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Critiques de Bruno Latour (83)
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Où suis-je ?

Un nouveau régime climatique, un confinement dans une zone critique de moins de 6 kilomètres d’épaisseur où vivent tous les organismes connus, une métamorphose inéluctable, de l’activité collective, un retournement philosophique … Pensée transversale pour vivre autrement avec la Terre.

Pierre-Romain Valère dans DoubleMarge (extrait)
Lien : https://doublemarge.com/page..
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Mémo sur la nouvelle classe écologique

Vademecum court et très précis, coécrit par le philosophe et sociologue Bruno Latour, et Nikolaj Schultz, jeune doctorant en géo-sociologie danois. Un vieil écolo passant la main à un jeune intellectuel.

Pour quel objectif ? Fédérer autour d’idées souvent difficiles et amener ces dernières au pouvoir. En soixante-seize paragraphes, définir, après les classes sociales Marxistes, une « classe écologique ».

Cette dernière ne se définit pas comme la classe anti-capitaliste du passé même si elle s’ancre dans la préférence donnée par la gauche au commun plutôt qu’à l’individualisme, mais elle refuse le dogme de la production comme alpha et oméga du progrès. Fini la croissance, bienvenu à la prospérité. « Il ne s’agit pas de décroître mais d’enfin prospérer ».

Ceci en conciliant le monde « où l’on vit » et le monde « dont on vit ».

Un livre très intéressant, quel que soit votre orientation politique car comme le disent les auteurs, l’écologie est partout et nulle part. Donc forcément dans nos têtes. Alors ce petit bouquin participe à y mettre un peu d’ordre en déclinant un thème plus intéressant que ceux proposés par les chaînes de propagande en continu.

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21 penseurs pour 2021

Un an déjà....

Comme ça passe quand on y repense. C'était même pas hier et ça fait pourtant un an.

Un an déjà, qu'une certaine série philo des années 2020 a vu le jour avec sa première saison : « 20 penseurs pour 2020 ». le principe en est simple, une anthologie des meilleurs articles parus dans la presse internationale l'année d'avant.

L'an dernier, j'émettais l'idée pour la première que l'originalité des concepts les éloignait d'un recueil de brèves de comptoir, bien qu'une forme de philosophie pouvait aussi s'entendre dans les bistros. Je confirme le truc pour cette année encore.

Oui je sais, tous les bistros ont fermé entre-temps.

Voici donc pour cette deuxième, « 21 penseurs pour 2021 », une liste non exhaustive, de résumés (très succincts) d'articles aux concepts philo bien tournés et développés (dans le livre), que vous n'avez pas entendus dans les bistros :

- la possibilité d'une décélération initiée par le politique démontrée par la pandémie

- la limite des systèmes ultralibéraux des USA ou de la Grande-Bretagne pendant la pandémie

- inégalité de la vulnérabilité face à la propagation d'une maladie aux USA

- le télétravail comme vecteur d'évolution de la géographie des centre-villes

- un état mondial ? « Comme si ce minuscule être vivant était venu en messager pour défier notre humanité mondialisée et révéler son impuissance, lui offrant une dernière chance pour prendre conscience d'une communauté de destin »

- le capitalisme favoriserait la zoonose (transmission des maladies d'animaux vers humains)

- débat d'idées autour du dilemme des soins à conditions égales impossibles pour deux patients : l'âge doit-il être le critère sélectif ?

Bon tout ça pour dire, on se doute, il est question de ce que vous savez, comment pourrait-il en être autrement. Ça fait un an que l'on ne parle que de ça. Et de météo peut-être aussi un peu, au creux d'une vague certainement. Ou alors du réchauffement climatique, comme dans l'article de Bruno Latour qui se demande si on ne devrait pas passer d'une lutte des classes sociales à une lutte des classes géosociales  (Ou comment en finir avec le partage des richesses pour préserver l'environnement). On aurait parlé de Trump aussi. le recueil ne l'ignore pas, en interrogeant la survie du trumpisme après le règne de son créateur, mais aussi dans un autre article qui décrypte la révolte de certains dirigeants dont Trump, Bolsonaro ou Erdogan, empruntant à la population la haine des élites en place et dénigrant la démocratie, alors qu'ils proviennent eux-mêmes des élites.

