Et il y eut d'autres humanités, d'autres civilisations, d'autres vanités , d'autres Babylones, d'autres Thèbes, d'autres Athènes, d'autres Romes, d'autres Paris, d'autres palais, d'autres temples, d'autres gloires, d'autres amours, d'autres lumières.
Mais toutes ces choses n'eurent plus rien de la Terre, dont les effigies s'étaient effacées comme des ombres spectrales.
Et ces univers passèrent à leur tour.
Et d'autres leur succédèrent ...
En réalité [la Lune] est toute proche de nous. C'est une province annexée par la nature à notre patrie. Un bon marcheur pourrait s'y rendre à pied pendant le cours de sa vie, et bien des facteurs ruraux ont parcouru un chemin égal à celui-là sans se douter que s'ils avaient marché en ligne droite, ils auraient pu aller jusqu'à la Lune.
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Je vis ensuite un ciel nouveau et une terre nouvelle ; car le premier ciel et la première terre étaient passées ...
(Apocalypse - XXI, L)
L'aspect funèbre de la mort est dû surtout à son entourage, au deuil qui l'accompagne, aux cérémonies religieuses qui l’enveloppent, au Dies iræ, au De profundis. Qui sait si les désespoirs des survivants ne feraient pas place à l'espérance, si nous avions le courage d'examiner cette dernière phase de la vie terrestre, cette transformation, avec les mêmes soins que nous apportons à une observation astronomique ou psychologique? Qui sait si les prières des agonisants ne feraient pas place à la sérénité de l’arc-en-ciel après l'orage?
Il est difficile de ne pas désirer une réponse au formidable point d'interrogation dressé devait nous, lorsque nous songeons à notre propre destinée, et lorsque la Mort cruelle nous a enlevé un être cher. Comment ne pas se demander si l'on se retrouvera jamais, si la séparation est éternelle?
[Contre l’hypothèse de l’intervention d’un esprit dans les expériences de spiritisme]
La réunion des personnes assemblées crée, momentanément, une personnalité psychique qui les résume. C’est notre être subconscient, notre moi subliminal qui paraît agir.
Surprenons un instant les facultés intellectuelles naissantes des animaux auxquels des philosophes ont osé refuser les rudiments mêmes du raisonnement et du sentiment : et par cette observation faite librement, et sans idée préconçue chez les races les plus diverses, apprenons à contempler la nature sous son véritable jour et à mieux connaître les rapports d'origine qui nous lient à l'ensemble de toute création.
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Le maître d'école porte alors lui-même [le crapaud] à une distance de plusieurs lieues. Huit jours après environ, le crapaud était de nouveau devant la ruche occupé à attraper des abeilles. Il cessa alors de le chasser, d'autant plus qu'il remarqué que « l'animal ne dévorait que des abeilles malades ». Cette observation dura plusieurs années, jusqu'à ce qu'un jour le crapaud tomba sous la dent d'un putois.
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Reste-t-il quelque chose de matériel dans une demeure après la mort des êtres qui l'ont habitée ?
Certaines observation sembleraient l'indiquer. Là comme partout, il y a des illusions, des erreurs, des fausses appréciations, et aussi des supercheries.
Mais il y a des faits irrécusables.
Chapitre 7, page 176.
Des observations qu'il a faites sur la nidification de l'hirondelle de fenêtre, M. Pouchet tire la conclusion que, durant la première moitié du siècle actuel, celle-ci y a introduit de notables perfectionnements.
Et c'est ainsi que, sous la plume de Flammarion, les faits deviennent, magiquement, des phénomènes. Qu'est-ce pour lui qu'un phénomène ? Rien de ce qu'enseignait la philosophie classique, je le répète. Seulement un fait qui parle pour lui seul, un fait qui exhibe sa singularité, son caprice. Lorsque Flammarion nous parle de "l'affinité de la foudre pour les pointes", ou de sa "grande prédilection pour les chaussures", il ne nous dit pas un mot sur les conditions générales de la conductibilité électrique. Il "constate", comme il dit. Mais sa façon même de présenter les choses transforme le fait - banal, intégrable - en un phénomène qui est à la fois extrêmement objectif, "constaté", répétitif... et unique, incroyable, capricieux : n'est-ce pas en effet un "caprice" de la foudre de préférer les pointes aux bouts arrondis, par exemple, et les chaussures aux chaussettes, par exemple ?
Georges Didi-Huberman, L'Empreinte du ciel