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Citations de César Vallejo (54)


Pluie


Sur Lima… Sur Lima tombe
la pluie sale d’une douleur
ô combien meurtrière. Elle tombe
du larmier de ton amour.

Ne joue pas l’endormie,
souviens-toi de ton trouvère ;
car je comprends bien… je comprends
l’humaine équation de ton amour.

Résonne dans la flûte mystique
la gemme tempétueuse et fausse,
le sortilège de ton « oui ».

Mais tombe, tombe l’averse
sur le cercueil de mon sentier,
où pour toi je me consume jusqu’aux os…


//Traduction de Nicole Réda-Euvremer
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Les anneaux fatigués


On a des envies de revenir, d’aimer, de ne pas s’absenter,
et on a des envies de mourir, combattu par deux
eaux opposées qui jamais ne vont isthmer.

On a des envies d’un grand baiser qui ensevelisse la Vie,
qui finit en l’afrique d’une agonie ardente,
suicidaire !

On a des envies… de n’avoir pas d’envie, Seigneur ;
toi je te désigne d’un doigt déicide :
on a des envies de n’avoir pas eu de cœur.

Le printemps revient, revient et s’en ira. Et Dieu,
telle une courbe de temps, se répète et passe, passe
portant sur son dos l’épine dorsale de l’Univers.

Quand les tempes battent leur lugubre tambour,
quand me blesse le songe gravé sur un poignard,
on a des envies de rester planté là dans ce vers !


//Traduction de Nicole Réda-Euvremer
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Agape


Aujourd’hui personne n’est venu poser de question ;
et cette après-midi on ne m’a rien réclamé.

Je n’ai même pas vu une fleur de cimetière
en si joyeuse procession de lumières.
Pardonne-moi, Seigneur : je ne suis mort que si peu !

Cette après-midi tous, tous passent
sans me poser de question ni rien me réclamer.

Et je ne sais quelle chose ils oublient et qui n’a pas
sa place dans mes mains, comme étrangère.

Je suis sorti à la porte,
et j’ai envie de leur crier à tous :
S’il vous manque quelque chose, c’est ici !

Car toutes les après-midi de cette vie,
je ne sais quelles portes claquent sur un visage,
et de quelque chose d’étranger se saisit mon âme.

Aujourd’hui personne n’est venu ;
et aujourd’hui je ne suis mort que si peu cette après-midi !


//Traduction de Nicole Réda-Euvremer
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ÉPÎTRE AUX PASSANTS


Je renoue avec ma journée de lapin,
ma nuit d'éléphant au repos.

Et je me dis en moi-même :
là est mon immensité brute, torrentielle,
là est mon poids si léger qu'il me cherche au sol pour me faire oiseau ;
là est mon bras
qui, lui, refuse d'être une aile,
là sont mes saintes écritures,
là mes testicules en émoi.

D'une île lugubre je naîtrai à la lumière continentale,
tandis que le capitole s'élèvera sur ma défaite intime
et que l'assemblée en armes fermera mon défilé.

Mais quand je mourrai
de vie et non de temps,
quand seront enfin deux mes deux valises,
là sera mon ventre, où tenait ma lampe en morceaux,
là sera cette tête qui expiait les tourments de mes pas circulaires,
là sera chaque ver que mon cœur comptait un par un,
là sera mon corps solidaire
veillé par l'âme individuelle ; là sera
mon nombril où je tuais mes poux de toujours,
là sera ma chose, chose, ma chose épouvantable.

Entre tant, convulsif, âpre,
mon mors renaît,
souffrant comme je souffre du langage direct du lion,
et puisque j'ai vécu écrasé entre deux briques,
je renais moi aussi, et mes lèvres sourient.
                                  1932

p.107
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Del borde de un sepulcro removido
se alejan dos marías cantante