A-t-on réellement parlé de cancel culture dans les foyers ? Peu importe, car le papier d'Helen Lewis se révèle bien intéressant, en mettant en regard la génération des milenials qui coupent le cordon avec Harry Potter et son autrice, sujette à polémique sur la question des transgenres.

Intéressant et surtout accessible, comme tous les articles ou presque d'ailleurs, à picorer au gré des envies et des humeurs.

Néanmoins, le recueil dans son ensemble m'a paru moins passionnant que l'an dernier, sûrement que la répétition de l'axe Covid/économie/politique n'y est pas étrangère.



Un grand merci à Babélio et Philomag pour l'envoi de ce recueil d'articles, dans le cadre de masse critique.

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Atlas de l'anthropocène

Époque géologique dont l'existence est controversée, l'anthropocène succèderait à l'holocène, et serait marquée par l'influence de l'homme sur la géologie et les écosystèmes. Son début se situerait donc entre le milieu du 19ème siècle (montée en puissance de l'industrie) et le milieu du 20ème (accélération et prise de conscience des impacts de l'humain sur l'environnement).



L'ouvrage passe en revue les principales composantes de l'anthropocène : la crise de la couche d'ozone (unique cas de retour arrière réussi !), l'évolution du climat et de la biodiversité, les pollutions et la démographie, avant de conclure sur les politiques applicables à l'anthropocène pour en limiter les conséquences.



Ce ouvrage a les défauts de ses qualités. Rédigé par des chercheurs, il est extrêmement précis et très bien documenté. Il cherche à être didactique et accessible au plus grand nombre. Je l'ai cependant trouvé parfois un peu trop technique et brouillon.



Ce peut être un beau cadeau pour des jeunes, ou des moins jeunes, désireux de développer leur culture scientifique sur la dégradation de notre environnement et la nécessaire transition écologique.












Lien : http://michelgiraud.fr/2022/..
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La fabrique du droit

Entre nous, une ethnographie du Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative française, cela peut rebuter. Même quelqu’un comme moi qui suis connu pour avoir des passions douteuses. Et pourtant j’ai pris un certain plaisir à lire les passes d’armes entre Conseillers, à passer de dossiers en dossiers et de réunions en réunions, bref à comprendre ce qui se joue au-delà et en deçà du droit dans la fabrication du droit.

Car le droit est fait de contexte et d’opportunités, d’hésitations et d’habitudes, d’expériences et de préjugés… et tout cela ensemble. « Le droit est déjà du social », et c’est ce qui nous permet d’expliquer pourquoi certaines obligations obligent tandis que d’autres n’obligent en rien :



« Le transport de la règle au cas n'obéit pas à un simple automatisme mais à une multitude d'évaluations qui obligent, très vite, à rouvrir la discussion juridique que l'on croyait définitivement fermée. C'est que nous n'avons dans la pratique jamais affaire à des règles mais toujours à des textes, plus ou moins forts, sur lesquels la dynamique du raisonnement peut ou non s'appuyer. [Tel article réglementant le pantouflage] a beau être dans le Code pénal, il n'a visiblement jamais eu beaucoup de force puisqu'il n'a jamais entravé l'action de l'État ni poussé les commissions de pantouflage à donner un avis défavorable [...].

C'est tout le paradoxe d'une obligation qui n'oblige qu'à la condition que tout le reste soit en place pour transporter cette obligation... Comment expliquer ce paradoxe? En reconnaissant sans remords le poids du contexte [...]. Les aspects extrajuridiques font [...] partie intégrante de la discussion. [...] Ce qui oblige, ce qui pèse, ce qui va loin, ce qui a de la force est donc un mélange de "climat" et de droit. » (p. 170-172)



On n’est jamais déçu par l’ethnographie.
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Habiter la Terre

Petit volume présenté comme un échange mais pour lequel le journaliste sert surtout de faire-valoir au philosophe en lui permettant de dérouler son discours.

