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Critiques de Charles Willeford (45)
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Une fille facile

Belle découverte que cet écrivain américain de romans noirs pas très connu vu le nombre de ses lecteurs sur Babelio.

Un peu d'humour, beaucoup de tendresse et de tristesse dans cette rencontre entre un homme et une femme qui ont le mal de vivre.

Deux âmes désemparées qui se sont reconnues dans leur douleur et essayent, ensemble, de survivre avec leur amour, beaucoup d'alcool et une tentative de suicide ratée leur donnant, un temps , l'illusion, tout à la joie de se retrouver, que la vie peut-être supportable.

Mais tout cela ne suffit pas et c'est le cœur serré que l'on assiste à la fin de leur singulière histoire se terminant par une phrase inattendue de l'auteur nous éclairant sur le mal être de l'un des personnages.

Pas franchement gai, me direz-vous, mais l'écriture et la compassion de Charles Willeford envers ces deux paumés nous les rendent attachants.
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Une fille facile

Quand Harry rencontre…. Helen.

Helen fille facile, ça c’est certain, elle est pas farouche la Miss (au demeurant magnifique, blonde au teint pâle avec des petites tâches d’or dans les yeux, une sorte de Kate Moss quoi…), si on lui paye un verre ou dix… ou mieux une bouteille ou deux… Le problème c’est qu’après une bonne cuite, elle ne se rappelle de rien, du coup elle égare son sac ou sa valise, les seuls biens qu’elle possède.

Frisco, tout début des années cinquante, Harry, ex peintre désabusé, ex soldat durant la guerre, homme charmant, aimé de tous, respectueux, officie comme barman lorsqu’il rencontre Helen, lui aussi aime bien (beaucoup) picoler, alors entre eux c’est le coup de foudre.

Helen, fragile et paumée, s’installe donc dans la pension de famille où Harry loue une piaule minable. Grâce à l’amour d’Helen, Harry revient même à sa passion première : la peinture. Elle lui demande de faire un portrait d’elle nue, le tableau est une réussite totale. Les amoureux s’installent dans le cocon sordide de la chambre d’Harry pour faire l’amour et boire, boire, boire….

Oui mais pour boire, il faut de l’argent, Harry change souvent de job, il n’est pas paresseux et se débrouille pour les faire vivoter. Le problème c’est qu’il ne peut pas laisser Helen seule, elle déprime, alors elle sort pour picoler et finit ivre morte entourée de marines ou autres soldats qui la tripotent… Harry n’aime pas ça du tout, d’autant plus qu’il se paye tout San Francisco pour la retrouver et que ça dégénère en bagarre avec les types parce qu’il ne faut pas trop le chauffer quand même, le Harry, surtout que tout le monde les regarde avec dédain, comme s’ils formaient un couple improbable.

Ils s’enfoncent tous les deux dans la dépression, idées suicidaires, passage à l’acte raté, soins en clinique, cuites, c’est un cercle vicieux… Jusqu’au drame…

L’ambiance dégagée par ce grand roman noir de Charles Willeford rappelle celle du monde de Charles Bukowski : course effrénée pour trouver un dollar ou deux pour pouvoir boire, tout est moche, sordide, aucun espoir, pas d’avenir.

Une fille facile est malgré tout un livre très intrigant, plus on avance dans l’histoire, plus on se demande où l’auteur veut nous emmener, ce n’est qu’à la dernière page que nous trouvons la réponse et que tous les évènements s’expliquent en une seconde. Étonnant tour de force, ce bouquin de 1967 est dérangeant, réaliste et attachant.

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La Différence

Sud de l'Arizona, à proximité de la frontière mexicaine, quelques années après la fin de la guerre de Sécession. Johnny Shaw, dix-neuf ans, traverse un paysage désertique sur le dos de son cheval. Arrivé au sommet d'une colline, il scrute l'horizon pour repérer la trace de ses poursuivants. Son avance sur Dad Reardon et ses deux fils s'amenuise. Les trois hommes sont à ses trousses pour venger Onyx, le plus jeune des fils Reardon, que Johnny aurait – selon eux - abattu lâchement, sans respect des règles du duel.



