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Citations de Anne-Catherine Blanc (45)


Nous y voilà, Moana, en face de la tombe où tu vas reposer, comme disent ceux qui croient, ceux qui s’appuient sur la religion pour se soutenir, comme disent aussi ceux qui font semblant de croire et ne s’appuient que sur l’imposture lénifiante des mots. Pour l’instant, il ne s’agit que d’un simple trou dans la terre, où quatre hommes ont descendu ton cercueil avec des cordes. La vérité nue, enfin presque, disons à peine voilée. Plus tard viendront la dalle, les inscriptions, les fleurs. L’emballage, quoi. Rien n’est trop beau pour éviter de la regarder en face, la vérité.
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Mais il arrive parfois, quand il trace un kanji, de ne plus se sentir exister que comme souffle vital, comme pur élan du corps devenu simple conducteur de l’énergie universelle. Dans ces instants de grâce, il s’oublie et se fond dans le creuset du monde. Sa vie alors n’est plus sa vie, elle participe de cette énergie démesurée et il expérimente à l’avance, ébloui comme un enfant qui mâchouille un bout de pâte crue avant que sa mère n’enfourne le gâteau, la saveur inachevée mais grisante, de son éternité
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Mais, avant le soir de sa chute, elle ne prit jamais conscience de la haine qu’une créature comme elle pouvait générer dans l’un ou l’autre clan.

La limpidité presque angélique de ses intentions la sauvait toujours de désastre. La sincérité de son regard, la spontanéité de ses élans la protégeaient du mal. Parvenus au bord du gouffre, ses agresseurs potentiels renonçaient à l’y pousser, parce qu’elle était vraie, parce qu’elle était pure, et sans doute aussi parce qu’ils n’étaient pas totalement pervertis, parce qu’ils étaient encore capables de pressentir en elle cette vérité, cette pureté, capables encore d rougir d’eux-mêmes.”

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Ne regarde pas, n’écoute pas. Regarde l’océan. L’océan t’a toujours sauvé de la médiocrité, quand tu la sentais peser vraiment trop fort sur ta pauvre vie d pauvre petit Paulot paumé. C’est pourtant vrai qu’on voit l’océan, d’ici, les montagnes s’entrouvrent sur une belle échancrure verte de lagon, frangée de la ligne blanche et nette du récif qui la sépare du bleu profond, du moana …
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Des montagnes sublimées par cette lumière mouvante, qui joue à se faufiler entre le bleu du ciel et de gros nuages gris perle, roulant très haut; Des montagnes qui se jettent dans le lagon, comme toutes celles de l’île, n’offrant aux habitants qu’une mince bande de terre habitable de part et d’autre de la route de ceinture
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Ces tatouages-là sont faits pour être exhibés, visibles de tous, ils grimpent à l’assaut des membres, enlacent les torses, soulignent l’arc des reins, ciblent les épaules ou les crânes.

D’autres, au contraire, s’enveloppent de mystère, posés délicatement sur la rondeur d’une fesse, effleurant le creux d’une aisselle ou le renflement d’un pubis, encerclant l’aréole d’un sein. Ces tatouages-là sont d’abord des offrandes amoureuses, de tendres surprises à l’amant qui, pour la premières fois, les dévoile sur le corps désiré. Ils deviennent ensuite des secrets d’alcôve, des sujets de plaisanteries privées, de discrets petits sceaux garant d’intimité.

Et le tatoueur à longueur de journée écoute, conseille, caresse, palpe, gratte, pince, et puis transperce et brûle et imbibe d’encre indélébile les épidermes de ses frères humains.

Dépositaire de tous les secrets du monde.

A la fois artiste graphique et écrivain public. Ecrivain à fleur de peau.”