Ce dernier commence par poser la question : qu'est-ce qu'être « Moderne » ? le vingtième siècle qui en est l'acmé, nous a conduit selon lui à un monde qui touche à sa fin car il porte en lui un paradigme de destruction. Il pense que son aboutissement, à savoir « moderniser » la planète est impossible. Si on le fait, elle devient inhabitable et invivable pour nous, humains.

Il s'interroge sur ce qu'il considère comme l'énigme de l'histoire du XXe siècle : l'humain a constamment dénié la situation dans laquelle il se trouvait. « Les Modernes sont inauthentiques. Ils ont la langue fourchue, ils font toujours le contraire de ce qu'ils disent. Ils sont toujours désaxés par rapport à ce qu'ils font, et dans les années quatre-vingt, ils y vont carrément, ils exagèrent dans leur exagération, dans leur inauthenticité. »

Mais alors quelle est l'alternative à la modernité ? Que deviennent l'abondance, la liberté, l'émancipation sans la modernité ?

L'alternative, c'est ce qu'il appelle « écologiser », dont il est difficile de comprendre la signification exacte parce que « c'est un énorme virage à prendre ». de l'ancien « moderniser » à abandonner vers le nouveau « écologiser » à concevoir.

Il prend un exemple : celui des haies. Et bien... Je n'ai pas compris grand-chose à son exemple et donc, par extension, au sens concret d' «écologiser».

Il semble y avoir l'idée de modestie et de controverse induisant la découverte par tâtonnement du « bon chemin »... Doute.

Ses arguments scientifiques procèdent de cette modestie : « Il n'y a aucune raison pour qu'il y ait 30 % d'oxygène dans l'atmosphère ». Exact puisque c'est plutôt 20 % de dioxygène en arrondissant, mais bon...

Certains concepts évoqués sont explorés sans être bien nouveaux : l'habitabilité au sens de notre minuscule marge de manoeuvre dans l'univers. L'anthropocène ou influence des humains industrialisés sur le reste de la planète...

Pour prendre ce virage, il propose une nouvelle classe sociale (puisque les anciennes appartiennent à l'ancien monde et que même la notion de classe sociale...) : la classe géosociale... Fini le progrès, bonjour la prospérité, fini l'autonomie, vive l'hétéronomie... Et qui vient nous y aider ? la religion : le cri des pauvres est le cri de Gaïa...

Le chapitre scientifique est original. Sa description des sciences du climat, faites de physique, de chimie, de nombreux modèles et d'algorithmes, qui dépendent à la fois des bouées dans l'océan, des satellites, des carottages etc... incite à la réflexion. Pour lui, ce puzzle de centaines de millions de données différentes est une science d'assemblage qui a déjà permis d'établir, dès les années quatre-vingt, que le dioxyde de carbone allait faire monter la température de la planète. Mais le savoir n'a rien produit de concret. Pourquoi ? parce que la science n'a pas le monopole du vrai, alors qu'elle le croit. Parce que notre société est faite de droit, de science, de technique, de religion qui sont tous des modes de vérité associés mais souvent incompatibles les unes avec les autres. Et les « modernes » ont mis la science au-dessus de tout, ce qui est une erreur.

Ce livre annonce la fin du monde, d'un monde, de notre monde. Il nous invite à reprendre le processus de civilisation qui a été suspendu dans la période où nous sommes maintenant. Son souhait : dans quarante ans, regarder historiquement la période de déni, d'ignorance, d'incompréhension de la situation écologique dans laquelle on s'est aujourd'hui égaré.

Mais concrètement ? Rien. le philosophe (sociologue selon...) n'est pas habilité à construire, il invite chacun à participer à l'élaboration. Espérons qu'il sera traduit dans la langue de nos maîtres car ce n'est pas ici que se construira (ou pas) le monde de demain.