Charles Willeford surprend en quittant le registre du roman noir pour nous livrer un western caractéristique : cow-boys solitaires, duels, boeufs marqués au fer rouge, terres attribuées au premier arrivé, avis de recherche placardés dans le bureau du shérif, etc. Nous assistons à la mue progressive de Johnny. le gibier de potence se transforme en prédateur. Il apprend le maniement des armes et des rudiments de stratégie. Et l'image du bon garçon va progressivement s'effacer et nous allons découvrir un personnage bien plus sombre et complexe.



Ce roman efficace offre en deux cents pages un condensé d'action et le portrait tout en contraste d'un jeune as de la gâchette. Un bon western qui sent bon la poudre des armes à feu et la poussière des terres arides de l'Arizona.
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Ainsi va la mort

Dernier opus (mais première lecture pour moi) des aventures de Hoke Moseley, flic de Miami en charge de "décès non éclaircis".

La différence avec des cold cases ? Aucune, simplement ce livre a été écrit à la fin des années 80'.



Toujours est il que ce postulat laissait supposer une enquête en bonne et due forme. Que nenni ! On est ici dans du noir bien plus que dans un polar.



Un noir percutant qui dépayse et qui déroute un peu aussi parfois. Qui déroute dans les attitudes de certains personnages un tantinet bizarre, qui alterne dans son écriture parfois alerte, parfois inventorielle, qui louvoie dans la trame même de son récit.



Ce cocktail me laisse sur un sentiment mitigé, et sans l'entrain suffisant pour envisager de remonter l'histoire du Sergent Moseley et de ses précédentes aventures.









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Dérapages

Comme chaque matin, Hoke Moseley parcourt les titres du Miami Herald en dégustant son premier café. Il s'installe sur sa chaise longue, ferme les yeux et perd soudainement toute motivation. Victime d'un burn out, il se sent incapable de rejoindre son bureau au sein de la Police de Miami où l'attendent des piles de dossiers. Il décide de mettre sa carrière de policier entre parenthèses et se rend sur Singer Island où il se contentera de gérer des meublés appartenant à son père. Dans ce troisième volet consacré à ce sergent désabusé, nous retrouvons son entourage : ses deux filles qui l'encombrent, sa coéquipière d'origine cubaine enceinte jusqu'aux yeux et ses collègues de la Criminelle. le récit de son congé croise celui des péripéties de Stanley Sinkiewicz. le vieil homme a travaillé toute sa vie dans une usine Ford. A la retraite, il a quitté Detroit pour couler des jours tranquilles avec son épouse sous le soleil de Floride. Mais sa vie si ordinaire et si ennuyante va sortir des rails lorsqu'il croise la route deTroy, un dangereux sociopathe. le lecteur qui a apprécié les épisodes précédents devine assez vite la nature des dérapages à venir. le roman n'en reste pas moins savoureux avec sa galerie de personnages drolatiques.On y croise par exemple un jeune peintre qui produit de l'art figuratif sans grand talent ou un spécialiste en taons d'Ethiopie en congé sabbatique... Charles Willeford prend le temps de poser son intrigue et ses personnages, aussi l'histoire, bien que déjantée, reste-elle parfaitement construite. L'humour noir est parfaitement dosé et teinté d'une pointe de mélancolie. Pour conclure, je reprendrai l'appréciation de Philippe Jaenada dans sa présentation de Miami blues (dans le cadre de l'opération "lectures sur ordonnance") : "noir, cynique, violent, odieux mais déroutant d'humanité".
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Miami Blues

