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Critiques de Barry Lopez (28)
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À ciel ouvert

A l'instar d'une Kathleen Dean Moore (Petit traité de philosophie naturelle) ou d'un Wallace Stegner (Lettres pour le monde sauvage), Barry Lopez nous livre dans "A ciel ouvert" les récits de ses expéditions naturalistes et son regard sur les rapports entre animaux et humains.

Disparu il y a deux ans, il nous lègue un héritage littéraire fidèle à ses principes de protection des écosystèmes pour assurer la pérennité de la vie sur Terre.

En proposant une couverture vive et colorée avec du vert à foison, les Editions Gallmeister nous incitent à tourner les pages de ce livre sentant bon le terroir américain. Alors, laissons-nous tenter de découvrir la prose de Barry Lopez.

Après "Rêves arctiques", ces quatorze histoires nous permettent de comprendre pourquoi il a reçu de nombreuses distinctions littéraires et scientifiques.
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À ciel ouvert

En plein air.

La destruction volontaire ou accidentelle des sites archéologiques exposés à tous vents situés dans les déserts californiens représentait déjà en 1980 plus du tiers des vestiges préhistoriques. Quand Barry Lopez accède au cheval géant tracé au sol avec des petites pierres noires par un artiste indien il y a trois mille ans, il espère qu'aucune jeep ne viendra le laminer, que nul visiteur ne le vandalisera.

Dans le second récit, la migration des oies blanches de l'Arctique dans une des dernières zones humides de la Californie entraîne l'auteur, d'observations en interrogations quant au devenir de l'avifaune sauvage. Les chasseurs américains tuent les oiseaux sans discernement, sans connaissance et sans conscience de la portée de leurs actes.

Le troisième texte est à propos d'une randonnée aquatique dans le grand canyon du Colorado où "la nature a des pouvoirs de guérison" : "Tandis que le bateau dérive lentement, vous effleurez du bout des doigts une roche vieille de 1,9 milliard d'années".

Les récits de Barry Lopez se suivent et ne se ressemblent pas hormis le fil conducteur qui les unit tous à savoir comment faire corps avec l’environnement et le paysage, en comprendre les relations, y trouver sa juste place. L'évocation poignante d'amis disparus est révélatrice à ce sujet, des hommes simples et bons, nantis d'une vie riche et d'un savoir exceptionnel, sans esbroufe, généreux, lucides et subtils qui : "aux yeux de très nombreuses personnes... passeraient pour des ratés" car sans autre richesse accumulée que celle de connaissances puisées dans la nature. Entre les rodéos de taureaux, l'échouage des cachalots, l'étude des phoques, la culture des Anasazis ou les splendides volières de Tenochtitlàn, la Byzance aztèque, le même émerveillement mêlé d'effroi subjugue à la lecture. On est atterré puis soufflé par la petitesse et la grandeur des hommes.
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À ciel ouvert

Un recueil (à ce jour inédit en français) de textes naturalistes, poétiques et militants.



Récit de l’observation d’oies sauvages, d’un échouage de cachalots

sur la côte californienne ou encore de la recherche des traces

des tribus qui les premières peuplèrent l’Amérique du Nord…



Barry Lopez, disparu malheureusement en 2020, nous propose

un regard passionné et engagé sur la nature.



Un véritable hymne pour mettre fin à notre attitude destructrice

et prédatrice pour la vie sauvage.



Pour des lecteurs et lectrices curieux et passionnés !

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Le chant de la rivière

Barry Lopez, né à New-York en 1945, est une institution à lui tout seul. Ecrivain respecté et admiré, photographe nature, Barry Lopez est considéré comme l'un des meilleurs représentants du Nature Writing. Je l'ai connu avec le Chant de la rivière, puis j'avais acheté Rêves actiques et un ouvrage sur les loups qui me tenait à coeur, presque une bible pour les amateurs, Of wolves and men - pas (encore ?) traduit en français.



Le livre que je présente ici m'avait attirée pour trois raisons : la couverture, l'éditeur (je pioche souvent dans leur catalogue) et le résumé.