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nous avons eu si peu de temps, Moana. Nous avons gaspillé à nous guetter mutuellement, à nous apprivoiser, à nous connaître. Mais dans le bleu, d’abord quand je t’apprenais à plonger et ensuite quand, devenu en peu de mois mon égal, tu t’amusais à me faire comprendre que bientôt l’élève dépasserait le maître, nous avons vécu ensemble des moments d’une telle intensité que leur souvenir vaut bien une vie.
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Chez nous, les rues de la nuit appartiennent aux furtifs, aux baveux, aux électriques. Elles appartiennent aux chats pelés qui bondissent des poubelles, crachoteurs d’injures chuintantes, griffes et dents jaillies du fourreau pour défendre la pauvre arête ou la tripaille fétide qui alimentera en eux jusqu’au lendemain la petite braise de vie, étique et obstinée. Elles appartiennent aux lignes de chiens galeux, mangés de tiques, mais forts de leur nombre : masse protéiforme et grondante, capable d’attaquer l’ivrogne branlant ou de faire reculer le jouisseur clandestin filant à son plaisir, feutré, circonspect, concentré dans son effort pour noyer l’ombre qui le talonne dans l’ombre caressante des murs, un ton plus noire.
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Aucun père, qu’il soit père biologique ou père d’élection, ne maîtrise la mort de son fils.
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Chez nous, les rues de la nuit appartiennent aux furtifs, aux baveux, aux électriques. Elles appartiennent aux chats pelés qui bondissent des poubelles, crachoteurs d'injures chuintantes, griffes et dents jaillies du fourreau pour défendre la pauvre arête ou la tripaille fétide qui alimentera en eux jusqu'au lendemain la petite braise de vie, étique et obstinée. Elles appartiennent aux ligues de chiens galeux, mangés de tiques, mais forts de leur nombre : masse protéiforme et grondante, capable d'attaquer l'ivrogne branlant ou de faire reculer le jouisseur clandestin filant à son plaisir, feutré, circonspect, concentré dans son effort pour noyer l'ombre qui le talonne dans l'ombre caressante des murs, un ton plus noire." (p.7) Poétique : "La Faena a un petit sexe humide et souriant, un petit coquillage rose corail, niché dans sa pelote d'algues douces. La Faena a des yeux d'obsidienne, des lacs volcaniques sans mémoire dans un visage de lave épuré, mais rigide, infiniment lointain, comme ignorant de sa propre histoire. (p.26)
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Le soleil… on lui avait promis le soleil, cet amant implacable qu’elle poursuit et qui se dérobe à elle depuis tant d’années.”
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Enclos dans ces routines gigognes, le temps de Colette tourne en rond comme un hamster dans sa roue.”
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Car si d'obscures raisons mènent les rois comme les chats, le chat est supérieur au roi en cela que ses raisons, pour obscures qu'elles soient, suivent toujours le penchant de leur coeur. En outre, l'amitié des rois se peut acheter de paroles flatteuses et de billets à ordre tirés sur l'avenir, quand l'amour des chats ne se marchande pas, et par là même n'a pas de prix."
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Durant la nuit, il vaquait à de nombreuses occupations, félines par essence et donc inaccessibles à l’entendement humain. On l’apercevait parfois qui cheminait pensivement sr les remparts, d’un train égal d’ambassadeur investi d’une grave mission ; parfois se découpait comme un point d’encre, sur le lavis d’un disque de lune, sa ronde et fluide silhouette surmontée de la courbe interrogative d’une longue queue annelée. Parfois aussi, il disparaissait en quelque gouttière secrète, et bien malin qui eût alors réussi à le suivre ! Mais toujours il revenait à la chambre de la tour et aux caresses de l’astronome, qu’il semblait priser à l’égard d’un ami cher et fidèle ; et l’astronome, comme ami, lui aussi appréciait son chat.
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Gente dame, ne tremblez point ! Certes, du fait de ma décrépitude, je suis impardonnable d’oser seulement effleurer votre manche. Mais si ma carapace est immonde, l’âme qui s’y trouve enfouie a su rester noble et fière. Daignent vos beaux yeux, ouverts à la lumière du jour, percer l’apparence des choses et vous faire voir que vous n’avez nulle raison de me craindre ni de me fuir. “ En entendant ces mots la belle, étonnée, regarda l’aveugle, et soudain ne le trouva plus repoussant, ni effrayant. Elle fut fort surprise par la douceur de sa voix et la suavité de ses paroles, choses auxquelles ni son mari, bourgeois grincheux, ni son amant, homme de grand cœur mais de peu d’éducation, ne l’avaient habituée. “Asseyez-vous donc sur cette escabelle, reprit l’astronome en la lui présentant aussitôt car, comme beaucoup d’aveugles, il connaissait à une ligne près l’emplacement de chaque objet autour de lui. Nous n’avons point ici, reprit-il, de ces douceurs qui plaisent aux dames, pâtes d’amandes, rousquilles, tourons et autres délicates confiseries ; mais si vous vous en daignez contentez, voici quelques noix encore fort bonnes, quoique cueillies l’automne dernier, et une pomme qui elle aussi traversa l’hiver sans dam
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“ Les ancêtres de Poerava étaient arrivés là guidés par les étoiles, sur d’immenses pirogues doubles, pontées, capables d’affronter les rages d’un océan que seule l’inexpérience d’autres hommes, un jour, permettrait de baptiser Pacifique.”
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Il voudrait enfoncer la tête dans le coussin, le plaquer sur ses deux oreilles, mais il s'est lui-même tellement ficelé dans la saleté de drap qu'il ne peut plus dégager ses mains. Le temps d'y arriver, une porte s'est ouverte en grinçant, un murmure lui parvient à travers la cloison, quelqu'un est en train de calmer la gosse, de lui parler doucement, de l'aider à se rendormir. Pas à dire mon Paulot : les familles extensibles, c'est chiant la plupart du temps, mais ça a parfois du bon. T'imagines, nouveau père à Paris, dans un appart' de deux mètres carrés, t'aurais dû y aller toi-même.
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C’est quand il jardine ou qu’il débrousse qu’il imagine l’île avant que les hommes ne la civilisent, ou n’y apportent leur propre forme de sauvagerie, question de vocabulaire. Depuis plus de vingt ans qu’il est arrivé, il n’a jamais pu oublier son premier contact avec cette nature tropicale obscène, explosive. Ce jour-là, il a eu la vision originelle, fragment de magma dans l’infini marin, parcelle constituée au centre de la soupe primitive. Le magma bouillonne, fermente, les coulées s’épaississent, se figent en strates sillonnées par le réseau souterrain des lava tubes.
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Moana, c'est le bleu absolu que prend l'océan quand le regard plonge vers l'abysse, vers le vertige sans fond qui s'ouvre au-delà du lagon [...]. Moana, c'est la matière bleue [...]. Plonger dans le bleu, c'est la petite mort, le renoncement à l'être. [...] Au-delà du moana le bleu devient noir. C'est "'ere'ere", le bleu noir qui précède les ténèbres [...]. Moana, c'est aussi un prénom.
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"Lorsqu'il admit l'approche inéluctable de la cécité, l'astronome éprouva d'abord un grand sentiment d'injustice et de révolte. Mais son coeur était droit, son âme était noble. Il n'imputa son malheur ni à dieu ni à diable ; il comprit qu'à trop scruter les corps célestes, il avait dû faillir un jour à regarder en face quelque vérité de cette terre, et sut que l'heure était venue de tourner ses regards en lui-même, à la recherche de cette vérité. Quand sa vue eut baissé au point qu'il ne se sentit plus capable de remplir auprès du roi ses fonctions d'interprète des volontés du ciel, il l'alla trouver".

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