A peine sorti de prison, Frederick Junior Frenger commet trois agressions. Les cartes de crédits récoltées lui permettent de prendre l’avion pour la Floride. Le Sunshine State est la destination préférée des retraités, des touristes et depuis peu, des criminels. Alors un psychopathe de plus ou de moins... Junior s’illustre dès son arrivée à l’aéroport de Miami en tuant involontairement un dévot de Krishna. Arrivé dans sa chambre d’hôtel, il fait monter une prostituée qui le surprend par sa jeunesse et sa candeur. Junior & Susan, un duo de choc vient de naître, la brute sans envergure et la plouc ingénue. Mais ils devront faire face à un autre duo de preux chevaliers œuvrant pour la police criminelle. Nos « deux flics à Miami » se nomment Bill Henderson (il est marié à une épouse autoritaire et père de deux enfants acnéiques) et Hoke Moseley. Je vais employer un affreux anglicisme : entre Hoke et moi, ça a tout de suite ‘matché’. Ses problèmes de dents et de poids, sa pension alimentaire astronomique, sa piaule dans un hôtel de seconde zone, ses doubles doses de Early Times, sa vieille Pontiac cabossée… C’est un enquêteur de roman policier divorcé et amateur de whisky comme il en existe des centaines d’autres mais Hoke Mosely se détache par sa sincérité et par son regard caustique. Il est un brin désabusé mais il est vrai que la ville de Miami ne semble pas de tout repos pour un policier. Les affaires vont du braquage pour quelques dizaines de dollars aux fusillades entre trafiquants de drogue. Il n’est guère prudent de sortir de chez soi sans son arme. Charles Willeford réussit à mettre en place des personnages déjantés dans une intrigue maitrisée sans tomber dans la facilité. « Miami blues » est un polar d’excellente facture qui brille par la férocité de son humour.
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Miami Blues

Miami Vice ?



Non, Miami Blues !



Mais quand même un peu, voire beaucoup Miami Vice...



J'ai beaucoup aimé traîner dans Miami avec le sergent Hoke Moseley de la police criminelle.

Celui-ci est désabusé, blasé, voire déprimé...



Il ne touche qu'un mois de salaire sur deux car son ex-femme le ruine en pension alimentaire et frais divers et variés pour ses deux filles.

Obligé de loger dans un hôtel assez pourri en compagnie de vieilles dames veuves, il doit en plus endosser le rôle de gardien de nuit dans ledit hôtel pour payer le loyer de sa chambre miteuse à un propriétaire pour le moins cupide.

Vivant seul et sans ami, affublé d'un appareil dentaire confectionné par un médecin légiste, il doit sans cesse surveiller sa ligne ayant un solide appétit, une faiblesse pour le Early Times et une certaine tendance à l'embonpoint. Hoke suscite immédiatement l'empathie.



Vie somme toute déjà assez glauque mais si on ajoute le climat de violence omniprésent à Miami, celle-ci tourne au cauchemar, qui va d'ailleurs se concrétiser sous les traits de Frederick J. Frenger Junior, psychopathe débarqué de Californie que Hoke aura le malheur de croiser au cours d'une enquête.



Poor lonesome Hoke...



Roman noir parfaitement construit mêlant cynisme, autodérision et violence, ce petit bijou est à lire sans modération !

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Une fille facile

Harry termine son service dans une gargotte de San Francisco quand une femme fait son entrée dans l'établissement. Son joli visage encadré par des cheveux blonds ne le laisse pas indifférent. L'inconnue, éméchée et sans ressource, est une proie facile pour les rapaces qui rôdent la nuit. Harry la prend en charge et lui paie une chambre d'hôtel. Helen, c'est son nom, le rejoint le lendemain. Ces deux âmes perdues s'unissent mais leur idylle va rapidement battre de l'aile. Le couple est en effet miné par l'alcoolisme, la pauvreté et la dépression. Leurs maigres économies sont dépensées dans les bars du quartier. Ils cherchent dans les spiritueux à échapper à la laideur du monde. Mais l'alcoolisme est un vice coûteux. Et l'artiste raté et la fille prodigue vont sombrer peu à peu dans une mélancolie fatale. « Une fille facile » est le second roman de Charles Willeford. C'est un polar classique assez semblable par les thèmes abordés aux romans de David Goodis (et donc bien différent de la série Hoke Moseley qui a rendu l'auteur célèbre). Ce qui distingue ce roman, c'est que de nombreux détails disséminés dans le récit ne prennent sens qu'aux dernières lignes du livre. Un tour de force qui offre un nouvel éclairage à l'histoire.
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La messe noire du frère Springer

Sam Springer est un écrivain au succès très modeste et accessoirement un être relativement détestable !