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Où atterrir ? Comment s'orienter en politique

Quand c'est Latour (de contrôle ?) même qui demande « où atterrir ? », avouez qu'il y a de quoi s'inquiéter…

Cela dit, Latour propose tout de même une solution : atterrir sur terre, enfin sur le terrestre.



Au-delà de la blague, ce petit ouvrage du grand sociologue des sciences qu'est Latour mérite le détour. Mais m'inspire aussi quelques réticences.



Si je trouve que le diagnostic est bon – avant tout celui de politique fiction qu'il formule au début sur la stratégie de rupture décomplexée des élites financières voire politiques qui les servent, mais aussi celui qui concerne la nécessité d'un redécoupage des clivages politiques – je suis (bien) moins convaincu par les propositions qu'il formule. Proposer de nommer le terrestre ce qui devrait être le nouveau local (pour éviter les dérives « nationalo-identitaires »), je le comprends, mais cela me semble un voeu pieux : je trouve quelque peu malhonnête le portrait que fait Latour sur les risques d'un « retour » en force du local (si tant est qu'il avait d'ailleurs disparu) et notamment son assimilation à une forme d'obscurantisme identitaire.



Car le local ne se réaffirme pas que sous ce masque (même s'il existe et que, malheureusement, tout « localisme » a tendance à être réduit à cet forme d'exclusivisme et de fermeture aux autres – mais par qui ? précisément par des éditorialistes qui sont au service des élites « hors sol »), mais aussi sous celui, bien plus pertinent d'un désir de reconquête de la souveraineté que le global de la « mondialisation moins », comme il dit, a largement battu en brèche.

Et sa conviction dans le fait que l'Europe est la bonne échelle d'une « mondialisation plus », débarrassée de ses illusions et seule à même de lutter contre le local et ses oripeaux nationalistes les plus abjects, me semble vraiment très simplificateur : non seulement l'Europe n'a pas commencé à exister après le second conflit mondial (pour garantir la paix) mais (à l'inverse) elle a « commencé » au moment de la Conférence de Berlin (1885) dans ce grand partage de l'Afrique entre gouvernants blancs et puissants : un projet rien moins que pacifiste, pour les Africains et même pour les peuples européens. Car cette Europe-là, rapidement en crise face aux désordres sociaux de la soi-disant Belle Époque, n'a pas hésité à envoyer ses peuples non plus au charbon mais sous les déluges d'acier pour faire taire les aspirations révolutionnaires.



Croire que l'Europe est un projet pacifique me semble une parfaite foutaise. L'Europe n'a jamais été, ni de près ni de loin, un projet de rassemblement des peuples derrière un projet de paix universelle (affiche de propagande qui ne berne que ceux qui veulent y croire), mais est une stratégie de gestion des obstacles de l'impérialisme capitaliste de ses élites. Croire que l'« Europe » peut devenir autre chose, qu'elle puisse soudain se parer de bons sentiments (politiques et écologiques) et que les peuples y verront soudain la lumière tant attendue (eux qui ont été bernés depuis près de 150 ans sur le sujet – ce que Latour reconnaît d'ailleurs honnêtement, mais comment faire autrement…), c'est effectivement, comme il l'admet (mais sans doute avec un peu de fausse modestie puisque l'objet de son ouvrage est bien politique), être bien « fragile » comme analyste du politique (au sens moins de l'étude des rapports de pouvoirs – science politique à papa - que de celui de l'étude des liens sociaux – la politique au sens premier du terme, et une science politique, donc, qui se nourrit de toutes les sciences humaines).



