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Citations de Bruno Nassim Aboudrar (19)


Medius (en grec : mesos, d'une racine indo-européenne medhyo), signifie "milieu". Le mot a donné le terme latin tardif mediatio, en français "médiation", qui a d'abord signifié "division par le milieu" avant de prendre le sens contraire d' "entremise".Le médiateur est ainsi, au sens propre, un entremetteur : celui qui se met entre, dont l'action intervient entre deux entités, de manière équidistante, afin de les relier et par le moyen duquel la rencontre peut advenir.
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Oui, même si elle ne croyait pas à la légende, Mrs Lyon pouvait reconnaître dans La Toilette de Vénus la méditation intime d'un homme mûr. Il vit, à Rome, une année de bonheur dérobé aux contraintes de la cour et de l'atelier. Il sait, car le roi le lui fait savoir, qu'il lui faudra bientôt rentrer et reprendre, au seuil de la vieillesse, le fardeau des dignités ; il l'accepte et même il le souhaite. Mais il s'accorde encore le temps allongé de ce corps, le premier et le dernier nu. Velásquez est nonchalant : il fait traîner le désir ultime, la jeunesse qui passe. (p. 187)
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On appelle "médiation culturelle" un ensemble d'actions visant, par le biais d'un intermédiaire - le médiateur, qui peut être un professionnel mais aussi un artiste, un animateur ou un proche- , à mettre en relation un individu ou un groupe avec une proposition culturelle ou artistique (oeuvre d'art singulière, exposition, concert, spectacle etc.) afin de favoriser son appréhension, sa connaissance et son appréciation.
La médiation culturelle apparaît le plus souvent comme une pratique spontanée, informelle, par laquelle un amateur, familier d'une expression artistique, en facilite l'accès à des proches : parents, amis, voire élèves dans un cadre scolaire.
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Si le voile musulman heurte tant la sensibilité des Européens – ce que montre à l'envi le débat dont il fait l'objet, en tout cas en France, depuis plus de vingt ans – ce n'est donc pas tant en raison de l'outrage éventuel fait aux femmes (nous tolérons, hélas, toutes sortes d'outrages) que parce qu'il inquiète profondément l'ordre visuel sur lequel le monde occidental s'est, de longue date, fondé. Il inscrit en effet dans une économie du visible entièrement soumise au règne du regard le refus de se laisser voir. Au sein même de l'image, faite pour être vue, la vue est empêchée, interdite ; la forme noire montre qu'elle cache, exhibe la dissimulation.
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Comparée au catholicisme sombre des Habsbourg et de l'inquisiteur à Madrid, la Rome papale, avec ses cardinaux raffinés et leurs secrétaires humanistes, ses putains, ses petits prêtres en aubes tuyautées, ses portefaix déguenillés, ses ruffians et ses castrats, constituait le foyer des équivoques baroques. Velásquez y fit quelques portraits, encore plus libres, et par là plus profonds (si c'est possible) que les figures de bouffons et de nains qu'il peignait en Espagne. (p. 185)
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Mrs Lyon avait, certes, vécu ses plus belles années (au moins les plus nombreuses) sous le règne de la reine Victoria, mais, ses amies pouvaient en témoigner, elle n'était pas bégueule. Aussi, elle y insistait, ce n'était pas de sa part un réflexe d'hypocrite pudeur si elle considérait que la place d'une femme entièrement nue, peinte d'assez près, de dos, n'était pas dans une salle commune de musée. Car il s'agissait d'une femme. Vénus - mais l'appelait-on Vénus du temps de Velásquez ? les premiers documents, en tout cas, ne l'attestaient pas - était peut-être la seule vraie femme nue, peinte, du siècle. Et il avait fallu que cela fût dans le pays où le nu féminin était le plus sévèrement prohibé. (p. 182)
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Qu’on ne s’y méprenne pas. La médiation demeure encore régulièrement traitée comme un sujet auxiliaire, face à l’art ou aux sciences. Nous pensons que sa place est nettement plus importante, pour autant que l’on ne veuille pas la percevoir comme une succession de visites-conférences ânonnées et d’ateliers de coloriage, ce qu’elle n’est pas. Elle s’inscrit au contraire au cœur du processus de développement de la personne et de la constitution de la société. Ancrée au sein des processus d’apprentissage (et d’auto-apprentissage), elle constitue un vecteur de dépassement tout au long de la vie. Qu’elle soit soutenue par des organismes publics ou issue du cercle familial, qu’elle passe par des rencontres impromptues, elle constitue un moteur de notre existence.