Malgré tout ses atouts, il m'a été extrêmement difficile d'entrer dans Le chant de la rivière. Fragmenté en courtes histoires, ce recueil se compose en fait de deux parties disticntes, The river notes et The desert notes. Il avait 24 ans lorsqu'il rédigea The desert notes et au moment de sa publication en 1975 il travaillait sur les River notes. Un ouvrage de jeunesse donc. Il m'a fallu pour ma part deux lectures, à 7 ans d'intervalle, pour apprécier pleinement ce livre.

Pourquoi cette réticence ? Peut-être parce qu'il me semblait, lors de ma première lecture, que ces textes disparates et sans liens dénotaient une vision chaotique des rapports que l'homme entretient avec la nature. Certains textes m'ont plu immédiatement, comme Le périmètre, le corbeau, le crépuscule. Ils sont empreints de poésie, la relation à la nature est évidente, lumineuse. Barry Lopez me touche davantage dès qu'il parle de paysages, d'animaux. Il se met à la place du héron, devient saumon.



Certains de ces récits sont contés à la première personne, comme celui de l'homme malade. D'autres se focalisent sur un individu, Barry Lopez nous donne alors son nom, nous dévoile un pan de sa vie, dans d'autres textes, le personnage est anonyme. Plus loin, il s'adresse directement... à qui ? au lecteur ? La plupart m'ont déroutée, m'ont laissée perplexe. Je sens confusément ce qu'il cherche à expliquer, à démontrer, mais sans que la forme, le style ne parvienne à m'émouvoir réellement.



Un recueil qu'il faut donc apprivoiser pour mieux en goûter la singulière beauté. Encore que, je ne sais pas à quel point les traductions françaises lui rendent justice. Curieusement, Le chant de la rivière a bénéficié de deux traducteurs... Quoi qu'il en soit, c'est l'un des grands noms du NW qu'il faut découvrir, aux lecteurs de se faire leur propre opinion...
Lien : http://lectures-au-coin-du-f..
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Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..





Un recueil en deux parties : la première autour de la rivière, la seconde aux confins d’un désert.



Un recueil pour se reculer du monde, découvrir d’autres paysages, écouter d’autres voix. Dans ces pages, on ne reçoit que la visite d’oiseaux, de cerfs, d’ours, de serpents, des saumons étincelants et autres animaux sauvages. On ne rencontre que très peu d’humains, encore ont-ils un lien avec l’imaginaire, un fil qui les relient à un monde plus subtil ou à l’opposé, ne sont-ils évoqués que pour leurs actes qui malmènent la nature.



La rivière comme comme une sylphide tout en gouttelettes, tout en ondulations. Elle étreint le héron, l’hôte de ses bords, oiseau immobile attentif et parfois cruel. Le génie des lieux.

La rivière comme une finalité, un exutoire : celle qui engloutit les chagrins, les peurs. Celle à qui on confie les tourments, certain si elle les recèle, qu’ils disparaîtront.

La rivière qui vit, parle, meurt, donne la vie et la reprend.



Le désert, lieu de recueillement, accompagne l'examen de soi. Il abrite des peuples aux habitudes de vie inconnues, incompréhensibles, des animaux qui se questionnent sur la bonne volonté des hommes. Il ralentit le temps, laisse celui qui ose y pénétrer écouter le sable qui glisse dans le sablier. Il reprend le territoire qu’on lui a dérobé, grignote ruines et vestiges de ce qui est abandonné comme on effacerait des souvenirs qu’on préfère oublier.





Des récits très courts, dans une langue poétique, imagée, créant sensations et jeux de lumière. C’est très beau à lire, parfois un peu hermétique, la clef d’entrée dans ces mondes demande beaucoup de patience et une nécessité de relecture.



Un très beau livre qui ne se raconte pas, qui doit être découvert doucement pour en appréhender toute la sensibilité.

Un recueil presque pour méditer sur ce monde qu’on habite, qu‘on effleure sans réellement le connaître, sans réellement le comprendre.

Un recueil pour permettre comme le dit un des personnages de "savoir ce qu’il faut faire pour éviter l’inutile".



(Mai 2021)
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Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..

Reflets dans un œil d’or de héron.