Il rencontre l’abbé Dover qui lui démontre que le métier de prêtre n’est pas une vocation religieuse mais plutôt un art de vivre : travailler peu et en vivre convenablement sur le dos des fidèles.

Sam devient alors le Très Révérant Deutéronome Springer de l’Eglise du Cheptel de Dieu à Jacksonville, Floride, prêtre blanc dans un quartier noir en pleine période ségrégationniste.

Le livre est bien tourné et nous fait visiter les coulisses des églises obscures présentes à tous les coins de rues aux Etats-Unis, surtout lorsqu’elles sont gérées par des égocentriques malhonnêtes et vicieux, comme notre cher Springer.

Charles Willeford a une belle plume et ce roman non médiatisé mérite d’être lu
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Miami Blues

Hoke Moseley, sergent de la police de Miami, vit dans une chambre d'hôtel minuscule où personne ne fait jamais le ménage et tous les soirs il met ses dents dans un verre.

Charles Willeford est mort en 1988 et Miami Blues, son premier grand succès a paru quatre ans avant. Il a écrit quatre romans dans la série du flic Hoke Moseley, comme si Ed Mc Bain était mort après la quatrième enquête de Steve Carella, au lieu d'en écrire cinquante-trois. J'aurais adoré qu'il me reste cinquante-deux histoires de Hoke Moseley à lire! Willeford aime la littérature et il en parle dans ses polars; ici les Haïkus animent les conversations entre Freddy, ex-taulard culturiste, Susie qui fait des passes et qui voudrait étudier, et les flics. Et tout le monde compte les pieds : 5-7-5. Willeford, comme Susie, rêvait de fac de lettres. La fac a renvoyé Willeford quand elle a compris qu'il n'avait pas le bac. Il est retourné ferrer des chevaux. Bien plus tard, après trois romans, l'Université de Miami l'a accepté. Willeford fait tout un peu plus tard que tout le monde. Il rate son départ, à l'instar de son flic qui fait réellement son entrée dans le roman un peu plus tard que tous les flics de romans. Seul dans la tête du malabar taulard pendant 60 pages magnifiques, le lecteur prend de l'avance sur l'inspecteur. Une ironie dramatique relative et jouissive. On sait ce qui attend Hoke quand Freddy croisera sa route. Cent pages plus loin on quitte Hoke pour retourner là, où, lecteur infâme et honteux, on est vraiment mieux: dans la tête du voleur, ce balèze, malin et complètement idiot. Malin dans sa logique limpide de machine violente, persuadé qu'il va y arriver; complètement idiot, parce qu'il ignore le contexte : Miami, où il vient de débarquer ; la vie mystérieuse des gens honnêtes, quand on a passé toute sa vie entre la maison de redressement de Whittier et la San Quentin State Prison, où Johnny Cash ne jouait pas tous les soirs. Freddy voit juste, mais tout est faux. Willeford disait « écrivez la vérité et ils diront que c'est de l'humour noir ». Miami Blues est un mille-feuille : 100 pages brillantes, 100 pages molles, 100 pages brillantes. Et ça s'arrête là. Mon Haïku à la mémoire de Freddy :



Le soleil se lève

Si la merde est ton destin

Il se couche quand même
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Une fille facile

À l'avant dernière ligne d'Une Fille Facile, tout un monde bascule. Six mots, pas plus, et le lecteur est soufflé, estomaqué par l'audace et le talent de l'auteur de ce livre écrit en 1967, ce roman noir, pas vraiment un polar, qui classe Charles Willeford dans la lignée des plus grands auteurs, de John Fante à Jim Thompson, de Romain Gary à William Styron.