Finalement, qui a besoin d'atterrir ? Précisément ces élites qu'il identifie justement comme « hors-sol ». La plupart des individus, eux, ceux qui n'ont donc pas de pouvoir, réclament qu'on cesse de les obliger à décoller (pour le pays imaginaire du « libéralisme » où la dernière liberté qui leur reste est d'aller se faire exploiter par des multinationales dont l'universalisme n'est rien d'autre qu'un United Colors of Benetton - fait pour gagner du fric) : non pas par racisme (même s'il en est parmi ceux-là, il ne faudrait pas non plus être angélique) mais parce que sans « enracinement », comme disait Simone Weil, l'homme se perd… et avec lui, toute politique (être ensemble) digne de ce nom.
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Où atterrir ? Comment s'orienter en politique

Voilà un essai (très ! trop ! ) Intelligent. Que de réflexions sur le monde contemporain. La Guerre froide, l'opposition Est-Ouest, ou même Nord-Sud, sont devenues plus insuffisantes on le voit. B. Latour nous propose une opposition Local-Global très intéressante (même si pas toujours facile à suivre). L'élection de Trump, époque de l'écriture de ces lignes, a mis l'accent sur le sujet d'opposition central : le climat. Il nous montre aussi a quel point l'élite se protège, se met à l'abri, de tout ce qu'elle est en train de détricoter. Ça fait froid dans le dos d'actualité.
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Où suis-je ?

Après s’être demandé où atterrir, Bruno Latour se demande où il est ! Les questionnements sur notre place et notre relation à Gaïa se poursuivent à la lumière de notre confinement Covid, peut-être finalement source positive d’interrogation sur notre devenir. La première partie de l’ouvrage est compréhensible, et on est presque fier de parvenir à suivre l’argumentation de l’auteur, mais cela se gâte ensuite, dés lors qu’une philosophie pure et plus dure s’invite au débat. Impression mitigée qui n’empêche pas d’être conscient et convaincu que les vraies questions sont posées !
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Où suis-je ?

Dans ce conte philosophique, Bruno Latour se saisit de l’expérience du confinement pour nous aider à comprendre la réalité du changement climatique et ses conséquences sur nos vies. Pour illustrer la radicalité du changement que nous devons opérer pour survivre, il se réfère à la Métamorphose de Kafka. Car c’est une métamorphose que nous sommes appelés à vivre, aussi phénoménale que celle vécue par les contemporains de Galilée quand ils prirent conscience que la Terre n’était pas au centre de l’Univers et que celui-ci était infini. Il s’agit ici d’un changement radical de perspective : l’Univers est illimité mais hors de notre atteinte et la Terre est notre limite physique. Notre territoire est celui où nous vivons et dont nous vivons. Notre responsabilité est d’en saisir les limites qui sont les conditions d’habitabilité nous permettant de durer plus longtemps et de laisser un espace viable pour toute forme de vie à venir. Explorer ce territoire, le comprendre dans ses relations les plus intimes, ses intrications, ses concaténations, est notre nouvel horizon. Ne plus vivre sur Terre mais avec Terre.

Cet essai nous permet d’appréhender la complexité du changement que nous subissons et de ne pas laisser aux seuls scientifiques l’analyse de cette crise qui est autant sociétale, économique, spirituelle que climatique. Des propositions de lecture en fin d’ouvrage permettent d’approfondir les différents thèmes abordés pour ceux qui le souhaitent.



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Où atterrir ? Comment s'orienter en politique

Un nouvel acteur politique : la Terre elle-même



Dans ce court essai percutant, Bruno Latour développe la réaction à chaud qu’il avait publiée dans Le Monde au lendemain de l’élection de Donald Trump. Il voit dans l'évènement le sauve-qui-peut de masses qui ne croient plus à la mondialisation et se réfugient dans un passé idéalisé. Sans voir - ou plutôt en refusant de voir - la crise écologique qui change tous les repères.



L’humanité désorientée…



« Où atterrir ? » La question titre est devenue cruciale. Embarqués dans une course folle à la croissance mondialisée, nous découvrons qu’elle n’est pas soutenable et qu’il va falloir revenir sur Terre. Ceux qui en profitent le plus veulent poursuivre le voyage le plus loin et le plus longtemps possible, sans se soucier des dommages collatéraux qui, comme ceux infligés au climat, forcent de nouveaux flux de migrants à se mettre en marche. Mais la multitude des autres sent confusément qu’on les mène en bateau. Ils veulent retrouver la terre ferme – leur identité, leur sécurité, leurs certitudes, alors que le sol n’est plus assuré. Il se dérobe, car la crise écologique, dont le volet climatique n’est que le plus criant, va rendre la planète de moins en moins habitable. Elle rend déjà caduque l’espoir d’un accroissement du bien-être pour tous.