Le journal naturaliste et poétique de Barry Holstun Lopez (écrivain américain né le 6 janvier 1945) paraît déconcertant dès l’introduction puis on apprend au fil des phrases à voir le monde autrement, à travers l’œil d’un héron et l’esprit habité d’un homme attentif au moindre miroitement ou au plus ténu mouvement d’air : « Ton odeur est pareil à celle du gingembre sauvage. Quant tu lèves ta patte au-dessus de la rivière, l’eau ne s’en écoule pas et ne va donc pas troubler la surface transparente de l’eau des bas-fonds. » Les récits se juxtaposent sans autre lien que le cordon ombilical de la rivière pour la première partie du recueil intitulée River notes, The dance of herons (1976) et traduite par Le chant de la rivière, La danse des hérons. Elles n’ont pas toutes la même force, un impact similaire mais la vision de l’auteur est parfois fulgurante et neuve : « Pensez seulement aux odeurs dont un seul filament peut être pincé entre des rochers […] grâce à ces extensions invisibles, le caractère de la rivière est révélé, une piste nous conduit vers ce qui n’a jamais été examiné ». Dans un autre récit, on peut lire aussi : « Enfoncer ses mains dans la rivière, c’est sentir les cordes qui lient la terre en un seul tenant. » La seconde partie du livre, Desert notes, Reflections in the eye of a raven (1979), Reflets dans un œil de corbeau, Notes sur le désert, est introduite par un court extrait du Voyage d’un naturaliste autour du monde (1836) de Charles Darwin. Puis les feuilles du journal de Barry Lopez se stratifient en fines couches sédimentaires à mesure que les perceptions et les sensations s’accumulent et refluent aux rythmes insondables de la nature. Le lecteur pourrait facilement perdre pied dans cet imbroglio de vision qu’un monde merveilleux enfante sans relâche loin des hommes mais l’auteur revient sans cesse à la réalité. Les choses racontent toutes une histoire comme ce tapis navajo qui passe de main en main et recèle encore dans ses fibres « des odeurs enterrées » et « des bruits qui résonnent ». Il est difficile de conseiller ce livre déroutant de prime abord mais tressé en filigrane de filaments précieux. J’avais noté dans une revue spécialisée les dix livres de voyage choisis par Michel Le Bris, mauvais écrivain au goût sûr. Y figurait à côté du Léopard des neiges de Peter Matthiessen, du Temps des offrandes de Patrick Leigh Fermor, de Pèlerinage à Tinker Creek d’Annie Dillard, ce Chant de la rivière avec le commentaire : « Ce texte du plus secret des naturalistes américains a été un choc dans le monde des lettres outre-Atlantique. »
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Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..

Barry Lopez est l’un des grands nature writers américains contemporains (1945-2020). Le recueil le chant de la rivière suivi de Reflets dans un œil de corbeau se constitue de notes et historiettes en milieu forestier et dans le désert du Sonora dans le sud-ouest des Etats-Unis.

Dans un style parfois déroutant (les pensées du narrateur se mêlent à son ressenti physique) le récit donne droit, toutefois, à de belles envolées lyriques.

L’univers poétique des paysages est retranscrit comme vu à travers le prisme d’un microscope, le moindre grain de sable de la rivière est ausculté, la faune et la flore possèdent leur langage et leur âme propre. Mais toute cette magnificence est teintée de tristesse et de drame qui nous rappelle l’âpreté de la nature.

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Of Wolves and Men

!! livre en anglais !!



Le livre (plus tout jeune vu que la 1e édition date de 1978) pointe deux biais dans notre connaissance du loup (et ces biais sont loin d'être effacés en 2023) :

- d'une part vu le nombre de loups qui peuplent encore la terre au regard du (relativement petit) nombre d'heures que des scientifiques peuvent consacrer à son observation effective, notre connaissance du loup et de son mode de vie est condamnée à rester lacunaire (un loup n'est pas l'autre, une meute n'est pas l'autre) ;

- d'autre part la perception du loup d'un point de vue culturel dépend du "mode d'acquisition de la viande" dans la culture en question : s'il s'agit d'une société basée sur la chasse l'image sera plutôt positive, s'il s'agit d'une société basée sur l'élevage l'image du loup sera plutôt négative.
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Of Wolves and Men

Publié en 1978, Of Wolves and Men est un classique de la littérature non-scientifique sur la faune sauvage. Barry Lopez fut en effet l'un des premiers auteurs à tenter de réellement comprendre le loup pour en dresser un portrait fidèle et dépourvu des fantasmes et idées reçues liées à cette espèce. L'auteur rassemble ici les connaissances acquises sur le loup jusqu'aux années 70, mêlant à la fois biologie, histoire, sociologie et considérations plus culturelles.



