Citations de Anna Gavalda (2660)
Allez, il faut pleurer une bonne fois pour toutes. Tarir les larmes, presser l'éponge,
essorer ce grand corps triste et puis tourner la page.
Simon chantait, Vincent riait et Lola souriait. Nous marchions tous les quatre au milieu d'une chaussée toute chaude à l'entrée d'un village de l'Indre. Il flottait dans l'air une odeur de goudron, de menthe et de foin coupé. Les vaches nous admiraient et les oiseaux s'appelaient à table. Quelques grammes de douceur.
Peu avant d'arriver au castel de la tante Paule, Simon nous a dégoté un petit chemin bordé de mûres. Nous nous sommes jetés dessus en évoquant les charmilles de la maison de Villiers avec des trémolos dans la voix. Carine qui n'avait pas bougé son cul de la voiture nous a rappelé que les renards pissaient dessus. On s'en foutait. Erreur... - Bien-sûr. L'echinococcose, ça ne vous dit rien (...) - Mais c'est des conneries ça ! C'est boulchite et compagnie ! Les renards, ils ont toute la nature pour pisser ! Tous les chemins ! Tous les talus ! Tous les arbres et tous les champs alentour et il faudrait qu'ils viennent pisser la ?! Exactement sur nos mûres ?! Mais c'est n'importe quoi ! Moi, c'est ça qui me rend malade. Ce sont les gens comme toi qui abîment toujours tout (...) Elle nous a gâché nos mûres et notre peu d'enfance avec.
T'es pas obligé de l'aimer. C'est tout ce que j'ai à dire. Tu vas me répondre que je suis comme ça à cause de mon malus et t'aurais raison. Mais c'est justement parce que j'ai déjà parcouru ce chemin là que je te le montre : on n'est pas obligé d'aimer ses parents quand ils se comportent comme des grosses merde, c'est tout.
Elle les serrait le plus fort possible. Tout son équilibre était là aujourd'hui. Ni devant, ni derrière, mais là. Juste là. Entre ces deux coudes débonnaires...
- J'ai six soeurs...
- Et alors ?
- Alors je te le dis le plus simplement du monde : abandonne. Ce que femme veut, Dieu le veut.
Il aimait la vitesse. Il aimait vraiment ça. Plus que tout au monde. Plus que les filles même. Elle lui avait offert les seuls moments heureux de sa vie : calmes, apaisants, libres...
D'aussi loin qu'il se souvienne, il avait toujours eu un moteur entre les jambes et une espèce de démangeaisons au creux de la main et, d'aussi loin qu'il se souvienne, il n'avait jamais envisagé la mort comme un problème bien sérieux. Une contrariété supplémentaire tout au plus... Et encore... Puisqu'il ne serait plus là pour en pâtir, quelle importance, vraiment ?
Laisse donc les torchons et les serviettes dans le même tiroir, la vie est plus amusante quand il y a un peu de bordel...
Alors, voilà, regarde, c'est ça, ma vie : c'est rien. Je fais rien. Je vois rien. Je connais rien et le pire c'est que je comprends rien...
Elle interpella son reflet en silence : Alors ? C'était ça le programme ? Se démerder, quitte à s'enlaidir, quitte à se perdre de vue, pour ne jamais rien devoir à personne ?
Non, sérieusement ? C'était ça ?
Elle passa sa main sur son crâne râpeux et eut très envie de pleurer.
Ces déjeuners, si espacés fussent-ils, lui bousillaient toujours les intestins. Elle en ressortait pliée en deux, chancelante et comme écorchée vive. Comme si sa mère s'appliquait, avec une méticulosité sadique et probablement inconsciente, quoique, à gratter les croûtes et à rouvrir, une à une, des milliers de petites cicatrices.
Il aura bientôt vingt ans. Cet âge décourageant où l'on croit que tout est possible. Tant de probabilités et tant d'illusions. Tant de coups à prendre dans la figure aussi.
J'étais un peu à la bourre ,surtout qu'il y avait du brouillard sur l'autoroute .
J'ai éteint la radio parceque j'avais besoin de réfléchir .
Je me faisais du souci pour cet entretien, je savais qu'on était sur la sellette avec un concurrent important et pour moi c'étais un gros challenge;
.
D'ailleurs, j'ai même failli rater la sortie .
-Franck,
- Quoi encore?
- Y sont où tes parents?
- l'en sais rien.
-Comment ça, t'en sais rien?
- J'en ai pas.
- Mon père, je l'ai jamais connu... Un inconnu qui s'est vidé les burnes à l'arrière d'une bagnole... Et ma mère, euh..
-Quoi?
- Ben ma mère, elle était pas très contente qu'un connard dont elle arrivait même pu à se souvenir le nom se soit vide les burnes comme ça...alors euh...
- Quoi?
- Ben rien.
- Rien quoi?
- Ben elle en voulait pas..
-Du mec?
- Nan, du petit garçon.
- Camille?
- Oui.
- Dis-moi quelque chose de gentil.
- Pourquoi?
- Pour bien commencer l'année..
- Non. Je suis pas un juke-box.
- Allez..
Elle se retourna:
- Laisse donc les torchons et les serviettes dans le même tiroir, la vie est plus amusante quand il y a un peu de bordel...
- Et moi? Tu veux pas que je te dise quelque chose de gentil pour bien commencer l'année?
- Non. Si... Vas-y.
- Tu sais... Ils étaient magnifiques tes toasts…
- Mais elle a vraiment dit : «S'il n'y a plus de pain, donnez- leur de la brioche...»
- Bien sûr que non, voyons... Jamais elle n'aurait prononcé une ineptie pareille... C'était une femme très intelligente, vous savez..
Et Camille se dépêchait de consigner ce sourire-là, ce ravissement amusé d'un garçon qui épluchait l'histoire de France comme d'autres feuilleteraient un magazine de cul.
C'est lui, ta copine? Enfin c’est elle? Dis donc, tu m prépares quoi, là? Des doubitchous confits?
-C'est une soupe, figure-toi…
- Ça? Une soupe?
- Parfaitement. Une soupe poireaux pommes de terre de chez Liebig.
El C'est de la merde. En plus tu l'as laissée brûler, ça va être dégueulasse... T'as rajouté quoi la-dedans? ajouta-horrifié, en soulevant le couvercle.
Euh... de la Vache Qui Rit et des morceaux de pain de mie..
- Pourquoi t'as fait ça? s'inquiéta-t-il.
-C'est le médecin... Il m'a demandé de la retaper.
- Eh ben, si elle se retape avec ce truc-là, chapeau! À mon avis, tu vas plutôt la faire caner, oui.
Sur ce, il attrapa une bière dans le Frigidaire et alla s'enfermer dans sa chambre.
L'enlèvement fut désastreux. Il cognait sa belle dans les tournants et manquait de tomber à chaque marche. Heu. reusement, il avait pensé à prendre la clef de la porte de service et n'eut que trois étages à descendre. Il traversa l'of. fice, la cuisine, manqua de la faire tomber dix fois dans le corridor et la déposa enfin sur le lit de sa tante Edmée.
- Écoutez-moi, je dois vous découvrir un peu, l'ima-gine... Je... Enfin, vous... Enfin, c'est très embarrassant,
quoi..
Elle avait fermé les yeux.