…quand la Terre se rebiffe



« Comment s’orienter en politique ? » Le sous-titre du livre rend compte de son objet : penser une nouvelle géographie politique et dresser une ébauche de carte. Une fois exposée l’impasse de la polarisation actuelle entre local et global, l’auteur tente d’expliquer pourquoi l’écologie n’a pas réussi à s’imposer dans le paysage politique. Son erreur, pense-t-il, a été de vouloir se situer sur l’axe qui servait et sert toujours de repère à la confrontation entre droite et gauche. Résultat : le mouvement écologiste, constamment ballotté entre les deux pôles, a fini par être laminé. Alors que, suggère-t-il, il fallait faire émerger un nouveau pôle. Ce nouvel attracteur, qu’il nomme faute de mieux « le Terrestre », consiste à donner toute sa place au nouvel acteur politique qui s’est imposé, la Terre, qui rue dans les brancards d’être ainsi malmenée et éreintée. La Terre, qui n’est plus la scène immuable sur laquelle l’homme pouvait tranquillement développer ses activités. C’est comme si, dit-il, le décor s’était mis à jouer dans la pièce.



Bruno Latour, qui n’est pas toujours facile à lire, a pris ici le parti de s’adresser à un large public. Fort heureusement, car ce qu’il a à dire nous concerne tous. Son style est imagé et les formules font mouche. Exemple : [Le retrait par les Etats-Unis de l’accord de Paris], « une déclaration de guerre qui permet d’occuper tous les autres pays, sinon avec des troupes, du moins avec le CO2 que l’Amérique se garde le droit d’émettre ». Dommage toutefois qu’il ne soit pas parvenu à s’affranchir complètement du jargon ni des références en usage dans son domaine de spécialité… C’est peut-être pour le prochain livre, qu’on ne peut qu’espérer, car après avoir répondu à la question « Où atterrir ? », il faudra bien répondre à celle-ci : « Comment s’organiser après l’atterrissage ? »


Lien : http://www.ouvertures.net/un..
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L'économie, science des intérêts passionnés

Gabriel Tarde était un sociologue français de la seconde moitié du XIX eme siècle. Rival d'Emile Durkheim, son oeuvre restera longtemps dans son ombre, quasiment oubliée de l'histoire faute notamment de disciples et de successeurs pour la prolonger, il sera peu à peu redécouvert ces dernières décennies. Bruno Latour et Vincent-Antonin Lepinay contribuent ici à dépoussiérer (sinon exhumer) la pensée de Gabriel Tarde et plus particulièrement ce qui concerne sa vision de l'économie.





Je serais bien incapable de résumer la pensée de Tarde en quelques lignes mais on peut néanmoins donner quelques idées directrices qui pourront vous donner une idée de sa vision en matière d'économie : tout d'abord, on remarque que cet auteur s'applique à gommer les frontières entre économie, sociologie et sciences politiques. Pour Tarde, on notera également que ce sont avant tout les idées et ce que certains appelle le ‘génie' qui mènent le monde et non l'accumulation du travail ou du capital (à la différence des auteurs marxistes ou libéraux) et fait l'éloge du dialogue, de la conversation, bien plus que du labeur. Enfin, il met à mal l'idée reçue selon laquelle révolution industrielle et capitalisme seraient synonymes de rationalité et de logique froide : il tient à démontrer qu'au contraire, ce sont les passions qui s'intensifient et envahissent les sociétés européennes.





À notre époque, où les données sont surabondantes, les sondages omniprésents et où la position des plus grandes entreprises mondiales repose autant (sinon davantage) sur des idées ou une image de marque que sur leurs infrastructures ou la force de travail de leurs salariés, il semble que Tarde puisse donner quelques clefs pour comprendre la force des idées ou ce « capitalisme immatériel » qui entre peu à peu dans notre quotidien. Il permet également de prendre du recul et de remettre en cause quelques « évidences » sous-jacentes économiques ou sociales.





