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Citations de Christine de Mazières (57)


là, je souffre et j'enrage. Voir ces jeunes chevelus assis sur le mur, trinquant et chantant, une bouteille à la main... Ces embrassades avec nos capitalistes. Tous ces efforts pendant quarante ans pour bâtir une société nouvelle : l'éducation depuis le plus jeune âge, la surveillance de toutes les déviances...Quelle tâche surhumaine nous nous sommes assignée. C'est difficile de changer les hommes, un travail de Sisyphe.
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Christine de Mazières
Une forêt de mains levées. Pas de poings fermés sur la colère ou le mensonge. Finis les poings levés obligatoires pendant quarante ans de défilés forcés. Ce sont des mains qui retournent en enfance, mains ouvertes, mains offertes, mains agiles, qui font signe, applaudissent, caressent, touchent d'autres mains, entourent l'épaule du voisin. Des mains qui s'élèvent pour attraper le vent de liberté soufflant cette nuit. Voyez ce peuple de mains qui s'éveillent.
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Une forêt de mains levées…Des mains qui s’élèvent pour attraper le vent de liberté soufflant cette nuit. Voyez ce peuple de mains qui s’éveillent. Tor auf ! Wir kommen wieder !
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La victoire était amère. Il tremblait de froid et n’arrivait pas à éprouver de joie. Il était pourtant arrivé en Europe. La chance lui avait souri. La main d’un pêcheur grec s’était tendue vers lui, mais sa vie de clandestin n’était pas terminée. Désormais, la route des Balkans se dressait devant lui, hérissée d’obstacles et de murs…
Tandis que Tamim et ses compagnons se morfondent au fin fond d’une forêt hongroise, est achevée la clôture de barbelés de quatre mètres de haut et de cent soixante-quinze kilomètres le long de la frontière avec la Serbie. Un nouveau rideau de fer…
Vingt-six ans auparavant, le 2 mai 1989, la Hongrie commençait à démanteler sa frontière grillagée vers l’Ouest et, le 10 septembre 1989, elle ouvrait officiellement sa frontière vers l’Autriche, laissant passer des milliers de réfugiés est-allemands, avant que ne tombe le Mur de Berlin deux mois plus tard.
À présent, trois mille migrants arrivent chaque jour en Hongrie. Même après l’achèvement du nouveau mur, le nombre d’interpellations s’élève encore à huit mille sept cent quatre-vingt-douze le week-end du 28 au 30 août.
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La ville de Torbat-e Heydarieh, cent vingt mille habitants, se situe dans le nord-est de l’Iran, dans la province de Khorasan-e Razavi. Le trafiquant d’hommes décharge ses passagers dans la cour d’un immeuble en construction. Un Iranien à la fine barbe taillée en pointe examine les quinze recrues. Ils vont rejoindre les ouvriers, tous également clandestins. Ils dorment sur place, dans des appartements sans portes ni fenêtres. Une couche de sable épandue à même le ciment, une natte par-dessus en guise de matelas. Il est dangereux de quitter le chantier pour des sans-papiers. Alors ils travaillent sans relâche, pour rembourser le passeur et gagner de quoi payer la prochaine étape.
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« Ça y est, ils en ont laissé sortir.
Nous aussi, on veut y aller !
Ne poussez pas, restez calmes.
A quand notre tour ? »
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Par la suite il s'est tenu tranquille. Son silence vaut résignation. Il n'a plus vocation de martyr. J'ai gagné et je l'ai perdu. Depuis son retour, il ne me parle plus.
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L’identité des morts est maintenant connue. En face de chaque numéro est indiqué un nom, un prénom, un âge, un pays. Des vies réduites à cela, une identité, somme d’informations minimales, rien de plus. En face de la date de naissance, on ajoutera la date de la mort. Des décoctions de vies, qui passent à côté de l’essentiel ; la joie ressentie en contemplant un reflet du soleil couchant dans la vitre sale de l’autocar, le souvenir d’un baiser dans un bruissement de feuillage, un regard saisi à la volée et que l’on n’oublie pas. Ces fulgurances qui dévoilent la beauté du monde, à arracher le cœur, ces myriades de possibilités qu’offre la vie à chaque instant sont désormais closes. Toutes ces vies, scellées en destins.
