnement qui offre de nombreux contrastes : le lieu idéal pour une villégiature pleine nature, l'oppression de la forêt profonde et de ses fantômes ; la jeunesse pleine de torpeur en cette fin de sixties, l'activité des adultes ; le passé spectral et le présent brumeux.



Comme je le disais, ce que j'ai le plus apprécié, c'est moins l'histoire et l'enquête (dont je trouve d'ailleurs l'issue un peu décevante) que l'atmosphère de sauvagerie latente parfaitement rendue par l'auteure. Jusqu'à l'étouffement. Evocation d'une nature trop dense qui recèle trop d'ombres et de secrets, souvenir de la trappe et des chasseurs que la solitude des bois pouvait rendre fous après les avoir marginalisés. Les descriptions sont terriblement réalistes : on perçoit l'humidité, la chaleur, on s'agace du vol des mouches, de la piqûre des moustiques, on a soif, on se sent perdu, on cherche la lumière.



Une belle rencontre qui laisse sa trace et qu'on est heureux de voir s'achever, histoire de respirer un grand coup pour se sentir vivant.





Challenge ATOUT PRIX 2022

Challenge MULTI-DEFIS 2022

Challenge PLUMES FEMININES 2022
Commenter  J’apprécie          450
Bondrée

Bondrée est le premier livre de Andrée Michaud que je lis et surement pas le dernier.

Je reconnais que sans le Challenge Lecture Commune Polar animé par Sallyrose ( encore merci à elle ), je serais surement passé à côté de ce très bon livre encore un bon moment.

Bondrée : j’avoue qu’au tout début ce titre a évoqué certes la nature pour ma part, mais de manière erronée. Pour moi cela évoque un rapace la Bondrée apivore, et j’ignorais complétement que ici, Bondrée évoque un endroit bien précis, Boundary Pound qui est un lac dans l’état du Maine tout proche de la frontière canadienne .

Ce lac est un magnifique lieu de villégiature pour les amateurs de nature, de foret et de pêche.

En été 1967, les vacances sont au rendez-vous autour du lac. Le soleil, le cadre sylvestre, les odeurs de fruits sauvages, les cris des enfants s ‘amusant dans l’eau, tous les ingrédients sont réunis pour décompresser. Deux jeunes filles à peine sorties de l’adolescence, à moins que nous parlions de deux jeunes adolescentes pas encore tout à fait des jeunes filles se démarquent un peu par leur joie de vivre et leur vitalité, mais après tout il faut bien que jeunesse se fasse… Zaza Mulligan et Sissy Morgan sont un duo que rien ne semble pouvoir séparer….Mais ….

Zaza va être découverte morte dans la foret, victime d’un ancien piège à ours… Très vite l’imagination collective s’enflamme et on fait le lien avec un ancien trappeur Pierre Landry ayant vécu dans la région bien des années avant. Le fait que ce trappeur est officiellement mort depuis plusieurs années n’empêche évidemment pas les esprits de s’enflammer et on commence à considérer la foret d’un autre œil…

Je n’en dirais pas plus sur cette histoire qui se lit, je dirais même qui se savoure car l’écriture de Andrée A. Michaud est vraiment délicieuse. Ses évocations de la nature, de la foret nous transportent là-bas et on sent le bruissement du vent qui agite les branches des arbres ….

Elle a su créer des personnages attachants, en particulier la petite Andrée Duchamp, une fillette aux portes de l’adolescente, et qui va essayer de comprendre pourquoi la vie de tous les vacanciers présent sera bouleversée à jamais par cette histoire…

En conclusion, je dirais que Bondrée est un excellent roman noir, doté d’une écriture à la fois puissante et poétique.





Lecture Commune Polar février 2019

Commenter  J’apprécie          453




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Andrée A. Michaud (1248)Voir plus

Quiz Voir plus

Fantômes

Dans quelle pièce de W. Shakespeare le héros est confronté avec le spectre de son père ?

Le marchand de Venise
Richard II
Hamlet
Titus Andronicus

10 questions
127 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}