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L’usage du terme « médiation » ne provient pas du champ de la culture. Généralement, la fonction du médiateur est liée à un conflit potentiel que ce dernier, par sa position de neutralité, est censé résoudre. Dans le monde des entreprises ou des administrations, le médiateur intervient comme tierce personne qui, sans parti pris, tente de dénouer un conflit entre l’organisation et les usagers ou les clients : factures impayées, réclamation sur la qualité du matériel fourni, service défectueux, etc. Dès les années 1970, des actions de médiation sont mises en place par les pouvoirs publics, à commencer par la création d’un poste de Médiateur de la République, ombudsman chargé d’améliorer les relations entre le citoyen et son administration. Au gré de l’évolution du système économique et politique, la médiation apparaît comme une solution appropriée pour résoudre tous les conflits : en entreprise, à l’école, puis dans les banlieues, qui s’embrasent de plus en plus régulièrement. Pourquoi avoir choisi un mot aussi fortement lié aux conflits, en matière de culture ? Au milieu des années 1990, de nombreux emplois-jeunes de médiateurs sont offerts, la plupart dans les zones sensibles. Parmi eux, aussi, des médiateurs culturels.
« Comme toute notion à la mode, le terme de médiation culturelle devient difficile à cerner. Sa définition oscille entre deux extrêmes : d’un côté, une approche théorique très générale, de l’autre, des descriptions, des comptes rendus d’expériences très pragmatiques, centrés sur des réalisations novatrices du moment », écrit Paul Rasse.
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Si Vénus s'était si bien comportée dans la tentative de meurtre de meurtre dont elle a été la victime, c'est aussi parce qu'était une vieille toile âgée de plus de deux siècles et demi. le temps l'avait rendue "raisonnable", c'est à dire inerte
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C'est qu'il n'aimait rien tant que réfuter les jugements des connaisseurs et des experts avec la confiance ridicule qu'ils place dans le discernement de leur œil, un organe pourtant si grossier, rapporté à la finesse et à l'exactitude du microscope.
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Vénus trouble au plus haut degré notre représentation familière des oppositions entre légende et réalité, divinité et humanité, imagination et présence, bref, entre le "haut" et le "bas".
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Sa vue agissait comme un vulnéraire. Elle mettait soudain sur ces visages soucieux un sourire incertain de ravissement; parfois elle faisait pleurer des larmes douces, qui lavaient des larmes amères trop souvent versées.
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Ils attendaient longtemps pour cet instant, très court mais comme suspendu, où la beauté d'un tableau, l'enchantement de ses couleurs, de ses formes de son histoire, leur procurerait, tel un opium, le bienheureux oubli de leur condition quotidienne
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Se voiler, c'est refuser de faire image et témoigner de son appartenance à un monde qui offre peu à voir et se méfie du regard. Autrement dit, c'est une seule et même logique qui voile les femmes, régule le regard des hommes et interdit les images.
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Un homme n'a tout simplement pas à se trouver enfermé dans une chambre avec une femme. Son espace à lui est l'extérieur : c'est la rue, la mosquée, le marché ; aux femmes la maison, à plus forte raison la chambre. Et, dans cet ordre d'idée, dans sa chambre et en présence de son mari une femme n'a pas à se voiler. Si elle se voile, c'est qu'elle est étrangère à l'homme.
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D'une certaine manière, la fonction de médiateur, comprise comme celle d'intermédiaire entre une oeuvre ou une production artistique et le public à laquelle celle-ci est destinée, existe depuis toujours. Devrait-on conclure, à la manière d'un Joseph Beuys pour l'art, que tout homme est médiateur ?
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Quand aux nudités de Rubens, elles étaient une emphase de chair dans le même rapport à la femme nue que les vocalises et les trilles du chant sont aux vers du poèmes. (p. 184)
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En application d'une prescription coranique (24, 30), la bienséance veut que l'homme baisse les yeux ou détourne manifestement son regard au passage d'une femme. Alors que la visite – le mot même dérive de la vue – est un rituel social au cours duquel chacun voit et offre à voir (son élégance vestimentaire, l'agencement du salon, etc.), les règles de l'hospitalité arabe veulent que l'hôte montre le moins possible et que l'invité manifeste son absence de curiosité. Et surtout, il n'y a pas d'image. La tradition musulmane les interdit, en cela héritière du deuxième commandement de la loi de Moïse.
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On concédera à la rigueur que le jeu de regards, sur la photographie, subvertit ce qu'il doit à l'iconographie chrétienne. Là, confiants, les mariés regardent ensemble dans la même direction, non celle du spectateur ou du peintre, mais, symboliquement, celle de l'avenir et de la descendance qu'il promet ; ici, c'est un regard de défi que seul l'homme est en puissance de lancer, car, si la femme voit quelque chose derrière le voile opaque qui dissimule son visage, nul ne peut voir ses yeux.
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