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Citations de Boris Quercia (134)


Si la vie n’est plus possible, il restera toujours les rêves pour nous sauver.
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Ça pourrait être pire, je pourrais être l’un de ces dissidents. La trappe sous mes pieds est une frontière. On est soit au-dessus, soit en dessous, asphyxié. Je suis sur la première ligne de front et la victoire est encore lointaine. Ce silence peut aussi être un piège. Parfois, les dissidents stockent des masques à gaz dans leurs cachettes. Plus d’un collègue, rouvrant l’une de ces trappes en pensant ne découvrir que des cadavres, s’est pris une lance bricolée dans le ventre. Je n’ai même pas mon aleka pour me défendre. J’ai dû la consigner au ministère en échange des grenades suffocantes.
Ils ne veulent pas le reconnaître, ils le démentent et ça ne figure sur aucun protocole, mais ils savent que les grenades sont la meilleure façon d’en finir rapidement avec les dissidents. Dans ces souterrains, les morts par inhalation de monoxyde de carbone sont monnaie courante, vu que le seul moyen de se chauffer, c’est de brûler les ordures. Si j’étais entré en tirant, ça se serait transformé en procédure policière en bonne et due forme, et personne n’a intérêt à ce que ces persécutions se fassent au grand jour. Mais il faut arrêter la vague d’attentats qui étrangle la City, c’est une nécessité impérieuse. Les dissidents sèment le chaos et s’en prennent aux postes-frontières des portes, qui peinent déjà à freiner les flux migratoires venant de la vieille ville. Pour le ministère, il faut se débarrasser d’eux au plus vite, quelle que soit la manière, un point c’est tout.
Le liquide refroidissant finit de s’accumuler autour de l’encadrement de la trappe, me laissant isolé sur ma petite île métallique.
Quel dommage pour mon électro, il fonctionnait bien, je m’y étais habitué, et je n’ai certainement pas assez de crédits pour me racheter le même modèle. Je vais devoir aller à Electros-Intel pour voir ce qui reste au rayon des occasions. Il ne manquerait plus que je me balade tout seul dans les rues, sans électro à mes côtés. Je ne peux pas tomber aussi bas. Même un classe 5 mérite d’avoir un électro, nous ne sommes pas encore le dernier maillon de la chaîne alimentaire de la City.
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Mon électroquant se vide de son sang.
Le liquide de refroidissement forme une grande mare autour de son corps, et de minuscules ruisseaux vaporeux s’écoulent dans les rainures des dalles de béton jusqu’à la plaque de métal sur laquelle je me tiens. C’est comme si cette humeur chaude et visqueuse, qui s’échappe de sa tête fracassée, était autonome et cherchait à s’infiltrer dans le sous-sol pour dégouliner sur les dissidents et se venger.
Tout s’est passé très vite.
Dès que l’électroquant a ouvert la trappe, les dissidents lui ont lancé une bombe magnétique artisanale qui s’est collée à sa tête. Dans ces cas-là, il n’y a plus rien à faire, on l’a tout de suite su. Il n’a même pas cherché à s’en débarrasser. Il m’a regardé et, juste avant l’explosion, il a ouvert la bouche pour me dire quelque chose, je ne sais pas si c’était un adieu ou un avertissement pour que je m’éloigne. Je me suis instinctivement jeté au sol afin de me protéger des éclats de son crâne. À présent, il ne reste plus de lui que des circuits noircis secoués d’étincelles. Quel gâchis. C’est dommage, mais il vaut mieux que ça tombe sur ton électro que sur toi.
Ma réaction a été immédiate : quelques secondes après l’explosion, sans laisser aux dissidents le temps de sortir, j’ai lancé une grenade suffocante dans le sous-sol, j’ai refermé la trappe du pied et je me suis posté dessus. Ça fait quelques minutes que je n’entends plus les cris étouffés et le bruit des ongles contre le métal. C’est le silence complet. Mais je ne bouge pas. Je ressemble à une statue sur un minuscule piédestal, je me sens même héroïque, quelque part. Mais qui érigerait une statue à la gloire d’un misérable classe 5 ?