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Tant de questions que l’on retient, par peur de blesser l’autre, par pudeur, par lâcheté… Tant de rêves que l’on garde pour soi, parce que la vie rêvée vaut moins que la vie réelle, pense-t-on. Mais qu’est-ce que la vie réelle ? Une vie édulcorée, banale, réduite à ce que l’on croit possible ? Une vie décente, qui plaira aux voisins ? Une vie comme on dessine les plans de sa propre prison ?
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Elle est née il y a vingt ans en Allemagne, un pays qui nourrit un rapport spécial à son histoire. Les Allemands ont pour cela des mots longs et compliqués, Vergangenheitsbewältigung, le fait de surmonter le passé, ou Wiedergutmachung, la réparation des fautes passées.
L’Allemagne oscille entre amnésie et devoir de mémoire, indifférence et sidération, histoires familiales retouchées et impressionnants mémoriaux, victimisation et responsabilité. Les villes sont semées de plaques commémoratives, les passants marchent sur des Stolpersteine, pavés rappelant le nom de victimes du nazisme. Mais il a fallu cinquante ans avant de reconnaître les crimes de la Wehrmacht. La légende d’après-guerre avait blanchi l’armée du Reich, afin de permettre aux dix-sept millions d’anciens soldats de vivre ou de reposer en paix, et à leurs familles, de tourner la page.
Alma sait pertinemment que l’histoire est une matière inflammable, et c’est cela qui l’attire : raconter l’histoire est sujet à controverses. Les historiens se querellent, la politique s’en mêle, les journaux exhument les dossiers enfouis, la mémoire s’embrouille. La plupart des familles sont bâties autour d’un puits d’ombre.
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Depuis que chacun reçoit son flot abrutissant d’images sur petit écran, nul ne peut plus l’ignorer, même à Lom : la Bulgarie est le pays le plus pauvre de l’Union européenne, et cette région, l’une des plus déshéritées de Bulgarie. Bienvenue chez les oubliés de l’opulente Europe. D’entendre parler d’eux à la télévision, même en mal, les habitants de Lom ont apprécié, car enfin on parle d’eux, on officialise leur état de parias et leur plein droit à se plaindre comme de juste.
Des fonds européens s’y déversent pourtant. Au milieu du chaos, une route, un pont, un hôpital, une usine sont rénovés ou construits à coups de millions d’euros. Une belle plaque bleue couverte d’étoiles dorées, sur laquelle est inscrit L’EUROPE S’ENGAGE, est apposée sur l’ouvrage ou sur le bâtiment rutilant.
Tout est rénové avec l’argent européen : la place de l’église, repavée, le jardin public avec ses bancs coquets, la bibliothèque et ses ordinateurs en libre accès, de nouvelles canalisations d’eau.
Mais les gens ne sont plus là. Ils sont partis au loin chercher du travail. Et, parmi les écoles remises à neuf, certaines ont dû fermer faute d’élèves. Le pays se dépeuple, malgré les investissements. Inauguré en 2013, le nouveau pont de Vidin, à une heure de route de Lom en remontant le Danube vers l’amont, un ouvrage imposant long de deux kilomètres, reliant la Bulgarie à la Roumanie, n’a pas réussi à désenclaver cette région.
Tout cela ne suffit pas pour fournir du travail aux plus pauvres des habitants. Ils se retrouvent le ventre vide au bord de la table du festin, avec juste un peu plus de rêve de partir.
C’est une géographie du manque : ni argent, ni travail, ni chance. Pas étonnant que des pauvres de Lom soient tentés d’exploiter encore plus malheureux qu’eux, car il y en a toujours, des plus malheureux, ceux qui n’ont pas encore le passeport frappé de douze étoiles, le sésame d’une vie meilleure.
