Je tourne la tête, comme Mohamed Ali qui, au quinzième round, vient de recevoir un magistral uppercut et cherche des mains Joe Frazier qui a disparu de son champ de vision. Mais il est déjà à terre dans la brume. L’autre méchant lui prépare un coup fatal qui va l’envoyer pour la première fois de sa carrière dans les roses, pour mon plus grand malheur.
Tout s’est joué au mot près, au moindre petit indice, à la seconde de trop, à un haussement de sourcil, à un micro-tremblement de la narine gauche. C’est l’Algérie. Je l’ai en moi. Seuls les adeptes du yoga et de la plongée en apnée peuvent y survivre.
Dans tous ces domaines, rien n’était acquis et des difficultés étaient embusquées autour de chaque point à régler. C’était comme ça, une réalité sociale incontournable chez nous. On n’aimait pas quand les choses se déroulaient normalement, sans incident de dernière minute, sans conflit, sans folle passion. Il fallait de l’adrénaline en grosse quantité.
C’était aussi ça, la pauvreté, avoir peu à répondre à ses enfants quand ils posent des questions sur leurs ancêtres, leur arbre généalogique, ou bien ne pas sentir l’intérêt d’en parler.
Chacun avoua son impuissance et s’en remit à Dieu. Ah, le bon Dieu ! Il était toujours d’un secours irremplaçable quand la gouaille ici-bas avait épuisé ses modestes ressources analytiques et décisionnelles.
Nous étions vite devenus amis, grâce aux Monty Python et, plus précisément, à La Vie de Brian, film qui m’avait définitivement transformé en anglophile convaincu. Un peuple capable de produire cet humour ne pouvait pas être mauvais.