L'humour grinçant de l'auteur qui n'apparaît pas au fil de cette histoire désespérée surgit ainsi à l'avant dernière ligne. Charles Willeford a joué avec nous et nous a bien eus. On ne rit pas, non, mais on salue l'habileté de l'artiste qui, évitant une démonstration pesante, nous amène à réfléchir sur notre attitude face à certains gros problèmes de société. Et dès lors, ce sont des passages entiers du livre qui reviennent à notre esprit et que l'on comprend mieux.



En dire plus serait priver le lecteur d'une belle surprise.
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Dérapages

Troisième volet consacré au sergent Hoke Moseley, de la police de Miami, Dérapages reprend à grands traits la structure sur premier roman de la série, Miami Blues. D’un côté Hoke Moseley, flic en surpoids affublé de dentiers vaguement bleutés et de deux filles adolescentes, qui partage une maison avec sa collègue cubaine enceinte. Hoke, sous pression parce qu’il a trop bien travaillé sur ses dossiers précédents et a donc écopé d’encore plus de travail, devient catatonique. Après que sa plus jeune fille l’a découvert dans sa chaise longue refusant d’articuler un mot après s’être pissé dessus, il rejoint Singer Island, où il a grandi, et décide de ne plus mettre un pied en dehors de l’île. D’un autre côté, Troy Louden, psychopathe à l’origine de braquages sanglants dans des supermarchés monte un nouveau coup avec l’aide du vieux Stanley Sinkiewicz dont la femme est partie après qu’il a été accusé à tort d’attouchements sur une enfant.



On se doute bien que les deux histoires finiront par se croiser, mais, en réalité, peu importe. Ce qui compte, c’est la manière dont Willeford nous implique dans la vie de ses personnages. Des vies médiocres ou, au mieux, sans grand intérêt. Hoke tente de se reconvertir dans la gestion d’un immeuble pour le compte de son père, joue au Monopoly, découvre que sa fille est boulimique, s’intéresse au travail scientifique que l’un de ses locataires consacre aux taons d’Éthiopie… Stanley, débarrassé de sa femme, découvre la liberté en se plaçant sous la coupe de Troy et apprend à un complice à faire des lignes droites avec un pinceau sans utiliser de règle.



Personnages à la dérive, avec leurs qualités et leurs défauts, perdus dans une société qui n’est plus vraiment la leur et qui regrettent un passé qui n’était en fait guère mieux, Hoke et Stanley apparaissent comme les deux faces d’une même médaille. La différence étant que Hoke est un peu plus déterminé et a encore quelqu’un à qui se raccrocher et dont il se sent responsable ; ses filles qui le rendent meilleur.



Et de ces histoires banales, Willeford tire un roman nonchalant et accrocheur. Grâce à son humour qui transperce dans quasiment chaque phrase, cette dérision légère mais terriblement bien affutée, et ce sens des dialogues légèrement décalés. Grâce aussi à la tendresse qu’il porte à tous ses personnages sans exception. Il en ressort une atmosphère indolente où pointe toujours un semblant de tension dans laquelle le lecteur se laisse entraîner avec plaisir.


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Une seconde chance pour les morts

« Hoke s’éveilla tout abruti à six heures du matin, fit chauffer de l’eau sur sa plaque électrique pour faire du café instantané, mit ses dentiers et se rasa dans la salle de bains. Il avait déjà compris que s’il n’allait pas dans la salle de bains le premier le matin, les filles y passaient un temps tout à fait déraisonnable. Elles réussissaient par ailleurs le prodige de mouiller toutes les serviettes sèches et consommaient une quantité vertigineuse de papier hygiénique. »