Ces forçats de la route, les peuples de l’Orient et de l’Afrique qui fuient les guerres et les assassins, sont une manne de désespérés aux ourlets cousus de dollars. Alors, les miséreux font leur blé sur le dos des migrants. Pauvres contre pauvres, c’est une loi du monde.
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Ils sont dans la "Vorfreude", la joie d'avant la joie. Mais ils sont en train de découvrir la nouvelle la plus inouïe : ici, à la frontière, à la place du peuple résigné et soumis de la RDA, se tiennent des personnes qui clament leur désir de liberté. Ils sont venus fuir un pays muselé et ils rencontrent un peuple en train de secouer ses chaînes. Une onde de joie illumine les visages et allume de minuscules étincelles dans les regards.
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Et là, peu à peu, par son ampleur la foule mesure sa force, sa dynamique propre. Holger, Karin, Micha et les autres prennent conscience qu'ils sont peut-être davantage que des spectateurs : ils sont eux-mêmes les acteurs de ce qui se joue en ce moment.
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Là, au pied du mur, la vieille peur les reprend, leur tord l'estomac, essore leurs boyaux jusqu'à leur faire remonter la bile à la bouche, la peur qui refroidit la moelle dans leurs os, la peur des matins gris, la peur des nuits noires. Mais ils ne s'arrêtent plus. Ils se sentent poussés par un désir si fort.
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Des dizaines d'années d'humiliations et aucun ressentiment, la joie est la plus forte.
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Il n'y a plus d'ennemis, seulement des frères. Le peuple allemand se retrouve à cet instant précis.
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« Rassuré, je reprends le micro : Je… je voudrais attirer votre attention sur le fait qu’il est dix-neuf heures… C’est la dernière question, d’accord ? Ayez de la compréhension. Euh, donc vous disiez… Que va devenir le mur de Berlin »
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Quand la vie tourne au ralenti comme dans une salle d'attente, quand les hommes finissent par se taire par dégoût du mensonge, lire est un refuge. En toute logique, l'imagination devrait être sous haute surveillance, et les livres de fiction, interdits. Après tout, lire des romans est improductif, c'est une perte de temps, qui procure une sorte d'évasion de l'esprit nocif à l'endoctrinement. Et pourtant, le Parti n'a pas proscrit toute la littérature. C'est étrange, à bien y penser, que de laisser les citoyens s'étourdir de poésie, de drames et de comédies, de contes et légendes, de romans policiers et de science fiction, de dystopies et d'uchronies. Et on s'échange les livres interdits sous le manteau. Toutes ces heures passées à oublier l'État des ouvriers et des paysans en lisant, toutes ces heures à s'évader par l'imagination. Dans nul autre pays au monde, on ne lit autant. La République démocratique allemande a mérité le surnom de leseland, pays des lecteurs.
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Tant de questions que l'on retient, par peur de blesser l'autre, par pudeur, par lâcheté... Tant de rêves que l'on garde pour soi, parce que la vie rêvée vaut moins que la vie réelle, pense-t-on. Mais qu'est-ce que la vie réelle ? Une vie édulcorée, banale, réduite à ce que l'on croit possible ? Une vie décente, qui plaira aux voisins ? Une vie comme on dessine des plans de sa propre prison ? p.116
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Oui, c'est cela mon Europe... Ce désir de fraternité et de liberté, ce rêve partagé... Ce rêve que nous avons réalisé sur les charniers de la dernière guerre. Parce que nous avons dépassé en horreur tout ce que l'on pouvait imaginer jusque-là. Parce que nous savons que la civilisation la plus raffinée n'est qu'une barrière de papier face aux pulsions destructrices. Parce que nous avons appris que tout homme a le droit d'avoir une vie digne d'être vécue. C'est cela qu'ils viennent chercher, tous ceux qui fuient leur pays et risquent leur vie chez nous... p.27
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