IInterview de Anne-Sophie Silvestre, l'excellent auteur médecin à Saint-Maur en poche pour le blog : http://lescritiquesdejeremy.blogspot.fr/
elle s'est confiée aux caméras du blog
Méléagre se laissait porter par le bavardage d'Atalante, il écoutait le son de sa voix, il riait avec elle, il ressentait une étrange impression de chaleur et il se sentait incroyablement heureux.
"Que m'arrive-t-il? songeait-il. Mon cœur bat comme si je me trouvait en face d'un ennemi armé... Est-ce que je suis amoureux? C'est donc cela, être amoureux? Comme c'est bien, comme c'est bien, comme c'est agréable..."
Et soudain, il ne put s'empêcher de demander:
- As-tu un fiancé?
- Les hommes sont idiots ! s'emporta Mme Croix. Chair à canon amoureuse du canonnier ! ... Un tambour, un canon, un drapeau, un bureau de recrutement : aucun mâle ne peut résister ! Mais, pour l'amour de Dieu, pourquoi ces choses là vous fascinent-elles à ce point ?
- C'est incroyable, fit enfin Louis XV, je n'avais encore jamais rien vu de pareil. Quand vous êtes un garçon, votre virilité ne fait aucun doute. Quand vous êtes une fille, même avec votre maquillage barbouillé et votre coiffure en tas de foin, il est indiscutable que vous êtes une fille ; cela vous donne même un petit air attendrissant de fillette battue...
Les tambours battirent, puis le silence se fit. Le seul
bruit qu’on entendait était celui des drapeaux agités
par le vent froid d’avril. Napoléon descendit l’escalier de
pierre.
«Soldats, je vous fais mes adieux…»
Les soldats de la garde, alignés comme pour la plus parfaite
des parades, étaient sombres et muets comme à des funé -
railles.
«Depuis vingt ans, je suis content de vous ; je vous ai
toujours trouvés sur le chemin de la gloire… Soyez fidèles au
nouveau roi que la France s’est choisi ; n’abandonnez pas
notre chère patrie ! Aimez-la toujours, aimez-la bien… Je ne
puis vous embrasser tous, mais j’embrasserai votre général…
et le drapeau !… Adieu, mes enfants!… Mes voeux vous
accompagneront toujours, conservez mon souvenir.»
C’était dans la cour de Fontainebleau, le 20 avril 1814.
Napoléon quittait la France. Il partait pour l’île d’Elbe. Il nous
quittait.
Le cabinet noir était un efficace département des services secrets de Louis XV. C'était un endroit où quinze employés étaient occupés jour et nuit à ouvrir et à lire les lettres avant les personnes à qui elles étaient adressées. On lisait les lettres, si besoin on en prenait copie, on les refermait et on les remettait au courrier. Et chaque matin le roi trouvait sur son bureau un rapport résumant tout ce qu'on y avait trouvé d'intéressant. Marie-Thérèse savait parfaitement cela. Elle le savait d'autant mieux qu'elle disposait en Autriche de son propre cabinet noir tout aussi diligent que son confrère français.

La France était envahie. Des soldats russes et prussiens
circulaient dans les rues de Paris. Nos vainqueurs, le
tsar Alexandre et le roi de Prusse, choisirent notre nouveau
gouvernement. Ils voulaient le retour de la monarchie. Ils
appelèrent Louis XVIII, le frère de l’ancien roi Louis XVI, qui
se trouvait alors quelque part en Angleterre.
Nous, les Français, nous assistions à ce chamboulement sur
lequel nous n’avions pas notre mot à dire. Les sentiments
étaient embrouillés, nous étions soulagés d’avoir la paix – on
avait entendu le canon jusqu’aux portes de Paris – mais, pour
beaucoup d’entre nous, voir finir l’Empire était une grande
douleur.
Chez nous, les Lavalette, le chagrin prenait en plus une
dimension personnelle. Mon père était un compagnon de la
première heure de Napoléon, maman était la nièce de
Joséphine, et moi, Joséphine de Lavalette, âgée de douze ans,
comme tous les enfants nés sous l’Empire, j’avais l’impression
de posséder une part de gloire à titre personnel.
Oui, je portais le même prénom que l’impératrice, et pour
cause, elle était ma marraine.
Mon père était le ministre des Postes de Napoléon; c’était
une immense responsabilité qui témoignait de la confiance
absolue de l’Empereur.
"Le 14 mars, alors que le soir tombait, la voiture dans laquelle se trouvait le chevalier d'Éon fit son entrée dans la grande cour de Versailles, et il se demanda soudain s'il n'était pas en train de faire une bêtise.
Il était habillé en femme. Très bien déguisé. Paré, coiffé, maquillé avec le talent et le souci du détail d'une femme du monde."
-Père, Marie-Louise n'est pas une marchandise que l'on peut ajouter dans la balance pour équilibrer un traité !
-Bien sûr que si, Louis. Vous, moi, votre mère, votre cousine, nous ne sommes pas autre chose. Notre devoir le veut ainsi.
Ce n'est pas un devoir facile, je vous le concède, mais quel devoir l'est ?
Au début de mai, notre nouvelle famille royale fit son
entrée à Paris. Nouvelle n’est pas le mot juste, cette famille
était au contraire très ancienne, elle avait régné sur la France
pendant mille ans. Mais depuis vingt-cinq ans, elle s’était
retirée et on les avait oubliés. Il s’était passé tant de choses
pendant leur absence : la Révolution et Napoléon.
Donc, bon gré mal gré, nous redécouvrions les Bourbons.
De cette antique lignée, il ne restait que cinq personnes. Deux
vieux messieurs : le roi et son frère, le comte d’Artois. Leur
nièce, la duchesse d’Angoulême. Et les deux fils du comte
d’Artois. Il n’y avait pas d’enfant jeune. J’appris qu’on appelait
le frère du roi : Monsieur, et sa nièce : Madame ; c’était,
paraît-il, un usage de la royauté.

Madame, c’était « l’orpheline du Temple », la fille de
Louis XVI et de Marie-Antoinette, l’enfant blonde qu’on avait
enfermée avec toute sa famille dans ce donjon planté au coeur
de Paris. Elle avait vu son père et sa mère partir pour l’échafaud.
On lui avait aussi enlevé son frère, le petit dauphin, sans
lui dire où on l’emmenait. En fait, il n’était pas loin, il se mourait
un étage plus bas ; mais cela, elle ne l’apprit que plus tard.
Elle était restée seule. Et enfin, vers sa seizième année, en
échange de prisonniers républicains, on lui avait permis de
rejoindre en Autriche la famille de sa mère.
Son histoire faisait verser des larmes au monde entier. Elle
était le membre de la nouvelle famille royale qu’on attendait
avec le plus de sympathie.
Ce fut donc sur Madame que je portai toute mon attention.
Je vis le profil d’une femme qui se tenait droite d’une façon
presque exagérée. Elle regardait devant elle, sans jamais
tourner les yeux vers les gens qui lui adressaient des mots de
bienvenue… Je me sentis décontenancée, elle ne ressemblait
pas à ce que j’avais imaginé… Pour tout dire, ce que j’avais
imaginé s’apparentait à Rapunzel, la princesse aux cheveux
d’or enfermée en haut d’une tour.