C’est un Hoke Moseley pour le moins perturbé que l’on retrouve dans le deuxième roman que Charles Willeford lui consacre après Miami Blues. Son ex-femme lui a expédié sans préavis ses deux filles de quatorze et seize ans pour pouvoir refaire sa vie et il se voit obligé de partager avec ces deux enfants qui lui sont devenues étrangères sa chambre miteuse de l’hôtel Eldorado qu’il va de toute façon devoir quitter, son chef refusant qu’il habite à l’extérieur des limites de Miami. À cela vient s’ajouter le fait que sa jeune coéquipière cubaine est à la rue car son père l’a jeté dehors en apprenant qu’elle était enceinte, la mission que lui a confié le chef d’enquêter sur de vieilles affaires non élucidées, et les liens étroits qu’il tisse avec la belle-mère de la victime dans une enquête qu’il est en train de mener.



Plus encore que dans Miami Blues, l’intrigue criminelle est ici secondaire, Hoke cherchant avant tout à se faciliter la vie en trouvant aussi vite que possible un logement et le moyen de s’occuper de ses filles. Fataliste mais doté d’un certain sens des responsabilités, le héros de Willeford tente de mener de front sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Il prend d’ailleurs ici une certaine épaisseur en faisant preuve d’une attitude quasi sacerdotale en ce qui concerne l’éducation de ses filles et en essayant dans le même temps de tirer parti de son travail pour améliorer sa situation.

Plus déterminé qu’il n’y paraît, Hoke Moseley, s’il accepte sa condition de flic sans le sou à la merci de l’avocat de son ex-femme et des organismes de crédit, tente vaille que vaille de trouver des solutions à ses problèmes, fussent-elles complètement loufoques ou à la limite de la légalité.



On notera par ailleurs que Charles Willeford n’avait pas prévu cela au départ. En effet, comme l’explique Pierre Bondil, traducteur de Willeford, dans le Dictionnaire des littératures policières, l’auteur avait écrit après Miami Blues un second et ultime volume qui ne fut jamais publié des aventures de Moseley dans lequel il tuait purement et simplement ses deux filles lorsqu’elles débarquaient chez lui à l’improviste. En laissant finalement en vie les filles de Hoke Moseley, Willeford se doit finalement de le doter d’un plus grand sens des responsabilités. Mais il conserve le caractère résigné de son héros et joue de sa maladresse dans ses rapports avec ses filles et sa coéquipière, le tout se doublant d’un étonnant et très personnel sens des valeurs.



Cela donne au final un roman atypique, hilarant parfois (le passage où Hoke décide de parler de sexualité à ses filles vaut à lui seul qu’on lise ce roman) mais sur lequel est posé un pesant couvercle de pessimisme qui en fait un livre profondément noir à l’atmosphère lourde et moite.




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Une fille facile

Après le pavé 22/11/63, j’avais envie d’une lecture courte.

Je pensais en prenant ce livre de 220 pages me diriger vers un polar type James Hadley Chase ou William Irish avec un détective, une enquête et de belles pépées.

Et bien pas du tout : Helen est bien une "pépée" comme on pourrait s’y attendre mais elle est bien plus que ça.

Quand Harry la rencontre dans un bar, il sait tout de suite qu’elle est soûle (et alcoolique), normal : il est lui même alcoolique. Presque siamois, ces deux-là décident de vivre ensemble, ils se confient l’un à l’autre et c’est passionnant : une grande détresse de part et d’autre et l’auteur arrive à nous les rendre attachants et même indulgents vis à vis de leur addiction.

L’action se passe au début des années 50 à San Francisco. Harry est un ancien GI, il a essayé de reprendre des études d’art en rentrant de sa mission de soldat ... sans succès ... dépressif, alcoolique mais également lucide alors qu’Helen ....

C’est un livre très noir, sombre...



La fin est doublement surprenante mais je n'en dirai pas plus pour ne pas divulgâcher. L’avant dernière phrase claque comme ....une évidence ? Une mystification de la part de l’auteur ?