Lunes.
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« Père cendre qui montes de l’Espagne » et qui revient « Père cendre qui t’élèves du feu », « Père cendre, arrière-petit-fils de la fumée »
« père cendre, Espagnol, notre père // Père cendre qui vas vers l’avenir / que Dieu te sauve, te guide et donne des ailes, / Père cendre qui vas vers l’avenir ».
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« La voilà qui passe ! Appelez là ! C’est son flanc ! / La voilà, la mort, qui passe à Irun : / ses pas d’accordéon, des obscénités, / son mètre du suaire que je t’ai dit, / son gramme de ce poids que j’ai tu… oui, ce sont eux ! ».
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« A Madrid, à Bilbao, à Santander / les cimetières ont été bombardés / et les morts immortels des tombes, / les os toujours en veille et l’épaule éternelle, / les morts immortels, en sentant, en voyant, en entendant / si infâme le mal, si morts les vils agresseurs / […] / ils ont cessé de pleurer, ils ont cessé / d’espérer, ils ont fini / de souffrir, ils ont fini / de vivre, ils ont fini, enfin, d’être mortels ! »
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Je mourrai à Paris par un jour de pluie / un jour dont j’ai un jour déjà le souvenir. / Je mourrai à Paris - je n'en ai pas honte – / peut-être un jeudi d'automne, comme aujourd'hui. // Ce sera un jeudi, car aujourd'hui, jeudi / que je prose ces vers, mes os me font tant souffrir / et de tout mon chemin, jamais comme aujourd'hui, / je n’avais su voir à quel point je suis seul ».
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César Vallejo
Sous les peupliers
PAR CÉSAR VALLEJO


TRADUIT PAR REBECCA SEIFERLE
pour José Eulogio Garrido


Comme des poètes sacerdotaux emprisonnés,
les peupliers de sang se sont endormis.
Sur les collines, les troupeaux de Bethléem
mâcher des arias d'herbe au coucher du soleil.

L'ancien berger, qui frissonne
aux derniers martyres de la lumière,
dans ses yeux de Pâques a attrapé
un troupeau d'étoiles de race pure.

Formé à l'orphelinat, il descend
avec des rumeurs d'enterrement au champ de prière,
et les cloches des moutons sont assaisonnées d'ombre.

Il survit, le bleu déformé
en fer, et dessus, pupilles enveloppées,
un chien grave son hurlement pastoral.
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PRINTEMPS TUBÉREUX


C'est le temps où, trainant, vigoureux, ses misères
en sens contraire de ma splendeur d'antan,
le printemps exact au bec de vautour
ajuste son cothurne à ma claudication sans talon.


p.109
/Traduction de François Maspero
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Dentelle de fièvre


Sur les tableaux de saints pendus aux murs
mes pupilles traînent un hélas! de crépuscule ;
et dans un frisson de fièvre, bras croisés,
mon être reçoit la vague visite du Nonêtre.

Une mouche pleureuse sur les meubles fourbus
veut répandre je ne sais quelle légende fatale :
une illusion d’Orients qui s’enfuient harcelés ;
un nid azur d’alouettes qui meurent en naissant.

Dans un vieux fauteuil est assis mon père.
Comme une Mater Dolorosa, entre et sort ma mère.
Et en les voyant je sens un je ne sais quoi qui ne veut
  pas partir.

Car avant l’oublie qui est hostie faite de Science,
est l’hostie, oublie faite de Providence.
Et la visite naît, m’aide à vivre bien…


//Traduit par Nicole Réda-Euvremer
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Unité


Cette nuit ma montre halète
près de ma tempe assombrie, comme
le barillet d’un revolver qui tourne
sous la gâchette sans trouver la balle.

La lune blanche, immobile, pleure,
et c’est un œil qui vise… Et je sens comme
estampe sa marque le grand Mystère en une idée
hostile et ovoïde, en une balle vermeille.

Ah, main qui limite, qui menace
derrière toutes les portes, qui souffle
dans toutes les montres, qui cède et passe !

Sur l’araignée grise de ta structure,
une autre grande Main faite de lumière porte
une balle qui a la forme azur du cœur.


//Traduit par Nicole Réda-Euvremer
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La voix du miroir


Ainsi passe la vie, comme un bizarre mirage.
La rose azur qui enfante et donne le jour au chardon !
À côté du dogme du fardeau
fatal, le sophisme du Bien et de la Raison !

On a saisi, au hasard, ce que la main a frôlé ;
les parfums se sont envolés, et parmi eux on a senti
la moisissure qui à mi-chemin a poussé
sur le pommier sec de la morte Illusion.

Ainsi passe la vie,
avec les cantiques trompeurs d’une bacchante fanée.
J’avance tout effaré, en avant… en avant,
faisant gronder ma marche funèbre.

Avancent au pied de brahmaniques éléphants royaux,
au son du sordide bourdonnement d’une ardeur
  mercurielle,
des amants qui lèvent leurs coupes sculptées dans
  la roche,
et des crépuscules oubliés, une croix sur la bouche.

Ainsi passe la vie, vaste orchestre de Sphinx
qui jettent dans le Vide leur marche funèbre.


//Traduction de Nicole Réda-Euvremer
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