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Jeremias Coraza Salgado, colombien, vingt-quatre ans. Deux peines pour proxénétisme : il a déjà effectué la première, il purgera la seconde dans une boîte en bois.
Quelqu’un avait tendu en travers de l’escalier un fil de cerf-volant, abrasif et coupant, si fin qu’on ne le voyait pas. Il était entré dans sa chair aussi facilement qu’un couteau chaud dans du beurre. Un piège ? Dirigé contre qui ? Contre quiconque emprunterait ces escaliers. Comme Coraza fonçait, la coupure a été profonde. Une personne arrivant plus lentement, ou ne faisant pas la même taille, n’aurait eu qu’une éraflure. C’est comme si la mort avait attendu Coraza pendant vingt et quelques années qu’il passe juste ici à ce moment-là. Il n’y a que le fil. Rien qui puisse me donner une piste. N’importe qui pourrait l’avoir mis là, la galerie commerciale est un lieu public.
De toute façon, le chef fait évacuer. On prend les coordonnées de chaque personne, une par une. Les femmes n’en finissent pas de sortir des différentes boutiques, ainsi que les coiffeurs, les cuistots, les tatoueurs – ces derniers sont de jeunes Chiliens. La moitié des étrangers n’ont pas de papiers en règle.
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Je suis encore dans les limbes à me demander si tuer quelqu'un qui va mourir est plus grave que tuer quelqu'un qui vivra éternellement. (114)
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Aucun humain ne peut passer inaperçu ou effacer ses traces. Il n'y a que nous, les machines, qui pouvons nous rendre invisibles. (112)
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J'ai mes limites, comme tous les humains. C'est comme jouer aux échecs contre quelqu'un de beaucoup plus fort que nous. Il déplace une pièce et nous ne comprenons son mouvement que lorsqu'il est sur le point de faire échec et mat. C'est à cet instant-là que nous mesurons l'ampleur de notre bêtise. Nous ne saisirons les raisons de leurs actes que lorsqu'il sera trop tard. (104-105)
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Toute notre société s'est effondrée si vite qu'on n'a pas eu le temps d'inventer autre chose et, à la longue, on s'est habitués à tout. Plus personne n'est impressionné, ni par les incendies, ni par les morts. (88)
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"Les anomalies se cherchent et se rejoignent", c'est la troisième loi de Rostik, toujours vérifiée. (68)
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L'homme des cavernes aux prises avec sa création la plus élaborée. Les coups de hache pour contenir les particules quantiques. (61)
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Je jette le mégot dans les toilettes. Il s'en va, comme l'amour. Il s'en va comme ces papas qui sont comme les cigarettes, quelques taffes et après on ne les revoit jamais plus.
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[...] Jusqu’à ce qu’on soit tous entassés dans le même trou. Qui mérite son sort ? La roue des coups durs n’arrête pas de tourner et chacun aura un jour le numéro perdant. On ne mérite pas cette fin.
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[…] La pluie n’arrête pas de tomber et le métro est plein d’animaux mouillés en route vers l’abattoir.
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PLUSIEURS pistolets mitrailleurs nous tirent dessus et les balles ricochent de partout, je suis planqué dans un cagibi où sont entreposées des bouteilles de gaz et les balles me sifflent aux oreilles.