J’ai lu ce livre car il était cité dans Mars club, un roman sur la vie en prison d’une jeune femme condamnée à perpétuité. Dans Mars Club, le professeur qui donne des cours d’anglais aux détenus leur fait lire (ou leur parle) d' « une fille facile » : pas sûr que ça aide les détenus de lire ce livre ...le désespoir va crescendo.... mais quelle force dans le propos .... un livre marquant !
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Une fille facile

Le rapprochement avec mes récentes lectures de Frédéric Dard est inévitable puisque c'est une rencontre homme / femme qui est à l'origine de l'intrigue de ce roman noir.

Car il ne s'agit pas vraiment d'un polar mais de la chronique d'une certaine Amérique des années 60 qui prends tout son sens avec le twist-ending qui la clôt.

J'en avais pour ma part pressenti la nature tout en me trompant de cheval.



A lire.
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Miami Blues

Une curiosité que voila ...

Quand l'humour noir se méle au polar en général c'est efficace , la preuve ici .

Cette intrigue est un peu folle , cela pars un peu dans tout les sens , mais au final c'est asez jubilatoire .

On ris souvent et de bon coeur .

Le suspense est bien géré , avec des limites mais c'est trés efficace .

On s'amuse , on frémis , on se règale en somme avec cet opus sans génie mais trés sympathique .
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Dérapages

Un polar comme on les aime.

Nous sommes loin du flic ou du privé cynique-revenu de tout-alcoolique-coureur de jupons-mais néanmoins décidé à poursuivre le crime comme on nous les sert régulièrement, sur fond d'assassinat archi-sanglant-sans indices.

Hoke Moseley (le héros récurrent de Willeford dans trois de ses livres, si je ne m'abuse) est un quadragénaire bedonnant, affublé d'un dentier, d'un compte en banque anémique et d'une solide dépression nerveuse.

Surtout, l'arrière plan du livre est très original : les méchants sont un jeune truand et un papy sans histoires qui en est tombé amoureux, rien que ça...

Bref, un vrai polar, documenté, iconoclaste, passionnant, écrit par un maître du genre.
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La messe noire du frère Springer

Comment en faire le moins possible mais réussir néanmoins à avoir un niveau de vie correct ?

C'est la question à laquelle répond ce roman.

On suit les aventures de Sam Springer qui devient révérend de l'Eglise du Cheptel de Dieu à Jax, Floride.

Tout paraît simple au détail près que Sam n'a aucune formation religieuse et n'est même pas croyant.

Les déconvenues s'enchaînent les unes après les autres, ce qui donne un aspect comique au roman.

Mais, à travers ce personnage qui se révèle ne pas être sympathique du tout, l'auteur brosse un tableau caustique de la pratique religieuse et surtout des hommes chargés d'organiser cette pratique.

Le personnage est fantastique (on le déteste très rapidement) : il est égocentrique, sexiste et préoccupé uniquement par sa petite personne.

Ce fut une lecture très sympa et originale.
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Ainsi va la mort

Remis de sa dépression, Hoke vit une vie bien réglée dans un lotissement où il partage une maison avec ses deux filles adolescentes, son ancienne coéquipière cubaine Ellita et le bébé de cette dernière, Pepe. Il continue par ailleurs à travailler sur des affaires de meurtres non résolues, mais sa petite vie réglée commence à lui échapper. D’abord parce que le manque d’effectifs pousse sa hiérarchie à le remettre sur des affaires courantes, ensuite parce que le nouveau chef a décidé de mettre à l’amende les officiers de police qui fument dans les locaux et les véhicules du département, enfin parce que Donald Hutton, que Hoke avait arrêté et qui avait été condamné à vingt-cinq ans de prison en jurant de se venger, vient de comme par hasard de s’installer dans la maison située juste en face de celle de la famille Moseley.

