Chloé Cruchaudet

La violence est parfois silencieuse.

- Il n'y a vraiment aucun vieux parmi vous ?
- Surtout pas ! Les adultes trahissent, ils sont grossiers...
- Et ils sont tellement moches !

- Quand ce palace flottant sera sur l'eau, nous suivrons la Grôsne jusqu'à la mer, et ainsi, nous accomplirons notre rêve: trouver notre place. .. l'endroit qui nous est destiné...
- Votre place? Elle est où exactement?
- Justement. C'est à nous de chercher. Le hasard nous a posés ici... Mais ailleurs... c'est peut-être mieux...

L’incipit, c’est comme tremper le doigt dans le plat avant la dégustation…

- Vous allez faire des courses M'zelle Suzanne ? Eh bien... bon courage !
J'ai passé ma matinée hier, y a que dalle... J'ai ramené trois rutabagas et deux navets.
- Aaah...quelle misère...
- Résultat, aujourd'hui, j'ai des gaz.
- Mais tout Paris pète ma pauvre Lucette. Qu'est-ce que vous voulez... Faut bien se nourrir...

Ici, on ne déplace pas un grain de poussière sans ma permission.
Mon asthme. Comprenez-vous.
J’ai la phrase longue, mais le souffle court. Ha! Ha!

- Tiens , ça, c'est la robe en soie dont je vous parlais...
- Elle s'est abîmée par endroits, alors j'ai ajouté des broderies. Ça m'a pris un temps !
- ...Monsieur faisait la même chose avec ses textes ! ...
- Il rapiéçait, il rapiéçait...
.....
- Jour après jour, je l'écoutais décortiquer l'âme humaine...
-...Il observait, disséquait...épinglait tout le monde...

Je pense que l'amour, quelle que soit sa forme, est très... surévalué. L'art, lui, ne nous déçoit jamais.

[années 1910]
- Surtout, fais bien attention. Ne fais pas comme moi. Choisis quelqu'un de bien, de solide. Quelqu'un sur qui on peut compter...
- Maman. Je vais juste danser pour m'amuser, n'en fais pas toute une histoire...
- C'est ça, oui... Tiens-toi bien, tu ressembles à rien toute tassée. Et n'oublie pas de baisser les yeux quand on te regarde, si tu ne veux pas passer pour une fille vulgaire.
(p. 6)

[conseils entre femmes pour séduire, années 1910]
- Elle a raison. Tu touches tes cheveux, tu tripotes ton genou, tu baisses ta jupe... Comme ça tu flattes son instinct de chasseur, tu fais la proie innocente qui s'agite devant lui.
- C'est fatigant.
- Le coup de grâce : tu renverses la tête en gloussant pour lui offrir ton cou.
(p. 10)

- Détends-moi, ma caille... T'es tellement pâlotte, ça va te faire du bien !
- Et tu crois que cette puanteur va me rendre plus gaillarde ?
- Allez... Fais pas la fine bouche ! C'est Paris ! Tu verras, les riches aussi sentent fort. D'autres odeurs, des parfums capiteux.... Prends-ça comme si tu faisais une balade au zoo.

- Je perds tellement de trucs que des fois... j’ai peur de me perdre moi-même.

– Il faut qu’on les dépasse, notre honneur est en jeu !
– C’est quoi l’honneur ?
– C’est un truc qui fait qu’on peut bomber le torse et regarder les gens avec fierté.

- Regarde les gestes... Une femme, ça doit être discret, tout en retenue... Tu manipules les objets comme s'ils étaient très fragiles... Tu bouges lentement comme si tu étais dans l'eau... Tu fais comme si tu avais un peu froid...Tu pose ton verre sans faire de bruit...
- Bon, tu veux que je joue au pédé quoi...

- Si un jour vous avez l'honneur d'aller sur un champ de bataille, il faut que l'ennemi soit impressionné par la propreté de vos bottes.
- Psst... Gino.. Mate la brillance, t'es ébloui, là ?
- Je suis aveuglé, mon gars.

C'est dégueulasse la mort, ceux qui disent le contraire.... sont des foutus menteurs.

- [Colette évoquant les romans de Proust à Céleste] Et puis... il n'est pas questions d'histoires... au sens classique du terme.
- Comment ça... Y'a pas un début et une fin ?
- Des histoires avec une narration classique impliquent un mouvement. Là, ce n'est pas le cas. Ce serait plutôt une succession d'images figées, sur lesquelles on resterait si longtemps, qu'on comprendrait, sentirait, chaque détail.

Monsieur.... je dois vous avouer que...
Odilon m'a prévenu. Vous ne savez rien faire. Je ne vous demanderais pas grand-chose. Mon café, quelques envois... J'ai remarqué que vous ne saviez pas parler à la troisième personne. Je ne vous le demanderais donc pas...
Oh, ça non, Monsieur, je ne le pourrais pas !
?.... Je m'en accommoderais, si vous faites de même avec mes horaires particuliers.
Bien sûr, Monsieur.
.....
Odilon...
... C'est qui, la troisième personne ?
Hein ?
Pourquoi on devrait parler à une troisième personne chez Monsieur Marcel ?
Ma Céleste... qu'est-ce que t'es chiante...
Est-ce que le pli de son pantalon convient à Monsieur ? Est-ce que Monsieur reprendra un nuage de lait avec son essence de café ?
Mais... pourquoi ?
La distance, Céleste. On doit être là et pas là. C'est impoli de s'adresser directement. Tu apprendras.
De toute façon, Monsieur ne m'y oblige pas.
Tant mieux... Est-ce qu'elle voudrait bien laisser dormir son mari ?

- Il t'a dit qu'il voulait bien de moi ?
- Puisque je te le dis ! T'sais, il a besoin de quelqu'un. Il est incapable de se suffire à lui-même. Il me fait penser à un de ces bibelots de riches qu'on met sous cloche pour pas qu'il se casse.

[ enfants dans une Eglise, devant une relique ]
- Jésus, Marie, Joseph, l'ongle de Saint Christophe.
- On dirait plutôt sa crotte de nez !

(p. 18)