Je pensais vraiment être passionnée par cette lecture mais j'en ressors un peu déçue. Ayant déjà pas mal lu sur le sujet du loup, j'ai trouvé le premier chapitre plus scientifique un peu dépassé, les connaissances sur le loup s'étant largement étoffées ces dernières années. J'ai également trouvé les chapitres plus "sociologiques" vraiment ennuyeux mais j'avoue quand même à la base un petit désintérêt pour les cultures amérindiennes et leur mythologie. Pareil pour le chapitre 4 sur l'image du loup dans l'intellectuel collectif que j'ai trouvé trop brouillon.



Malgré ces points négatifs, Of Wolves and Men reste une lecture que je recommande, parce qu'elle montre bien à quel point notre vision des animaux sauvages, de leur place dans notre société et leur étude ont été révolutionnées ces dernières années. La troisième partie du livre sur la chasse absurde qui a bien failli mener à la disparition de l'espèce du continent américain est également aussi passionnante qu'effrayante.



Un classique de la littérature sur le loup un peu daté, mais un excellent repère pour mesurer l'évolution de nos mentalités, sur la nature et la place que nous souhaitons y occuper. Commentaire plus complet sur mon blog.
Lien : http://unmomentpourlire.blog..
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Of Wolves and Men

Presque 5 mois ! Il m'en a fallu du temps pour finir ce livre au titre bien accrocheur, « Of Wolves and Men ». Bon, une petite pause de 3 mois au milieu, priorités priorités (plus jamais, d'ailleurs : toujours d'accorder du temps de lecture quotidien pour sa santé mentale et son repos psychologique, pour se dépayser des priorités et des responsabilités).

Je n'aurais pas dû mettre autant de temps puisque ce tome, aussi long et d 'apparence complexe et technique soit-il, se lit très facilement. Je me souviens (c'était il y a 4 mois après tout) avoir dévoré la première partie sur le loup en tant que créature sociale, avec tous ces détails scientifiques sur ses comportements et ses hurlements. Et la deuxième partie aussi, à la rencontre du loup à travers la culture des indiens américains, donc à mille lieues de notre culture et des quelques clichés présentés par les médias.

La troisième partie était une horreur. Vraiment. Le véritable acharnement contre le loup dans la conquête de l'ouest américain puis dans la conversion des grands espaces en grandes exploitations de bétail... Des faits aussi intéressants du point de vue politique, qu'horrifiant, du point de vue massacre aveugle, sans scrupules et sans raison.

Et enfin, un petit retour au Moyen-Âge, en Europe et à travers les légendes pré-datant l'image du loup héritée du Moyen-Âge...

Un bon recueil sur le loup, écrit par un auteur naturaliste originaire d'un continent qu'il partage avec son sujet d'écriture. Tout est très digeste et je m'encourage à lire un titre phare de Barry Lopez...
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Réécrire l'Amérique

Une bien belle lecture que ce petit ouvrage publié par l’excellente maison d’édition WildProject.

En moins de 100 pages, Barry Lopez, nature Twitter américain nous partage sa réflexion sur notre rapport à la nature, au territoire, aux autres vivants et ce que colonialisme et capitalisme ont fait aux cultures indigènes. Sa réflexion personnelle est suivi d’un entretien avec OrennLyons, leader amérindien, du clan de la Tortue des nations Sénécas de la Confédération Iroquoise. Cette réflexion est une véritable claque qui devrait nous réveiller et nous amener à reconsidérer de toute urgence notre (celle des occidentaux) manière de vivre sur les territoires qu’on occupe.

Une lecture forte, qui invite à réfléchir et agir pour changer ce qui doit être changé.

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Réécrire l'Amérique

D’un grand voyageur arctique, géographe humain et résistant infatigable, un récit, un manifeste et un entretien pour tenter d’enfin habiter notre monde américanisé sans le détruire.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/11/03/note-de-lecture-reecrire-lamerique-vers-une-litterature-des-lieux-barry-lopez/



Du grand Barry Lopez, qui s’est éteint en décembre 2020, on connaît surtout en France ses magnifiques « Rêves arctiques », qui lui valurent le National Book Award for Nonfiction en 1986, formidable et rare analyse authentiquement systémique de l’impact à long terme des changements climatiques sur les écosystèmes, à partir d’une étude minutieuse de l’évolution du boeuf musqué, de l’ours blanc et du narval, et on néglige trop souvent ses superbes nouvelles épistolaires et révolutionnaires, marques d’un terrible crépuscule démocratique, réunies dans le recueil « Résistance ».