Là où les romans précédents faisaient généralement évoluer en parallèle Hoke Moseley et les criminels qui allaient finir par croiser sa route, Ainsi va la mort est exclusivement centré sur le policier. On voit Moseley tour à tour affairé à essayer de comprendre en quoi une télécommande de porte de garage a pu jouer un rôle dans le meurtre d’un chirurgien, s’agacer de l’incompétence de son jeune coéquipier, s’énerver de la présence de Hutton en face de chez lui et embringué dans une mission d’infiltration dans les Everglades qui semble moins tenir de l’enquête que du bizutage. Ce faisant, Willeford offre l’occasion d’entrer un peu plus encore dans la psyché de son héros partagé entre nonchalance et fausse résignation mais qui semble toujours près d’exploser. C’est d’ailleurs cette tension du personnage-même qui importe ici, plus que tout autre élément. On attend moins la résolution des intrigues qui se mettent en place dans le premier tiers du roman que le moment où Hoke Moseley va agir de manière radicale et envoyer valser tout ce qui pèse sur ses épaules.

Et c’est finalement la description minutieuse mais aussi constamment teintée d’une ironie un peu acerbe des états d’âmes de Moseley, le regard fataliste de ce dernier sur le monde dans lequel il vit et dans lequel, d’une certaine manière, il se sent étranger, qui fait tout l’intérêt de ce roman noir existentialiste d’une lenteur salutaire que viennent opportunément briser quelques explosions propres ou figurées ou quelques sentences définitives.

Certainement interrompue par la mort de Willeford, la série mettant en scène Hoke Moseley trouve pourtant ici un épilogue idéal, qui laisse des portes ouvertes mais en ferme aussi un certain nombre et, surtout, laisse en suspens la mélancolie résignée de son héros.


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L'île flottante infestée de requins

Nous sommes dans les Seventies.. Les pat'd'éph, les chemises cintrées, les pantalons moulant bien le "service-trois-pièces", les cheveux longs, les rouflaquettes, les Doors...et bien d'autres portes ouvertes à ce qui deviendra illicite dans les décennies d'après.

4 célibataires, étant parvenus à un niveau de vie supérieur à la moyenne, noient leur célibat et leur ennuis tous les soirs, en buvant des cocktails et des whiskys, au bord de la piscine, sur la terrasse de leur résidence ultra privée à Miami en Floride...Résidence réservée qu'à l’élite...De préférence la masculine engeance... Seules quelques hôtesses de l'air y résident, de temps en temps, entre deux avions, deux scotch et deux hommes...

L'un d'eux lance un pari comme quoi il est capable de lever une fille dans un drive-in pour la coucher dans son lit...N'importe quelle fille, la premiere venue...une fille différente du milieu dans lequel ils naviguent...De toute façon c'est toutes les mêmes....

Les autres, goguenards, relèvent le défi....et l'autre s'y colle...

Mais rien ne se passera comme "prévu"....Le drame est à leur porte, et chacun tout au long des années qui passeront porteront cette croix....chacun la leur, mais le poids, non de la culpabilité ou du remord, mais le poids de la peur de se faire prendre les tiendra en alerte.

Leur amitié résistera-t-elle face à ce boulet qu'ils traînent ?....Sauront-ils se taire ?....Sauront-ils faire face aux imprévus ?... à la fragilité du temps qui passe... ce temps qui ronge l'amitié comme l'acide....

Absence totale de moralité chez ces énergumènes cyniques mais pourtant on suit leur périples avec délice...

Willeford à la plume d'un grand raconteur d'histoire...à la façon d'un Jim Harrison..

En guise de conclusion, je voudrais dire que Charles Willeford nous livre un détail croustillant... Je ne voudrais pas être mauvaise langue ,mais on prend connaissance que les Hôtesses de l'air sont friandes d'anulingus.... "C'est d'un goût !...." me diriez-vous....Certes ce n'est pas un détail qui restera dans les annales et n'est pas d'une grande profondeur dans le sens noble de la littérature, mais bon....De toute façon je ne connais pas d'hôtesses de l'air en activité et je n'avais pas 10 ans dans les seventies...alors...
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Au début de l'histoire, le vieux flibustier arrive a l'auberge avec

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Thème : L'Ile au trésor de Robert Louis StevensonCréer un quiz sur cet auteur

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