La lecture fut plutôt intéressante même si je dois dire qu'un certain nombre de passages m'ont paru trop abstraits et que j'aurais apprécié de temps à autre quelques paragraphes supplémentaires de Latour ou de Lepinay pour mettre en résonance ou expliquer les implications concrètes des théories de ce sociologue.

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Où atterrir ? Comment s'orienter en politique

L’humanité est désorientée, une mondialisation effrénée qui devient insoutenable et le sentiment de plus en plus partagé qu’il va falloir atterrir, retrouver « le terrestre », c’est ce que Bruno Latour nous explique dans cet essai. Les inégalités qui s’accroissent, les privilégiés qui profitent le plus longtemps possible d’un système qu’ils ont établi sans tenir compte des dégâts collatéraux (le climat, les migrations..), le mouvement écologiste, ballotté entre la droite et la gauche ne sait plus ou il habite ! L’auteur, philosophe n’est pas toujours facile à suivre, mais il fait malgré tout un effort de pédagogie qui devrait profiter au plus grand nombre, tellement les enjeux sont importants.
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Atlas de l'anthropocène

Un ouvrage incontournable pour faire le point sur l'état de notre planète, de son épuisement face à la consommation de ses ressources naturelles, à l'extinction du vivant, à l'apparition des dangers qui nous guettent dans un horizon proche.

On peut puiser dans les chapitres suivants : Notre époque nommée Anthropocène, Ozone, Climat, Biodiversité, Pollutions, Démographie, Politiques.

Une postface de Bruno Latour appelle à prendre un nouveau cap en toute connaissance.

Tous les chiffres sont donnés sous des formes graphiques variées, pertinentes, mettant en scène le poids respectifs des pays, des continents, des zones terrestres.

A méditer pour se faire une opinion éclairée objectivement et agir à notre petit niveau aussi.

Un cadeau de Noël utile à offrir.
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Atlas de l'anthropocène

Excellent ouvrage qui, en 185 pages, dresse un tableau précis et documenté de l'état de la science et de la pensée sur l'avenir de l'homme et de la planète terre. Rien de catastrophiste, rien de négligé non plus pour dénoncer les lacunes de nos sociétés d'abondance illimitée. Bel appel à l'action courageuse et audacieuse en fin de compte.
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Éloge des mauvaises herbes

Écrit dans l’urgence de l’expulsion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, ce livre regroupe les textes de seize personnalités intellectuelles, littéraires et artistiques cherchant à penser l’importance de ce qui se joue là.

(...)

Étrange sensation que de sauter ainsi d’un point de vue à l’autre. L’exercice permet finalement de les confronter tour à tour à son propre avis, d’approfondir ses réflexions, de les porter à ébullition, et donnerait presque envie de jeter quelques notes personnelles sur les pages blanches finales. Malgré quelques bénéfiques divergences, le constat est unanime : c’est bel et bien un épisode de la guerre civile en cours qui se joue là, l’écrasement d’une preuve bien vivante qu’un autre monde est possible. C’est pourquoi, même si cet ouvrage ne le dit pas, il faut rejoindre les Comités de soutien de la ZAD, aller y faire un tour, apporter sa pierre à l’édifice, reconstruire ce qui a été détruit, écouter aussi la parole de ceux qui y vivent.



Article complet en suivant le lien.
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Nous n'avons jamais été modernes : Essai d'an..

Plouf !



Avons-nous eu raison de faire le grand partage entre Nature et Cultures ? Sur quoi se base-t-il ? En quoi a-t-il permis à nos sociétés de dominer toutes les autres ? Jusqu'où est-il pertinent ? Est-il réel ?