« Réécrire l’Amérique – Vers une littérature des lieux », mince ouvrage publié en 2020 chez Wildproject dans leur précieuse collection Petite bibliothèque d’écologie populaire, regroupe trois textes.



« La redécouverte de l’Amérique », conférence de 1990 publiée en 1992, traduite ici par Baptiste Lanaspeze, revisite de manière particulièrement incisive le malheur impérialiste et colonial décomplexé qui s’abattit sur les Amériques au tournant du XVIème siècle, jouant avec les concepts et les imaginations mises en scène par exemple chez William T. Vollmann (même si nous ne disposons toujours aujourd’hui en français que de deux de ses « Sept Rêves », « La tunique de glace » et « Les fusils »), chez le Kim Stanley Robinson – en un creux diabolique – de « Chroniques des années noires », ou chez les Wu Ming de « Manituana », et avec les analyses plus académiques que l’on trouverait chez le Tzvetan Todorov de « La conquête de l’Amérique » ou du Nathan Wachtel de « La vision des vaincus ». Vibrante d’intelligence, cette conférence aiguisée pèse avec brio l’ombre portée de l’avidité impérialiste réputée passée sur la crise écologique contemporaine.



« Une littérature des lieux », traduit par Gayané Zavatto, également issu d’une conférence, a été publié en revue en 1996, offre une belle mise en perspective du nature writing, et de ce que sa (relative) popularité contemporaine peut bien vouloir signifier. C’est peut-être ici que Barry Lopez, tout en s’appuyant sur une longue tradition d’exploration littéraire écologique et spirituelle qu’il maîtrise à la perfection, explicite de la manière la plus claire sa conception d’une géographie humaine et artistique qui sache puiser dans le dedans pour agir au dehors, qui sache lire et écouter avant de vouloir décider et imposer. Composant aussi bien avec des forces rebelles comparables à celles d’Edward Abbey et de son « Gang de la clef à molette » qu’avec des visées intégratives, systémiques et poétiques à l’image de celles du Gary Snyder du « Sens des lieux », Barry Lopez élabore sous nos yeux un usage de la géographie et du voyage, mobile et immobile, qui entre en résonance aussi bien avec l’approche des lieux d’une Hélène Gaudy (on pensera sûrement à son si beau « Grands lieux« ) qu’avec les définitions diplomatiques expérimentales d’un autre lien au vivant agencées par un Baptiste Morizot.



Le troisième et dernier texte, après le récit et le manifeste qui le précèdent, est un entretien de 2007, traduit par Marin Schaffner, entre l’auteur et Oren Lyons, leader amérindien et défenseur des droits indigènes, sage et juriste issu du clan de la Tortue des nations sénécas de la Confédération iroquoise, entretien qui puise dans une autre histoire, précisément, alternative et jadis vaincue, de quoi contrebattre et fragiliser les visions du monde qui prétendent aujourd’hui plus que jamais à l’hégémonie, de toute la puissance de leurs incantations « There Is No Alternative », pour continuer à ne se soucier que de confort matériel, de profit et de domination. Et c’est ainsi qu’au confluent de la littérature et de la philosophie s’élaborent de salutaires mécanismes de défense et de reconquête vitale.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Réécrire l'Amérique

La Terre-Mère.

