Citations de Arnaud de La Grange (77)
Les politiciens sont une ethnie étrange, qui se croit supérieure mais souvent vit à ras de terre. Avec leurs combines de sous-préfecture, ils pensent modeler le monde.
Mes yeux se sont posés à nouveau sur le mourant. Dehors, la lune avait percé et son visage était le seul blanchi par son pinceau. Il était beau. La beauté est injuste jusque dans la mort, elle la rend encore plus scandaleuse.
Sortir de l'état de guerre demande des efforts, et je suis paresseux !
Vous n'aimez pas la façon dont on tue ici, lieutenant ? On ne s'étripe pas comme il faut ? Vous vous êtes pilonnés, gazés, embrochés pendant quatre ans dans vos trous à rats. Et vous venez nous donner des leçons ! Nous ne sommes pas civilisés, car notre boucherie n'est pas aussi ordonnée que la vôtre ?
Ce n'est que bien plus tard que j'ai lu les vers prémonitoires d'Alan Seeger. Ils sont là, posés dans mon carnet de cuir.
J'ai un rendez-vous avec la Mort
Sur quelque barricade âprement disputée,
Quand le printemps revient avec son ombre frémissante
Et quand l'air est rempli des fleurs du pommier.
Les rafales d'armes automatiques élaguaient la jungle, les futaies assourdissaient les explosions de grenades. J'enrageais d'être cloué dans l'herbe, aux portes de la bagarre. Mon épaule me faisait mal et ma cuisse s'engourdissait. J'ai appelé le radio à mes côtés et j'ai demandé du soutien.
-Le soutien, c'est vous-même...,m'a-t-on répondu.
Il y a du grabuge du côté des Éliane. Les obus tombent si serrés que l'on n'entend plus les explosions distinctes, juste un grondement continu qui fait trembler la vallée. L'onde cogne contre la poitrine et sabote le souffle. C'est comme si des dieux en colère tapaient au marteau sur nos casques pour nous enfoncer dans le sol.
André avait été professeur de lettres au lycée Albert-Sarraut. Il m’apprenait l’Indochine et il m’apprenait la France. De mon pays, je n’avais jamais entendu parler comme cela. C’était lui, un « sang-mêlé », comme disent les Chinois, qui portait au plus beau notre langue et nos lettres. Peut-être parce qu’il n’était pas un héritier et qu’il connaissait le prix de ce qui lui était confié. Il avait sans doute en lui plus de France que moi.
Je suis pris de vertige devant le mystère de ces sacrifices croisés. La dramaturgie de cette lutte démente me prend à la gorge. Ce cercle de montagnes ressemble à des gradins surplombant une scène furieuse où se jouent la souffrance et la mort. Un théâtre où les dieux observent ce que les hommes ont fait de leur liberté.
Un chef vous fait comprendre que vous êtes essentiel. Plutôt que de vous faire sentir que vous dépendez de lui, il vous persuade que c'est lui qui dépend de vous. Il n'est pas le premier, mais la somme de ceux qui le suivent. [p.56]
Un chef vous fait comprendre que vous êtes essentiel. Plutôt que de vous faire sentir que vous dépendez de lui, il vous persuade que c'est lui qui dépend de vous. Il n'est pas le premier, mais la somme de ceux qui le suivent. [p.56]
[...] je me retrouve à chercher un sens à ma vie en faisant une guerre que pourtant le sens a fuie. [p.38]
J'étouffe de cette souffrance acceptée puisque la révolte ne mène à rien.
Dans le sud ,nous avons été les premiers à être libérés ,mais notre vie ne s'est en rien améliorée.Au contraire.
– Attention mon lieutenant ! Pour un soldat, rêver est plus dangereux que sortir des tranchées. Cela se termine toujours mal
Quelques mots viennent de tomber dans le combiné de la radio. Des mots de fonte, qui pèsent lourd dans la vie d'un homme jeune. C'est une voix que je connais, l'officier adjoint de Kervan. "L'opération de dégagement ne pourra aller jusqu'à vous. En accord avec le commandement, nous vous laissons libres de votre décision."
Une liberté que tout officier rêverait de se voir offrir, en d'autres circonstances .Pas là.Ces mots signifient que c'est à moi de décider de la vie de cent dix hommes.
Il y a ici un saisissant contraste entre cette profusion de corps jeunes, robustes et éclatants de vie et ce chaos de chairs broyées.La mort fait son marché sur un étal de premier choix
En ces soirs de mai, Giap inventait une tactique militaire, la submersion.
Les Viets les appellent les "fantoches". Un rien a décidé de leur vie, ils se battent et meurent d'un côté comme ils auraient pu mourir de l'autre.
Les politiciens sont une ethnie étrange, qui se croit supérieure mais souvent vit à ras de terre. Avec leurs combines de sous-préfecture, ils peuvent modeler le monde.