Depuis le début je ne le sentais pas. Je devrais être de permanence au bureau, pas dans ce trou à rats qui va exploser d’un moment à l’autre

Jiménez est à deux mètres de là, une balle lui a traversé la cuisse et il se tord par terre. Du dehors, on lui crie de ne pas bouger mais Jiménez est fou de douleur.

On est dans la cour d’une maison de San Luis, à Quilicura. Dès qu’on a défoncé la porte, on a été surpris par les rafales ; il n’y a que Jiménez et moi qui avons pu entrer. Comme il est passé le premier, son corps m’a servi de bouclier. Je n’ai pas eu d’autre choix que de me jeter dans cet abri, mais si une balle touche une bonbonne, je vais être réduit en bouillie.

Jiménez crie de nouveau, fou de douleur, un autre projectile l’a atteint malgré son gilet pare-balles et on dirait qu’il a une côte cassée. Je ne peux pas bouger d’un millimètre, je ne peux même pas lever le bras pour viser sans risquer qu’on me fasse sauter un doigt, j’ai la tête collée contre le mur et mon casque est sur le point de tomber. Du fond de la maison, les types du gang lâchent les chiens. Des rottweilers, des diables noirs qui bavent et grognent férocement.

Ils se précipitent sur Jiménez, droit à la gorge. Je le vois se défendre en essayant de leur donner des baffes. Moi, ils ne m’ont pas vu. J’essaie de viser l’un des chiens qui l’attaquent, mais je ne tire pas, j’ai peur de toucher Jiménez. Les collègues, depuis l’extérieur, lancent des bombes lacrymogènes, l’air devient irrespirable. La fusillade s’arrête, j’en profite pour me jeter au sol et m’extirper de ma cachette. J’attrape Jiménez par une jambe pour le traîner vers la porte. Les chiens disparaissent, sauf un qui ne veut pas le lâcher et lui mord rageusement l’avant-bras. Je colle mon arme sur la poitrine de la bête et je lui mets deux balles. Malgré ça, il n’abandonne toujours pas. On dirait un vrai démon, ce chien, la fumée lui sort par le museau à cause des coups de feu tirés à bout portant.

Jiménez est inconscient. Les autres vont à ma rencontre et me soulèvent. La dernière chose que je vois est un collègue qui brise la mâchoire du chien pour lui faire lâcher sa prise.

Ils me jettent sur le trottoir et me disent de ne pas bouger. Je n’ai rien mais je suis couvert de sang. Je préfère rester immobile et laisser les autres partir en chasse, sauter des clôtures, enfoncer des portes, se faire tirer dessus.

Finalement ils ramènent Jiménez, le mettent dans une voiture, il est tellement mal en point qu’on ne peut pas attendre l’ambulance. Le petit Nouveau part avec lui. Quelle saloperie, c’est sa première sortie et il se tape déjà un collègue grièvement blessé.

Les coups de feu s’éloignent. Je commence à respirer plus tranquillement. Mon corps me démange. Ce sont les puces. Les puces des chiens des narcos.
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Il y a des gens que la souffrance rend méchants et d’autres qui deviennent des espèces de saints. Tout dépend des personnes, pas de ce qui leur arrive.
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Ce n’est pas agréable de voir un pendu, pas seulement à cause de son visage violacé, la langue dehors, les yeux injectés de sang. Le corps, au moment de l’asphyxie, ne contrôle plus les sphincters et lâche tout ce qu’il y a dedans.
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Je suis par exemple resté à regarder une fontaine bâtie en hommage à Christophe Colomb. C’est une fontaine minable, presque sans eau, sur laquelle on a posé une plaque ronde avec le visage de Colomb, qui a l’air d’avoir été dessiné par un élève de primaire.

Et là, je me suis mis à réfléchir. Si c’est ça l’hommage qu’on rend au type qui a découvert la moitié du monde, qu’est-ce qu’on peut espérer pour soi ? Et je me suis répondu à moi-même : le broyeur à viande et rien d’autre.
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L’éternité, c’est le temps qui passe entre la fin d’un rapport sexuel et l’arrivée d’un taxi.
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Une fillette qui vit dans la rue, dit Ricardo, a au moins son groupe de copains, des enfants comme elle qui vivent sous les ponts et sniffent de la colle. Ce sont des bandes urbaines avec des liens d’amitié très forts.

Dans les foyers, l’amitié n’existe pas. Ce sont de petites prisons où tout dépend du sens moral de celui qui exerce le pouvoir, et l’histoire de l’humanité nous a suffisamment montré quel niveau d’abjection peut atteindre l’être humain.
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Elle me permet alors de me retourner, elle se met à genoux en face de moi, me montre ses seins et ouvre sa bouche. Je n’en peux plus et je jouis sur elle, je mouille son visage, ses cheveux. Comme dans un film porno, mais à toute vitesse, cette branlette aura duré moins d’une minute.
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