Barry Holstun Lopez (1945-2020), écrivain américain majeur dont l'oeuvre est constamment irriguée par la nature et la place de l'homme en son sein voit trois de ses textes, parus indépendamment, judicieusement assemblés dans la « Petite bibliothèque d'écologie populaire » des éditions Wildproject. La temporalité pourrait articuler ces trois écrits. le premier texte, « La redécouverte de l'Amérique » (1990) est une brève étude historique du passé américain, le second, « Une littérature des lieux » (1996), un essai sur l'art d'habiter la terre au présent, le troisième, « le peuple de la Tortue » (2007), un dialogue avec Oren Lyons, passeur amérindien charismatique, pour entrevoir l'avenir quant à la gouvernance du monde. Les textes politiques documentés de Barry Lopez ouvrent l'esprit par la clarté du style et l'évidence du propos. « Rediscovery of North America » est une contribution à une conférence. Il imagine l'arrivée de « Cristoforo Colombo - littéralement Christophe Colombe », le mal nommé, en 1492, aux Bahamas. Son regard prédateur préfigure les incursions barbares qui vont suivre. La richesse du Nouveau Monde est un dû pour les colonisateurs. L'avidité est sans borne. le saccage des hommes et des lieux perdure aujourd'hui : « Nous avons ainsi perdu des communautés entières de gens, de plantes et d'animaux,…, des langues, des épistémologies, des livres, des cérémonies, des systèmes logiques et métaphysiques – un carnage long et hideux ». L'auteur imagine une autre approche fondatrice, un regard bienveillant et ouvert, cherchant à connaître les lieux et leurs habitants afin d'établir une « intimité ». En se recentrant en un lieu donné, l'homme se trouve. « A Literature of Place » (1996) est, de même, une collaboration à une conférence. Comment la géographie façonne-t-elle l'esprit ? Approche personnelle, connaissance historique et relation éthique rendent le lieu accueillant dans une relation réciproque. L'esprit de compagnonnage supplante celui de propriété. La terre s'exprime alors par les mots et la parole de l'écrivain. « The Leadership Imperative : an interview with Oren Lyons » (2007) est un entretien éclairant avec le leader amérindien qui propose comme une synthèse des deux précédents textes, une autre perspective du monde opposée à la propriété et à la cupidité, le peuple devant prendre collectivement en main son destin et assumer ses responsabilités, toute une sagesse amérindienne jadis appliquée et bafouée depuis. L'essai de Barry Lopez pose les jalons essentiels d'une prise de conscience écologique et d'une gouvernance salutaire.
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Résistance

En neuf missives-récits, une incroyable leçon fictionnelle de résistance contemporaine.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2018/05/24/note-de-lecture-resistance-barry-lopez/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Rêves arctiques

Un ouvrage des années 80 mais dont la qualité n'a pas échappé aux éditions "Gallmeister" !

Sauvé de l'oubli donc pour notre plus grand bonheur !



De l'excellent nature writing alliant descriptions de paysage, considérations philosophiques et données scientifiques, le tout présenté par une prose poétique, pétrie d'humanisme.



Une ode à la beauté, à la délicatesse, à la fragilité du monde sauvage, animal ou végétal.

Une sublimation des phénomènes naturels aussi exceptionnels que les aurores boréales ...

Mais aussi , des observations sans condescendance sur les comportements humains .



Mais après cette lecture, une amère réflexion donne le sentiment que la protection des espaces naturels reste un combat de titans, que l'homme moderne réputé intelligent ( ? ) n'a toujours pas compris où est son réel intérêt ,et donc, ces publications sont non seulement salutaires mais d'utilité publique !



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Rêves arctiques

Comment parler de tant de beauté décrite dans ces pages sans risquer de l'amoindrir ? Et en même temps c'est douloureux de réaliser à quel point l'humanité s'évertue à détruire tout ça par cupidité. Dès le prologue j'ai oscillé entre émerveillement et chagrin mais aussi écoeurement face à l'arrogance des blancs.



Par moments un peu trop didactique à mon goût, voire encyclopédique, ça demande beaucoup de concentration pour que l'esprit ne s'échappe pas. de la course du soleil en arctique à la description très détaillée des forages pétroliers et stations de pompage, en passant par le boeuf musqué, l'ours polaire ce seigneur du grand nord, le narval, la migration des bernaches cravant, des filigules milouinants, des tournepierres à collier, des océanites cul-blanc, des saumons chinook, des baleines du Groenland, des veaux marins, des phoques barbus mais aussi des humains entre 23 000 et 25 000 ans, des icebergs et des naufrages de baleiniers, des couleurs et des luminaristes, ces peintres de l'Arctique, des faux soleils, des aurores boréales avec parfois des envolées métaphysiques, de la sociologie esquimaude et la psychologie humaine, de l'histoire de l'exploration et des hommes qui les menèrent souvent dans des souffrances abominables… C'est passionnant mais parfois un peu long. Et puis c'est triste de voir à quel point l'humanité s'autorise à tuer, saccager, détruire, parfois juste pour le plaisir d'être stupide et cruel. D'ailleurs j'ai appris très récemment que les japonais, qui avaient arrêté la chasse à la baleine, sont en train de construire un navire-usine, en 2023, pour remettre ça, alors que la consommation de viande de baleine a diminué de 99%. Apprend-on jamais de ses erreurs ?