Qu'est-ce que la modernité ? Pourquoi avons-nous l'impression qu'elle est en panne ? Pourquoi sommes-nous postmodernes (ou antimodernes) ? Avons-nous jamais été modernes ? Faut-il nous reconnaître comme non modernes ?



Comment peut-on penser le relativisme avec les autres sociétés ? Sommes-nous réellement si différents des sociétés « traditionnelles » ? L'ethnologie peut-elle nous aider à nous connaître nous-mêmes ? A quelles conditions ?



La science a-t-elle réellement désenchanté le monde ? La science et les technique ne continuent-elles toujours pas à l'enchanter ? Pourquoi avons-nous tant de mal à penser, à gérer aujourd'hui, les enjeux de notre Monde ? Quels changements conceptuels pourraient nous aider à gérer notre présent et notre avenir ?



Devrions-nous revenir à un peu de modestie ? Ou mieux, de lucidité ?



Essai éblouissant, mais ardu (pour moi), audacieux, et finalement optimiste, qui incite à tout repenser.
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Atlas de l'anthropocène

Un livre pour ceux qui aiment les faits, et les infographies qui mettent clairement les faits en lumière. Exemple : la température annuelle dans 14 villes du monde de 1900 à nos jours. Les bandes rouges sont les années + chaudes et ça devient carrément rouge partout sur la fin.

Ah oui, l'anthropocène, c'est la période où l'homme met sa marque partout. Autant dire que pour marquer son territoire, c'est partout, partout, partout et jamais dans le bon sens. Au rythme de presque 70 chapitres de 2 pages, à gauche du texte, à droite des infographies. Le climat, la biodiversité, la pollution, et pour finir, la "surenchère des promesses non tenues".

Ah, c'est implacable. C'est aussi un beau livre. Mais implacable. Et vraiment déprimant quand on y pense. Enfin je trouve ça déprimant, d'autres appellent ça devenir maîtres du monde.

On a vraiment du mal à voir ce qui peut enrayer cette machine de destruction. Enfin, je suis engagé dans la décarbonation, je fais le job, petit à petit, et je suis pas tout seul. Mais je vois tous mes anciens collègues, il y a encore beaucoup de monde qui vit dans l'ancien monde.
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Changer de société - Refaire de la sociologie

Une très bonne introduction à sa théorie de « l'acteur réseau ». Une manière passionnante d'élargir, au risque du vertige, les perspectives d'une discipline dont Latour critique la dimension « figée » (à la manière de la mécanique newtonienne) et l'oubli des objets « non-humains » dans les interactions sociales. Il revient pour cela à un pionnier un peu oublié (Gabriel Tarde) et nous propose une nouvelle méthodologie consistant à faire parler les acteurs, sans les croire victimes passives et aveugles de forces plus puissantes qu'eux, et à reconstruire une théorie pour chaque situation spécifique (un peu ce qu'est censé faire un bon psychanalyste avec chaque patient). Le risque est bien sûr, comme avec la pensée complexe d'Edgar Morin, de n'aller nulle part à force de vouloir aller partout. Mais Latour en est conscient et propose au chercheur une démarche certes exigeante mais aussi, à mon sens, très inspirante...
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Aramis ou l'amour des techniques

Une enquête passionnante, aussi bien si l'on s'intéresse à la gestion de projets, à la sociologie des sciences de l'ingénieur, qu'à la politique des transports urbains.



On rêverait qu'il existe de tels ouvrages sur tous les autres grands projets, réussis ou pas. De tête, je pense à "L'auto qui n'existait pas" de Midler et à la thèse de Sophie Poirot Delpech sur le CAUTRA.
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Franzen l'austère ou Auster le franc zen ?

Le souci, avec les gouvernements, c'est qu'ils sont élus par des majorités qui n'en ont rien à foutre, de la biodiversité. Alors que les milliardaires ont tendance à s'en occuper. Indice : Elle éclaire le monde.

Jonathan Franzen
Paul Auster

10 questions
30 lecteurs ont répondu
Thèmes : citations philosophiques , citadin , évocation , Appréciation , littérature américaineCréer un quiz sur cet auteur

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