On découvre néanmoins que l'anéantissement des espèces n'est pas quelque chose de nouveau, ce n'est pas le fait que de l'homme blanc. Ça existe depuis très longtemps. C'est juste tristement humain.



Pourtant l'Arctique recèle tant de merveilles ! Qu'un endroit aussi inhospitalier soit peuplé d'êtres qui ont su s'adapter à ce climat d'une rudesse absolue est en soi totalement magique.



À chaque chapitre l'auteur commence par des descriptions sublimes qui donnent l'impression qu'il nous parle d'un Éden glacé inhospitalier, où les différentes espèces vivent dans un écosystème parfait, puis il nous raconte les comportements humains et le rêve s'arrête là car nous vandalisons tout ! À croire que nous n'aimons pas le beau, ni la vie.



605 pages d'extrême beauté puis d'ignominies, à se demander de quel droit une poignée d'hommes commet tant de destructions et de meurtres gratuits. Car oui, il y a pire que la cupidité. Trop souvent de nombreux animaux sont tués pour rien, juste pour le plaisir de faire un carton.



C'est passionnant de découvrir que cet endroit du monde, gelé la majeure partie de l'année, est foisonnant de vie mais malheureusement terriblement convoité et pillé depuis trop longtemps.



D'un bout à l'autre de ces descriptions exhaustives de l'Arctique dans son entièreté, j'ai eu l'impression de voyager à travers l'origine du monde. Pourtant, la vie arctique est très jeune, à peine 10 000 ans. Mais quelle tristesse de penser qu'elle est en train de mourir et que nous en sommes responsables, et plus aberrant encore, que nous allons à notre propre perte et que nous le savons.



Lecture longue mais captivante, mais longue… et qui demande une bonne dose d'opiniâtreté.
Lien : https://mechantdobby.over-bl..
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Rêves arctiques

Livre fascinant sur une contrée méconnue. La date de dépôt légal pourrait faire croire qu'il s'agit d'un récit contemporain (au sens strict). Puis on découvre la date de publication originale en langue anglaise ... Chronique d'une catastrophe plus qu'annoncée?
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Rêves arctiques



Lire Rêves arctiques c’est s’attaquer à un monument, que dis je à un iceberg ! On ne fait pas que s’imprégner du grand Nord, on le vit. Car ce livre de Barry Lopez, classique du Nature Writing américain, est le résultat de quatre années de voyage, de réflexions et de rencontres dans l’Arctique. A la fois récit d’aventures et méditation sur l’art de l’exploration, il nous plonge dans la réalité des régions arctiques: leurs habitants, leurs animaux, leurs géographies et nous offre de multiples expériences pour comprendre ce continent hostile et pourtant magnifique.



L’auteur, grand voyageur, a passé ces années entre la baie de Baffin et le détroit de Béring. Accompagnant de nombreux scientifiques, utilisant avion, hélicoptère, bateau, traîneau, ski. Il a voulu vivre parmi les Esquimaux pour bien les connaître, apprendre leurs techniques de chasse et à parler leur langue. Il en a rapporté cet ouvrage, reconnu en Amérique du nord, composé de tous ses souvenirs sur les paysages, les hommes, les animaux, – et aussi sur l’histoire de sa découverte par les hommes.

J’ai trouvé cette somme de connaissances dure à lire. Très factuel, son côté encyclopédique lui donne un côté ardu.



Mais on continue de lire parce que les icebergs sont si beaux qu’ils nous tirent des larmes. Et nous terrifient aussi. On y découvre les spermophiles, les bœufs musqués, les ours, les narvals toute la faune et toute la flore adaptés au froid et qui vivent sur ce continent. On y apprend que cet écosystème n’a que 10 000 ans. On y lit les migrations, les incroyables aurores boréales, les cartographies des côtes, la terrible chasse à la baleine, les Esquimaux qui nous appellent, nous les hommes du sud, « les hommes qui changent la nature ». Parce qu’il n’y a pas que le climat, il y a le pétrole, les stations de recherche et l’argent. C’est passionnant et c’est triste, parce qu’il n’y aura pas de retour en arrière. Les rêves arctiques de Barry Lopez n’ont rien d’oniriques ou de merveilleux, je vous le dis.

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Rêves arctiques

« Ce n'est pas tant que le pays soit simplement beau, il est puissant. Sa puissance découle de la tension entre sa beauté évidente et son pouvoir de tuer, de prendre des vies. »



Ainsi Barry Lopez raconte l'Arctique, la limite si fine entre la vie et la mort qui est une partie intégrante de cet écosystème bien plus vivant que ce que ne laisseraient entendre nos préjugés. Avec l'auteur, nous allons suivre la migration des oies sauvages et des caribous, lever une partie du voile de mystère qui plane autour des narvals, découvrir la culture des différents peuples Esquimaux, comprendre la science des aurores boréales, naviguer auprès des explorateurs occidentaux et leurs récits de mort et de gloire. Pépite poétique et scientifique, Rêves arctiques s'attache à la description - biologique, historique, politique, culturelle, spirituelle... - d'un lieu empli de vie, de lumière et de silence, son rythme unique, ses déséquilibres soudains. On y apprend entre autres choses que l'ours polaire a souvent trop chaud en hiver et rejette la chaleur par la plante de ses pattes. Que la période la plus dangereuse pour beaucoup de ces animaux est l'automne, lorsque la glace de la banquise n'est pas encore formée pour pouvoir y chasser. Que les plaques de glace de l'océan arctique permettent de protéger bien des poissons des froids extrêmes. On y découvre aussi l'influence de l'homme, avec un regard très critique sur les conséquences environnementales et culturelles de l'attitude occidentale face à cette région (gageons que, depuis les années 80, cela n'a pas dû évoluer en bien).



Rêves arctiques est exigeant, mais passionnant. Barry Lopez partage dans cet ouvrage sa grande connaissance de l'Arctique avec beaucoup d'humilité, y dévoile de nombreux mystères, et y insuffle beaucoup de magie.
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Rêves arctiques



❤️ 📜𝕸𝖔𝖓 𝖗𝖊𝖘𝖘𝖊𝖓𝖙𝖎📜 ❤️

L'exploration de l'océan glacial arctique a toujours fasciné l'homme.

Barry Lopez nous en explique les ressorts et les étapes

au gré des aléas climatiques. Ce livre est une véritable encyclopédie dense et vivante.



Barry Lopez, a une écriture de virtuose pour ses ouvrages sur la nature américaine , il en connait un rayon !



Nous lecteurs nous suivons ce guide qui a le pouvoir de nous enchanter dans cette région de la Terre ,

l'Arctique :

- 38 fois la France (c'est la surface de l'Arctique en hiver, les deux tiers sont de l'océan)

- la température la plus froide -70°C

- 750 km (c'est la distance qui sépare le Pole Nord de la terre la plus proche ,l'ile du Groenland

- la banquise (plaques de glace qui soudent entre elles , elle a environ 3 mètres d'épaisseur.

-En hiver de Novembre en avril on peut marcher sur l'océan et aller à pied du Canada à la Russie.



Et bien d'autres choses que vous découvrirez en lisant ce chef d'Oeuvre.

Vous découvrirez dans ce récit de voyage , de la méditation-réflexion, essai sur la faune et la flore

Anthropologie ,géographie son histoire ; enfin tout l'essentiel que l'on doit savoir sur cette région polaire.

Bien que inhospitalier se dévoile à nous et l' on s'immerge avec un fulgurant plaisir.

"Attention l'eau est froide ,très froide!!

500 pages environ que l'on dévore comme une glace à la crème avec délectation!

Allez couvrez vous de la tenue Inuits d'un parka, d'un pantalon, de mitaines en peau de phoque ou de caribou !

vous voila paré pour un grand voyage

On en sort avec un sentiment d'admiration , mais aussi inquiet , pourquoi ?



Ce milieu fragile est bouleversé par le changement climatique, qui facilite l'exploitation

de ses ressources en rompant peu à peu son isolement.

vous comprendrez quand vous le lirez!!
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